Le regard de la Direction régionale des affaires culturelles Midi-Pyrénées
Les plans de conservation partagée et l’esprit qui les anime relèvent, à mon sens, d’une récente mais aussi vieille histoire.
La plus récente remonte aux années 1980, quand la coopération régionale entre bibliothèques apparaît comme un agent de texture indispensable pour l’alchimie de la première décentralisation. Mais elle constitue de fait une sorte de greffe sur la souche composée par les premiers recensements liés aux territoires locaux, départementaux ou régionaux : c’est à ce travail pragmatiquement initié de façon jacobine et aux produits qui en sont issus – les différents catalogues devenus collectifs – que l’on doit autant d’atouts opérationnels pour la meilleure pertinence de plans de conservation en région.
Au regard de ce qui vient d’être évoqué, l’expérience menée en Midi-Pyrénées, tardive par rapport à d’autres régions, ne l’a pas été en faisant le choix de la facilité. Car initier un travail collectif autour de la littérature pour la jeunesse, sans outil bibliographique spécifique, sur un territoire où n’a préalablement existé aucune pratique durable et organisée de coopération ressemblait un peu à un défi. Si la Drac a été instigatrice de la démarche lors de la redéfinition des missions du Centre régional des lettres (CRL), il revient à ce dernier d’avoir su la gérer de façon particulièrement intelligente, méthodique et efficace.
Affirmant la priorité de ce plan par rapport à tous les autres envisagés, le CRL a répondu à la demande exprimée par les bibliothécaires depuis plusieurs années. Il est vrai que la richesse éditoriale régionale (éditions du Rouergue, éditions Milan), autant que la richesse patrimoniale de certaines bibliothèques justifiait une sensibilisation particulière des professionnels. L’existence de centres de ressources associatifs actifs a aussi largement et longtemps contribué à la découverte de cette littérature.
Au-delà des résultats obtenus, la mise en œuvre du plan, en fédérant la réflexion préalable par la constitution d’un groupe de travail représentatif et opérationnel, a démontré la possibilité de passer outre les difficultés géopolitiques propres à cette région – la plus vaste de France – composée de huit départements, de deux massifs montagneux opposés, et… de tout ce qui les sépare. Ce n’est pas là le moindre mérite de l’opération, qui a su aussi vaincre les réticences de certaines structures à entrer dans une synergie régionale.
Reste que ce plan de conservation, si cohérent soit-il à son échelon régional, appelle d’ores et déjà à s’interroger, comme tout autre projet, sur sa pertinence hors ses limites géographiques : quelle coordination pourrait-on envisager au niveau interrégional, sachant qu’aujourd’hui même bien des échanges sur le plan documentaire sont d’abord établis entre départements limitrophes de deux régions différentes ? Quelle structure serait à même de la gérer ? Quel partenaire national saurait-il en être le fédérateur ou le modérateur ? Autant de questions auxquelles les seules compétences et bonnes volontés de la région Midi-Pyrénées ne sauraient répondre.