Le nouvel environnement administratif des bibliothèques universitaires
Une journée d'étude à Toulouse
Agnès Bach
Le 11 octobre dernier, le centre de formation aux carrières des bibliothèques Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon 1 organisait un séminaire sur le nouvel environnement administratif des bibliothèques universitaires, séminaire qui a permis de situer les évolutions locales dans un contexte national.
La loi LRU : contexte et enjeux
En préambule, Isabelle Gras 2 a rappelé que l’autonomie des universités s’inscrit à la fois dans un long processus historique et dans le contexte international. Dès 1968, la loi Faure 3 a eu pour objectif de favoriser l’autonomie administrative, financière et pédagogique des universités. En 1984, la loi Savary 4 a accru les pouvoirs du président de l’université grâce à la création des trois conseils, et a instauré une politique de contractualisation. Enfin, en 2001, la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) préfigure l’élargissement des responsabilités des acteurs publics. Par ailleurs, la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, dite loi LRU 5 s’inscrit dans un contexte européen où l’université est de plus en perçue comme un enjeu stratégique pour l’économie. Les universités doivent devenir performantes et compétitives, elles doivent pouvoir s’évaluer et se comparer. La loi LRU abonde pleinement dans le sens de cette culture du résultat : elle met en œuvre les principes d’une gouvernance moderne où l’État évalue, régule et responsabilise les acteurs par une pratique de contractualisation. C’est dans ce nouveau contexte culturel et organisationnel que les bibliothèques universitaires doivent trouver leur place.
La gestion des ressources humaines des universités dans le cadre de la loi LRU
L’université Toulouse 1 Capitole est passée aux responsabilités et compétences élargies (RCE) le 1er janvier 2009. Hélène Calmes, responsable de la gestion des ressources humaines dans cette université, présente un bilan positif en ce qui concerne la gestion des personnels.
Juste avant le passage aux RCE, la masse salariale a été déterminée à partir des effectifs en poste à l’université Toulouse 1, avec une prise en compte des évolutions prochaines, notamment les promotions de grade et changements d’échelon. Le passage aux responsabilités et compétences élargies a permis une plus grande souplesse de gestion, et les moyens alloués sont conformes aux besoins actuels.
Néanmoins, à terme, n’encourt-on pas un véritable risque sur le plan de la mobilité des fonctionnaires ? En cas de mutation, les fonctionnaires en fin de carrière ne seront-ils pas systématiquement écartés parce que trop coûteux pour l’université qui doit les accueillir ?
Premiers bilans pour les bibliothèques universitaires : quatre exemples
À Strasbourg, les présidents des universités ont décidé de fusionner en une université unique au 1er janvier 2009. Un bon dialogue de gestion s’est rapidement instauré entre le président et le directeur du service commun de la documentation (SCD). Malgré une situation de départ complexe, la fusion a aplani les problèmes. Le budget du SCD est en hausse, la politique documentaire est très ambitieuse en matière de recherche ; par contre, aucun crédit n’a été versé au SCD dans le cadre du plan « Réussite en licence ».
À Bordeaux se trouvent quatre services communs de la documentation et un service interétablissements de coopération documentaire (Sicod) qui a été transféré au pôle de recherche et d’enseignement supérieur (PRES). Les universités Bordeaux 1 et 2 sont passées aux RCE, celle de Bordeaux 4 passera aux responsabilités et compétences élargies en janvier 2011 et Bordeaux 3 n’a pas encore fait de choix. La situation est contrastée, mais une convergence politique et universitaire forte conduit l’ensemble des universités et des services communs de la documentation vers l’union. Les missions documentaires du Sicod et des services communs de la documentation sont reconnues et bien intégrées.
À Toulouse 1, un pôle de recherche et d’enseignement supérieur a été créé en mars 2007 par six établissements fondateurs, selon des principes de coopération et non pas de fusion. Le service interétablissements de coopération documentaire a été intégré au pôle de recherche et d’enseignement supérieur en janvier 2008. À Toulouse 1, la documentation est inscrite dans le contrat d’établissement, le service commun de la documentation possède un budget, mais l’université a du mal à s’orienter vers une vision stratégique de la documentation.
À Montpellier, la situation est atypique : une bibliothèque interuniversitaire qui dessert trois universités. La présidence des conseils de la documentation est assurée à tour de rôle par chacun des présidents d’université. La bibliothèque interuniversitaire constitue en quelque sorte un SCD fusionné, alors que les universités ne le sont pas, ce qui rend très difficile l’élaboration d’une politique documentaire. Les personnels de la BIU sont rattachés à Montpellier 3, qui n’est pas encore passée aux responsabilités et compétences élargies, contrairement à Montpellier 1 et 2, mais les personnels travaillent pour trois universités différentes ! Le fait que les trois universités ne soient pas passées aux RCE en même temps complique un peu plus la situation. Le budget du service commun de la documentation est simplement reconduit à l’identique. L’inadéquation entre le cadre institutionnel de la BIU et le nouveau dispositif juridique de la LRU est patente.
En conclusion, la fusion des universités ou leur bonne entente sont source de dynamisme pour les universités comme pour leurs services communs de la documentation. Le contexte politique universitaire tout comme les structures administratives pèsent désormais de tout leur poids sur le bon fonctionnement des bibliothèques universitaires. •