E-Bibliothèques : les bibliothèques françaises face à l’arrivée du numérique
Anne-Marie Bertrand
Le 26 mars dernier, s’est tenue dans le cadre du Salon du livre une table ronde intitulée « E-Bibliothèques : les bibliothèques françaises face à l’arrivée du numérique », organisée dans le cadre des Lectures de dem@in (sic – parce que les Lectures de demain, avec un a, c’est plouc !).
Devant une salle pas tout à fait pleine, Jérôme Kalfon (SCD Paris Descartes), David Liziard (médiathèque d’Issy-les-Moulineaux) et Frédéric Martin (BnF) ont évoqué quelques-uns des « nouveaux » usages engendrés par le numérique. Ceux qui s’attendaient à ce que l’on parle des usages de lecture, d’accès à l’information ou de stockage de l’information, en auront été presque pour leurs frais. Car c’est d’abord des producteurs et diffuseurs d’information qu’il a été question.
Jérôme Kalfon, dans une intervention très claire, a présenté l’activité de publication des chercheurs, aujourd’hui plus que jamais « enjeu majeur : si on ne publie pas, on n’existe pas », d’autant plus que l’évaluation de l’activité scientifique est largement basée sur une approche bibliométrique. Le modèle économique des revues numériques constitua la deuxième partie de son intervention : inflation constante des coûts (environ 10 % par an), système des bouquets (pas de liberté de choix, étranglement des petits éditeurs), licences d’utilisation (on paye mais on ne possède pas), organisation des acheteurs en consortium pour redonner de la marge de négociation dans ce système oligopolistique, développement des archives ouvertes.
Une expérience de prêt de liseuses électroniques
David Liziard a rendu compte d’une expérimentation de prêt de liseuses menée à Issy-les-Moulineaux depuis janvier 2010. Pas moins de 16 liseuses électroniques (Sony et Bookeen) sont prêtées aux lecteurs de la médiathèque pendant trois semaines, avec 200 fichiers gratuits (romans classiques, théâtre, histoire, tous ouvrages libres de droits). Les retours sont bons (mais l’expérience récente et le nombre d’usagers touchés faible) : la prise en main, disent les expérimentateurs, est facile, le confort de lecture est bon, mais davantage de fonctionnalités sont attendues (pas de recherche en plein texte, pas de possibilité d’annoter, pas de liens hypertexte) et surtout des nouveautés. Conclusion des usagers : on est contents d’avoir pu essayer la liseuse, mais on va attendre que ce soit moins cher et plus performant avant d’en acheter une…
Frédéric Martin présenta Gallica, son alimentation et sa fréquentation. Si, à la fin des années 1990, la bibliothèque était enrichie d’environ 10 000 documents par an, on est aujourd’hui sur un rythme décuplé – environ 100 000 documents par an. La collection est riche de plus d’un million de documents. Les usages sont en hausse constante, avec un pic de 23 000 visites en une journée. Les visiteurs à distance sont différents de ceux qui viennent sur place : avec un plus grand éventail d’âge (plus de jeunes, plus de vieux) et d’origine géographique (plus d’étrangers).
Rien de bien bouleversant dans tout cela. Une explication, peut-être : le Salon du livre a, à peu près, renoncé à son volet professionnel, et toutes les conférences (même celles du lundi) sont désormais grand public. Il s’agissait là, dans cette conférence, d’une bonne vulgarisation. C’est déjà bien. Mais un peu frustrant.