De la prise en compte de l'usager à la performance globale
Andréas Agathocléous
Dans les services publics, la recherche de la qualité et celle de la performance globale nécessite la prise en compte des attentes des usagers, qui sont multiples et complexes. La participation dynamique de ces derniers à la production du service apparaît donc déterminante, car la construction de la qualité est le résultat d'un compromis entre plusieurs logiques, ce qui implique la mise en uvre d'une organisation transversale.
In the public services, the search for quality and general performance necessitates taking into account the expectations of users, which, here as elsewhere, are multiple and complex. The dynamic participation of users in the production of service appears, then, determinant, because the construction of quality is the result of a compromise between several demands, and it is that which implies the necessity of a transversal organization.
Im öffentlichen Dienst bedarf die Qualitäts- und Leistungsmessung der Berücksichtigung der Benutzererwartungen, die vielfältig und komplex sind. Die Teilnahme der Benutzer bei der Erstellung dieser Dienstleistungen erscheint maßgeblich, denn die Erzeugung von Qualität ist das Ergebnis eines Kompromisses zwischen mehreren Standpunkten, was eine entsprechende organisatorische Umsetzung nach sich zieht.
La diversité de plus en plus grande des publics, les exigences accrues en matière de qualité entraînent une transformation considérable des relations entre établissements ou structures et usagers. L’administré assujetti devient ainsi un usager « spécifique », et de plus en plus un acteur et une ressource dans le processus de construction de la qualité du service et de la performance. Les besoins des usagers sont de moins en moins uniformes et de plus en plus diversifiés, singuliers et en évolution permanente 1.
Le « service » peut se définir comme un acte immatériel, non stockable, comme un acte visant une transformation d’état ; il se fait en faveur de quelqu’un et les effets qu’il aura sur celui-ci sont incertains. La qualité du service est toujours une qualité espérée, anticipée… ; la réalisation de la « prestation » est le résultat d’un compromis entre plusieurs visions… Par ailleurs, le service est au cœur de l’activité de la structure et prend ses racines au plus profond du fonctionnement de l’organisation.
La prise en compte de l’usager devient donc une variable déterminante (mais aussi une exigence méthodologique pour l’appréhension de la qualité), non seulement dans le processus d’obtention de la qualité, mais aussi de la performance globale 2.
La prise en compte d’une variété de situations
Qu’il s’agisse d’une Caisse d’allocations familiales (caf), des collectivités territoriales, de l’hôpital, du travail social…, la prise en compte des besoins et des attentes des usagers devient un axe stratégique pour ces établissements. Diverses situations ont été observées par l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (anact).
Au cours de l’étude d’une Caisse d’allocations familiales, par exemple, a pu être constatée l’existence de plusieurs types de prestations, dont certaines sont complètement nouvelles, et correspondent à plusieurs types de publics, parfois au sein de la même prestation. Le traitement administratif et l’accueil physique d’un rmiste 3 ne se déroulent pas de la même manière que pour un usager bénéficiaire des allocations familiales, ayant une situation sociale élevée. Leurs besoins, et par conséquent leurs comportements, sont loin d’être identiques. Un retard de versement des allocations, comme ce fut le cas pendant une longue période dans cette caisse, n’a pas la même signification ou le même impact pour l’un et pour l’autre.
Il en est de même pour l’hôpital. La diversité des publics et la variété des attentes qu’ils génèrent obligent les équipes soignantes à apporter une réponse spécifique, voire singulière en fonction de chaque cas. Il est évident que le rapport à la maladie ne peut pas être le même pour un patient atteint d’un cancer que pour celui qui a subi une appendicectomie, et, par conséquent, la relation soignant-soigné ne peut pas non plus être la même. Autrement dit, l’équipe soignante adapte sa stratégie aux patients.
Attentes spécifiques et réponses spécifiques
Il est intéressant de constater que, souvent, la venue de certaines catégories d’usagers à l’accueil ne relève pas du tout d’un problème administratif ou d’une demande réelle de leur part sur un aspect technique, inhérent à leur situation d’allocataire.
Au travers de ces types de « visites », l’usager cherche à être sécurisé, à se sentir respecté et pris en charge de manière affective. Il perçoit la Caisse d’allocations familiales comme une institution-mère…
Il est caractéristique de voir que, suite à une enquête réalisée auprès de 230 allocataires qui fréquentent l’accueil, 27 % sont hostiles à la fermeture de la Caisse pendant la période de mise à jour des dossiers, même si cette période est courte… Par ailleurs, une grande partie de l’ensemble de l’échantillon (29 %) n’attend pas prioritairement des agents une efficacité technique au sens large, mais plutôt des qualités sociales et relationnelles, à savoir la « disponibilité », la « politesse », etc.
Par ailleurs, au-delà des attentes technico-médicales qui caractérisent globalement tous les patients et chaque patient individuellement selon sa maladie, on peut aussi distinguer, avec François Steudler (cf. bibliographie), les attentes psychiques et sociales liées au contact avec le nouvel environnement, et les attentes matérielles et intellectuelles traduisant le désir de ne pas être dévalorisé, de retrouver l’estime de soi, etc. Ces attentes, étant loin d’être contractuelles et prédéfinies de manière rationnelle, mettent en cause la conception traditionnelle de la qualité, à savoir « le respect du protocole médical ou l’absence d’erreurs techniques… » ; la qualité est de plus en plus perçue comme la meilleure adéquation entre l’offre hospitalière et le besoin des usagers.
Au sein d’un centre social de la région lyonnaise, la diversité des services proposés crée également une diversité de populations qui fréquentent ce centre. On trouve l’usager « exclu », l’usager « défavorisé », l’usager « famille », l’usager « citoyen »… chacun ayant un ou plusieurs objectifs différents, ce qui nécessite un traitement différent, spécifique, adapté, pour chacune de ces populations. Néanmoins, le travail social paraît extrêmement complexe, car, souvent, il s’agit de répondre aux demandes individuelles tout en sachant que l’enjeu est collectif ; le salarié doit donc rechercher un équilibre entre les deux aspects.
La prise en compte de cette réalité, c’est-à-dire l’histoire, les spécificités et les besoins réels de chacun, facilite le traitement administratif et la définition des priorités, mais aussi la relation duale agent-usager, soignant- soigné, etc.
Pour améliorer la qualité de service, l’on constate, dans un certain nombre de cas, une volonté politique de rendre moins anonymes et plus personnalisées les relations agents-usagers. Chaque usager a un interlocuteur unique bien identifié et s’adresse directement à lui chaque fois que cela est nécessaire.
Le rôle de l’usager
Il est clair que la seule prise en compte des « attentes des usagers » ne constitue qu’une étape de la relation de service.
Si l’on définit la qualité, et plus particulièrement la qualité de service, comme une chose variable (dans la mesure où elle ne peut pas être préconçue), comme un processus, une construction permanente…, l’usager auquel la prestation est destinée doit y jouer un rôle dynamique, c’est-à-dire être un acteur à part entière et participer à cette construction… Cette participation dynamique paraît essentielle, non seulement parce qu’elle est un facteur d’efficacité, mais aussi parce qu’elle favorise la citoyenneté et la démocratie directe.
C’est d’ailleurs pour cela que la coproduction du service s’intègre explicitement dans l’ensemble du processus de production et dans la politique de l’établissement, dont la manifestation concrète apparaît au niveau de la relation agent-usager.
Cette relation est un lieu privilégié où l’usager apparaît comme une ressource mobilisable, comme une source d’informations, voire d’idées, importantes pour la qualité de service, mais elle est aussi un lieu de régulation entre l’offre et la demande. Il s’agit donc pour l’agent de traduire les attentes de l’usager en termes organisationnels, d’exploiter de manière fine toutes les informations recueillies, dans la perspective d’explorer de nouvelles possibilités, de trouver éventuellement d’autres alternatives, etc. ; il s’agit aussi de l’« éduquer » sur la qualité, sur les contraintes techniques, juridiques, organisationnelles, politiques…, existantes, sur les « limites » de la prestation… Par exemple, 18 % des allocataires qui fréquentent l’accueil de la Caisse d’allocations familiales étudiée avouent envoyer des documents incomplets, ce qui perturbe considérablement l’organisation interne.
Cet exemple montre qu’il y a une éducation explicite et une collaboration potentielle à élaborer, susceptibles d’améliorer aussi bien la qualité de service que l’optimisation de l’organisation.
Souvent les effets de cette relation duale ne sont pas immédiats, c’est-à-dire que le service a un impact différé. L’agent est donc dans l’incapacité d’apprécier la pertinence de cette relation, car il ne sait pas comment l’usager se l’appropriera.
Connaissance et coopération
Devant la complexité des variables et des données à prendre en compte, la connaissance mutuelle (agent-usager) met en évidence l’existence des variantes possibles de « solutions », des choix à effectuer, des contraintes plus ou moins fortes à respecter. Dans ce sens, il n’y a pas une solution unique et optimale : différents chemins sont possibles et la construction de la qualité ne résulte jamais – selon la nature de l’activité – d’une approche totalement rationnelle, mais plutôt d’un ensemble de compromis qui aboutit à un résultat commun et donne satisfaction aux deux parties.
En milieu hospitalier, Anne-Marie Gallet met bien en évidence le rôle stratégique que le malade joue ou peut jouer dans le processus de sa guérison et par conséquent dans le processus de construction de l’efficacité thérapeutique (cf. bibliographie). Ainsi, sa participation consiste d’abord à transmettre aux professionnels des informations d’ordre social et médical (antécédents, allergies, sensations…), de manière permanente et itérative. En fonction de ces informations, un réajustement permanent est nécessaire.
Ensuite, selon les « capacités » des malades, on peut proposer une participation à la réalisation d’actes techniques comme la prise de médicaments, la piqûre, le suivi d’un protocole médical…
Malades et soignants doivent donc explorer, de façon mutuelle, le champ de coopération possible. La compréhension par le malade d’une procédure médicale, et celle par les soignants, de ce qui explique la crainte du malade vis-à-vis d’un traitement, par exemple, déterminent le degré de cette coopération.
Le degré de la participation du malade se fait essentiellement en fonction de son degré d’autonomie au sens large, qui varie selon son âge, sa situation socioprofessionnelle, sa pathologie, l’expérience de sa maladie, le niveau de technicité du traitement, la manière dont il appréhende sa maladie…
Dans le centre social étudié, la participation des usagers semble se situer à un niveau « supérieur », dans la mesure où elle s’inscrit aussi au niveau de l’évaluation. Ainsi, la mise en place d’une « commission » non hiérarchique par activité (halte-garderie, insertion, secteur jeunes, secteur 3e âge…), composée de professionnels, d’administrateurs et d’usagers, qui se réunissent plusieurs fois par an, a comme objectif d’évaluer l’activité et de proposer un certain nombre d’actions d’amélioration.
Cette évaluation, transparente aux yeux de l’ensemble des acteurs, y compris des financeurs, permet au conseil d’administration et à la direction d’adapter en permanence leur politique, notamment en matière de ressources humaines, de moyens pédagogiques, etc., mais aussi aux financeurs d’avoir une autre vision du terrain… Au-delà, elle contribue à la construction de la performance globale du centre.
Des critères variables
Les liens, tant entre les dimensions techniques et relationnelles qu’entre les niveaux, structures, procédures et résultats, sont tellement complexes qu’un effort important doit leur être consacré afin de permettre leurs interactions et faciliter l’appréhension de la qualité sous toutes ses facettes.
Ainsi, la variété du ou des services offerts, la multitude en même temps que la singularité des attentes, les différents points de vue et conceptions selon les individus et les groupes, montrent que la qualité est variable, et suppose des critères différents, qui évoluent dans le temps, selon les situations et les acteurs en présence. Autrement dit, la qualité d’un service n’est pas nécessairement la même chose considérée du point de vue de l’usager, de l’agent, de l’organisation ou encore des pouvoirs publics.
Au sein de quatre collectivités territoriales étudiées, les spécificités des services qui – de par leur nature même – sont difficiles à appréhender, posent avec acuité le problème d’évaluation : en quoi le service a-t-il été rendu, quelles dimensions ont été ignorées, pourquoi… ? Le caractère flou et contingent du service rend encore plus difficile l’évaluation.
Au sein du centre social, aussi, se pose d’une autre manière la question de l’évaluation et des critères de qualité. L’action d’insertion, par exemple, doit prendre en compte : en amont les objectifs et les contraintes, et en aval la mise en œuvre en situations de travail et le caractère opérationnel des compétences et de la performance.
Les critères de qualité diffèrent considérablement selon les acteurs :
– l’individu ou groupe cible qui « attend » un équilibre psychologique ;
– le salarié qui attend un développement de ses compétences et de bonnes conditions de travail ;
– l’organisation qui attend une optimisation des moyens disponibles ;
– les prescripteurs publics qui attendent des résultats mesurables, etc.
Cette situation implique donc, selon les cas, une articulation étroite entre l’organisation, les agents et les usagers ou encore entre le politique, les administratifs et les usagers. Il faut donc appréhender la qualité de manière globale et la considérer comme un produit collectif, comme un compromis entre plusieurs visions…
Le rôle déterminant de l’organisation
Si la relation duale agent-usager s’avère déterminante pour la qualité de la relation de service, c’est parce qu’elle s’inscrit dans une organisation transversale et dans une politique structurante. Autrement dit, l’approche relationnelle seule – surtout lorsqu’elle est mécanique – ne suffit pas, car un certain nombre de décisions et d’opérations, le système de pilotage, etc., s’élaborent en amont de la relation agent-usager. La cohérence de l’ensemble et plus particulièrement la complémentarité front-office/back-office semblent donc importantes (et nécessaires), quels que soient la nature du service et le degré de cette complémentarité.
Autrement dit, la qualité de service dépend d’un ensemble de performances associées aux différents processus de production et de leur articulation en vue d’une performance globale. Plus l’incertitude et la complexité liées à l’usager sont grandes, plus ces processus sont interdépendants et plus le travail en amont détermine la qualité du service. C’est l’organisation du travail « interne » qui la détermine, en grande partie ; c’est-à-dire que la qualité de la relation duale agent-usager dépend plus ou moins de la qualité de cette organisation qui s’adapte aussi en fonction des informations ascendantes provenant du terrain.
Chaque partie de l’organisation a besoin de partager les connaissances qui concernent tant l’usager (en aval) que les contraintes techniques ou organisationnelles, voire politiques (en amont), ce qui permet aussi l’efficacité de la « gestion » (en évitant l’alourdissement d’une procédure lorsqu’on connaît les caractéristiques et les attentes des usagers), en même temps que l’amélioration de l’accueil (en maîtrisant les possibilités organisationnelles ou les informations transversales pour « résoudre » un problème). Inversement, le dysfon c-tionnement d’une partie a un impact négatif immédiat sur l’autre partie, et vice versa, ce qui détériore l’efficacité globale.
L’enquête réalisée au sein de la même Caisse d’allocations familiales montre combien accueil et organisation, amont et aval, etc., sont interdépendants et combien le dysfonctionnement de l’un ou de l’autre peut avoir de répercussions globales sur la qualité de service.
Au niveau de l’organisation, nous constatons par exemple que, parmi les usagers qui ont essayé de joindre la Caisse par téléphone, une grande partie (24 %) n’y est pas arrivée ; c’est d’ailleurs cette cause qui motive sa venue à l’accueil… ; une autre partie se déplace à cause d’un « retard de paiement » (24 %), d’autres viennent également pour « demander des explications » sur un document reçu de la Caisse même, et incompréhensible à leurs yeux (24 %). Par ailleurs, plus d’un tiers des allocataires (36 %) estime que les différents documents reçus sont, soit « difficiles à comprendre », soit « incomplets », soit « longs », etc.
En ce qui concerne l’accueil, une grande partie des usagers (33 %) estime que les explications des agents sont « peu claires » ou « incompréhensibles » ; que les informations qu’ils leur donnent ne sont « pas toujours justes” »(37 %), voire « pas du tout justes » (6 %). Ils pensent aussi qu’ils sont « peu disponibles, indifférents, agressifs »… (33 %) ; ils aimeraient avoir toujours les mêmes interlocuteurs à l’accueil (65 %), etc.
Il est clair que ces types de dysfonctionnements, en articulation avec les attentes des usagers, au-delà de la faible articulation et coopération organisation-accueil, interpellent le fonctionnement de la Caisse dans son ensemble, sa politique en matière de ressources humaines et d’organisation, sa stratégie…, et au-delà, la politique même de la Caisse nationale… D’ailleurs, les préconisations de l’anact (suite à une longue intervention) et les actions d’amélioration ainsi mises en place portaient essentiellement (et portent toujours) sur ces aspects.
Rechercher une cohérence globale
Sous un autre angle, en milieu hospitalier, la faible performance souvent constatée (« malaise » des soignants, insatisfaction des usagers, inefficacité gestionnaire) provient essentiellement de l’absence de cohérence globale ; autrement dit de la séparation et de l’absence de transversalité entre amont et aval, entre travail prescrit et travail réel. Cela signifie un décalage entre des modes d’organisation traditionnelle (parcellisation des tâches, organisation taylorienne, standardisation d’une activité jugée prévisible), et la réalité du terrain, c’est-à-dire la prise en charge des malades, qui nécessite, au contraire, flexibilité et capacité d’adaptation. Le terrain doit donc éclairer « la gestion », qui, à son tour, lui donne les moyens d’adapter le service hospitalier aux besoins des usagers.
Par ailleurs, dans les collectivités territoriales, la recherche de la performance globale met essentiellement en évidence la nécessaire articulation « politique-administratif » : l’administration (ou les agents) est chargée de mettre en œuvre les orientations des élus ; elle est aussi garante de la continuité pour assurer la crédibilité du service public. Elle est de plus source d’informations sur le contexte et les contraintes et participe de ce fait aux processus décisionnels. Les décisions sont donc au croisement de deux logiques : logique de changement immédiat et visible répondant à l’intérêt des électeurs, donc des élus ; logique de continuité, de mise en œuvre dans le temps de toutes les décisions. L’anticipation passe par une clarification par les élus de leur politique.
C’est donc à partir de ces perspectives que l’organisation des administrations et la place des agents évoluent, mais c’est aussi à partir de la réalité du terrain (traduite par les agents) que la politique territoriale sera efficace. Le schéma ci-dessous met bien en évidence l’ensemble des processus qui contribuent à cette performance globale.
Ainsi, la prise en compte de l’organisation au sens large permet de mettre en forme les relations entre les différents acteurs, afin qu’ils réalisent au mieux leurs tâches, avec le minimum d’incertitude et le maximum de résultat sur l’usager. Toute attente de l’usager ou d’une catégorie d’usagers est en fait insérée dans une organisation collective, faite de la juxtaposition et de la coordination entre différentes compétences et des contingences logistiques qui s’imposent aux agents. L’organisation du travail doit prendre en compte à la fois l’unique et le contingent de la relation à l’usager, et les nécessités de l’action collective. Il y a donc une interdépendance entre les actes des uns et des autres qui s’inscrivent à la fois dans la recherche de l’optimisation de l’organisation et de la satisfaction des usagers. La qualité et la performance du service s’inscrivent dans cette approche globale.
Le rôle des agents/acteurs dans l’organisation
Comme nous l’avons déjà évoqué à plusieurs reprises, la recherche de la qualité et celle de la performance globale impliquent et nécessitent à la fois développement des compétences professionnelles, responsabilisation, autonomie, prise d’initiatives, et, par conséquent, reconnaissance des agents en tant qu’acteurs principaux de la relation de service.
Leur travail qui consiste à jouer les « médiateurs » entre la variété des attentes et la complexité de l’organisation interne ou de la politique publique, nécessite à la fois (on le constate aussi dans plusieurs établissements ou services observés) trois types de compétences interdépendants :
– des compétences techniques de plus en plus pointues, qui relèvent de la nature même du service, du métier… ;
– des compétences organisationnelles qui sont le résultat du partage et de la circulation d’informations et de connaissances, horizontales et transversales ;
– des compétences communicationnelles ou relationnelles qui consistent en la compréhension fine des besoins des usagers et à l’élaboration de leur adéquation avec les aspects techniques.
La mise en place des compétences, notamment transversales, de manière efficace, doit être accompagnée par une autonomie et une prise d’initiatives fortes car, compte tenu de la complexité des situations (événements imprévisibles de tous ordres, incertitude dans les relations, attentes peu claires des usagers…), les agents doivent gérer en permanence ces situations, en faisant des arbitrages, en prenant des décisions, en élaborant des solutions pour résoudre des cas spécifiques…
Ceci nécessite encore le décloisonnement des services par la mise en place d’une organisation transversale, ainsi que la réduction des niveaux hiérarchiques par la mise en œuvre d’un management plus dynamique et plus participatif.
Rendre les agents acteurs dans la relation de service implique enfin et surtout leur participation, non seulement au processus de construction de la prestation et à la définition des moyens de l’atteindre, mais aussi à la définition des critères de qualité et de performance, et au-delà, à l’élaboration même de la stratégie de l’établissement.
Octobre 1997