Coopération entre CDI et services documentaires
L'accès et la formation à la documentation, un enjeu pour la réussite scolaire
Monique Alba
Monique Rollin
La journée départementale des enseignants documentalistes des Bouches-du-Rhône, organisée et animée par Gérard Puimatto, directeur du CDDP (centre départemental de documentation pédagogique), s’est tenue le jeudi 14 mai 2009, à la bibliothèque départementale de prêt, à Marseille.
Jacques Papadopoulos, directeur du CRDP (centre régional de documentation pédagogique) de l’académie d’Aix-Marseille rappelle en ouverture l’objectif de la journée, qui est de mettre en perspective la coopération entre les centres de documentation et d’information (CDI) des établissements scolaires et les bibliothèques de prêt, de lecture publique ou universitaires.
Cette collaboration s’inscrit dans le projet académique documentaire, selon trois priorités : veiller à la mise à disposition des ressources ; former l’élève à la maîtrise de l’information ; renforcer l’accès pour tous à la culture.
Quelle continuité de la formation à la recherche documentaire ?
Georges Perrin, inspecteur général des bibliothèques, rapporte que, selon une étude récente, 25 % des étudiants abandonnent leurs études dès la première année et 39 % seulement obtiennent une licence en trois ans. Dans ce contexte, a été mise en place une mission d’étude sur la liaison lycée/université dans la formation à la documentation, conduite par l’Inspection générale des bibliothèques et le groupe Établissements et vie scolaire (EVS) de l’Inspection générale de l’Éducation nationale. Après repérage des universités qui coopèrent avec des lycées et assurent un recrutement de proximité parmi une population défavorisée et un suivi des élèves et des étudiants, trois universités ont été retenues (Évry, Bretagne-Sud et Artois) et vingt lycées de neuf régions visités.
Au lycée, si la formation à la recherche documentaire est bien assurée en seconde, très suivie en première grâce aux TPE (travaux personnels encadrés), elle chute en terminale (la préparation à l’examen devenant primordiale) et n’est pas une priorité dans les projets d’établissement. Les élèves sont davantage mis en garde que formés à la maîtrise des outils informatiques dans le domaine de la recherche documentaire et de la validation de l’information.
En licence, les documentalistes des bibliothèques universitaires proposent une formation à la recherche documentaire. Pourtant, cette formation n’est pas encore suffisamment considérée comme un atout pour la réussite des étudiants (20 % n’utilisent jamais la BU) et elle n’est pas intégrée au cursus universitaire.
Du CDI à la BU, l’absence de transition est flagrante. Le lycéen ne reçoit aucun code d’utilisation de la vie à l’université, en particulier pour la fréquentation de la bibliothèque. La BU est vécue comme un lieu de travail, de rencontre et de mise à disposition d’outils.
La fréquentation est bonne en première année où une initiation est faite, puis la baisse est très nette en deuxième et troisième années avec un vrai retour en master 1, car la recherche sur documents y est plus importante.
L’observation des pratiques dans les universités retenues montre des constantes dans la mise en place d’actions de promotion des filières universitaires à l’adresse des lycéens et la mise en œuvre de dispositifs d’accompagnement variés, parfois liés au plan « Ambition réussite » (guichet unique pour l’orientation et l’insertion, réorientations, suivi des lycéens et nouveaux étudiants encadrés par des étudiants tuteurs et des PRCE – professeurs certifiés affectés dans l’enseignement supérieur – chargés d’assurer une formation à la recherche documentaire, stages de découverte des filières universitaires, participation à des périodes d’intégration, ateliers d’expression écrite, ouverture des BU sur les publics des quartiers, carte gratuite pour les lycéens), ainsi que dans la mise en réseau des BU, BM et CDI (création de portails avec accès à tous les catalogues, réunions communes des personnels des différentes structures). Toutes ces actions ne sont rendues possibles que par l’implication des proviseurs et des présidents d’université.
Les préconisations qui se dégagent de ces observations sont les suivantes :
- centrer les politiques documentaires sur la réussite des élèves ;
- faire porter la compétence numérique sur les outils et la maîtrise des stratégies de recherche ;
- mieux situer les compétences informatiques informationnelles ;
- penser une autre utilisation du temps scolaire ;
- mettre en réseau des ressources ;
- établir et faire vivre la liaison par des échanges de pratiques entre professeurs documentalistes, vie scolaire et bibliothécaires.
Renforcer les partenariats
Anne-Marie Faure présente les différentes vocations de L’île aux livres, service spécialisé de la bibliothèque municipale à vocation régionale de l’Alcazar, à Marseille : conservation et promotion du patrimoine dans le domaine de la littérature de jeunesse ; mise à disposition de la structure et des ressources auprès du public scolaire ; programmation d’animations autour d’auteurs et d’illustrateurs ; expertise avec le comité de lecture Pass’Livres concernant la production pour adolescents ; formation continue, avec l’organisation de journées interprofessionnelles pour un public mêlé de bibliothécaires et d’enseignants ; formation universitaire, en partenariat avec l’université de Provence dans le cadre d’un master de littérature de jeunesse.
Matthieu Rochelle, directeur de la bibliothèque départementale de prêt des Bouches-du-Rhône, met l’accent sur l’un des objectifs du projet d’établissement : l’ouverture à d’autres structures. Il expose les nouvelles missions de la BDP, notamment :
- les actions vers les établissements scolaires et les collectivités (prêt, aide à la recherche documentaire ou conseil en acquisition, prêt gratuit d’une centaine d’expositions, formation professionnelle) ;
- la médiation culturelle (visites guidées pour un public scolaire, atelier de lecture de l’image, participation au Printemps du livre de Cassis, aux Journées du livre de jeunesse de la ville d’Aubagne, etc.) ;
- l’autoformation pour les usagers (en ligne pour les langues étrangères, et perfectionnement informatique) ;
- les ateliers pour adolescents (soutien scolaire, « Les ateliers du mercredi »).
L’après-midi, Damien Durand, inspecteur d’académie et inspecteur pédagogique régional vie scolaire met en exergue les préconisations prioritaires concernant la communauté éducative : agir dans la continuité de l’intérêt de l’usager et renforcer les partenariats. Le projet documentaire académique et les politiques documentaires des établissements devraient favoriser la réflexion sur le rôle des professeurs documentalistes dans la formation des élèves. Travailler avec des structures connexes est un axe à privilégier.
Des interventions successives des SCD des trois grandes universités d’Aix-Marseille sur la formation des étudiants à la recherche documentaire, il ressort notamment que des perspectives de liaison lycée/université sont envisageables dans le cadre des préconisations présentées par Georges Perrin.
Différents dispositifs mis en place sont ensuite rappelés par des représentants des collectivités territoriales : ateliers héraldique et enluminure proposés aux scolaires, dispositifs entrant dans le cadre de la formation continue des enseignants en collaboration avec les musées (service éducatif des archives municipales) ; Correlyce, catalogue ouvert régional de ressources éditoriales pour les lycées (service Éducation du conseil régional), « Ordina 13 » et le catalogue d’activités artistiques et éducatives proposées aux collèges (Conseil général).
Damien Durand conclut que l’accompagnement des élèves doit être porté collectivement et que la liaison lycée/université doit devenir un champ partenarial. Dans le domaine de la formation à la recherche documentaire, un portefeuille de compétences info-documentaires pourrait être envisagé pour donner une cohérence à ce volet éducatif.