Éditorial

Anne-Marie Bertrand

Après le dossier « Urgences universitaires », publié fin 2009, il nous a paru nécessaire de faire un nouveau point d’étape sur la documentation à l’université.

Nous ne sommes plus dans l’urgence, dans les urgences. Mais la situation des universités continue à évoluer à grands pas : depuis 2009, nous avons vu apparaître, croître et embellir, puis se faner (pour certains) les PRES, les EquipEx, les LabEx, les IdEx, les universités fédérales, confédérales, supra-fédérales, infra-fédérales, trans-fédérales, les grandes universités, les universités de proximité, le plan Campus, le plan Réussite en licence, et j’en oublie. Sans compter nos duettistes LRU et RCE.

Côté documentation, nous apprîmes, de même, à nommer la MISTRD, la BSN, l’Istex, Calames, Numes, le Schéma numérique des bibliothèques, les Learning Centres, Europeana, le Comité stratégique bibliographique, les liseuses, les iPad, Kobo et autres Kindle…

Dans ce tourbillon de nouveautés, il était temps de faire le point.

Ce dossier le fait sous différents angles. D’abord, une interrogation sur les politiques documentaires. Politique au sens le plus large (Alain Fernex) ou au sens plus professionnel, notamment sur les relations entre papier et numérique ou entre collections pour l’enseignement et collections pour la recherche. Ensuite, nous avons sollicité les contributeurs du dossier de 2009 pour que, avec trois ans de recul supplémentaires, ils renouvellent leur analyse ou leur approche. Puis, trois articles reviennent sur la question des usages, en particulier sur la lecture numérique. Enfin, pour fixer les idées ou éclairer nos collègues qui ne travaillent pas à l’université, nous abordons quelques dispositifs, nouveaux, matures ou à régénérer (BSN, Istex, l’Abes, les Cadist).

Ce dossier très complet est sans doute plus sombre que celui de 2009 : la crise est passée par là et aussi la mise en œuvre de la loi LRU, qui était encore dans ses premiers balbutiements lors du précédent dossier. Désormais, toutes les universités (sauf une) sont passées aux responsabilités et compétences élargies. Et les effets, pour les bibliothèques, semblent en être mitigés : ceux qui criaient au loup sont rassurés, ceux qui montraient de l’enthousiasme sont plus inquiets.

Entre les lignes ou très explicitement, un même souci traverse bien des articles : les universités et leurs bibliothèques ont-elles encore, vont-elles continuer à avoir les moyens de desservir tous leurs publics ou cette ambition doit-elle être revue à l’aune des fortes contraintes budgétaires d’aujourd’hui ? Le moment des choix va-t-il pouvoir être esquivé plus longtemps ? Les branches du ciseau sont-elles en train de se refermer ou peuvent-elles encore être écartées ?

En somme (et une fois encore), les bibliothèques des universités vont-elles pouvoir faire la preuve de leur utilité, de leur nécessité, et être considérées partout comme des acteurs stratégiques dans l’écosystème de la production et de la transmission des savoirs ?

Sans attendre encore trois ans, nous reviendrons dès cette année sur ces questions, en particulier sur les Assises de l’enseignement supérieur  1 et la loi encore en attente à l’heure où j’écris ces lignes.