Politique documentaire et établissement scolaire

par Philippe Marcerou

Nicole Augé

Clotilde Cardona

Stéphane Chauvin

Évelyne Coupé

France Montel-Roux

Vernotte Prévost

Préface d’Yves Jeanneret, avant-propos de Françoise Albertini et Isabelle Fructus
Paris, ADBS éd., 2007, 220 p., 24 cm, coll. Sciences et techniques de l’information
ISBN 978-2-84365-096-3 : 25 €

Politique documentaire et établissement scolaire, ouvrage collectif coordonné par France Vernotte-Prévost à partir de comptes rendus d’expériences et de travaux menés par des professeurs de documentation de l’académie d’Aix-Marseille, traite non seulement de la notion de « politique documentaire » au sens où l’entendraient des bibliothécaires, mais aussi de l’ensemble des pratiques et politiques que l’on peut observer dans les centres de documentation et d’information (CDI) des collèges et des lycées en matière de documentation. On peut noter que, malgré le titre, les bibliothèques centres documentaires (BCD) des écoles primaires ne sont pas évoquées. Les auteurs, liées à la Fédération des associations de bibliothécaires et de documentalistes de l’Éducation nationale (Fabden), coéditeur de l’ouvrage, se proposent aussi de montrer la complexité du métier d’enseignant documentaliste et s’emploient, non sans faire preuve de conviction et d’une forme de « militantisme » revendiqué, à promouvoir l’idée que la mise en place de politiques documentaires raisonnées dans les établissements scolaires est – ou, en tout cas, devrait être – une priorité pédagogique.

Le corps de l’ouvrage, précédé de plusieurs propos liminaires et introductifs, est structuré en cinq chapitres d’importance équivalente traitant respectivement d’une politique documentaire qui serait « à inventer », de la notion de « projet documentaire », des liens entre systèmes d’information et politiques documentaires, de ceux entre formation des élèves et documentation et enfin de l’évaluation des politiques documentaires. Des tableaux, des questionnaires d’enquête, des conseils complètent le propos. C’est donc à la fois un panorama des pratiques documentaires dans l’enseignement secondaire et un guide méthodologique qui sont proposés.

Les auteurs partent du constat que la question même des « politiques documentaires » dans les établissements de l’Éducation nationale – singulièrement dans l’enseignement secondaire – se heurte à une difficulté primordiale. En effet, les textes réglementaires qui fixent cette notion sont peu nombreux, contingents et incomplets, si bien qu’au-delà de la volonté individuelle des chefs d’établissements et de leurs équipes dirigeantes, on note que ces politiques – ou plutôt ces pratiques – documentaires revêtent des caractères très différents selon les établissements et dépendent fortement des moyens financiers qui leur sont consacrés. C’est donc, d’abord, la place du CDI dans le collège ou le lycée et celle de son animateur, le professeur de documentation, qui est en jeu. De la capacité de conviction de ce dernier et de la possibilité qui lui est offerte ou non d’être associé aux décisions générales touchant à la vie de l’établissement et d’être impliqué dans le travail des équipes pédagogiques de chacune des disciplines dépendent largement la qualité et la pertinence du projet documentaire. Les auteurs montrent que ce contexte général n’est pas favorable à la mise en place de véritables politiques documentaires normées, concertées et coordonnées.

Malgré la justesse du constat d’ensemble qui se dégage de l’ouvrage, on peut cependant regretter que les définitions qui sont données de la « politique documentaire » ne soient pas plus précises. En effet, cette notion, ambiguë et plurielle chez les bibliothécaires, l’est encore plus chez les professeurs de documentation. Aussi, à mon sens, compte tenu de l’ampleur du sujet, il aurait été préférable que les auteurs parlent de « projet documentaire », plutôt que de « politique ». Cela aurait permis de faire clairement le départ entre une vision d’ensemble tendue vers une amélioration du contenu pédagogique du cursus des élèves (logique de projet) et la pétition de principe que suppose le mot de « politique ». Faute de réglementation et de définition précise des missions du CDI, ces politiques documentaires relèvent du souhait plutôt que de la réalité, tandis que l’ouvrage, qui est d’abord une modélisation et un examen critique des pratiques des enseignants documentalistes, propose d’introduire une méthodologie générale pour mener à bien un projet documentaire.

Au demeurant, l’ouvrage coordonné par France Vernotte-Prévost est précieux, car il donne à la fois des points de vue et des conseils pratiques aux enseignants ou aux chefs d’établissements qui souhaiteraient se lancer dans l’élaboration d’un projet documentaire qui associerait les professeurs de disciplines, les professeurs de documentation et les élèves. Cette approche systémique et systématique permet de fixer quelques cadres à un domaine peu normé : si les auteurs refusent le terme de « modèle », elles donnent en tout cas des guides et des méthodes utiles qui, en tout ou en partie, peuvent être transposés dans la plupart des établissements.