The Post-modern Library Between Functionality and Aesthetics
proceedings of the seminar of the liber Architecture Group, Paris, 22-26 January 1996
Les actes du séminaire que liber a tenu à Paris sur l'architecture des bibliothèques sont publiés sous l'évocation provocatrice de « la bibliothèque post-moderne », provocation dont, à vrai dire, on ne comprend pas vraiment le sens puisqu'ils parlent traditionnellement de bibliothèques traditionnelles.
Après un joli cahier d'une soixantaine d'illustrations en couleurs, sont regroupées les interventions. Dans le cadre général des bibliothèques universitaires ou de recherche, elles évoquent soit une bibliothèque précise, soit les bibliothèques d'un pays (les bibliothèques universitaires de Grande-Bretagne ou de Hongrie), soit des problèmes techniques spécifiques (l'éclairage artificiel, l'accessibilité des personnes handicapées), le corps de l'ouvrage étant précédé par une réflexion de Michel Melot sur l'architecture des bibliothèques.
Le travail des architectes
Les articles les plus intéressants, de mon point de vue, sont ceux où les architectes présentent leur propre travail : Pierre Riboulet pour la bibliothèque de Paris VIII Saint-Denis, Robert Chambers pour la Hartley Library de l'université de Southampton, Bjarne Hammer pour la Bibliothèque royale de Copenhague ou Anna Chmura pour la bibliothèque universitaire de Varsovie.
Leurs réflexions sont marquées par une constante négociation entre un projet architectural (un travail de création) et les contraintes propres au site, ou au budget, ou aux exigences fonctionnelles (un travail d'adaptation). Finalement, les architectes semblent se souvenir surtout de leur lutte pour faire valoir leurs critères d'excellence (échelle, modénature, convenance) et la symbolique qu'ils attribuent à ces lieux étranges (des « hétérotopies », dit Michel Foucault) que sont les bibliothèques, dans lesquels ils voient « wisdom and dignity » (Copenhague), « noblesse », « lieu unique, unitaire » (Paris 8). C'est une nouvelle fois à explorer cette question que s'emploie Michel Melot : pourquoi, à l'heure de la bibliothèque virtuelle, continue-t-on à construire des bibliothèques, si ce n'est parce qu'elles sont aussi des symboles intellectuels et sociaux (lieu de rencontre et de partage, « un port dans l'océan des informations, une sorte de permanence du savoir »).
La question implicite du titre du recueil (« entre fonctionnalité et esthétique ») reçoit finalement une réponse nuancée : plusieurs des projets présentés sont des extensions, et donc techniquement et esthétiquement contraints comme Berne ou Southampton (les exemples français de la bibliothèque d'Arles ou du musée de Lille montrent, cependant, qu'on peut s'étendre sur place sans renoncer à la création architecturale). Pour la Bibliothèque royale de Copenhague, l'intervention laisse comprendre entre les lignes que le dialogue a été franc (comme disent les diplomates) entre les bibliothécaires défendant la fonctionnalité et les architectes soucieux de l'insertion urbaine du bâtiment et de la qualité architecturale due à une bibliothèque nationale.
Fonctionnalité et esthétique
Au contraire, pour la bibliothèque des sciences humaines de l'Université libre de Bruxelles, le dialogue semble avoir été harmonieux entre hommes de l'art et hommes du livre, partageant la même envie de symbole (d'où le choix d'un bâtiment en triangle, « symbole de réflexion et d'élévation ») et de services fonctionnels (mais cette impression est peut-être due au fait qu'un seul des interlocuteurs présente le projet). Le débat entre fonctionnalité et esthétique ne serait ainsi rien d'autre que le débat entre bibliothécaires et architectes Peut-être ce débat peut-il se dissoudre, à défaut de se résoudre, dans une conception plus large des fonctions de la bibliothèque : « cultural center », à Copenhague ou à Tallinn, insertion dans le jardin botanique à Varsovie (où le toit devient jardin public). Comme le conclut Michel Melot, « nous sommes passés d'une logique de l'accumulation à une logique de l'articulation ».