Journée Bibdoc 37

« L’info, le jeune et la bibliothèque » – 28 avril 2016 – Tours

Christophe Girault

Bibdoc37 est un réseau en Indre et Loire ouvert à tous les professionnels des bibliothèques, des services d'archives, des centres de documentation du secteur public et des entreprises du secteur privé, qui organise une journée d’étude annuelle.

Cette journée, qui alterne conférences et ateliers, a attiré un public important (200 inscrits) et avait pour thème cette année : L’info, le jeune et la bibliothèque.

La conférence introductive était animée par Jean-François Rouet de l’université de Poitiers. Il est directeur de recherche au CNRS et mène ses travaux de recherche sur la cognition et l’apprentissage. Elle avait pour titre « Les modes de lecture des enfants, des étudiants et la structuration de l’information »

JF. Rouet introduit son propos en posant la question suivante : savoir lire, qu’est-ce que c’est ? Décoder en donnant du sens au mot écrit se révèle être une définition couramment acceptée par les spécialistes et les éducateurs. L’identification des mots est un processus rapide qui devient automatique même si elle diffère d’un individu à l’autre, et la lecture se déroule généralement au rythme moyen de 150 mots par minute.

Il poursuit ensuite en expliquant les mécanismes de la compréhension. L’apprentissage de la lecture est ancré dans le développement du langage oral et de la communication gestuelle et faciale : l’apprentissage est précoce pour l’oral mais il faut attendre l’âge de cinq ans pour qu’un enfant puisse amorcer le décodage d’un mot écrit et c’est à l’âge de huit ans que débutera la lecture compréhension.

Les quelques exemples d’exercice du programme PISA proposés aux jeunes permettent de mieux comprendre les mécanismes de l’évolution de cet apprentissage. Le programme PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) est un ensemble d'études menées par l'OCDE et visant à la mesure des performances des systèmes éducatifs des pays membres et non membres. Leur publication est triennale. La première étude fut menée en 2000 et un des objectifs est de comparer les performances de différents systèmes éducatifs en évaluant les compétences acquises par les élèves en fin d'obligation scolaire (quinze ans et plus). Ces compétences sont définies comme celles dont tout citoyen européen moyen peut avoir besoin pour réussir dans sa vie quotidienne et la lecture en fait bien évidemment partie. Depuis 2009, PISA comporte également un volet évaluation sur la lecture numérique de la génération Y.

On pourrait en effet penser que les supports numériques pourraient modifier la maîtrise de la lecture pour les jeunes. En réalité, la distribution des compétences est similaire à celle de la lecture « classique ». Néanmoins concernant les supports numériques, il apparait que les jeunes rencontrent des difficultés concernant la recherche d’informations, la détermination de leur pertinence et l’évaluation de la qualité de ces dernières. A l’entrée à l’université, on constate que la recherche d’information est beaucoup moins fréquente que la consultation des réseaux sociaux type Facebook.

Une culture informationnelle qui interroge et amène sans conteste une réflexion sur les méthodes d’enseignement.

Hérvé Le Crosnier a animé une conférence intitulée « la culture participative sur le web ». Il est enseignant chercheur à l’université de Caen et spécialisé dans le domaine du web et de la culture numérique.

Il annonce pour sa part vouloir parler du web de façon positive en s’intéressant à la manière dont les jeunes se servent d’internet pour créer des cultures participatives. Une enquête récente montre que la vidéo en streaming et Facebook arrivent en tête des services consultés et on note également qu’ils sont de plus en plus utilisés à partir de téléphones mobiles.

H. Le Crosnier aborde la question du droit à l’ennui alors que le système déploie beaucoup d’énergie pour l’empêcher. Lui le revendique car il permet de créer. Avec internet, est aussi arrivée une nouvelle culture graphique et iconique comme par exemple les émoticônes, le like de Facebook, le cœur de Twitter … La culture web participative se développe grâce aux contributeurs qui peuvent interagir et partager leurs savoirs (exemple de Wikipédia ou open streetview). Ces modes de culture participative ne sont certes pas parfaits et peuvent être améliorés. Il cite l’exemple de Wikipédia où 85% des contributeurs sont des hommes.

Dans le domaine de la lecture, le web a permis de mettre en ligne une quantité astronomique de livres disponibles partout et tout le temps, modifiant parfois les pratiques : on ne lit plus que les titres ou les chapeaux. On y retrouve néanmoins des sites de partage au travers des booktubers ou d’autres qui démocratisent l’écriture comme wattpad. Diffuser et devenu tout aussi important que produire.

La société numérique fixe de nouvelles règles : ce qui est sur le web un jour reste pour toujours, on veut s’adresser à quelques personnes mais des millions d’autres peuvent nous voir, une information peut se diffuser à la vitesse de l’éclair… pas de panique néanmoins, internet est un vrai écosystème numérique où la culture participative est très innovante et le plaisir ainsi que la joie de créer sont bien réels.

L’économie du web ne pourra cependant pas perdurer en se reposant sur la publicité ou le commerce de datas, un système qui reste incertain pour le moment.

Les ateliers Bibdoc 37 : quatre ateliers étaient proposés aux participants

« L’apport de la lecture et des activités culturelles dans l’adolescence » par Mandarine Hugon, Maître de conférences en psychologie du développement et de l’éducation. Elle s’est attachée à définir ce qu’est l’adolescence d’un point de vue physique, cognitif, moral, social et affectif. Tout un ensemble de transformations qui vont influer sur les choix d’activités culturelles des adolescents.

« E-réputation, entre gestion et co-construction de ses identités virtuelles » par Philippe Godiveau, professeur en sciences du langage à l’université d’Orléans. Il a défini et présenté l’évolution de la notion d’identité. Une identité qui peut très facilement être définie à partir des datas récoltées par l’activité web de chacun : dis-moi ce que tu fais, je te dirai qui tu es ! Il met en garde évidemment sur les imprudences d’adolescents : photos intimes postées, mauvaises rencontres …Une e-réputation dont il faut apprendre à garder la maîtrise.

« Wikipédia, la validation de l’information et la structuration des données » par Olivier Morand de Wikimédia France. Le site figure parmi les dix sites les plus fréquentés de France, c’est l’une des principales sources d’information des internautes. C’est la raison pour laquelle il est intéressant de s’interroger sur l’encyclopédie collaborative : il y a ses partisans, des personnes plus sceptiques ou totalement hostiles. L’intervenant a apporté des éléments de réponse quant à l’organisation de la communauté wikipédienne alors même que jeunes et moins jeunes peuvent rencontrer des difficultés à évaluer la pertinence des informations sur le web.

« Les collections passerelles de la bibliothèque municipales d’Angers » par Claire Isnardon, responsable du secteur adultes et de la vidéothèque. En 2007 les bibliothécaires des pôles jeunesse et adultes décident de réunir des romans qui peuvent rapprocher adolescents et adultes dans un même plaisir de lire. A la bibliothèque municipale, un pictogramme est apposé sur les romans concernés pour mieux les identifier. Elles vont par ailleurs à la rencontre des lycéens dans les établissements scolaires d’Angers et organisent des rencontres à la médiathèque pour présenter leur sélection et échanger sur les livres lus.

Pour les personnes intéressées par des aménagements intérieurs, les sociétés Steelcase et Blanchet Dhuisme ont présenté une sélection de mobilier moderne ainsi que des propositions d’espaces d’apprentissage actif.