Doom or bloom, reinventing the library in the digital age
Rêve ou cauchemar, réinventer la bibliothèque à l’âge du numérique
Anissa Rachef
Le 29 octobre 2009, l’Institut français du Royaume-Uni et ses homologues européens donnaient rendez-vous aux professionnels du livre venus d’horizons divers autour de l’avenir des bibliothèques, à l’invitation du réseau European Cultural Institutes Librarians.
Projet Europeana : avancées en Espagne et au Portugal, innovation en Pologne et en Allemagne
Si on note la richesse de documents iconographiques proposés à ce stade par Europeana, on constate en revanche la rareté de contenus en plein texte. Jonathan Purday, de l’équipe d’Europeana, souligne que la Commission se fixe pour objectif la création d’un Portail paneuropéen, dans un but éducatif et culturel, selon trois axes principaux : conservation, collecte collégiale et participative des ressources et harmonisation en vue de la création d’une plateforme du « nouveau savoir » et de la « nouvelle information ».
La bibliothèque Computense de Madrid ayant été la première bibliothèque non anglo-saxonne à rejoindre le « GoogleBooks Project », Manuela Palafox, qui la représentait, a rappelé le bénéfice acquis en terme de notoriété de la langue espagnole et d’accessibilité des documents « dormant » depuis des années. Helena Patricio, de la Bibliothèque nationale du Portugal, précise que le service « eBooks on Demand » (EOD) permet de mesurer la fréquence d’utilisation du ebook et l’évolution des pratiques et du niveau d’information du public.
La technologie mise en place permet aussi d’évoluer vers de nouvelles formes de savoir, comme le souligne Jaroslaw Lipszyc, de la bibliothèque scolaire numérique de Wolne Lektury 1 en Pologne. Il milite pour une bibliothèque numérique vivante : « Qu’est-ce qu’un document numérisé ? À cette question, les bibliothécaires répondent unanimement : c’est la reproduction d’un document original imprimé. Cependant, qu’adviendrait-il si on rejetait ce dogme de l’édition originale ? »
La perspective d’une disparition de la bibliothèque elle-même a été évoquée par Luke Roskilly, représentant d’une entreprise qui offre des contenus éducatifs, ludiques et scientifiques à de jeunes publics 2. Plusieurs propositions pour l’adaptation des bibliothèques aux besoins des « digital natives » ont été faites par les participants, toutes aussi intéressantes les unes que les autres. Olaf Eigenbrodt (architecte-consultant, bibliothèque universitaire de Berlin) propose notamment de redéfinir la bibliothèque comme un lieu de rencontres et de découvertes, par l’ouverture à d’autres fonctions : formation, ateliers, détente, loisir, échanges, discussions, expositions, etc.
Conservation et dépôt institutionnel de documents numérisés
Le dépôt institutionnel des travaux de recherche de l’Imperial College, ou projet Spiral 3, se fixe, selon Fereshteh Afshari, l’objectif d’augmenter la visibilité des publications universitaires, de permettre l’accès libre et gratuit, de fournir des liens de pages web professionnelles aux universités et de visionner en plein texte toutes les publications disponibles. Les parties prenantes de ce projet travaillent en synergie pour améliorer la disponibilité à tous moments et en tous lieux des travaux de recherche des disciples de l’Imperial College. Selon Fereshteh Afshari, les bibliothèques, loin de disparaître, doivent se renouveler continuellement et proposer des stratégies nouvelles d’exploitation et de recherche. De même, Dominique Stutzmann, de la Bibliothèque nationale de France, souligne que la création d’index numérisés favorise une consultation conviviale, facile et rapide, rendue possible grâce à l’intermédiation des bibliothécaires.
Réinventer la bibliothèque à l’âge du numérique s’accompagne d’une nécessaire réflexion sur la question des droits d’auteur, ainsi que l’ont évoqué les échanges entre participants. Par ailleurs, des bibliothèques anglaises de lecture publique ont souligné qu’il s’agit non seulement de s’approprier les nouvelles technologies, mais aussi de les offrir au public en s’appuyant sur des stratégies proches de celles du marketing, afin de mettre en valeur les fonctions et l’espace de la bibliothèque.
À la question « rêve ou cauchemar ? », les participants ont répondu à l’unanimité que la numérisation du savoir, maintenant bien engagée, est riche de promesses.