Estivales 2009

Natalie Cêtre

La deuxième édition des Estivales, qui s’est tenue à Villeurbanne en juillet dernier, a permis de faire un point sur l’actualité de la recherche à l’École nationale des sciences de l’information et des bibliothèques (Enssib).

La recherche scientifique à l’Enssib

La première demi-journée fut consacrée à la recherche scientifique. Histoire matérielle du livre et de l’édition, sociologie ou technologie au service des sciences de l’information, l’éventail présenté fut large et brillant. Raphaële Mouren nous fit d’abord partager son étude consacrée à l’imprimeur et humaniste du XVIe siècle, Paul Manuce, non seulement autour d’une œuvre et d’une carrière, mais aussi d’un contexte professionnel, d’enjeux économiques et de réseaux de pouvoir.

Dans ce domaine de la bibliographie matérielle et de l’histoire littéraire, Dominique Varry nous dévoila une communication qui sera présentée lors d’un colloque sur la contrefaçon à l’Institut national d’histoire de l’art en octobre 2009. Florence Stankiewicz, chartiste et conservateur-stagiaire, assura la transition entre l’imprimé et la technologie, en nous présentant sa thèse sur « Les éditions anciennes de Pierre Gringore », exemple convaincant d’une réalisation d’un répertoire bibliographique en format EAD (Encoded Archival Description).

Christophe Evans et Marie-France Peyrelong nous ont ensuite entretenus de leur enquête sur les usagers du récent service « Questions ? Réponses ! » de l’Enssib. L’approche qualitative, grâce à des entretiens semi-directifs, et une démarche inductive révèlent une appropriation communautaire, des attentes et des attitudes en relation avec le métier. Un rapport d’étape sera publié à l’automne 2009. C’est à Éric Guichard qu’est revenu le difficile rôle de clore cette après-midi très dense, avec une intervention sur les apports de la cartographie informatisée à la recherche et à l’analyse, démontrant la nécessaire mutation du géographe en ingénieur-programmateur. La carte fabriquant du savoir et des territoires, abolissant la frontière texte-image, devient méthode mais aussi écriture !

Gestion des bibliothèques

Le lendemain a laissé place aux interrogations de gestionnaires : formation, contexte réglementaire, aménagement du territoire.

La matinée nous permit d’aborder avec Philippe Sardin  * les conclusions du rapport Le Bris sur la formation des agents de l’État. Redondance, dispersion, coûts, faiblesses diverses… bilan sévère mais très contesté. Si certaines analyses sont intéressantes – et permettront à des institutions de faire elles-mêmes des propositions d’évolution –, les préconisations dérangent car elles remettent en cause l’histoire de l’université et des grandes écoles françaises.

Sans rupture, la question de la formation initiale des bibliothécaires territoriaux fut abordée par Matthieu Rochelle, représentant de l’Association des bibliothèques de France. Où se repose la question de la formation initiale et de la formation continue… La commission « Statuts » de l’association mène une réflexion où se mêlent contraintes réglementaires, évolutions professionnelles et nouvelles compétences, pertinence des épreuves des concours A et A+, origines des candidats, référentiels métiers… L’évolution de la formation initiale des territoriaux et le Droit individuel à la formation remettent sur le métier les accords entre l’Enssib et les écoles nationales d’application des cadres territoriaux (ENACT). Puis Christophe Pavlidés (Médiadix) fit le point sur le réseau des douze centres régionaux de formation aux carrières des bibliothèques et définit leur nouveau contexte d’intervention, entre autonomie des universités et dispersion des offres de formation. Pour conclure par les aspirations de ces centres en termes de positionnement, de coopération, de réseau et de visibilité, en les définissant comme « cet artisanat de pointe contre l’indifférenciation et le corporatisme ».

Christophe Pérales (Service commun de la documentation de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines) et Marie-Annick Cazaux (SCD Pau) ont successivement présenté l’impact de la LRU (loi relative aux libertés et responsabilités des universités) et des PRES (pôles de recherche et d’enseignement supérieur), sur la place des SCD dans les universités. S’il fallait mettre l’accent sur la réactivité et le professionnalisme des gestionnaires de bibliothèques, voici qui est fait : pilotage, schéma numérique, aménagement du territoire, gestion des coûts, logique de réseaux et mutualisation, stratégie nationale… témoignent d’une capacité à s’approprier les leviers et les objectifs de la LRU, à s’insérer dans un PRES, à repenser le positionnement de la documentation.

Anne-Marie Bertrand, quant à elle, fit une synthèse du rapport Balladur sur la réforme territoriale avant d’en étudier l’impact sur les bibliothèques, en termes de compétences, de territoires et de réseaux.

Enfin, ce séminaire s’est conclu sur deux réactions au rapport Renoult sur la mise à disposition des conservateurs d’État dans les bibliothèques municipales classées. Deux approches, deux argumentaires issus de ces deux contextes différents – une importante bibliothèque rayonnant sur un territoire métropolitain et régional pour Patrick Bazin (Bibliothèque municipale classée de Lyon) et une bibliothèque d’agglomération modeste mais fortement insérée dans un réseau local pour Esther Herantz (Bibliothèque municipale classée de Valence) – pour un même plaidoyer pour le maintien de postes d’État.

Rendez-vous – en force et en nombre – aux Estivales 2010 !