Bibliothèques universitaires et pédagogie

Quel environnement juridique ?

Louise Daguet

D’un constat

Partons d’un constat, ou peut-être d’une équation à deux inconnues.

D’une part, l’arrêté du 30 juillet 2018 relatif au diplôme national de licence identifie « repérage et exploitation des ressources documentaires » 1

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Arrêté du 30 juillet 2018 relatif au diplôme national de licence, article 6.

comme deux des compétences qu’un étudiant doit acquérir au cours de sa licence. D’autre part, le MESRI (Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation) 2 qui donne pour mission aux bibliothèques universitaires de « former les étudiants et enseignants-chercheurs à la recherche et à lexploitation de linformation » 3
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Site du MESRI, article « Bibliothèques universitaires » – 1re publication : 29 novembre 2007 – Mise à jour, 22 octobre 2015 : http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/pid25147/bibliotheques-universitaires.html

. Nous pouvons donc conclure sans trop hasarder que l’arrêté non seulement reprend verbatim le site du MESRI mais aussi – soyons audacieux – inscrit les bibliothèques comme partenaires évidentes de la nouvelle licence. La commission Pédagogie et documentation de l’ADBU s’est ainsi proposé d’investiguer les textes juridiques sur lesquels appuyer les actions de formation développées par les SCD.

Si la formation documentaire se généralise et entre de plus en plus dans les maquettes de licence, quelles sont les modalités de cette inscription ? Quel environnement juridique tisse et précise le lien entre bibliothèques et pédagogie ?

Des missions des BU

Loin de ne graviter qu’à la marge des compétences des bibliothèques universitaires, la formation documentaire est pleinement inscrite dans leurs missions, précisées par le décret de 2011 : «  Les bibliothèques universitaires contribuent aux activités de formation et de recherche des établissements. [On compte au nombre de leurs missions] former les utilisateurs à un emploi aussi large que possible des techniques nouvelles d’accès à l’information scientifique et technique. » 4

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Décret no 2011-996 du 23 août 2011, article 2.

Si l’acquisition et le signalement de documentation sur tout support apparaît comme l’une des missions premières des bibliothèques, former les publics à leur utilisation n’en est ainsi pas moins primordial.

Des compétences

Au-delà des missions des bibliothèques telles qu’elles ont été fixées par le MESRI, la formation documentaire apparaît en creux dans les compétences attendues dans les nouvelles licences.

Un examen des licences déposées au RNCP révèle ainsi un dénominateur commun dans les attendus : «  identifier, sélectionner et analyser avec esprit critique diverses ressources dans son domaine de spécialité pour documenter un sujet et synthétiser ces données en vue de leur exploitation ; [] développer une argumentation avec esprit critique. » 5

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Fiches RNCP – Licences.

Or ces compétences sont précisément celles que se proposent de développer les programmes de formations documentaires dispensés par les BU. Observons rapidement que certaines fiches Licence mentionnent l’utilisation de ressources documentaires, la bibliographie, la recherche documentaire ou encore la veille 6
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RNCP, Licence Arts du spectacle, Licence Arts plastiques, Musicologie, AES, Sciences de l’homme, Lettres, Sciences du langage, Théologie, Lpro Assurance-banque-finance, GRH, MO, Activités juridiques, DE Infirmier, Lpro Bâtiment et construction.

comme autant d’objectifs à atteindre pour leurs étudiants, ancrant encore davantage les compétences dispensées par les bibliothèques dans celles des étudiants.

L’arrêté, qui précise que « tout au long du parcours personnalisé de formation, l’étudiant doit acquérir un ensemble de connaissances et compétences comprenant notamment [] des compétences transversales, telles que laptitude […] au repérage et à l’exploitation des ressources documentaires  », ancre le rôle des bibliothèques universitaires dans la réussite étudiante.

En raisonnant par blocs de compétences, la nouvelle licence laisse davantage de place aux enseignements transversaux et aux soft skills, au nombre desquelles apparaît l’information literacy. Or, le LISEC (Laboratoire interuniversitaire des sciences de l’éducation et de la communication) remarquait en 2016 le lien entre compétences informationnelles et acculturation des étudiants, la connaissance de leur métier d’étudiants 7

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Étude du LISEC, chap. 4 : Articulation et collaboration entre les équipes pédagogiques et les services de documentation au cœur de la transformation pédagogique de lenseignement supérieur, rapport coordonné par Saeed Paivandi, juin 2016. Disponible à l’adresse : https://cache.media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/Enseignement_superieur/32/6/Rapport-SCD-pedago-LISEC_683326.pdf

favorisant – comme le concluait déjà Alain Coulon en 1997 8
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Cf. Alain Coulon, Le métier d’étudiant, PUF, 1997.

 – leur réussite.

Dans cette perspective, le développement progressif des open badges s’inscrit dans la reconnaissance portée davantage à un ensemble de compétences identifiées qu’à une compétence générale permettant d’acquérir un diplôme. En prenant en compte les aléas des parcours des étudiants, leur plus grande « fluidité et flexibilité », les open badges permettent de certifier l’acquisition de compétences définies au niveau national 9

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Voir l’article de Katie Brzustowski-Vaïsse et Néhémie Henry, « Badges numériques », Bulletin des bibliothèques de France (BBF), 2018, n° 16, p. 88-89. Disponible en ligne : http://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-2018-16-0088-012

. C’est dans cette voie que se sont déjà engagées plusieurs bibliothèques universitaires.

Car si les bibliothèques forment, elles évaluent aussi. Dans cette perspective, l’intégration de représentants de la bibliothèque au sein des équipes pédagogiques paraît de plus en plus souhaitable afin de construire ensemble une offre de formation «  cohérente et globale, portée par une équipe pédagogique composée notamment denseignants-chercheurs, denseignants, de chercheurs, de personnels d’information et d’orientation et de personnels d’appui à la formation  » 10

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Arrêté du 30 juillet 2018 modifiant l’arrêté du 22 janvier 2014 fixant le cadre national des formations conduisant à la délivrance des diplômes nationaux de licence, de licence professionnelle et de master, articles 2, 3 et 4.

. En «  encourage[ant] de nouvelles formes de pédagogie  » 11
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Arrêté du 30 juillet 2018 relatif au diplôme national de licence, article 6.

, soutenues par des équipes interdisciplinaires et interprofessionnelles, il s’agit bien, de «  mettre l’étudiant au cœur de la transformation pédagogique  » 12
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Plan Étudiants – 30 octobre 2017, p. 11.

, ainsi que le préconise le rapport Filâtre 13
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Daniel Filâtre, Réformer le premier cycle de l’enseignement supérieur et améliorer la réussite des étudiants, rapport au MESRI, octobre 2017. Disponible à l’adresse : https://cache.media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/concertation/26/6/RAPPORT_GENERAL_Reformer_le_premier_cycle_de_l_enseignement_superieur_et_amerliorer_la_reussite_des_etudiants_835266.pdf

qui préfigurait l’arrêté du 30 juillet 2018 relatif au diplôme national de licence.

Et c’est bien le sens de l’engagement des bibliothèques universitaires auprès des étudiants tout au long de leurs études : favoriser la réussite de tous et de chacun.

Pistes bibliographiques