Colloque annuel de l’association SHARP
Society for the History of Authorship, Reading and Publishing
Marie-Françoise Cachin
SHARP est une association internationale qui regroupe de nombreux chercheurs en histoire du livre, de l’édition et de la lecture, comme son nom l’indique (Association pour l’histoire des auteurs, de la lecture et de l’édition). Pour ses adhérents, le colloque annuel est une sorte de grand-messe à laquelle il est utile, sinon indispensable, d’assister, ce qui explique la présence de plus de 250 participants. L’atmosphère y est toujours très conviviale et chaleureuse, et c’est avec grand plaisir qu’universitaires, bibliothécaires, jeunes chercheurs, venant de diverses spécialités et de pays différents, s’y retrouvent ou se découvrent.
Les congrès annuels ont lieu alternativement en Amérique du Nord et en Europe, en attendant d’aller dans d’autres régions du monde. Depuis quelques années, un thème central est proposé par les organisateurs, par exemple en 2006 à La Haye « Trading Books – Trading Ideas » (Commerce du livre, commerce des idées), ou en 2010 à Helsinki « Book Culture from Below » (La culture du livre vue d’en bas). Le thème n’étant jamais limitatif, des communications sur d’autres sujets sont toujours possibles. Le congrès de 2011 a eu lieu à Washington DC du 14 au 17 juillet 2011 autour du thème « The Book in Art and Science ».
La journée d’ouverture du 14 juillet offrait à ceux qui le souhaitaient des visites de diverses bibliothèques de Washington, en particulier la section « Rare Book and Special Collections » de la Library of Congress. Elle s’est terminée par la conférence de Jonatham Topham intitulée « Why the History of Science Matters to Book History » (Pourquoi l’histoire des sciences est importante pour l’histoire du livre). L’orateur a mis en évidence l’importance des publications scientifiques qui permettent la diffusion des savoirs et des découvertes.
Durant les trois jours qui ont suivi, les présents ont eu un riche menu de quelque 190 communications, organisées en sessions regroupant en moyenne trois d’entre elles en fonction de leur sujet, à raison de vingt minutes chacune, suivie d’une discussion. Et les sujets ne manquaient pas : la publication d’œuvres afro-américaines, la censure, la lecture et les lecteurs, les bibliothèques, l’architecture du livre, les illustrations, la reliure, les rapports texte/image, l’édition musicale et artistique, le commerce du livre, la circulation des textes et les traductions, les périodiques et les collections, sans oublier le livre numérique, les projets de numérisation et les bases de données informatiques. D’où une certaine frustration, en raison de l’existence inévitable de sessions parallèles parmi lesquelles il faut choisir. Ce choix se fait en fonction de ses propres intérêts, de la période étudiée ou du pays considéré, car il n’y a pas de limitations à cet égard. Par exemple, cette année, on a pu entendre un exposé sur l’utilisation des initiales ornementales par les imprimeurs hollandais entre 1541 et 1600, ou un autre sur les lectures d’un missionnaire en Ouganda entre 1896 et 1918.
Heureusement, les conférences plénières rassemblent tous les participants et cette année, il y en eut quatre : la première par Elizabeth L. Eisenstein intitulée « From Divine Art to Printing Machine and Beyond » (De l’art divin à la machine à imprimer et au-delà), la deuxième par Ian Gadd sur « Book History and the Organization of the Early Modern English Book Trade » (L’histoire du livre et l’organisation du commerce du livre anglais au début de la période moderne), la troisième par un groupe de quatre bibliothécaires intitulée « Educating the Next Generation » (Éduquer la prochaine génération) et la dernière, présentée par cinq universitaires, a donné lieu a une discussion sur « Digital Technology ».
Parmi toutes les communications, seulement une dizaine, parfois une douzaine, seront reprises et développées pour publication dans le volume annuel de Book History, publié par une presse universitaire américaine. On peut regretter de ne pas savoir où paraissent certaines des autres communications auxquelles on a pu s’intéresser, mais il est vrai que certaines sont présentées comme « work in progress » (ouvrage en cours) lorsqu’il s’agit d’une recherche destinée à un ouvrage à paraître ultérieurement. Les discussions dans le cadre des sessions ou en dehors, lors des pauses et des réceptions, permettent de nouer des contacts intéressants, voire d’établir des relations et des échanges durables.
SHARP dispose aussi d’un site web très riche 1 offrant de nombreuses ressources bibliographiques sur le domaine ainsi qu’un forum électronique, SHARP-L, auquel on peut avoir accès sans avoir à adhérer à l’association. En revanche, seuls les adhérents reçoivent le bulletin trimestriel Sharp News qui propose informations, comptes rendus de colloques sur le livre et sur les ouvrages parus dans ce domaine.
L’annonce du congrès de 2012 qui aura lieu en Irlande, à Dublin, est déjà sur le site. Il a pour thème principal « The Battle for Books » (La bataille pour les livres) et la date limite pour proposer une communication est le 30 novembre prochain. Participer à un congrès annuel de SHARP est une expérience gratifiante à divers égards. Seule ombre au tableau : le coût en général assez élevé de la participation (inscription au congrès, plus frais de voyage et de séjour) mais des aides doivent et peuvent être trouvées. L’aventure mérite certainement d’être tentée. •