Chronique des bibliothèques

Bibliothèque nationale.

Legs Henri Mondor.

Le professeur Henri Mondor, de l'Académie française, est décédé à Neuilly, le 6 avril 1962, après une longue maladie.

Il laissait un testament faisant mention d'un certain nombre de legs particuliers. Une de ces clauses exprimait le désir que Mr Julien Cain, administrateur général de la Bibliothèque nationale, choisît pour cet établissement dix volumes (livres ou manuscrits) dans sa bibliothèque.

Choix difficile si l'on songe qu'Henri Mondor, homme de lettres et bibliophile averti, possédait une grande quantité de précieux volumes. Cette bibliothèque - est-il nécessaire de le rappeler ? - devait sa célébrité à l'incomparable collection de livres, de manuscrits et de documents de toute sorte relatifs à Stéphane Mallarmé à qui Henri Mondor a consacré des ouvrages qui font autorité. Or une clause du testament a écarté précisément cet ensemble vraiment unique des éléments parmi lesquels les pièces destinées à la Bibliothèque nationale pourraient être choisies.

Dans ces conditions, après avoir consulté les conservateurs en chef des Départements des imprimés et des manuscrits, Mr Julien Cain a fixé son choix en tenant compte à la fois de la beauté et de l'intérêt des pièces dont il pouvait disposer, et aussi de la valeur évocatrice qu'elles pourraient présenter de la personnalité du légataire.

On trouvera ci-après la nomenclature des dix ouvrages qui sont ainsi entrés à la Bibliothèque nationale.

Henri Mondor, ami de Paul Valéry et son successeur à l'Académie française, possédait d'admirables volumes de l'illustre écrivain. Quatre d'entre eux ont été retenus :
I° Manuscrits autographes des poésies de jeunesse de Paul Valéry, cahier de 20 feuillets, avec dessin de Valéry. Cette relique insigne appartint à André Gide qui l'a donnée au professeur Mondor après la mort de Paul Valéry, ainsi que l'atteste un envoi autographe ;
2° Paul Valéry, Eupalinos ou l'Architecte, N. R. F., 1923. Exemplaire sur vieux papier Japon (n° I). In-4°, maroquin brun, filets dorés, doublé maroquin Lavallière mosaïqué de G. Cretté. Long envoi au Professeur Henri Mondor;
3° Paul Valéry, Charmes, N. R. F., 1926, in-12, maroquin vert mosaïqué doublé maroquin vert mosaïqué de G. Cretté. Nombreuses additions autographes de P. Valéry. Envois de P. Valéry et d'Alain au Professeur Henri Mondor ;
4° Paul Valéry, L'Idée fixe. Nouvelle édition revue et corrigée N. R. F., mars 1933, in-4°, maroquin bleu, orné dans le bas de filets dorés et au palladium avec bandes triangulaires en maroquin gris mauve, reliure de Pierre Legrain. Envoi autographe au Professeur Henri Mondor.

A ces quatre pièces a été joint un manuscrit qui réunit de nouveau les noms d'André Gide et de Paul Valéry :
5° André Gide. Manuscrit autographe d'une étude sur Paul Valéry, 28 feuillets manuscrits et 33 dactylographiés avec corrections autographes, grand in-4°, demi-maroquin bleu avec coins.

Un des derniers ouvrages d'Henri Mondor était consacré à la jeunesse de Maurice Barrès, aussi a-t-il paru intéressant de retenir la pièce suivante, une des plus anciennes et aussi des plus rares publications de Barrès :
6° Les Taches d'encre, 1884-1885, 4 fascicules in-12, envoi de M. Barrès à Stanislas de Guaïta. Lettre de M. Barrès. Chemise, étui.

La Bibliothèque nationale ne possédant aucun manuscrit de MM. François Mauriac et Marcel Jouhandeau, il a paru opportun de saisir l'occasion qui s'offrait d'enrichir le Département des manuscrits des œuvres ci-après :
7° François Mauriac, Atys et Cybèle. Manuscrit autographe de 24 feuillets in-4°, cuir noir souple, chemise et étui.
8° Marcel Jouhandeau, Chroniques maritales. Manuscrit autographe de 225 pages, in-4° chemise, dos maroquin, étui.
9° Marcel Jouhandeau, Nouvelles chroniques maritales. Manuscrit autographe de 507 pages, in-4° chemise, dos maroquin, étui.

Enfin, la Bibliothèque d'Henri Mondor contenait, dans une partie ancienne, des joyaux bibliophiliques dont il convenait d'évoquer le souvenir. A cet égard, le charmant volume décrit ci-après atteste le goût raffiné du donateur :
10° Nicolas Heinsius, Poemata. 1653, maroquin rouge à grain long, décor doré, reliure de Courteval.

Départements des estampes.

Le Cabinet des estampes a présenté à partir du 10 juillet quelques gravures de Maurice Achener, en hommage à cet artiste disparu le 18 avril 1963.

Né à Mulhouse en 1881, Mr Achener fut pour l'eau-forte l'élève de Peter Halm à Munich avant de suivre à Paris l'enseignement de Jean-Paul Laurens. Gravant depuis 1902 quelques bois, mais surtout 500 eaux-fortes, il se spécialisa dans le paysage. Ses vues d'Alsace principalement, mais celles aussi d'Italie, de Suisse ou de Bretagne montrent dans une facture traditionnelle une grande sensibilité.

Bibliothèque de l'Arsenal.

Achats et dons récents.

Achats. - Comme les années précédentes, la Bibliothèque de l'Arsenal a pu acquérir un ensemble de documents manuscrits intéressant particulièrement l'histoire de ses collections ou de ses hôtes : une « notice des ouvrages manuscrits de la famille d'Argenson » qui se trouvaient au Bureau du Domaine national comme effets d'émigrés et un extrait des mémoires du Comte d'Argenson; plusieurs lettres de Charles Nodier, parmi lesquelles une lettre à son ami Lingay, datée du 12 janvier 1819, dans laquelle il raconte l'échec de son voyage à Odessa où il devait occuper un poste de professeur; deux lettres de Lamartine à Charles Nodier datées, l'une du 2 avril 1829, l'autre du 21 mars 1832 : Lamartine, désolé des embarras d'argent où se trouve Charles Nodier, lui offre l'hospitalité; un manuscrit autographe inédit de George Sand, Le Petit ramoneur ; des lettres de Balzac, Courteline, J.-M. de Heredia (à son gendre, Maurice Maindron et à son éditeur, Alphonse Lemerre).

Dons. - Parmi les autographes et documents concernant le Saint-simonisme, acquis par dons ou achats, il convient de signaler en particulier une lettre de Tchaïkovsky à Gustave d'Eichthal, don de Mr Daniel Guérin, et une longue lettre de Gustave d'Eichthal à Victor Hugo, don de Mr d'Eichthal. En outre, Mr Georges Toudouze a fait don d'un très important ensemble d'autographes adressés à son père Gustave Toudouze par diverses personnalités littéraires du XIXe siècle et d'une importante série d'éditions originales dédicacées par nombre d'écrivains de son temps : G. de Maupassant, Léon Daudet, Jules Claretie, Huysmans, etc...

La Collection Jacques Copeau à la Bibliothèque de l'Arsenal.

A la suite des dons faits récemment à la Bibliothèque de l'Arsenal des archives de Gaston Baty et de Louis Jouvet, de l'acquisition d'un important ensemble de maquettes originales de Georges Pitoëff, une collection Jacques Copeau apportera aux spécialistes du théâtre les éléments mêmes de la réforme du théâtre contemporain.

L'ensemble, récemment acquis et conservé précédemment à Pernand-Vergelesses (près de Beaune) dans la Maison Jacques Copeau où vécut le fondateur du Vieux-Colombier les dernières années de sa vie, comprend notamment la plus grande partie des manuscrits de Copeau, auteur dramatique, traducteur, critique et conférencier, le livre de bord et la totalité des archives du Théâtre du Vieux-Colombier, depuis sa fondation en 1913, et sa mission à New York jusqu'à sa réinstallation à Paris de 1919 à 1924. La période, qui a suivi et qui fut marquée par la fondation de la Compagnie des Copiaus en Bourgogne, les mises en scène dont fut chargé Copeau dans différents théâtres, l'intérim qu'il assura en tant qu'Administrateur de la Comédie française sont également représentés par des documents qui ont été conservés avec soin.

Les principaux éléments de cette collection comprennent :
I° les mises en scène écrites et les différentes conduites de chaque œuvre représentée ;
2° des schémas de décors et de plantations;
3° des maquettes originales de costumes et de décors;
4° des collections de photographies de scènes et de costumes;
5° des dossiers administratifs et des recueils de coupures de presse.

Les importantes recherches d'architecture théâtrale menées par Jacques Copeau avec le concours de Louis Jouvet constituent un ensemble iconographique d'un intérêt exceptionnel.

L'ensemble des affiches concernant les différents spectacles montés par Copeau ainsi que les collections de programmes ajoutées au livre de bord du Théâtre permettent de faire revivre chacun des spectacles qui furent inscrits au programme.

A ces éléments s'ajoute l'ensemble particulièrement précieux de la correspondance échangée par Copeau avec ceux qui ont concouru à la fondation du Théâtre ainsi qu'avec les auteurs représentés et les différents collaborateurs du spectacle.

La Bibliothèque de l'Arsenal organisera, à la Bibliothèque nationale, à l'occasion du cinquantième anniversaire de la fondation du Vieux-Colombier, une exposition dont l'inauguration est prévue le 23 octobre 1963. Cette manifestation permettra de présenter les plus belles pièces de cette collection.

Bibliothèques universitaires.

Lyon (Rhône).

Exposition Kierkegaard. - A l'occasion de la commémoration du 150e anniversaire de la naissance de Kierkegaard, la Bibliothèque a présenté trois vitrines sur la vie et l'œuvre du philosophe danois.

Outre les éditions de différentes œuvres et les principales études critiques consacrées à cet auteur, elle a pu présenter des fac-similés de portraits, ainsi que quelques autres documents fournis par l'Ambassade de Danemark. Celle-ci avait également envoyé des brochures sur l'écrivain danois, qui ont connu un assez large succès.

L'exposition a duré tout le mois de juin.

Grenoble (Isère).

Section médecine-pharmacie.

Publication. - Mr Jean Monteil, bibliothécaire à la Faculté de médecine et de pharmacie de Grenoble, vient de faire paraître une brochure 1 sur un manuscrit relatif à un cours d'anatomie pathologique de Bichat. Dans la première partie de son étude, Mr Monteil donne des détails sur l'identification de ce manuscrit d'origine jusqu'alors inconnue, entré à la Bibliothèque de l'École de médecine de Grenoble en 1902 et composé de 3 feuillets blancs non foliotés et de 271 feuillets. L'examen du texte lui permit d'établir avec certitude qu'il s'agit de notes prises à un cours de Bichat. La seconde partie est consacrée plus particulièrement à ce cours lui-même qui offre une version nouvelle et plus riche du Cours d'anatomie pathologique professé par Bichat presque à la fin de sa vie 2.

Bibliothèques municipales.

Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône).

A l'occasion du Festival international de musique d'Aix-en-Provence une exposition de reliures du début du xve siècle à la fin du XVIIIe siècle a été organisée à la Bibliothèque Méjanes.

La Bibliothèque Méjanes a participé par le prêt de reliures aux armes de bibliophiles aixois à l'exposition organisée au Pavillon de Vendôme : « Une demeure aixoise au XVIIIe siècle ».

Bourg-en-Bresse (Ain).

Exposition Gustave Doré. - La ville de Bourg-en-Bresse a présenté au Musée de l'Ain, du 15 juin au 15 octobre, une exposition consacrée à Gustave Doré. De nombreux livres illustrés (entre autres Don Quichotte 1863), dessins, estampes, peintures et sculptures montraient l'ampleur et la variété de l'œuvre de Gustave Doré qui passa cinq ans de sa jeunesse à Bourg-en-Bresse où il fit son apprentissage de dessinateur, de graveur et de lithographe.

Le catalogue 3 richement illustré donne, outre la liste des œuvres exposées, un article sur Gustave Doré à Bourg, par Mme F. Baudson, bibliothécaire de la Bibliothèque municipale de Bourg-en-Bresse, et un répertoire chronologique de l'œuvre de Gustave Doré, d'après Leblanc.

Carpentras (Vaucluse).

Exposition du Livre hébraïque. - Le Ier juillet a été inaugurée, dans deux salles du Musée, l'exposition du Livre hébraïque venant de Marseille et en présence de nombreuses personnalités locales et de membres des communautés israélites de Carpentras, d'Avignon et d'autres localités voisines.

Cette exposition itinérante a été complétée par un certain nombre d'ouvrages hébraïques anciens de la Bibliothèque Inguimbertine, dont quatre manuscrits, le tout provenant du legs Garsin-Cavaillon qui a fait l'objet d'une note dans un précédent bulletin 4.

Cette importante manifestation attire tous les jours de nombreux visiteurs.

Colmar (Haut-Rhin).

L'Art du livre à travers les siècles. - Poursuivant sa « leçon de choses », inaugurée il y a douze ans, la bibliothèque de Colmar propose cette année aux visiteurs l'histoire complète du livre depuis ses origines ou plus exactement depuis son apparition en Alsace au tournant du VIIe siècle, jusqu'à nos jours.

En dépit des possibilités qu'offre sa salle d'exposition, 32 vitrines et 40 cadres, il a fallu faire une sélection, un choix rigoureux des œuvres représentatives de chaque époque : monuments paléographiques et de calligraphie, chefs-d'œuvre de typographie et d'illustration, reliure. On a attaché un soin particulier à ne montrer que des exemplaires en excellent état de conservation, et n'ayant encore jamais été ouverts au cours des manifestations antérieures. A ce titre, l'Art du livre, croyons-nous, constitue un enseignement de qualité, où s'enchaîne l'histoire de la vie spirituelle et matérielle de la province.

C'est donc une large fresque qu'ouvre le Liber de ortu et obitu patrum d'Isidore de Séville. Il remonte à l'époque où saint Pirmin et ses disciples s'établirent dans un vallon des Vosges, à Murbach, pour y fonder une abbaye demeurée célèbre. Un évangéliaire et la règle pastorale de Grégoire le Grand illustrent les fastes de la Renaissance carolingienne.

Le IXe siècle est représenté par des Pères de l'Église, les épîtres de saint Jérôme et les consolations de Jean Cassien, auxquels s'ajoutent, pour les xe et XIe siècles, de monumentales bibles admirablement calligraphiées. Des psautiers, des missels, une règle de saint Benoît, un vocabulaire attestent le labeur des scriptoria du XIIe siècle et l'éclat de la vie spirituelle du XIIIe, alors que des livres liturgiques du XIVe siècle et des livres d'heures du xve offrent la splendeur des rouge, vert et or de leurs enluminures.

Mais ce XVe siècle est aussi le siècle de la xylographie, de la gravure sur bois, des premiers imprimeurs. A Mayence, vers 1470, Fust et Schoeffer impriment la Vita christiana de saint Augustin et, en 1484, un admirable herbier, déjà illustré. Erhard Reuwich s'attaque au Pèlerinage en Terre Sainte de Bernard de Breydenbach et illustre son livre de bois dont le format (1,64 m sur 0,305 m) peut étonner. A Strasbourg, Mentelin imprime des bibles allemandes et latines, Egge-Stein l'édition princeps des commentaires de la guerre des Gaules de Jules César (1473), Gruninger et Knoblouch les œuvres de Térence, d'Homère et de Virgile. Des incunables de Bâle, d'Augsbourg, de Nuremberg, d'Ulm, de Venise et de Lyon attestent la magnifique éclosion de la typographie. Pour Paris, ce sont les livres d'heures de Simon Vostre et un Duns Scott, imprimé vers 1470 par Michel Friburger, cet enfant de Colmar qui, le premier, a installé une officine à Paris, dans les locaux de la Sorbonne.

Le XVIe siècle s'ouvre sur la Géographie de Ptolémée, imprimée pour Jean Schott à Strasbourg, en 1522, une bible polyglotte en hébreu, chaldéen, grec et latin (Anvers, Plantin, 1568), et un exemplaire, d'une fraîcheur sans pareille, de la première bible grecque imprimée à Venise en 1518 par les soins d'Alde Manuce. En ce siècle de l'humanisme alsacien, la production strasbourgeoise a quelque chose d'étonnant. Le livre illustré témoigne d'un sens artistique raffiné. Des gravures sur bois portent la marque de Lucas Cranach et nous révèlent la maîtrise d'Urs Graf. Un Ancien Testament (Bâle, Adam Petri, 1524) avec des gravures copiées sur les dessins de Holbein le Jeune passe pour être un exemplaire unique.

Du XVIIe siècle on montre, avec quelques Elzevir de bonne époque, une traduction allemande du Traité d'équitation d'Antoine de Pluvinel, illustré par Mathias Merian (Francfort, 1670), le Traité d'astronomie de Nicolas Mercator (Londres, 1676), la Chronique des ducs de Brabant d'Adrian de Barlande qui « se vend en la boutique Plantinienne à Anvers » en 1612.

Un florilège de belles impressions embaume le XVIIIe siècle. Il permet un contact étroit avec les illustres graveurs du temps : Coypel, Oudry, Gravelot, Eisen, Marillier. Les Fables de la Fontaine sont représentées par l'édition qu'en fit A. Jombert en 1765 où l'on admire l'harmonieuse éloquence de la typographie, de la gravure, du décor. Mais on y trouve aussi les œuvres de Racine, illustrées par Jacques de Sève (Paris, 1760), la Nouvelle Héloïse de Jean-Jacques Rousseau, avec les illustrations de J.-M. Moreau (Londres, 1774), les Métamorphoses d'Ovide « gravées sur les dessins des meilleurs peintres français par les soins des sieurs Le Mire et Basan » (Paris, 1767). Le costume physique et moral de la France s'exprime avec plénitude dans les gravures de Moreau le Jeune (Neuwied sur le Rhin, 1789).

Vers la fin du siècle, Didot le Jeune réalise un admirable Rousseau, avec les gravures de Mansiau (Paris, 1796). A Kehl, Beaumarchais sort sa monumentale édition des œuvres complètes de Voltaire.

Le livre du XIXe siècle remplit deux vitrines; l'une consacrée au Romantisme, Granville, Raffet, Daumier, Jean Gigoux, Tony Johannot et l'exubérance débordante de Gustave Doré; l'autre à la production de la fin du siècle - Steinlen, Forain, Raffaelli, où l'on peut admirer une superbe édition de la Physiologie du goût de Brillat-Savarin, illustrée d'eaux-fortes par Ad. Lalauze (1879).

La continuation de l'art du livre s'affirme. Les dernières vitrines enferment le livre moderne illustré. Pour pleinement admirer les réalisations contemporaines, on y a réuni L'Intelligence des fleurs de Maeterlinck, illustrée par Tavy Notton (1955), Les Thibault de Roger Martin du Gard avec les dessins de Berthold Mahn (1960), la Bible et l'Apocalypse avec les compositions d'Edy Legrand (1942 et 1950), et la Divine Comédie de Dante où l'on entrevoit le monde imaginaire de Salvador Dali (196I). Les œuvres complètes d'Albert Camus, avec les lithographies originales d'André Masson (1962) voisinent avec quelques beaux livres imprimés pour la Société des bibliophiles de l'Est dont le goût se rattache aux plus pures traditions.

Une telle exposition serait incomplète sans la reliure. De beaux spécimens rehaussent l'éclat de la plupart des vitrines. Un échantillonnage tout aussi étincelant occupe une vitrine spéciale et nous fait connaître de la reliure le perpétuel renouvellement : ais de bois du XIVe siècle, reliures du xve armées de bossettes et de coins, pour le XVIe siècle des peaux de truie estampées à froid, de beaux maroquins des XVIIe et XVIIIe siècles aux armes de Louis XIV (1687), du duc de Valentinois, prince de Monaco (1716), de Philippe d'Orléans (1784), de Marie Leczinska, de Madame Adélaïde, fille de Louis XV, et de Nicolas Poisson, marquis de Vandières, le frère de Mme de Pompadour.

La bibliothèque du colmarien Reubell, membre du Directoire, fournit les plus belles reliures de l'époque. Se transformant sous les yeux du visiteur, la reliure accuse le style Empire; elle sera « à la cathédrale » ou portera, pour le XIXe siècle, les signatures de Marius Michel, d'Aspre, de Canape, de Charles Meunier. D'autres encore nous feront découvrir, à travers la belle discipline de la matière et du métier, la maîtrise de quelques relieurs modernes.

Dijon (Côte-d'Or).

A l'occasion du 32e Congrès des Écrivains de France qui s'est tenu à Dijon du 5 au 9 juillet, la Bibliothèque municipale a présenté pendant le mois de juillet une exposition d'ouvrages et de documents concernant quelques hommes de lettres nés en Côte-d'Or ou ayant eu des rapports avec Dijon.

Du plus célèbre, Bossuet, figuraient son acte de baptême à l'église Saint-Jean, quelques portraits du XVIIe siècle pris dans la collection léguée par André Virely, des éditions originales, un volume relié à ses armes, quelques lettres autographes et un devoir du Grand Dauphin, fils de Louis XIV, portant les corrections de son illustre précepteur.

Crébillon père était représenté notamment par un exemplaire dédicacé de sa tragédie Idoménée et une lettre du marquis de Marigny, directeur général des bâtiments de France, à Crébillon fils au sujet du monument (aujourd'hui au Musée de Dijon) que Louis XV avait ordonné d'élever à la mémoire de l'auteur tragique.

D'Alexis Piron était exposé, entre autres, un exemplaire de la Métromanie avec corrections autographes et de Buffon un beau portrait gravé en couleurs d'Alix et quelques volumes de l'Histoire naturelle.

Deux auteurs moins connus, mais auxquels on s'intéresse actuellement, sont Jacques Cazotte et Xavier Forneret (celui-ci né à Beaune). Le premier était représenté par une lettre de compliments que Piron lui adressa pour son roman Olivier, une édition des Œuvres badines et morales illustrées par Cochin et une édition du Diable amoureux dont les gravures sont d'un style surprenant pour l'époque. Du second, un des ancêtres du surréalisme, figuraient les œuvres qu'il offrit à la Bibliothèque en 1836, œuvres aux couvertures aussi insolites pour l'époque que les titres : Rien ; Et la lune donnoit et la rosée tomboit ; Sans titre, par un homme noir blanc de visage, etc.

Il aurait été impossible d'omettre Aloysius Bertrand qui, né en Piémont, passa sa jeunesse à Dijon et y puisa l'inspiration de son Gaspard de la Nuit dont étaient exposées l'édition originale et quelques-unes des nombreuses rééditions modernes.

Grenoble (Isère).

Exposition : Documents sur Bayard et son temps. - Le 22 juin 1963, à II heures, a été inaugurée par Me Petit, adjoint au Maire de Grenoble, l'exposition de « Documents sur Bayard et son temps 5

Les documents proviennent de collections particulières et des fonds de la Bibliothèque nationale, des bibliothèques municipales de Lyon et de Grenoble, des Archives de l'Isère et communales de Grenoble, enfin du Musée de Chambéry.

Les premières vitrines ont été réservées à Bayard lui-même, à ses portraits les plus anciens, aux documents relatifs à sa mort, à certains concernant sa famille. Figurent enfin dans ces premières vitrines les plus anciennes estampes que l'on connaisse de Château-Bayard, le château de sa naissance.

Est abordée ensuite la carrière de Bayard en Savoie, en France et en Italie, avec des plans du XVIe siècle concernant les villes qu'il a traversées et où il a séjourné. A côté de ces gravures figurent aussi des documents contemporains sur le séjour de Bayard à Grenoble en tant que lieutenant général. A été d'autre part exposée une copie contemporaine (1512) d'une des plus longues lettres que l'on ait conservées de lui rédigée par Jacques de Mailles, le Loyal Serviteur.

Cette revue de la carrière de Bayard a été complétée par celle des portraits contemporains des principaux personnages qu'il a connus : papes, empereurs, ducs de Savoie, rois de France et des principaux hommes d'armes avec lesquels et contre lesquels il a combattu.

Enfin a été retracée l'historiographie du bon chevalier en commençant par le récit du Loyal Serviteur. N'ont été retenues que les éditions originales des seuls historiens de Bayard.

Tours (Indre-et-Loire).

Exposition : Israël. - Dans le cadre de la Grande semaine, la ville de Tours organise chaque année une exposition ayant pour thème « La Terre et l'Homme ». Depuis trois ans, la Section de jeunes de la Bibliothèque municipale présente parallèlement une exposition sur ce même thème.

Cette année le choix des organisateurs s'étant fixé sur Israël, la Bibliothèque s'est donc donné la tâche de présenter ce pays au jeune public de cette section âgé de six à quatorze ans. L'aspect touristique devant être développé largement dans les pavillons de la Grande semaine, la Bibliothèque s'est proposé d'éveiller l'intérêt des enfants sur la longue histoire de ce pays.

L'exposition eut lieu dans la salle de lecture et de prêt de la Section de jeunes. Cette salle permet de disposer de deux panneaux muraux (3 m X I,65 m) et de deux tables vitrines. A ceux-ci s'ajoutaient quelques rayonnages utilisés comme vitrines à l'aide de plaques rhodoïd.

Pour enrichir la présentation de ce pays, il fallut demander le prêt de livres, de disques, de films, d'objets artistiques et divers renseignements à l'Ambassade d'Israël, à l'Office national israélien de tourisme. Un article paru dans un quotidien régional fit appel à la collaboration de lecteurs acceptant de prêter quelques souvenirs rapportés de voyage en Israël.

Quelle fut la réalisation de cette exposition ?

Trois panneaux bleus et blancs, rehaussés de bistre offrent aux visiteurs « quelques points de repère dans l'histoire du peuple israélien ». Des dates jalonnaient les préoccupations de ce peuple : recherche de sa cohésion, de son unité spirituelle, de ses lois, de son culte, ses revers : exils, fuites, famines, servitudes et les différentes civilisations qui se sont succédé sur sa terre. Le lecteur était convié à suivre les pérégrinations des enfants d'Israël, depuis les débuts mouvementés d'Abraham quittant Ur, sa cité natale, à découvrir les personnalités si diverses de ses chefs : de Moïse à Judas Maccabée, de ses rois : Saül, David, Salomon, à lier connaissance avec quelques prophètes : Élie, Isaïe, Jérémie... à se faire une idée générale des vagues des envahisseurs éphémères qui se succédèrent. Tour à tour, l'Assyrien, le Babylonien, le Perse, le Grec, l'Égyptien... le Romain, le Byzantin, l'Arabe... laissèrent leur marque.

Le texte était illustré par des reproductions de motifs des ivoires de Meggido, des objets de culte, des bordures de palmettes qui égayaient les surfaces de soubassements du palais d'Achab ou d'Hazaël, des harpes vieilles de trois mille ans, des copies de monnaies juives, des photographies du rouleau d'Isaïe, trouvé dans une grotte proche de la Mer Morte, quelques portraits d'envahisseurs syriens, grecs... des scènes de déportation des populations juives en Égypte, des Romains emmenant l'Arche d'Alliance, des reproductions des pavements de la synagogue de Beth-Alpha, etc...

Cette présentation s'achevait par l'évocation de la première colonie sioniste, de la seconde guerre mondiale entraînant la mort de six millions de juifs (discrète évocation d'Anne Frank). Enfin la proclamation de l'État d'Israël par David Ben Gourion.

Sur un rayonnage, quelques livres ouverts à des chapitres divers offraient cartes et illustrations (Ancien Testament, Atlas de la Bible, Histoire de l'Antiquité).

Le deuxième panneau mettait l'accent sur le pays actuel. Cartes, photographies et livres exposaient la situation de ce pays (vues de la Galilée, du désert de Néguev, de la plaine de Judée). Des brochures (dons de l'Ambassade d'Israël) indiquaient les ressources scientifiques et technologiques, leur développement dont dépend l'existence du nouvel État. Des photographies témoignaient du travail des Israéliens participant librement à la renaissance de leur pays (irrigations du Néguev, recherches de gisements, scènes pastorales, appareils de dessalinisation). Des notices explicatives révélaient diverses formes d'établissements agricoles et industriels ; moschavim, kibboutzim, entreprises privées et entreprises d'État. Quelques notes sur les villes en plein essor : Tel-Aviv, Haïfa...

Plus loin, le problème du reboisement était évoqué ainsi que la participation de chaque jeune dans cette entreprise (photos, découpages en collaboration avec quelques lecteurs).

Deux vitrines étaient réservées à l'enseignement de l'hébreu. De nombreux caractères d'un alphabet hébraïque et leurs transcriptions s'offraient au regard, ainsi qu'un jeu de lettres en matière plastique. Tout un éventail de recueils d'histoires, de calcul, de solfège, de chants en usage dans les écoles israéliennes et un petit album relatant l'histoire de Moïse facilement identifiable en parcourant ses illustrations naïves, intéressaient les lecteurs. Quelques tableaux donnaient de brefs renseignements sur les particularités de cette langue, son importance, ainsi que la place de l'enseignement en Israël (photos de maître faisant lire la thora, école de kibboutz, universités d'Haïfa et de Jérusalem). Des jeux de puzzle et de lotos attiraient les jeunes visiteurs.

Une courte histoire en images retraçait la vie d'un « sabra » de manière à intéresser les plus jeunes lecteurs. De-ci de-là, quelques panneaux « le saviez-vous ? » voulaient répondre à l'avance aux questions que peuvent se poser les enfants sur la faune et la flore d'Israël.

Les philatélistes n'étaient pas oubliés. Un coin leur était réservé où ils pouvaient admirer les séries des constellations du zodiaque, des rois...

Enfin la dernière vitrine présentait les souvenirs de voyage prêtés par d'aimables lecteurs : vases, coupes rapportées du kibboutz de Betsheva ou amusantes sculptures, fruits du coton. De nombreuses photos : rouleaux de thora, costumes de mariage, vues de monuments funéraires, des rives du Jourdain, des scènes de rues familières. Au centre, Jérusalem : plan, bref historique, vues de la ville ancienne et moderne. Tout un choix d'ouvrages (histoire, livres d'art, contes et légendes, biographies), apportant une documentation sur Israël, était spécialement réuni et mis à la disposition des lecteurs.

Quelques séances de projections réunirent les visiteurs de cette exposition et complétèrent cet aperçu trop bref sur Israël. L'audition de nombreux disques de musique et de chants israéliens clôtura cette manifestation.

Valence (Drôme).

A l'occasion d'une réunion d'une partie des bibliothécaires du sud-est, à la Bibliothèque municipale de Valence, les 15 et 16 juin 1963, un échantillonnage des livres de la Réserve, soit une soixantaine de volumes a été présenté.

A la demande du public, cette exposition a duré jusqu'au 15 juillet. Elle groupait des manuscrits, des incunables, des livres armoriés, des ouvrages ayant trait à la région par provenance, possessions ou éditions et des livres illustrés contemporains.

Valenciennes (Nord).

La Société des bibliophiles belges sous la conduite de son président Mr Leclercq a visité la bibliothèque de Valenciennes le jeudi 4 juillet 1963. A l'intention des visiteurs, Mr Paul Lefrancq, conservateur de la Bibliothèque, avait préparé une exposition de manuscrits.

Bibliothèque Benjamin Franklin.

La Bibliothèque américaine Benjamin Franklin (I, Place de l'Odéon, Paris 6e) a présenté du 4 avril au 30 juin 1963 une exposition consacrée au Far-West 6, montrant ainsi la richesse de ses collections sur tous les aspects du sujet.

A cette occasion, la Bibliothèque a publié une bibliographie commentée des documents et des romans inspirés par l'Ouest qu'elle possède. Les ouvrages y sont présentés par sujets, accompagnés de leur cote, et marqués d'un astérisque s'il s'agit d'un livre pouvant être emprunté après l'exposition.

  1. (retour)↑  Monteil (Jean). - Le Cours d'anatomie pathologique de Bichat : un nouveau manuscrit. - Grenoble, impr. Guirimand [1963]. - 24 cm, 47 p., ill., fac-sim.
  2. (retour)↑  Mr Monteil a également écrit un article sur ce sujet : Monteil (Jean). - Un Aspect parisien de la doctrine de l'École de Montpellier : Le vitalisme de Bichat et son opposition aux théories chimiques. [Extr. de Monspeliensis Hippocrates, n° 19, 1963, pp. 25-29, ill.]
  3. (retour)↑  Bourg-en-Bresse. - L'Œuvre de Doré. Exposition 15 juin-15 octobre. Musée de l'Ain, Brou, Salle Capitulaire. [Catalogue réd. par F. Baudson. Introd. de Hans Haug.] - Bourg-en-Bresse, impr. Berthod, 1963. - 2I,5 cm, 140 p., ill., couv. ill.
  4. (retour)↑  B. bibl. France, 8e année, n° 3, mars 1963, p. 160.
  5. (retour)↑  Vaillant (Pierre). - Bibliothèque municipale de Grenoble. Documents sur Bayard et son temps. Exposition... - Grenoble, Allier, 1963. - 20,5 cm, 24 p., 2 pl. couv. ill.
  6. (retour)↑  Bibliothèque Benjamin Franklin. Paris. - Vers l'Ouest... La « Frontière » dans l'histoire et la littérature américaines. Bibliographie. - Paris, Bibliothèque Benjamin Franklin [,1963]. - 27 cm, 35 f. multigr. (Centre culturel américain.)