Journées nationales des BNR 2015

Epinal – 21,22 mai 2015

Valérie Travier

A la journée d'information sur les Bibliothèques numériques de référence inaugurée en 2014 à Orléans par le Service du Livre et de la Lecture, ont succédé cette année deux journées de rencontres, à Epinal, les 21 et 22 mai, encadrées par des visites et une fin de semaine vosgienne et forcément aérée!

A la chaleureuse invitation de l'équipe de la Bibliothèque multimedia intercommunale (BMI) et du Sillon lorrain, premier pôle métropolitain de France, plus de 70 participants avaient répondu, venant en particulier des 13 services labellisés BNR par le Ministère de la Culture et de la Communication.

En plus d'un site Internet facilitant la mise en ligne des interventions, le partage d'expériences s'est fait également grâce à une clé usb remise à chacun et contenant cahiers des charges, plans de formation et de communication des bibliothèques ayant expérimenté le nouveau dispositif mis en place en 2013.

La Lorraine ainsi mise à l'honneur a présenté lors de ces journées le programme du Sillon lorrain qui a mis en synergie 4 villes (Metz, Nancy, Thionville, Epinal), avec 3 fonctionnaires à disposition, sur divers projets dont la Bibliothèque numérique de référence, un important volet culturel faisant partie intégrante du Pacte lorrain qui lie Etat, conseil régional et collectivités territoriales autour d'un volet industriel ayant pour ambition de valoriser la région à l'échelle européenne.

En introduction, Nicolas George a rappelé l'origine des BNR qui, dans le cadre des 14 propositions du plan de développement de la lecture initié par Frédéric Mitterand, faisaient partie de l'arsenal censé enrayer la baisse des pratiques de lecture traditionnelle au profit du numérique. Si le succès fut dans un premier temps modéré, les objectifs de professionnalisation des bibliothécaires sur le plan du numérique, soutenus par une réforme des financements mobilisant la DGD pour créer de nouveaux services, ont remporté une pleine adhésion. Depuis, la problématique a changé de paradigme, passant de la numérisation patrimoniale à l'intégration de bibliothèques numériques natives à gérer comme flux : les BNR promeuvent les plateformes numériques sur lesquelles sont proposées des expériences nouvelles de lecture. Le label BNR constitue aujourd'hui un réseau, il bénéficie d'une amélioration du conventionnement et de l'apport d'intervenants tiers (BnF, BPI), ainsi que de l'émergence de moyens de communication spécifiques.

Le Ministère entend inciter les collectivités qui portent les BNR à les utiliser comme outils structurants d'aménagement du territoire. L'entrée des BDP dans le dispositif devrait également permettre d'étendre les expériences acquises. L'expérimentation du Prêt numérique en bibliothèque (PNB) doit aboutir à la signature d'un protocole avec les organismes professionnels listant 12 conditions de réalisation dont l'interopérabilité des matériels de lecture. Enfin, on entre désormais dans une phase d'évaluation des dispositifs (impact sur les publics, développement des services, formation professionnelle).

Une large place a été faite lors de la première matinée aux intervenants tiers proposant de nouveaux services à intégrer sur ces plateformes numériques ouvertes : l'INA a annoncé l'offre INA Premium (plateforme de SVOD lancée en juin) tout en présentant les nombreux projets régionaux mis en place récemment (Imaginaire de la Grande Guerre, plateforme numérique de la métropole de Lille). La stratégie numérique de la BnF prend appui sur Gallica, qui compte aujourd'hui 270 partenaires et référence 60 bibliothèques. Pour les 7 BNR qui sont également bibliothèques de dépôt légal imprimeur (BDLI), outre l'accès aux archives de l'Internet, est annoncé également la mise à disposition de 23 titres de presse régionale et de leurs éditions locales. L'intégration des documents numérisés par les BNR dans Gallica est un gage de visibilité : des liens pérennes ARK (Archive Resource Key) sont créés pour tous les documents des partenaires numérisés par la BnF permettant une lecture sur tous les supports. Via Gallica, les collections seront également moissonnées par Europeana, le lien permettant d'accéder directement à la BNR en question.

Avec Numistral, c'est Gallica en marque blanche qui a été expérimentée : ce service pourra éventuellement être proposé comme prestation à l'avenir. La BnF prévoit un renforcement de la coopération avec les BNR : en échange de l'archivage pérenne, les fascicules sous droit du Républicain lorrain vont ainsi pouvoir entrer dans Gallica, la réflexion sur PNB va donner lieu à une note de la BnF en juillet, enfin les BNR se verront proposer, au terme des 6 mois pendant lesquels le registre RELIRE des oeuvres orphelines restera ouvert, une offre de service d'accès aux oeuvres ainsi numérisées.

La BPI a proposé elle aussi ses services aux BNR : autoformation à distance, projet de VOD pour les bibliothèques territoriales sur abonnement en partenariat avec ARTE et extension du périmètre d'Eurêkoi (feue Bibliosésame), avec l'adjonction de 47 bibliothèques francophones. Enfin une aide est offerte à l'accompagnement de projets de web magazines comme Balises, avec des formations à l'écriture web ou à la recherche d'images.

Une deuxième partie de la journée a permis de rappeler le mode d'emploi pour concevoir un projet BNR  1

Les critères d'évaluation du dossier prennent en compte l'impact sur les publics, le développement de l'offre de collections et de services, l'évolution des pratiques professionnelles, l'insertion dans le tissu numérique d'un territoire. Le processus de labellisation s'élabore en plusieurs temps : une demande doit être faite à la DRAC dont le conseiller engage un dialogue pour affiner le dossier. Avec l'accord de la DRAC, le dossier est alors analysé par le Service du Livre et de la Lecture(SLL) : un courrier doit être envoyé par la collectivité demandeuse à la Ministre. Commence alors un deuxième dialogue entre la collectivité, la DRAC et le SLL pour négocier les aspects financiers (taux de subvention accordé sur la DGD). Une convention-cadre accompagnée de conventions d'attributions financières annuelles sont finalement signées.

Les élements à fournir pour le dossier de candidature BNR sont les suivants:

- courrier- volet numérique du PCSES de la bibliothèque

- délibération de la collectivité

- dossier de présentation: objectifs généraux/obj.opérationnels/actions/phasage des projets.

Le comité de pilotage rassemble élus, agents de la collectivité (DAC, DSI, services administratifs et financiers), personnels de la bibliothèque, DRAC, SLL et éventuellement des partenaires extérieurs.

Les aides financières se sont montées de 100 000€ (Moulins) à plus de 2 millions pour le Sillon lorrain. L'aide de l'Etat se situe en général dans une fourchette de 45% à 62% du montant du projet. Jusqu'à présent 10 millions d'euros issus de la DGD ont été mobilisés depuis le début du dispositif.

Une BNR type allie la constitution d'une offre documentaire, d'une infrastructure à élaboration et d'un projet de service et de médiation.

Plusieurs projets ont été présentés par les participants: Sillon lorrain, Montpellier, Nîmes, Grenoble. Tous ont insisté sur l'intégration de la BNR dans un projet d'innovation numérique large mené par la collectivité.

Parmi les bilans d'expérimentations, une attention particulière a été apportée à celle du Prêt numérique en bibliothèque, à la BMVR de Montpellier et à la BM de Grenoble.

Bien que l'offre expérimentée reste trop faible pour l'intégrer à une politique documentaire, l'accessibilité testée à Montpellier (titres intégrés au portail, emprunt direct sur le compte lecteur) a permis un bilan positif avec davantage d'utilisateurs de l'offre que celle, précédente, de Numilog, pourtant sur une plus longue période. Le coût reste trop élevé (+ 50% du prix normal) mais la réactivité de la bibliothèque sur les nouveautés a pu être plus grande : les titres les plus empruntés ont été rachetés plus vite, et les 52 titres les plus demandés ont pu être ainsi rapidement disponibles pour les lecteurs avides! A Grenoble, une très intéressante enquête sur les usagers des services numériques, réalisée avec l'aide d'un laboratoire de recherche de l'université, a tracé le portrait du lecteur numérique moyen : surdiplômé, utilisateur de services numériques courants avec une expérience plus récente du livre, c'est un amateur de transferts de fichiers aussi bien que de sites marchands, il lit plutôt moins que ses aînés mais ses pratiques sont cumulatives, la lecture numérique sans achat est pour lui une simple pratique culturelle supplémentaire. A noter : le niveau de revenu n'a pas d'incidence sur ses pratiques. A Montpellier comme à Grenoble, on a vu apparaître de nouveaux lecteurs : Français expatriés, lecteurs d'autres bibliothèques ne présentant pas une telle offre numérique. PNB a participé au rayonnement de la bibliothèque et, dans les deux cas également, a nécessité une formation des personnels et des lecteurs...

Le lendemain a été occupé par des ateliers qui ont permis aux participants d'échanger leurs pratiques et leurs interrogations sur la notion de bibliothèque 3ème lieu confrontée au tiers lieu des technophiles, sur la place de la recherche dans le public des plateformes numériques, sur les modalités de formation et d'éducation au numérique proposées désormais par les bibliothèques connectées.

Pour plus de détails, voir le programme complet des journées ainsi que les présentations des participants

  1. (retour)↑  cf.site et carte: http://www.culturecommunication.gouv.fr/Politiques-ministerielles/Livre-et-Lecture/Bibliotheques/Numerique-et-bibliotheques/Les-Bibliotheques-numeriques-de-reference