Cinq idées reçues sur les collections universitaires

Nicolas Di Méo

L’offre documentaire des bibliothèques universitaires est au cœur de leur activité. Les évolutions de ces dernières années liées tant aux pratiques qu’au contexte institutionnel les confrontent à de nouveaux enjeux : coexistence du papier et du numérique, valorisation des collections patrimoniales, médiation et accompagnement des usagers, évolution de l’offre et adaptation aux nouveaux usages…

The holdings at university libraries are at the heart of their remit. Developments in working practices and the broader institutional context in recent years have led such libraries to meet new issues head on, including managing paper and digital collections side by side, promoting heritage collections, expanding reader services, updating the profile of holdings, and adapting to new ways of using libraries.

En une quinzaine ou une vingtaine d’années, le monde universitaire français a connu de profonds changements : bouleversement du cadre institutionnel avec le vote de la loi LRU (2007) et le passage aux RCE (à partir de 2009), développement de l’évaluation et du financement sur projets, révolution numérique… Dans un paysage aussi mouvant, les BU ont dû adapter leur offre documentaire et de nouveaux enjeux sont apparus en matière d’acquisition, de gestion et de valorisation des collections. Quels sont-ils ? Tour d’horizon à travers l’examen de cinq idées reçues qui ont la vie dure.

1 • Le papier va disparaître

Cela fait presque deux décennies, maintenant, que l’on prédit, « dans les cinq prochaines années », la disparition des collections papier. Le numérique progresse irrésistiblement et, comme Hannibal sur Rome, s’apprête à fondre sur les dernières étagères des bibliothèques pour les vider des ouvrages poussiéreux qu’elles continuent d’abriter. De telles déclarations, assenées avec certitude, ne sont pas rares : « Pourquoi prévoir autant de rayonnages, alors qu’il n’y aura bientôt plus de livres ? » demandait récemment un programmiste dans le cadre d’un projet de learning centre. Ceux qui sont allés aux États-Unis en rapportent même des histoires étonnantes de bibliothèques sans ouvrages, tels ces voyageurs de l’entre-deux-guerres qui, non sans un frisson de plaisir, croyaient lire dans les métropoles américaines l’avenir d’un monde bientôt déshumanisé.

Il ne s’agit évidemment pas de nier la part croissante que représentent les documents numériques au sein des collections universitaires. À l’échelle d’un SCD comme celui de Strasbourg, par exemple, le papier ne compte plus que pour 25 % du budget annuel d’acquisition. Même en sciences humaines, l’offre d’e-books s’enrichit constamment (mais on serait tenté de faire remarquer que les catalogues des éditeurs papier ne sont pas en reste) et, chaque année, des revues franchissent le Rubicon en choisissant de passer au tout-numérique. La tendance est donc nette. Pourtant, les bibliothécaires, lorsqu’ils sont attentifs aux besoins exprimés par les usagers, se rendent compte que les choses ne sont pas aussi simples. Les étudiants ne sont pas tous équipés d’ordinateurs portables et il n’est pas certain qu’ils le soient dans un futur proche (le programmiste cité plus haut croyait que ce serait le cas, grâce à la munificence des conseils généraux et régionaux, sans se demander si les collectivités territoriales auraient les moyens d’une telle générosité). Les bons vieux manuels continuent de rencontrer un succès qui ne va pas dans le sens de l’histoire, au point que l’on se plaint souvent du manque d’exemplaires. En sciences humaines, où la monographie domine outrageusement, il se trouve toujours des gens bizarres pour préférer lire 300 ou 400 pages sur un livre plutôt que sur l’écran d’un smartphone… Mais au moins, dira-t-on, les périodiques papier, eux, sont une espèce en voie de disparition ! C’est possible. Pourtant, à Strasbourg (comme ailleurs, sans doute), après des années de baisse, les budgets d’abonnement tendent à stagner, voire à augmenter légèrement, non seulement à cause de la hausse des tarifs, mais aussi parce que des chercheurs viennent demander de nouvelles revues. Peut-être celles-ci, d’ici quelques années, n’existeront-elles plus que sous forme numérique ; mais, en attendant, il faut bien les acheter !

Le numérique est une belle invention. Il permet des usages à distance dont beaucoup de chercheurs, aujourd’hui, n’accepteraient plus de se passer. Mais, comme dirait Lénine, il démontre aussi parfaitement la tendance monopolistique du capitalisme, à travers le succès de quelques gros éditeurs qui se partagent l’essentiel du marché et obligent les bibliothèques à acquérir des bouquets de revues particulièrement fournis, alors que seuls quelques titres les intéressent vraiment. Les possibilités qu’offre l’outil sont ainsi, parfois, sinon annulées, du moins limitées par les clauses restrictives figurant dans les contrats et par la pression financière s’exerçant sur les établissements. Les négociations tarifaires menées par l’intermédiaire du consortium Couperin et la mise en place de licences nationales constituent autant d’initiatives destinées à lutter contre cet état de fait. La mutualisation des abonnements, en revanche, n’est pas forcément une solution efficace. Dans le cadre du site alsacien, une étude a été conduite afin d’évaluer l’intérêt d’achats groupés entre l’université de Strasbourg et les établissements qui lui sont associés (l’université de Haute-Alsace, la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg et l’INSA de Strasbourg). Les risques d’augmentation des coûts engendrés par les effets de seuil, la complexité et la lourdeur des mécanismes administratifs à mettre en œuvre et la variété des besoins des acteurs ont fait apparaître les limites de cette démarche ; seules quelques ressources seront finalement acquises en commun.

Dans de telles conditions, le papier, qui donne la possibilité de mener une politique documentaire ciblée, au plus près des attentes des usagers et n’engageant pas forcément des dépenses considérables, demeure un outil précieux pour construire une offre diversifiée, attentive aux besoins des étudiants comme à ceux des chercheurs. S’il n’est pas impossible que les livres finissent un jour par disparaître des rayonnages des bibliothèques, il n’est pas impensable non plus que s’établisse durablement, entre le papier et le numérique, une espèce de partage ou d’équilibre, une coexistence fondée non sur une concurrence qui n’a pas lieu d’être, mais sur une complémentarité à la fois ambitieuse et soutenable financièrement.

2 • Les BU n’ont pas de vocation patrimoniale

L’histoire est connue : à la suite des saisies révolutionnaires, on ne savait plus que faire des ouvrages confisqués aux collèges et aux universités, qui, sous l’Ancien Régime, étaient la plupart du temps gérés par des congrégations religieuses. Après un certain nombre d’hésitations, les documents en question ont été confiés aux municipalités, ce qui justifie aujourd’hui encore la présence de personnels rémunérés par l’État au sein des bibliothèques municipales classées. Les BU ne conserveraient donc que peu de fonds anciens et ne seraient guère concernées par les enjeux liés au patrimoine.

Il convient d’être plus nuancé. Tout d’abord, il existe de riches fonds patrimoniaux dans certaines bibliothèques relevant des établissements d’enseignement supérieur ou de la tutelle directe du MENESR. En Alsace, la BNU possède ainsi environ 1 100 000 documents antérieurs à 1920, dont de nombreux incunables, mais aussi des manuscrits, des monnaies et médailles, des ostraca, etc. Beaucoup de SCD, par ailleurs, abritent des documents précieux dans leurs réserves. L’enjeu n’est pas seulement de les conserver dans les meilleures conditions possibles, mais aussi de les rendre accessibles au plus grand nombre. C’est ce qui explique que les bibliothèques numériques patrimoniales se soient multipliées au cours des dix dernières années, dans un contexte financier plutôt favorable, puisque les budgets de l’ESR sont restés relativement stables, alors que ceux des autres administrations de l’État connaissaient parfois des coupes importantes. La demande patrimoniale elle-même ne fait que croître : elle émane aussi bien des instances de décision des universités, qui souhaitent mettre en valeur leur établissement (par exemple en numérisant une partie de leur patrimoine scientifique, notamment les thèses), que des chercheurs, qui souhaitent s’insérer dans le vaste mouvement des humanités numériques. Les bibliothécaires sont directement impliqués dans ces actions, de la sélection des fonds à la conduite des opérations de numérisation et à l’administration des solutions informatiques. Au SCD de Strasbourg, par exemple, la bibliothèque numérique emploie 4 agents (soit 2,5 ETP) et l’atelier de numérisation fonctionne en continu.

L’enjeu, cependant, n’est pas seulement de diffuser, mais aussi d’enrichir les documents mis en ligne. Les actions de numérisation cherchent à créer une plus-value scientifique qui peut se traduire par un travail de description spécifique : dans le cadre du contrat de site alsacien, le SCD de Strasbourg a lancé un chantier de numérisation de pièces de monnaie grecques et romaines, ainsi que de photographies d’archéologie datant du tournant des XIXe et XXe siècles. Des étudiants en master et en doctorat ont été recrutés pour créer des métadonnées permettant d’identifier et de décrire ces objets. Le projet répond, par ailleurs, à un souci épistémologique formulé par des chercheurs désireux d’écrire l’histoire de leur discipline, car le fonds donne une idée de la manière dont l’archéologie classique était enseignée dans les universités allemandes à l’époque impériale. Les bibliothèques numériques patrimoniales apparaissent ainsi comme les lieux privilégiés d’une mise en relation des collections et des spécialistes capables de les commenter, et non plus seulement comme de simples outils de diffusion de contenus patrimoniaux qui se suffiraient à eux-mêmes.

La question qui se pose alors est celle des services que les BU offrent aux chercheurs. La BNU, le SCD de l’université de Strasbourg et celui de l’université de Haute-Alsace sont en train de construire une infrastructure commune destinée à donner plus de visibilité aux documents qu’ils numérisent tout en proposant des outils permettant de mener à bien des projets d’éditorialisation de corpus, avec inclusion de commentaires, de notes, de liens ou de rebonds vers d’autres sites. Dans cette perspective, le rapport aux collections change quelque peu : il ne s’agit plus seulement de numériser ce que l’on possède dans ses magasins, mais de fournir la possibilité de moissonner des documents diffusés ailleurs, de pointer vers des contenus extérieurs – pourvu que ceux-ci soient librement réutilisables – pour reconstituer des corpus complets, en composer de nouveaux et, éventuellement, mettre en place des parcours répondant à des impératifs scientifiques ou pédagogiques.

3 • La médiation documentaire est inutile, car les usagers savent ce dont ils ont besoin

Troisième idée reçue : le public universitaire est un public expert, de sorte qu’il n’est pas nécessaire de l’accompagner dans ses recherches, sauf s’il le demande expressément. Quant aux méthodes pédagogiques en vigueur en France, qui se fondent encore souvent sur la sacralisation de la parole du professeur et n’incitent guère à effectuer des recherches personnelles, contrairement à ce que l’on observe en Angleterre ou aux États-Unis, elles ne stimulent probablement pas la prise d’initiative, mais elles permettent aux enseignants d’indiquer clairement aux étudiants ce qu’ils doivent lire ou ne pas lire, les fonds vers lesquels il leur faut se diriger s’ils veulent réussir leurs examens du premier coup. Le rôle des bibliothécaires serait alors, simplement, de veiller à ce que les acquisitions suivent d’aussi près que possible l’actualité des cours et de se tenir à la disposition des usagers lorsque ceux-ci ont des questions à poser.

On ne saurait se contenter d’une telle approche. Les collections universitaires, comme les autres, ont besoin d’être portées à la connaissance des publics pour lesquels elles ont été constituées. La première exigence concerne le signalement et le catalogage. Les projets de rétroconversion sont nombreux dans les BU aujourd’hui, mais ils ne sont pas toujours évidents à mener à bien, en raison du temps qu’ils nécessitent ou du coût qu’ils représentent lorsque les établissements n’ont pas d’autre choix que de recruter des contractuels. Les formations à la recherche documentaire, pour leur part, se sont développées au cours des dernières années : qu’elles soient ou non intégrées aux maquettes d’enseignement, elles répondent à un besoin évident chez les étudiants et l’on serait tenté de dire que beaucoup d’enseignants-chercheurs ne perdraient pas non plus leur temps s’ils y assistaient.

La médiation, cependant, ne se limite ni à la formation des usagers, ni au signalement des documents, même s’il s’agit là d’aspects essentiels. De la rematérialisation des collections numériques à l’organisation de conférences ou de débats (notamment à l’occasion de la publication d’ouvrages par des chercheurs de l’université), en passant par la constitution de tables d’actualités ou la mise en valeur de nouveautés sur le site de la bibliothèque, de nombreux dispositifs existent pour donner vie aux collections et attirer sur elles l’attention des lecteurs. Il serait souhaitable que les acquéreurs, en plus de leur connaissance des fonds et des disciplines dont ils ont la charge, développent systématiquement des compétences dans ce domaine. Lorsque les locaux le permettent, l’organisation d’un salon des ressources numériques, par exemple, peut constituer un excellent moyen de mettre en valeur la richesse documentaire d’un SCD. D’autres dispositifs peuvent également être cités : à l’université de Haute-Alsace, les étudiants disposent de portails personnalisés, conçus dans le cadre d’une collaboration entre les bibliothécaires et les enseignants, qui leur permettent, une fois qu’ils se sont identifiés, d’accéder directement à des contenus susceptibles de les intéresser. Affirmer qu’il est temps de passer d’une logique centrée sur les collections à une logique centrée sur les services est devenu un lieu commun du métier de bibliothécaire ; mais, derrière cette évolution, c’est la fonction d’accompagnement pédagogique dévolue aux bibliothèques universitaires qu’il convient de rappeler.

4 • Pas de place pour les loisirs en BU !

Une autre image couramment répandue est celle qui voit les BU comme des temples du savoir peuplés d’ouvrages austères dans lesquels se trouvent sinon les réponses aux grandes questions agitant la pensée humaine depuis des temps immémoriaux, du moins les réponses aux besoins plus immédiats des étudiants, soucieux de réussir leurs examens et d’obtenir leur diplôme. Certes, l’architecture et l’état de nos campus ne donnent pas une impression particulière de majesté, même si, grâce aux investissements des dix ou quinze dernières années, notamment dans le cadre de l’opération Campus, les bâtiments ont eu tendance à s’améliorer ; mais au moins, pense-t-on, les collections reflètent les exigences d’un savoir sérieux, académique, et n’ont pas vocation à servir au divertissement !

S’il ne fait aucun doute que la fonction première des bibliothèques universitaires est de répondre aux besoins de l’enseignement et de la recherche, il n’en demeure pas moins que les fonds « détente » rencontrent, la plupart du temps, un franc succès. Acheter des DVD en BU n’est plus – heureusement – un tabou et il n’est pas non plus incongru d’y trouver des bandes dessinées. Au fil des années, d’ailleurs, les documents de ce type sont devenus à leur tour des objets d’étude, de sorte que des raisons pédagogiques et scientifiques ont pu servir à justifier leur acquisition, dans un contexte de restriction budgétaire et de concurrence entre des documents jugés légitimes et d’autres qui le sont moins ; mais, même lorsqu’elles sont destinées à un pur usage récréatif, ces collections ont tout à fait leur place sur les étagères des BU.

En fait, la question dépasse les seules bibliothèques et concerne les universités dans leur ensemble. Contrairement aux campus américains, les campus français ne sont pas des lieux de vie. Souvent construits à l’écart des villes pour répondre à l’accroissement de la population étudiante dans les années 1960 et 1970, ils ont bénéficié du développement des transports en commun (tramways, métros…) dans les années 1990 et 2000, mais demeurent encore, en règle générale, très excentrés. Les services que l’on y trouve sont limités : peu de cafés, de restaurants, de librairies ; peu de lieux où prendre un verre et discuter ; en un mot, peu d’espaces agréables pour faire une pause ou passer un moment avec des amis. L’afflux d’étudiants dans les BU s’explique par le manque de places de travail, mais aussi d’endroits calmes où s’asseoir entre deux cours. Les bibliothécaires l’ont compris et ont entrepris de créer, là où ils le pouvaient, des espaces conviviaux. On ne va pas encore jusqu’à autoriser la nourriture et les boissons dans les salles de lecture, mais ce n’est pas l’envie qui manque… Dans cette perspective, les collections ont aussi un rôle à jouer : tout ce qui peut œuvrer au bien-être des étudiants, aider à lutter contre le stress et améliorer la qualité des journées passées sur le campus doit être encouragé. Les loisirs ont leur place à l’université, comme c’est le cas dans les grandes institutions américaines ou anglaises, celles qui occupent les premières places des classements internationaux. Bien entendu, il se trouvera toujours des esprits chagrins pour estimer que l’achat de jeux vidéo, par exemple, est une hérésie en BU : qu’ils se consolent en se disant qu’un jour ou l’autre, quelqu’un finira bien par venir les réclamer aussi pour un projet de recherche…

5 • Il faut tout garder !

Ne le cachons pas, il est une tâche ingrate en BU, qui exige beaucoup de doigté et de sens de la diplomatie, c’est le désherbage. Qui ne s’est déjà heurté à l’incompréhension – parfois désagréable, voire franchement agressive – d’un enseignant refusant d’admettre que l’on puisse se débarrasser de livres ? J’ai déjà entendu, pour ma part, une simple opération de pilon de manuels obsolètes être comparée aux « autodafés de Nuremberg » (pourquoi ceux de Nuremberg en particulier, alors que des bûchers ont été allumés dans toute l’Allemagne ? Je l’ignore). Face à de tels excès, le bibliothécaire oscille entre ironie et indignation… Il n’empêche que l’idée est tenace : on ne jette pas un livre ; on ne se débarrasse pas d’un numéro de périodique, fût-il par ailleurs en ligne. Certes, un manuel périmé peut toujours être utile à un historien des sciences ; mais le cas est rare, très rare même, et il existe d’autres moyens de se procurer l’ouvrage en question. En fait, il s’agit, comme souvent, d’une affaire de représentation : les bibliothèques universitaires auraient vocation à rassembler la totalité du savoir en autant d’exemplaires que possible et il ne serait pas concevable de se débarrasser du moindre fragment de cette manne précieuse. Évidemment, tout le monde ne partage pas une telle vision des choses, mais il se trouve quand même beaucoup d’irréductibles…

Les collections universitaires, comme les autres, ont besoin de vivre, de se renouveler. La temporalité n’est bien entendu pas la même selon les disciplines : certains ouvrages se périment plus vite que d’autres. La fracture entre les sciences dites dures et les sciences humaines et sociales n’est pas aussi évidente que l’on pourrait le croire : l’économie et l’histoire politique évoluent rapidement, alors que les fondements de la physique et de la chimie ne changent pas tous les jours. Quoi qu’il en soit, tout garder constitue un vœu pieux : des contraintes de place et des contraintes financières s’y opposent, si bien qu’il est difficile de concevoir une véritable politique d’acquisition sans politique de conservation et de désherbage. Au SCD de Strasbourg, une opération de grande ampleur, appelée eplouribousse (« e pluribus unum »), a été menée entre 2012 et 2015, afin de dédoublonner les collections de périodiques du réseau. L’objectif était de ne garder qu’un seul exemplaire de chaque périodique papier – sauf lorsque la présence de plusieurs exemplaires se justifiait en raison d’une demande très forte – après avoir reconstitué des résultantes aussi complètes que possible à l’aide des morceaux de collections présents dans les différentes bibliothèques intégrées.

Proposer une offre documentaire lisible, régulièrement actualisée, adaptée aux besoins de l’enseignement et de la recherche, telle est la ligne directrice que se fixent les BU. Cela les conduit à nouer des contacts étroits avec les enseignants-chercheurs, non seulement pour identifier leurs attentes, mais aussi pour bénéficier de sources de financement variées : plutôt que de rechercher une exhaustivité impossible à atteindre en comptant uniquement sur les budgets de fonctionnement, amenés à se contracter ou, dans le meilleur des cas, à stagner, mieux vaut, lorsque l’occasion se présente, compléter des fonds identifiés comme stratégiques en s’appuyant sur l’expertise des chercheurs et en bénéficiant de l’effet d’aubaine des financements sur projets. Les bibliothécaires ont intérêt à se rapprocher des équipes de recherche pour que les dossiers déposés par ces dernières – que ce soit auprès de l’ANR, des Idex ou d’autres structures – comportent un volet documentaire. Le dispositif Collex, qui est en train de se substituer à celui des Cadist sous l’impulsion du ministère, repose d’ailleurs sur une logique voisine, qui lie étroitement les acquisitions au suivi des besoins des laboratoires et au développement des services aux usagers.