Revista general de información y documentación

par Philippe Marcerou
Madrid, Universidad Complutense, vol. 15, no 2, 2005 à vol. 17, no 1, 2007.
ISSN 0034-8244
Abonnement (2 numéros par an, individuel/institutionnel) Espagne : 27/18 € ; Europe : 30/21 € ; reste du monde : 40/25 €

www.eubd.ucm.es/html/docs/publicaciones/revista/index.htm

La Revista general de información y documentación est une publication semestrielle de recherche et d’érudition de l’université Complutense de Madrid et, plus particulièrement, de l’École universitaire de bibliothéconomie et de documentation (EUBD), qui en dépend. Elle est dirigée par le Pr Fernando Ramos Simón qui s’appuie sur un conseil de rédaction composé de membres permanents et de membres associés appartenant à l’université Complutense ou à d’autres universités espagnoles. La revue conçoit les mots « document » et « documentation » dans leur acception la plus large et publie des articles dans les matières les plus diverses : bibliothéconomie, documentation, archivistique, diplomatique, numismatique, épigraphie, conservation, informatique documentaire, histoire du livre, etc. Les principaux livres qui paraissent en Espagne dans ces domaines font l’objet de recensions dans la revue.

En dépit de l’extrême variété des thèmes traités par la Revista general de información y documentación, il ne sera fait mention, dans cette revue d’articles qui couvre les années 2005, 2006 et 2007, que des articles traitant de documentation et de bibliothéconomie.

Histoire du livre et des bibliothèques

La Revista general de información y documentación est d’abord une revue historique : les articles d’histoire du livre et des bibliothèques sont nombreux. Ces thèmes sont fortement marqués par une histoire démocratique courte et récente : en effet, en Espagne, le livre et les bibliothèques n’ont guère cessé d’être contrôlés, soit par l’Inquisition, qui est restée active jusqu’en 1820, soit par un pouvoir autocratique, alors que les périodes de liberté ont constitué, sur la longue durée, des exceptions (entre février 1873 et janvier 1874, d’avril 1931 à juillet 1936 ou septembre 1939, de novembre 1975 à nos jours).

Rares sont les articles publiés récemment dans la revue qui traitent de l’histoire du livre et des bibliothèques de manière générale. Certes, on remarquera l’article de Francisco Javier Fernández Abad, « Évolution historique de la fonction sociale des bibliothèques publiques » (2006, no 2), mais l’auteur se proposant, en quelques pages, de faire un panorama mondial de cette question depuis l’Antiquité, son article n’est exempt ni d’approximations ni de points de vues inexacts ou erronés, singulièrement sur l’histoire des bibliothèques françaises au xxe siècle où l’on apprend notamment que la création d’une Direction des bibliothèques et de la lecture publique correspondait à une manifestation évidente d’un esprit de chauvinisme (sic). On peut aussi mentionner l’article « Translatio studiorum : transmission des livres et dialogue des civilisations au Moyen Âge » de Francisco León Florido (2005, no 2) qui évoque la question des moyens de la diffusion des savoirs au Moyen Âge à travers la question de la propagation des livres.

La revue s’intéresse aussi à des sujets très ponctuels qui peuvent intéresser les érudits ou les spécialistes. On peut citer par exemple, dans le numéro 1 de 2007 : « Livres anciens et nécromanciens : autour de la possession et de la transmission de grimoires dans les procès d’Inquisition de 1509 et de 1511 » (Manuel José Pedraza García), « Juan Pedro Musete, marchand de livres à Medina del Campo » (José Maria Torres Pérez), « Contribution à la typobibliographie de Valladolid (1600-1672) : six impressions en lien avec la Gallice » (Carlos Santos Fernández).

Collections, livres anciens et fonds spéciaux

De 2005 à 2007, de manière tout à fait surprenante, la Revista general de información y documentación n’a consacré aucun article à l’accroissement des collections, aux politiques documentaires ni à la documentation électronique. On peut donc aisément affirmer qu’elle joue en Espagne un rôle singulièrement différent de celui que joue le Bulletin des bibliothèques de France qui consacre très régulièrement des articles à ces questions.

Parmi les articles traitant des collections, des livres anciens et des fonds spéciaux, notons ceux consacrés à « Une étude des fonds de la bibliothèque de Francisco de Zabálburu [de Madrid] » par Maria Teresa Llera Llorente dans le numéro 2 de 2005 et le numéro 2 de 2006. La bibliothèque du mécène, homme politique, érudit et bibliophile Francisco de Zabálburu est d’une richesse considérable puisqu’elle contient 18 000 documents précieux parmi lesquels des manuscrits médiévaux, des incunables et des éditions rares des xvie, xviie , xviiie et xixe siècles.

Notons aussi la recension par Juan José Fuentes Romero du livre de Fernando Ramos Simón intitulé Le fonds local en bibliothèque (2005, no 2). Cette étude ne peut qu’appeler l’attention d’un lecteur français car les bibliothèques espagnoles, contrairement aux bibliothèques françaises, n’ont pas connu de saisies par l’État. Par conséquent, les fonds locaux qui s’y trouvent conservés proviennent soit de démarches d’acquisitions par les bibliothécaires, soit de dons.

Bibliographie et catalogues

La Revista general de información y documentación traite des questions bibliographiques et catalographiques à la fois sous l’angle historique et dans une perspective professionnelle contemporaine.

Signalons deux articles historiques respectivement consacrés à « La chaire de bibliographie juridique de l’université centrale de Madrid (1883-1936) » (Isabel Villaseñor Rodríguez, 2006, no 2) et à « La chaire de bibliographie de l’université Complutense de Madrid » (Yolanda Clemente San Martín, 2007, no 1) et un article sur « Le catalogage des notes de mise en scène à la Bibliothèque historique et municipale [de Madrid] » (Ascensión Aguerri Martínez, 2007, no 1). On montre la spécificité documentaire de ce type d’annotation et en quoi les formats de catalogage existants peuvent ou non offrir des réponses appropriées à la mise en valeur de ces documents, problématique qui rejoint celle du traitement catalographique des collections du département des Arts du spectacle de la Bibliothèque nationale de France.

Dans « Aspects quantitatifs et thématiques de la production scientifique du département de Bibliothéconomie et documentation de l’université Complutense de Madrid (1984-2003) », Javier Salvador Bruna et José López Yepes établissent un retour sur vingt années d’activités de recherche et de publication en documentation et en bibliothéconomie à l’EUBD et, plus généralement, à l’université Complutense de Madrid. En s’inspirant des méthodes internationales d’évaluation des facteurs d’impact des publications, ils tentent de montrer l’importance et l’influence des publications de l’EUBD sur la communauté scientifique espagnole et internationale en sciences de l’information.

Publics

La question des publics des bibliothèques est traitée de la même manière que dans d’autres revues nationales de bibliothéconomie. En effet, on note, par exemple, un article général sur « Les usagers des bibliothèques, les nouveaux supports et les nouveaux services » de Javier Gimeno Perelló (2005, no 2). On remarque aussi un article sur les « Bibliothèques et librairies de grandes surfaces : clients et usagers » (2007, no 1) où Maria Rosario Ferrer Gimeno compare les usages des lecteurs et des clients dans des lieux culturels ou d’enseignement consacrés au livre (librairies, bibliothèques) et montre qu’une partie de la réflexion sur l’accès libre aux collections dans les bibliothèques publiques et universitaires américaines vient des techniques de vente de la grande distribution.

Notons enfin que l’essentiel du numéro 1 de 2006, coordonné par Esther Burgos Bordonau, est consacré à la publication des 15es Journées de l’EUBD dont le titre était « Politiques d’information et handicap : de nouveaux aspects pour l’intégration ». Ce colloque, très complet, s’est intéressé à tous les aspects (réglementaires, sociaux, pratiques, techniques, culturels, etc.) de l’accueil des handicapés dans les bibliothèques.

L’ouverture de l’Espagne vers l’Amérique latine autorise les collègues espagnols à traiter du sujet original de la place des bibliothèques dans l’aide au développement. On peut citer deux articles : « Des centres d’information pour la survie : fondements, projets innovants et rentabilité politique » d’Arturo Martín Vega (2005, no 2) et « Les bibliothèques éléments de développement » de Juan José Fuentes Romero (2006, no 2), ce dernier couvrant une aire géographique plus vaste que l’Amérique latine.

Informatique documentaire

La Revista general de información y documentación fait une part convenable à l’informatique documentaire. On peut citer par exemple un article général de Nicolás Bas Martín sur « La documentation et l’information dans le nouvel espace européen de l’enseignement supérieur » (2006, no 2).

Il faut aussi mentionner un article conséquent sur « L’utilisation de logiciels libres en bibliothéconomie et documentation en Espagne : le cas de l’université Complutense de Madrid (Juan Antonio Martínez-Comeche, Pedro Razquin Zazpe, Carlos Tejada Artigas, Luis Fernando Ramos Simón, 2007, no 1) qui fait un état de l’utilisation de logiciels libres dans cette université. Toutefois, si ce panorama complet montre bien les avantages et les limites de ces logiciels, les questions traitées sont vastes et vont de l’utilisation de logiciels libres pour la bureautique ou la messagerie électronique à celle de la conception, à partir de logiciels libres, d’applications spécifiques, notamment pour les bibliothèques.

Dans « Entreprises d’information et de documentation dans l’ingénierie civile » (2007, no 1), Benjamín Cendrero Ajenjo montre que les entreprises du bâtiment et de la construction, qui pèsent d’un grand poids dans l’économie espagnole, ont un besoin permanent de documentation ; il décrit les moyens qu’elles utilisent pour se la procurer.

Comme on peut le voir, la Revista general de información y documentación se présente comme un ensemble qui manque parfois d’unité : il est difficile de dégager une ligne directrice, voire une ligne éditoriale. La variété des thèmes, la prégnance des sujets historiques biaisent un peu le propos d’une revue qui, si on la compare à des revues françaises, jouerait en même temps le rôle du Bulletin des bibliothèques de France et de la Bibliothèque de l’École des chartes. Cet ensemble composite d’articles offre néanmoins une vue synoptique de la recherche bibliothéconomique en Espagne, même si la place réservée au fonctionnement des bibliothèques et aux expériences de terrain est extrêmement réduite.