« Ressources numériques : usages et valorisation »

Journée d’étude de l’ADBS Bretagne – 30 janvier 2020

Julie Morot

Emeline Jacqueline

Le 30 janvier 2020, la Bibliothèque départementale des Côtes d’Armor (BCA) accueillait la journée d’étude « Ressources numériques : usages et valorisation », une formation proposée par l’Association des professionnels de l’information et de la documentation (ADBS) en région Bretagne. Le sujet a réuni 15 participantes pour une présentation des missions et des ressources numériques de la BCA en matinée, suivie d’une visite du Fablab Saint-Brieuc Factory dans l’après-midi.

Initiatrice de cette journée, l’ADBS, représentée par Laurence Le Borgne, a présenté ses objectifs et missions : le développement de relations et de liens à l’intérieur de la profession par le biais de rencontres, formations, visites, réunions, conférences, voyages ou encore journées d’étude. Dans une démarche de valorisation du secteur de l’information et de la documentation, l’association se concentre sur le perfectionnement de la formation professionnelle par l’organisation de stages permanents. Ainsi, sa principale mission reste la défense de l’emploi et des intérêts professionnels des documentalistes, bibliothécaires et archivistes. À ce titre, l’ADBS publie depuis 1963 la revue scientifique I2D 1

. Regroupant les différentes formations proposées par l’association, I2D traite également de tous les aspects professionnels de l’information-documentation. Publiée 3 fois par an, la revue s’adresse principalement aux professionnels, étudiants et chercheurs du domaine, en ajoutant à chaque numéro un dossier thématique et une rubrique « recherche ».

En première partie de matinée, Jean-François Vatant, directeur de la BCA, a précisé les missions et le fonctionnement d’une bibliothèque départementale (BD). En premier rappel, le rôle d’accompagnateur de la BCA en ce qui concerne l’acquisition d’ouvrages, le développement des structures et l’élaboration d’actions culturelles sur le territoire. En effet, dans le catalogue des services rendus par la BCA, celle-ci assure le passage d’une navette une fois par mois dans chaque bibliothèque et médiathèque du département, permettant la circulation des prêts et réservations. Une place importante est donnée à la formation des bibliothécaires et des nombreux bénévoles œuvrant sur les plus petites communes. Rejoignant les préoccupations de l’ADBS, ces formations participent à la professionnalisation des employés en bibliothèque sur le territoire. Enfin, en complément à son rôle de conseiller pour tout projet d’aménagement et de construction de bibliothèques, la BCA développe ses services numériques et continue sur sa lancée dans la création et la mise à disposition d’outils d’animation, d’expositions et d’événements culturels.

Une offre variée de ressources numériques accessibles à distance

À la suite de la visite du bâtiment, David Bucaille, webmaster de la BCA, a présenté les ressources numériques disponibles sur le site web de la BD. Accessibles à tout usager inscrit dans une bibliothèque ou médiathèque du territoire, les ressources numériques proposent un large catalogue de services à distance. E-books, e-learning, presse numérique, service de streaming musical et vidéo, sans compter les prêts de liseuses et d’outils d’animation numérique. Cantook Station, plateforme canadienne dédiée essentiellement aux livres numériques, permet aux usagers 15 prêts pour 59 jours fixes et 3 réservations. Bien que tributaire des décisions des éditeurs sur la licence, la BCA parvient à proposer un large choix de livres avec de nombreux avantages pour l’emprunt. De plus, Cafeyn, kiosque de presse numérique, ajoute un panel de quotidiens et magazines pour une consultation numérique sans nécessité d’abonnement. Très populaire auprès des usagers, Toutapprendre.com propose un univers de formation éditorialisé, avec une application disponible sur tablette. Le site regroupe livres audio, soutien scolaire (TOEIC, Code de la route), formations musicales, apprentissage des langues, etc. La plateforme de streaming musical diMusic n’a pas été choisie par hasard. En effet, elle permet une meilleure rémunération des artistes et ouvre son catalogue à des musiciens indépendants, sans publicité non désirée. L’internaute peut alors créer capsules et playlists personnalisées ou se laisser porter par les propositions de la plateforme, à la découverte d’artistes peu connus. Malheureusement, diMusic n’est pas encore disponible en application smartphone. Enfin, depuis le 3 février 2020, la bibliothèque dispose des services de la plateforme de streaming vidéo Arte VOD.

Des formations à la médiation numérique pour le réseau

La BCA fournit également beaucoup d’effort en termes de médiation et d’animation numérique auprès de son réseau de bibliothèques. Afin de mettre en avant ses ressources, des formations sont organisées et le prêt de matériel est encouragé. On compte 16 bibliothèques municipales (BM) ayant emprunté une liseuse à la BCA. En termes d’animation numérique, des consoles Nintendo Switch sont disponibles en prêt, des lectures kamishibaï numérique avec rétroprojecteur sont proposées, ou encore des jeux et applications sont accessibles gratuitement sur les tablettes. Enfin, de nombreux ateliers tout public sont mis en place (ateliers d’apprentissage de code informatique, ateliers de robotisation, etc.). Un apprentissage du numérique par la pratique s’invite en bibliothèque, celle-ci n’étant plus seulement un lieu de lecture mais un espace de partage des savoirs en général.

Ne voulant pas court-circuiter les BM dans leur communication avec leurs lecteurs, la BCA laisse au réseau la démarche de médiation et l’inscription de leurs usagers sur leur plateforme. Un intermédiaire en plus, parfois, entrave la visibilité et l’attractivité de leurs services. Cependant, cela ne déroge pas à leur principe d’accompagnement. Ce choix présente des points négatifs comme des points positifs. Aujourd’hui, la bibliothèque de Dinan compte 25 % de lecteurs inscrits aux ressources numériques de la BCA.

Une « librothèque » de ressources numériques en accès ouvert

En addition à toutes ces initiatives, Hélène Bert, responsable des ressources numériques à la BCA, a terminé la matinée en exposant le projet de la librothèque dont le principe est de mettre à disposition des contenus et d’en devenir des producteurs. Mise en ligne en janvier 2018, la librothèque est un dispositif de médiation documentaire numérique regroupant des ressources du domaine public (libres et gratuites) partagées sous la licence Creative Commons au titre d’un droit d’usage (COMMUNIA). La librothèque héberge blogs, sitothèques, sites de patrimoine, de musique, etc. Loin des contenus payants et indexés par Google ou du très connu Wikipédia, les sites d’archives, les catalogues de bibliothèques et autres sites web indépendants mis en avant par la librothèque contribuent à la valorisation du bien commun numérique. Respectueuses des données personnelles des usagers, les ressources numériques amenées par la librothèque sont également un avantage pour les plus petites bibliothèques du réseau à budget limité. Un projet encore en devenir, en plein questionnement sur son audience mais riche de son dynamisme participatif.

Saint-Brieuc Factory, ou le Fablab comme laboratoire de la fabrique citoyenne

Ouvert depuis octobre 2014 avec le soutien de la municipalité de Saint-Brieuc, le Fablab Saint-Brieuc Factory s’est inscrit dès le départ dans le nouveau projet du Carré Rosengart au Légué, zone portuaire de la ville repensée comme un quartier dynamique et innovant. Il y a ici une volonté de soutenir et d’encourager les acteurs économiques afin de créer une synergie autour de nouvelles compétences, notamment celles du numérique. Une enveloppe de 15 000 euros a été débloquée pour équiper la fabrique : une fraiseuse numérique, deux presses à badge, un plotter de découpe pour les stickers, trois imprimantes 3D, un scancut, une brodeuse et une machine à coudre numériques, et tout l’attirail du parfait bricoleur (scie sauteuse, ponceuse, visseuse) ont ainsi pu trouver leur place.

Le responsable du service, Thierry Trupot, précise avec humour que « chaque fois que la porte s’ouvre, les ennuis commencent ! » Les deux agents, fonctionnaires de la collectivité, ont véritablement à cœur de faire vivre ce lieu innovant en synergie avec le territoire, d’accompagner son évolution mais aussi et surtout de satisfaire les demandes et besoins des usagers.

Tout comme les bibliothécaires, dont les missions ne cessent d’évoluer, les deux agents développent sans cesse de nouvelles compétences au fil des demandes : la création d’une centaine de badges pour un mariage, l’immatriculation d’un bateau pour les plaisanciers du port, une prothèse de main pour un enfant… Chaque demande est unique et nécessite une écoute et un accompagnement adaptés.

Les actifs, qu’ils soient salariés, artisans ou autoentrepreneurs, profitent des moyens et équipements mis à leur disposition pour développer de nouvelles idées et bénéficier des savoir-faire de l’équipe. Cet espace d’expérimentation reste néanmoins ouvert à tous. Sur les 120 m² de surface, les usagers peuvent profiter d’un espace de coworking, de visioconférence, de couture ainsi que d’un ensemble d’équipements qui invite à la pratique. « L’idée n’est pas de faire à la place des gens mais de montrer, d’accompagner et d’aider à mener un projet, du dessin à sa fabrication finale », nous précise Thierry Trupot.

Les échanges et les partages de connaissances y sont nombreux et restent au cœur de cette démarche. Toutes les générations se croisent, de 12 à 85 ans, pour donner vie à des idées diverses. L’espace de couture, notamment, permet de créer du lien social entre les différents usagers ou visiteurs de passage. Le lieu reste donc en constante évolution au fil des projets, des rencontres et des liens qui se nouent…

Au-delà de la simple visite de curiosité, les habitants du territoire semblent avoir bien identifié le lieu ainsi que les possibilités qui leur sont offertes. L’accessibilité reste donc un enjeu central dans ce projet. Cela semble être un pari gagné car si 30 à 40 adhésions annuelles sont comptabilisées chaque année, le nombre de prestations payantes à l’unité a, quant à lui, doublé en 2018 et 2019. Le champ des possibles semble donc ouvert…