Journée d’étude KohaLa
21 janvier 2020 – Paris
Initiés ou simples curieux, la journée d’étude organisée par l’association KohaLa réunit chaque année des professionnels de tous horizons autour du logiciel Koha. Bibliothèques universitaires et municipales, associations, bibliothécaires, documentalistes, professionnels intéressés par le SIGB libre se retrouvent pour échanger sur leurs expériences et discuter des avancées et projets de l’association.
Car c’est bien là ce qui fait la force du SIGB Koha : le dynamisme de sa communauté d’utilisateurs ! Venu de Nouvelle-Zélande, le logiciel a su s’adapter à nombre de problématiques nationales et locales. On le retrouve sur tous les continents, il s’intègre et se transforme selon les pays, les structures et les enjeux. Mais toutes ses instances ont un point commun : la culture du logiciel libre.
La journée d’étude organisée par l’association des utilisateurs français KohaLa s’inscrit dans cette dynamique. Les temps forts sont marqués par l’échange de pratiques, le retour d’expérience et le travail commun à des améliorations concrètes pour tous. Dans cet esprit étaient conviés des utilisateurs aguerris et novices comme des néophytes curieux du logiciel et de sa communauté d’utilisateurs. Une cinquantaine de personnes se sont réunies le 21 janvier 2020 à Paris, dans les locaux de la BULAC (Bibliothèque universitaire des langues et civilisations), pour assister à la journée organisée par KohaLa.
Deux groupes ont été constitués pour la matinée : l’un dédié à la démonstration du logiciel par Anne-Cécile Bories (bibliothèque de Sciences Po Grenoble) et Axelle Clarisse (bibliothèques universitaires Aix-Marseille) pour les nouveaux ou futurs utilisateurs ; l’autre groupe assistait à la présentation par Sonia Bouis (service commun de la documentation de l’université Jean-Moulin-Lyon-III) du nouveau plug-in Bibliostratus, financé par l’association et compatible avec la dernière version de Koha.
Le choix fut difficile car si, certes, nous sommes tous aux aguets sur l’alignement des données, les retours d’expérience et les démonstrations sont toujours l’occasion d’échanges stimulants et de conseils avisés. N’ayant pas le don d’ubiquité, j’ai décidé de me rendre à la présentation du plug-in Bibliostratus spécial Koha.
À l’heure où tous s’inquiètent de l’application de la transition bibliographique dans les catalogues locaux, Bibliostratus revient souvent dans les discussions. Il s’agit d’un outil développé par le groupe « systèmes et données » afin de contrôler la qualité des notices des catalogues locaux en les comparant avec celles des deux agences nationales : la Bibliothèque nationale de France et l’Agence bibliographique de l’enseignement supérieur (Abes). Bibliostratus est un logiciel libre qui fonctionne de la façon suivante : nous exportons nos données en tableur, les envoyons dans Bibliostratus qui compare ensuite notre fichier avec – au choix – le catalogue de la BnF et/ou de l’Abes. Bibliostratus nous propose ensuite un nouveau tableur avec le résultat de ce comparatif. La clé de l’opération tient aux identifiants pérennes produits par les agences bibliographiques nationales. Bibliostratus crée un fichier de résultats comprenant le tableur que nous lui avons envoyé et les identifiants pérennes correspondants.
L’association KohaLa a décidé en 2019 de financer un développement spécial Koha : l’intégration d’un plug-in Bibliostratus dans l’interface professionnelle du SIGB. Sonia Bouis nous présente le résultat de cette collaboration avec la société Biblibre. (De nouveaux formats d’export et d’import ont été paramétrés et nommés de sorte à ce que l’utilisateur identifie immédiatement les mises en forme compatibles avec Bibliostratus). Ne nous reste plus qu’à passer ces fichiers à l’alignement et les récupérer pour mettre à jour les notices bibliographiques et autorités dans Koha. Ainsi, la procédure est simplifiée et fléchée : les identifiants pérennes ne seront ajoutés dans les notices locales que s’ils sont manquants, avec toujours un PPN et/ou un ARK mais jamais deux références du même type. Bien que la démonstration ait été troublée par une connexion réseau aléatoire et un matériel récalcitrant, Sonia Bouis a formidablement détaillé toutes les étapes de l’utilisation de Bibliostratus. Ce nouveau plug-in est déployé à la bibliothèque universitaire de Lyon-3 et sera utilisé pour identifier des fonds n’étant pas localisés dans le Sudoc afin d’obtenir une liste qui sera transmise à l’Abes en vue d’une exemplarisation automatique.
Après une pause déjeuner libre, les participants ont rejoint l’auditorium de la BULAC. Au programme : la présentation d’Urungi, logiciel libre permettant de créer des tableaux de bord, un retour d’expérience de la part des membres du bureau sur leur participation au hackfest Koha de 2019, un point sur les nouveautés dans la dernière version communautaire de Koha, une présentation de la FULBI (Fédération des utilisateurs de logiciels pour bibliothèques, documentation et information) et un récapitulatif des actions en cours et à venir menées par l’association.
Sylvain Deflache (bibliothèque municipale de Caluire) a proposé une démonstration de la dernière version de l’outil de reporting Urungi. Il permet d’effectuer des tableaux de bord à partir des données de Koha. Le diaporama présenté détaille la marche à suivre pour personnaliser ses rapports statistiques. L’outil est puissant et la société Biblibre l’a optimisé pour que la construction des rapports qui alimenteront les tableaux de bord soit précisément calquée sur l’architecture de Koha. Les options proposées sont, en effet, directement issues de l’organisation des tables dans la base de données. Un petit bémol cependant : les tableaux de bord ne sont pas encore exportables en tableur. Notons que cet outil de reporting n’est pas ciblé vers un logiciel en particulier, il peut effectuer des tableaux de bord pour d’autres bases de données que Koha.
L’après-midi s’est poursuivi avec un retour sur le hackfest de 2019 par les membres du bureau. Aurélie Bérut (Enssib), Anne-Cécile Bories, Sonia Bouis et Axelle Clarisse nous ont relaté leur expérience avec enthousiasme. Le hackfest Koha, organisé chaque année à Marseille dans les locaux de Biblibre, réunit utilisateurs et développeurs autour d’un objectif commun : améliorer, optimiser, tester le logiciel et débattre de ses orientations techniques pour les versions à venir. Les intervenantes ont dépeint avec humour l’installation délicate d’une base de test sur leurs ordinateurs. Mais l’esprit d’entraide et la culture du partage propres à la communauté Koha ont permis de lever les obstacles techniques. Il a d’ailleurs été proposé de mettre à disposition de tous sur le site de l’association la « devbox » qui fut si difficile à installer. Cette instance de Koha sans données ni paramétrages a notamment permis de tester et valider les développements sur le logiciel.
Au cours du hackfest, un atelier a également permis aux bibliothécaires et aux développeurs de travailler ensemble à l’intégration des nouveaux champs de la transition bibliographique préconisés par l’IFLA dans Koha. Après de nombreuses propositions, vérifications, corrections et validations, deux patchs ont été finalisés et intégrés à la version communautaire du logiciel. Mais si les champs sont là, le travail sur l’affichage des données est toujours en cours. Le hackfest annuel est également l’occasion d’avancer sur le chantier au long cours de traduction de la base et du manuel à destination des utilisateurs. Un groupe de traducteurs animé par Axelle Clarisse œuvre toute l’année à ce fastidieux travail. Le hackfest permet notamment d’avancer à plusieurs et, par exemple, d’échanger avec les développeurs sur les éléments de ponctuation qui pourraient les gêner. Enfin, la session 2019 de l’événement a également permis de tester et valider la version 6 du moteur d’indexation Elasticsearch. Un plan de test Elasticsearch est d’ailleurs mis à disposition de la communauté sur le site de l’association.
Le logiciel Koha est en constante évolution et deux fois par an la version communautaire est améliorée et mise à disposition de tous. Nous en sommes aujourd’hui à la version 19.11 du SIGB. Les nouveautés de Koha 19.11 sont présentées par Aurélie Bérut avec dynamisme et pragmatisme. Si les grandes avancées sont la validation de la compatibilité avec Elasticsearch 6 et l’intégration des mises à jour UNIMARC IFLA, on peut également retenir des améliorations d’ordre ergonomique et l’ajout de nombreux raccourcis claviers.
Didier Thébault (centre de documentation des services du Premier ministre) nous a présenté la FULBI (Fédération des utilisateurs de logiciels pour bibliothèques, documentation et information) dont il est président. La fédération regroupe sept associations d’utilisateurs de logiciels documentaires et participe à divers groupes de travail nationaux, du référentiel général d’accessibilité pour les administrations (RGAA) au groupe « systèmes et données » de la transition bibliographique. Son rôle est multiple et comprend notamment la participation aux travaux de normalisation, l’organisation de journées d’études, la représentation des utilisateurs de logiciels documentaires auprès des pouvoirs publics et des éditeurs commerciaux… La FULBI a également participé à la refonte du formulaire SCRIBD de l’Observatoire de la lecture publique en collaboration avec le ministère de la Culture et l’Association des bibliothécaires de France (ABF). Didier Thébault en profite également pour nous annoncer la renaissance de l’Interassociation Archives Bibliothèques Documentation (IABD). La fédération s’est unie aux associations des métiers de la documentation et des archives pour relancer l’interassociation en 2019 afin de travailler ensemble « à promouvoir et faire connaître les missions, activités et services des organismes œuvrant pour la collecte, la conservation, la mise en valeur et la diffusion des œuvres de l’esprit et de l’information, quels qu’en soient les supports » ou encore « être force de proposition lors de la définition des politiques publiques dans le cadre des traités internationaux, des législations européenne et française ».
La présidente de KohaLa, Sonia Bouis, conclut alors cette journée en faisant le point sur les actions menées et à venir. Notons par exemple le financement du développement du plug-in Bibliostratus, celui d’un autre développement permettant d’effectuer des statistiques en conformité avec le RGPD (règlement général pour la protection des données), dont les tests sont en cours, ou encore l’organisation de sessions de formation à destination des utilisateurs qui souhaiteraient approfondir leurs connaissances. Pour conclure, Sonia Bouis nous donne rendez-vous aux prochaines rencontres organisées par l’association : le hackfest fin mars à Marseille et le symposium Koha du 22 au 24 juin à Orléans.
Avant de quitter l’auditorium de la BULAC, un dernier échange entre les participants et les intervenants a eu lieu afin de recueillir les impressions « à chaud » du public. Le logiciel et les présentations peuvent inquiéter un peu car la technicité demandée semble importante. Néanmoins, les membres de l’association ne sont pas tous des bricoleurs. Didier Thébault a choisi une image très parlante pour illustrer cette question : avec la plupart des SIGB, la prestation est comparable à laisser sa voiture chez un garagiste, lui donner les clés, et revenir la chercher une fois réparée ; avec Koha, on a le sentiment qu’il faudra aller nous-même voir sous le capot si la voiture pose problème. Or, le principe de Koha, c’est finalement le choix de bricoler ou non. Il existe trois prestataires sur le marché français et tous ont des délais et des qualités de réponse efficace. De plus, toute avancée d’un établissement peut profiter à l’ensemble des utilisateurs, la version communautaire restant libre et gratuite. À chacun donc de choisir l’option mécanique, l’option tout compris ou une formule hybride !