Libre parcours
Journée professionnelle du salon de montreuil
Claudine Hervouët
Faire un compte rendu de la journée professionnelle du 27e Salon du livre et de la presse jeunesse de Seine-Saint-Denis qui s’est tenue le 5 décembre 2011 à Montreuil ? Armée d’un programme, je pris mes marques, guidée spatialement par l’affichage de « pôles » (Ados, Art, Cinéma d’animation, Théâtre, BD, Numérique) ; matériellement par la présence centrale au niveau – 1 d’une arène de cirque : murs, piste et gradins ; typologiquement par des intitulés : escale, séance découverte, rencontre, atelier ; intellectuellement par le rattachement, le cas échéant, à « L’école du livre de jeunesse ». Mais ce qui rendait la mission difficile était l’abondance des propositions obligeant à des choix frustrants.
9 h 30. Beaucoup de monde à cette première rencontre, « Lecture, lecteurs de demain : le numérique change-t-il la donne ? », qui a proposé un guidage bien utile dans la forêt du numérique. Avec, comme préalable significatif, un point sur les « taux d’équipement », suivi de démonstrations. Une remarque : parmi les réalisations – pardon ! – les projets présentés, le plus inventif, le plus beau, celui sur lequel on avait envie de s’attarder, ne comportait aucun texte, ne se référait ni en amont ni en aval à aucun livre et se donnait comme objectif de faire aimer la musique. Les réponses aux questions sur les investissements financiers et la viabilité économique restèrent assez floues et en réponse à une question sur les droits en bibliothèque nous entendîmes : « Venez me voir sur mon stand. » De même pour le statut et la rémunération des auteurs – pardon ! – de l’équipe. Car un « projet » est « d’équipe ». Le seul réconfort (?) était sans doute de constater que le tâtonnement est partagé.
10 h 30.« L’art est un jeu d’enfant. »
Deux éditeurs présentaient leur production ramenée à une intention – pédagogique – et à un moyen : le lu-di-que. Après « projet », le glossaire 2012 des mots incontournables, entendus, battus et rebattus s’enrichissait. Heureusement, il y avait à voir, et du meilleur.
11 h. Attirée à une démonstration par une annonce fallacieuse : « Le premier Applilivre, où quand l’iPhone devient intelligent grâce au livre », nous pûmes constater que l’inverse n’était pas vrai.
La matinée était déjà bien avancée et, sans avoir démérité, j’avais déjà raté quinze rendez-vous. À vrai dire, certains semblaient voués à l’intime. Échanges entre un auteur et son éditeur, entre deux auteurs, entre un journaliste et un auteur, entre un auteur et son essai, entre un auteur et une bibliothécaire, présentations d’une installation multimédia, de deux DVD, d’un titre, etc. Néanmoins, je regrettai particulièrement d’avoir manqué « Café, croissants, rémunération, jus d’orange », mais gageons qu’on en reparlera, de la rémunération de l’auteur...
Suivant la foule vers une table ronde à la distribution nombreuse, je me dirigeai vers « l’espace Circus ».
11 h 15. « Quelles littératures, quelles lectures pour les 8-12 ans ? »
Avec une journaliste compétente en Madame Loyal. Éditeurs et bibliothécaire tinrent leur rôle, c’était du sérieux. Mais je dus partir avant la fin pour ne pas rater la séquence suivante.
12 h.« Les avant-premières de l’édition. Gallimard Jeunesse : éditer des livres documentaires aujourd’hui. »
Un pari impossible ? En tout cas un festival, exemples à l’appui, de ce que le livre peut offrir en termes de spécificités, de complémentarités, voire d’assimilation féconde des sortilèges de la concurrence (numérique).
Pendant ce temps, je perdais huit occasions de tout savoir sur « le passage de la littérature ado à la littérature adulte », « les politiques éditoriales en bande dessinée jeunesse », « les Pépites de la création numérique », « les nouveaux projets d’adaptation », d’apprendre que « Théâtrales jeunesse a 10 ans », ce qui se passe « quand les héros du livre de jeunesse s’animent » et « quand ils ont su… », et de réfléchir à « la place pour le livre jeunesse dans les médias et pour l’enfant dans la société aujourd’hui en France ».
Le temps d’un déjeuner et d’un parcours rapide entre les stands, ce furent encore dix-neuf (!) rendez-vous qui s’égrainèrent. Je repris pied avec :
15 h. « La Maison est en carton, déjà 5 ans ! »
En guise de dessert, une gourmandise. Que faire avec l’image ? Beaucoup de choses et même des livres. Car là, si la narration est présente, l’image est la première, et ses utilisations originales et inventives. On était rassuré, si on avait besoin de l’être, par la primauté accordée ici au support papier/carton et par la polyvalence d’illustrateurs qui, par ailleurs, font honneur à l’album.
15 h 45. « Collection Encrage, une autre manière de jeter l’ancre. »
Une autre manière, vraiment ? Il nous a semblé au contraire retrouver les fondamentaux de la création et de l’édition.
À l’heure de la sortie, trois rendez-vous s’ajoutaient aux délaissés.
Au terme de ce parcours forcément erratique, partiel et partial, dans un programme aux propositions foisonnantes, on regrette l’absence d’un rendez-vous dans une vaste (mais qui s’avère toujours trop petite) salle, comme on en a connu, qui permette au public varié de cette journée professionnelle de se retrouver en nombre autour d’une problématique commune pour échanger, voire se livrer aux délices des « débats animés ». Quoi de plus fédérateur qu’une bonne polémique ? Certes, une journée d’étude se tenait en parallèle (encore !), consacrée au numérique (ça alors !), mais il fallait choisir. Que sera le 28e Salon, projet des projets ? Il sera numérique ou ne sera pas. Mais, plus précisément, comment les différentes offres auront-elles évolué ? Quelles hybridations les serres des éditeurs auront-elles produites ? La bibliothèque est-elle un monument en danger ? Se sera-t-elle révélée soluble dans le numérique ? La suite en 2013. •