Cilip et les bibliothécaires britanniques

Anne-Élisabeth Buxtorf

Cilip – Chartered Institute of Library and Information Professionals – est un point d’entrée incontournable pour connaître les bibliothécaires britanniques.

Cette organisation est en effet la plus importante dans le monde des bibliothèques au Royaume-Uni. Elle couvre tous les champs de la profession : de la formation initiale à la gestion de carrière en passant par des offres d’emplois et la défense d’intérêts communs ou spécifiques. C’est un interlocuteur du gouvernement et des différentes tutelles des bibliothèques. Comptant près de 23 000 adhérents, Cilip est composé, pour l’essentiel de bibliothécaires (60 %), le reste étant des professionnels de l’information, des archives et de la documentation.

Cette institution à forte identité et au marketing développé permet à la fois de réunir et de donner un très grand nombre d’informations aux bibliothécaires et à leurs interlocuteurs. Mais cette visibilité ne doit pas masquer le fait que le tissu professionnel des bibliothécaires britanniques reste très morcelé. Cilip est loin d’en donner une parfaite vision d’ensemble.

D’une part, Cilip se décline en multiples branches, sous-branches et regroupements par spécialités ou zones géographiques. Son unité est donc relative. Les services qu’il offre sont aussi assez onéreux et parfois complexes dans leur mise en œuvre. Son efficacité en est donc sans doute amoindrie. Cilip publie un journal hebdomadaire, Gazette, dont une partie importante concerne les offres d’emploi et la formation ainsi que le calendrier des conférences et autres réunions professionnelles. Cette source d’information est complétée par un supplément mensuel, Library and Information Update. Mais le contenu rédactionnel reste pratique et il n’y a pas d’équivalent du BBF, ni d’ailleurs de Livres Hebdo.

Des listes de diffusion

D’autre part, Cilip est plutôt dédié aux bibliothèques publiques et ne reflète pas véritablement les préoccupations des bibliothécaires universitaires ni de ceux travaillant dans les bibliothèques nationales ou spécialisées. Dans ce monde plus académique, les échanges professionnels se font par d’autres réseaux. Le mode d’échanges privilégié sera alors la liste de diffusion ou la publication imprimée, mais dans une logique de spécialisation, et il n’existe pas de liste transversale comme pouvait l’être biblio-fr. De multiples associations, groupes, listes de diffusions, se réunissent selon des préoccupations communes. Par exemple, les personnes chargées des collections de langues se retrouvent dans les réseaux de cette spécialité : ACLAIIR, Wesline, FSLG, ISLG, GSLG, WESS… ALISS Quarterly est la publication de l’Association of Librarians and Information Professionnals in the Social Sciences. Les blogs ou les profils Facebook existent largement au niveau des structures, mais à titre individuel ; les professionnels n’utilisent pas massivement ce mode d’échanges.

Malgré sa forte implantation, Cilip n’est donc pas la seule source pour appréhender l’environnement professionnel des Britanniques.

Un environnement diffus

En fait, cet environnement est sans doute beaucoup plus diffus qu’en France. Cela est lié en premier lieu à une organisation administrative beaucoup moins centralisée au Royaume-Uni. L’absence de concours, de notion de fonction publique à la française change d’emblée la donne. L’idée de corps ou de catégorie est inexistante. La distinction entre un conservateur et un bibliothécaire n’a pas vraiment de sens. Ainsi la traduction de « conservateur » ne sera pas possible en tant que telle, mais uniquement par la fonction occupée. Une autre différence importante est qu’une personne travaillant dans une bibliothèque pourra être recrutée sur des compétences spécifiques sans avoir forcément suivi d’études en bibliothéconomie. C’est fréquemment le cas des subject librarians, spécialisés dans un domaine (langue, droit, art, sciences…), des personnes ayant des fonctions d’encadrement, de formation, d’animation, de médiation, etc.

Le recrutement se faisant sur un champ plus ouvert, la perception du métier s’en trouve forcément différenciée. La souplesse et les possibilités d’avancement sont réelles. Des années d’ancienneté ne sont pas nécessaires pour évoluer. De même, les changements d’orientation, voire de pays (dans la zone anglophone), ne sont pas rares. Il est possible de travailler un temps dans une bibliothèque puis dans un tout autre environnement.

Le versant négatif de cette mobilité est que la sécurité de l’emploi est inexistante et que beaucoup de bibliothécaires sont dépendants de la situation financière de l’organisation dans laquelle ils travaillent. En période de récession, l’avenir apparaît donc comme plutôt sombre. Ainsi, en début d’année, le Times annonçait que le nombre de personnes qualifiées embauchées dans les bibliothèques avait chuté de 4,1 % en 2008, et prévoyait un recul de 6,6 % pour 2009 (Times Online, 19 septembre 2008). En deux ans, 34 municipalités (Local Authorities) en Angleterre ont fermé définitivement ou provisoirement des bibliothèques (The Guardian, 3 avril 2009).

Ces éléments font que l’identité professionnelle est sans doute moins forte au Royaume-Uni qu’en France, d’une part, parce qu’elle se différencie moins de la situation d’autres professions, et, d’autre part, parce qu’elle se définit davantage comme des personnes travaillant dans des bibliothèques plutôt que comme des « bibliothécaires ».

Quelques sites

Cilip : site très complet avec une partie en français

http://www.cilip.org.uk

Des exemples de réseau

Ilig : The International Library and Information Group of Cilip

http://www.cilip.org.uk/specialinterestgroups/bysubject/international

 

Wesline : West Studies Library and Information Network

http://www.ulrls.lon.ac.uk/wesline

 

ACLAIIR : Advisory Council of Latin American and Iberian Information Resources

http://www.aclaiir.org.uk

 

FSLG : French Studies Library Group

 

GSLG : German Studies Library Group

 

ISLG : Italian Studies Library Group

 

COSEELIS : Council for Slavonic and East European Library and Information Services

 

Nacira : National Committee for Information Resources on Asia

 

WESSWEB : Western European Studies Section : American Association of College and Research Libraries

Blogs de bibliothécaires au Royaume-Uni

JennyLaw, « Where are the UK Librarian blogs ? », 18 mars 2008 : http://jennielaw.blogspot.com/2008/03/where-are-uk-librarian-blogs.html (blog consulté le 6 mai 2009).