Library Juice Concentrate
Duluth, Minnesota, Library Juice Press, 2006, 238 p., 23 cm
ISBN 978-0-9778-6173-6 : 25 $
Library Juice était une revue professionnelle américaine, diffusée sur internet entre 1998 et 2005, puis transformée un blog en 2006. Au tournant du millénaire, elle abordait le changement des modes de travail et le positionnement de la bibliothèque suite à l’émergence des technologies 2.0, non dans un esprit de rupture mais bien de continuité de la profession. Prudent, Rory Litwin, rédacteur en chef, démontre ainsi que les valeurs et les missions du métier n’ont pas changé fondamentalement. Il s’oppose de manière construite et argumentée au discours technophile que pouvait prendre la littérature professionnelle et à la tendance qu’auraient certains collègues à vouloir considérer que tout commence avec eux.
Rory Litwin rassemble dans son ouvrage une sélection choisie des contributions en ligne, entretiens, manifestes, articles de fond, citations. C’est pour lui l’occasion de souligner les fondamentaux des bibliothèques, confrontant nos missions au prisme de la technologie (qu’est-ce qu’être neutre et objectif ? Qu’est-ce que l’information aujourd’hui ? Quels sont les atouts de l’imprimé ?). C’est aussi l’occasion d’aborder des questions professionnelles : la position des institutions devant les projets de numérisation et notamment l’annonce du projet Google Print – devenu depuis Google Books ; les enjeux des normes et des métadonnées dans la circulation de l’information ; le respect des données privées dans les outils du web 2.0 ; la protection de la diversité de l’information alors qu’éclatait la guerre en Irak... En filigrane, on lit une critique du « professionnel » qui se cacherait derrière l’image flatteuse et illusoire de « spécialiste de contenus », éloignée de ses réelles capacités à caractériser et contextualiser l’information, incapable de capitaliser les apports de toute une profession.
Un ouvrage en somme très marqué par son époque, résonnant de démocratie, droits humains, économie de l’information, anarchie ou Cuba, mais dont la lecture se révèle encore utile.
Thomas Chaimbault