6e Journée sur le livre électronique (Couperin)

Sébastien Respingue-Perrin

sebastien.respingue-perrin@dauphine.fr

Cette journée, organisée par la Cellule e-books de Couperin (CeB), s’est tenue le 5 avril 2012 à la Bibliothèque universitaire des langues et civilisations (Bulac). Son thème portait sur « l’intégration du livre électronique dans l’écosystème de l’établissement » : de quelles façons ce support s’articule avec l’environnement administratif, technique et documentaire des établissements.

La journée était organisée autour de séances plénières et de six ateliers. Un grand témoin, Hervé Le Crosnier (université de Caen), était chargé de présenter et synthétiser les aspects les plus saillants des échanges. Signe de l’intérêt pour le sujet, près de 200 personnes s’étaient inscrites pour assister à ce programme prometteur  1.

Le livre électronique, définition et enjeux

Hervé Le Crosnier a débuté la journée en interrogeant la distinction entre « lecture attention » et « lecture dispersion ». Livre papier et électronique sont-ils des médias concurrents ? Chaque support devient le véhicule privilégié d’un domaine éditorial : les manuels, les encyclopédies ou les œuvres du domaine public dans le cas des e-books ? Dans un contexte de « guerre des liseuses », l’ouverture des formats est un préalable indispensable au développement du marché. Pour ce qui concerne les bibliothèques, la liberté de gestion est remise en cause (bouquets pré-paramétrés, archivage incertain, fichiers chronodégradables...). Par ailleurs, en lançant un service de prêt, Amazon devient-il « bibliothèque » ? Ce serait vite oublier les caractéristiques de cette dernière : anonymisation, pérennité des collections et intégration des savoirs. On en saurait donc trop peu sur le livre électronique pour le réglementer, mais il faut viser à maintenir la gratuité de l’accès à l’information.

Six ateliers pour un panorama des questions liées aux e-books

Guillaume Hatt (École nationale des chartes, CeB) a rappelé l’actualité et les interrogations autour du livre électronique, ce qui était l’objet des ateliers :

  • Son encadrement juridique est mouvant (loi sur le prix unique et réduction du taux de TVA). Par ailleurs, la question des marchés publics se pose avec insistance.
  • La médiation du livre est modifiée. Quelle forme prend-elle à l’ère du web 2.0 (annoter, partager...).
  • Son signalement en bibliothèque dépend des outils disponibles sur le marché. Un retour d’expérience de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) complétait cet atelier.
  • Les tablettes numériques permettent l’arrivée de nouveaux services, mais les contraintes causées par des systèmes propriétaires demeurent.
  • L’édition pédagogique est extrêmement variée. Quelle offre pour les bibliothèques dans l’achat de manuels électroniques ?
  • Les DRM cherchent à éviter le piratage, mais sont contournées. Le remède n’aggrave-t-il pas le mal ?

Un bouleversement des politiques documentaires ?

Pierre-Yves Cachard (université du Havre) a expliqué les raisons de son choix pour le développement d’une offre d’e-books et pour l’acquisition titre à titre. Principaux inconvénients : le coût et les DRM. Ces dernières sont un obstacle à la consultation, obligeant les lecteurs à « jongler » avec les formats. L’e-book incite à créer des services pour répondre aux besoins qu’il engendre, principalement en termes de formation des personnels ou du public. Stéphanie Gasnot (IEP Paris) a détaillé l’offre éditoriale de son établissement. Son intervention a abordé de nouveaux sujets, comme les licences nationales ou les difficultés causées par le développement de l’électronique pour les centres d’acquisition et de diffusion de l’information scientifique et technique – Cadist (interdiction du PEB électronique).

Inventer de nouveaux accès

La seconde partie des séances plénières s’intitulait : « Plateformes multisupports, portails et Discovery Tools (DT) : que reste-t-il du livre électronique ? ».

Annie Hélot (université de Caen, CeB) s’est prêtée à l’exercice délicat de présenter les travaux de Chérifa Boukacem (Urfist de Lyon) sur les DT. Ces derniers se situent à la confluence d’une réflexion englobant la gestion des collections, des usages ou des outils documentaires.

Une démonstration de la plate-forme Springerlink a montré l’impact de l’environnement technique sur le livre électronique. L’unité de ce dernier disparaît après une interrogation par le moteur de recherche (affichage par chapitre).

Romain Le Nézet (Paris 3) et Christophe Pion (Paris 7) ont présenté les outils documentaires de leurs établissements. Le portail Primo du SCD Paris 3, mis en production en 2011, référence près de 125 000 ouvrages. Romain Le Nézet a insisté sur la nécessité d’articuler différentes méthodes pour signaler de façon exhaustive les collections électroniques : import XML, enrichissement de la base de connaissance… L’évolution vers Primo Central fait espérer une meilleure exploitation des métadonnées, en dépit de difficultés (rigidité, interfaçage avec d’autres bases…).

Christophe Pion a présenté Summon, dont l’acquisition a permis de disposer d’une base de connaissance. Ses limites actuelles indiquent les marges d’évolution : signalement des collections dépendant des fournisseurs, affichage mélangeant livres électroniques et papier…

Pour conclure, une table ronde a résumé le contenu des ateliers. Hervé Le Crosnier a souligné que le maître mot de la journée restera « complexe » et a relevé l’absence de la notion de « gratuité » dans les débats.

La CeB a mis en ligne les différents supports d’interventions  2, complétés par la publication prochaine d’un livre, électronique, des actes de la journée. •