Journée nationale des bibliothèques numériques de référence
Plaine Commune, 30 novembre 2017
Le jeudi 30 novembre 2017 a eu lieu la journée nationale des bibliothèques numériques de référence, programme lancé en 2010 par le ministère de la Culture pour accompagner les collectivités dans la mise en place de bibliothèques et de services numériques de haut niveau. Cette journée professionnelle a rassemblé cette année environ 130 participants, sur deux lieux : la médiathèque Aimé Césaire de la Courneuve, réseau des médiathèques de Plaine Commune, et le siège de Plaine Commune à Saint-Denis. Deux sujets importants ont fait l’objet de tables rondes : la place de l’éducation aux médias et à l’information dans les bibliothèques et l’inclusion numérique. La journée a aussi été l’occasion de découvrir de nombreux projets numériques, à travers un forum des projets et une présentation des nouveaux entrants dans le programme BNR.
L’éducation aux médias et à l’information
L’ouverture de la journée a été assurée par une table ronde portant sur l’éducation aux médias et à l’information, en parallèle du Forum des projets. Animée par Céline Raux, conservatrice à la bibliothèque de l'Université Paris 8 Vincennes - Saint-Denis, elle donnait la parole à deux institutions, la médiathèque Astrolabe de Melun, représentée par Véronique Rioual et Didier Jelen, et la bibliothèque municipale de Lyon, représentée par Anne-Cécile Hyvernat.
La médiathèque Astrolabe a présenté l’évnement Voix de presse, un rendez-vous trimestriel tout public qui permet aux usagers d’échanger avec des journalistes autour de leur métier et de sujets d’actualité. La bibliothèque municipale de Lyon propose, quant à elle, une série d’évnements intitulés la Fabrique de l’information, des rendez-vous mensuels d’une heure pour échanger sur une thématique ou une actualité, dans un but d’analyse de l’information.
Les discussions qui ont suivi ont porté sur la place des bibliothèques dans l’éducation aux médias et à l’information : le vocabulaire à employer, le mot « éducation » étant peu utilisé par les bibliothèques et le terme « information » étant préféré à celui de « médias » ; le rôle que peuvent tenir les bibliothécaires, entre valorisation des collections presse, travail de médiation vers des ressources et formation de l’usager ; la légitimité des bibliothécaires à montrer le processus de fabrication de l’information et le travail du journaliste, et à donner les clés pour comprendre l’information ; la posture du bibliothécaire et les difficultés à garantir une neutralité d’opinion dans ce type d’évnements.
Une autre problématique évoquée a été celle du lien avec l’Éducation nationale, ainsi que celle de la place des publics enfance et jeunesse. La bibliothèque a la possibilité de s’adresser à tous les publics, y compris aux publics adultes, mais les publics adolescents semblent moins intéressés par la critique de l’information. Concernant les publics jeunes, le souhait est de travailler davantage en lien avec l’Education nationale ou le CLEMI, pour conduire des projets d’éducation aux médias auprès de ces publics, en veillant à ne pas se substituer aux professeurs. Cela nécessite aussi que les bibliothèques soient reconnues comme des partenaires pertinents en la matière.
Cette table ronde s’est terminée sur le constat de l’importance des partenariats : avec les professionnels de l’information, notamment les journalistes, avec l’Éducation nationale ou d’autre types de partenaires. Cela nécessite de s’investir sur le long terme, de trouver les budgets et les personnes. Certains dispositifs peuvent aider en ce sens : ainsi, l’Astrolabe a pu bénéficier de formations de la bibliothèque départementale sur l’animation de débats et de l’information sur les évènements, ainsi que du dispositif « journaliste en résidence » 1.
Présentations de projets BNR
Deux temps forts ont été proposés durant la journée pour découvrir des projets portés par les collectivités ayant reçu le label BNR. Durant la matinée, neuf collectivités ont ainsi présenté un aspect de leur projet réalisé ou en cours de réalisation. Répartis sur l’ensemble des espaces de la médiathèque Aimé Césaire, des stands ont permis aux personnes présentes de passer d’un projet à l’autre et de découvrir des réalisations à travers toute la France. On peut ainsi citer la valorisation sur tablettes tactiles du patrimoine numérisé dans le réseau Montpellier Méditerranée Métropole, la visite virtuelle de la bibliothèque Mériadeck à Bordeaux, la présentation de l’offre de la médiathèque départementale de la Drôme ou encore celle de l’autoformation à la BPI.
L’après-midi a débuté par la présentation des nouveaux entrants à travers « Ma BNR en cinq minutes », exercice consistant à présenter le projet numérique de la collectivité dans la durée impartie. Huit porteurs de projet ont ainsi expliqué leurs actions, venant témoigner de la richesse et de la diversité des projets BNR : Jura, Saint-Etienne, Puy-de-Dôme, Grand Poitiers, Bayonne, Dunkerque, Paris et Cambrai.
L’inclusion numérique
La table ronde de l’après-midi portait sur l’inclusion numérique et était animée par Anne Faure, chargée de mission Egalité numérique des territoires au Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET). Les quatre invités étaient Simon Roussey de l’Agence nouvelle des solidarités actives (ANSA), Frédérique Ambert de la médiathèque départementale de la Loire et Yannick Kremer et Lucie Daudun des médiathèques de Plaine Commune.
Les intervenants ont d’abord évoqué l’importance du risque d’exclusion en raison de la digitalisation croissante de la société, qui concerne presque 20% de la population, et qui est accentué par la difficulté du rapport à l’écrit et par l’illettrisme 2. La question de l’inclusion numérique devient une question politique, de plus en plus prise en compte par les institutions. Mais elle concerne un grand nombre d’acteurs et de réseaux, qu’il faut prendre en compte et faire travailler de concert. Les bibliothèques en font partie et cela amène une transformation de leurs missions, de leur organisation et de leurs moyens.
Les trois invités ont ensuite présenté leurs actions. L’ANSA a mis en place le laboratoire Inclusion et Numérique, groupe de travail réunissant une quarantaine de structures et de collectivités réfléchissant aux solutions pour faire du numérique un vecteur d’inclusion, et non un facteur supplémentaire d’exclusion. Il travaille sur une cartographie des risques d’exclusion au numérique, un plaidoyer « pour un numérique inclusif » et des cahiers thématiques intégrant un ensemble de solutions.
En 2016, la bibliothèque départementale de la Loire a mis en place le projet Quai 42. Le but est de permettre aux ligériens, et notamment aux publics éloignés, de s’approprier la culture numérique, de travailler sur la réduction de la fracture sociale, culturelle et numérique et d’adapter le service départemental de lecture publique à ses nouvelles missions (livres et multimédia). Des outils dédiés ont été prévus pour cela : ressources, animations et matériel. Un travail spécifique est aussi mené auprès des publics « dys » : proposition de ressources en ligne adaptées, engagement d’un partenariat fort avec les associations de l’Education nationale.
Enfin, les médiathèques de Plaine Commune proposent des ateliers créatifs et numériques, portés essentiellement par l’équipe des bibliobus, qui participent de l’inclusion numérique des publics. Ils sont organisés autour de trois univers : la fabrication numérique, l’électronique et robotique, l’impression et marquage. Vecteurs de la construction d’une culture numérique commune, ces ateliers créatifs constituent des leviers pour créer les conditions de la créativité et de la (ré)assurance, et offrent ainsi des pistes nouvelles en termes d’inclusion numérique.
En conclusion, le « Livre service »
Cette journée très dense s’est achevée par une conclusion commune à Patrick Braouezec, président de Plaine Commune, et à Nicolas Georges, directeur chargé du livre et de la lecture, Ministère de la Culture. Celle-ci a permis de rappeler que le programme des BNR accompagne des collectivités dans la mise en œuvre de projets innovants, structurants pour le territoire et les publics, et ambitieux. Le projet BNR de Plaine Commune est un exemple particulièrement intéressant, notamment en matière de réflexion sur une offre adaptée à un territoire. L’inauguration, le soir même, de « Livre service », kiosque de prêt numérique hors les murs, au sein même du siège de Plaine Commune, est venue illustrer cette volonté, sans cesse renouvelée, d’innover et de mettre en place des services numériques répondant aux attentes des citoyens.