Le cercle de la librairie

1847-1997, 150 ans d'actions pour le livre et ses métiers

par Yves Desrichard
Paris : Éd. du Cercle de la Librairie, 1997. 63 p. ; 24 cm. ISBN 2-7654-0678-2. 90 F

Livres Hebdo et Livres de France, Le métier de libraire, Le métier de bibliothécaire, la collection « Bibliothèques », la base de données Électre, Les Livres disponibles… autant d'outils indispensables au travail quotidien du professionnel, produits et réalisés par le Cercle de la librairie. Fondé en 1847, le Cercle a (donc) aujourd'hui cent cinquante années d'existence et, à cette occasion, une exposition a été organisée à l'automne dernier dans l'Hôtel historique du 117 boulevard Saint-Germain, ancien siège du Cercle exposition dont le présent ouvrage constitue le catalogue.

Une heureuse initiative

Heureuse initiative en vérité que de reconstituer brièvement l'histoire de cet organisme, « créé pour renforcer la cohérence des industries et des commerces du livre, rassembler les professionnels, faire circuler l'information et stimuler la production » et dont Ambroise Firmin-Didot, son premier président, indiquait qu'il partait du principe que « tout ce qui est utile à l'intérêt général de nos industries est nécessairement profitable à l'intérêt particulier de chacune d'elles, à l'intérêt individuel de chacun d'entre nous ». A sa fondation, « lieu de délassement pour les uns, d'occasion de faire des affaires pour les autres », le Cercle de la librairie n'est que l'un des 2 000 cercles autorisés par la monarchie de Juillet. Son président actuel, Charles-Henri Flammarion, souligne à juste raison que peu subsistent aujourd'hui, et que c'est l'étendue et l'intérêt de ses activités en faveur des métiers du livre qui expliquent cette juste longévité.

Les 67 membres de la première assemblée générale venaient des horizons les plus divers : imprimeurs, papetiers, fondeurs, brocheurs, fabricants d'encres et de papiers, et bien sûr « libraires-éditeurs », selon une typologie aujourd'hui disparue, mais qui confondait souvent, à l'époque, les métiers d'éditeur, de distributeur et de libraire, voire d'imprimeur et de papetier.

Tout au long du XIXe siècle, le Cercle est le reflet d'une profession caractérisée par « une très forte homogénéité sociale », dont « les membres titulaires appartiennent à des familles essentiellement parisiennes et regroupées dans le vie arrondissement », ce qui continue d'ailleurs à être « l'image de marque » du milieu de l'édition, sinon une réalité C'est en 1879 que le Cercle s'installe dans le prestigieux immeuble du boulevard Saint-Germain, conçu par Charles Garnier, qui venait alors de réaliser l'Opéra (siège abandonné depuis 1980).

Un véritable syndicat professionnel

Il est curieux de constater que, au XIXe siècle, le Cercle est aussi un lieu de détente, à la manière des « clubs » anglais, où l'on organise bals, soirées musicales, concerts, démonstrations de prestidigitation, etc., parallèlement à l'activité de « défense et illustration » des métiers du livre. En mars 1884, une loi autorise la création de syndicats, ce qui conduit le Cercle à une évolution naturelle vers un « véritable syndicat professionnel », signifiant qu'il l'était en quelque sorte avant la lettre.

Bientôt cependant, une soixantaine de syndicats vont être regroupés sous l'égide du Cercle, ce qui pourrait être considéré comme une force, mais conduit plutôt à un éparpillement revendicatif ne permettant plus au Cercle d'assurer autre chose que des missions généralistes de formation, de protection sociale et de promotion du livre.

Car, rapidement pourvu d'une bibliothèque technique (aujourd'hui consultable à l'Institut Mémoires de l'édition contemporaine), le Cercle assure des actions de formation auprès des professionnels du secteur et met en place, à partir de 1920, des caisses de secours pour gérer les retraites des personnels de l'édition et de la librairie, les assurances sociales et les allocations familiales.

L'organisation d'expositions, la défense de la propriété littéraire, « l'un des chevaux de bataille du Cercle dès sa création », sont quelques-unes des multiples activités du Cercle, qui reprend en 1856 la publication de La Bibliographie de la France, créée en 1811 comme tous les étudiants en bibliographie doivent le savoir…

Livres du mois, Livres de l'année, La Librairie française, autant de répertoires fondamentaux qui, tout au long du XXe siècle, viennent scander l'activité du Cercle, qui emploie aujourd'hui 85 personnes, pour des activités multiples bien connues - on l'espère ! - des professionnels.

La plaquette propose d'intéressantes reproductions des documents présents dans l'exposition. Inévitablement, certaines reliures somptueuses, ou des typographies remarquables, feront soupirer les nostalgiques, là où d'autres se réjouiront de savoir Électre désormais sérieusement installée sur le Web.

Le présent ouvrage n'offre qu'un aperçu rapide de l'histoire du Cercle de la librairie, et pourra avec profit être complété par quelques études savantes qui lui ont déjà été consacrées. Tel quel, il constitue un stimulant « hommage » à ce qu'on n'ose appeler une institution, tant, cent cinquante ans plus tard, son dynamisme, intact, paraît des plus remarquables.