Une brève histoire de l’image

par Yves Desrichard

Michel Melot

Paris : L’œil neuf, 2007. – 137 p. ; 21 cm. – (Brève histoire).
ISBN 978-2-915543-20-9 : 14,90 €

On sait que Michel Melot, entre autres ancien directeur du département des Estampes et de la Photographie de la Bibliothèque nationale (pas « de France » à l’époque) et ancien directeur de la Bibliothèque publique d’information, a toujours conçu une passion pour l’image, son histoire et ses influences.

Une flânerie, une réflexion

Dans la petite collection « Brève histoire » des éditions de L’œil neuf où il avait déjà publié, dans une autre collection, La sagesse du bibliothécaire, il propose donc Une brève histoire de l’image. Signalons d’emblée deux inconvénients de cette collection, et de cet ouvrage plus précisément : tout d’abord la totale absence d’images, qui s’explique sans doute tant par les coûts liés à l’insertion d’images dans un livre vendu moins de 15 euros que, peut-être, par la volonté de Michel Melot de ne pas privilégier telle ou telle image, au risque d’affadir, de détourner ou de figer son discours ; d’autre part, plus prosaïque, une reliure faite de telle manière qu’il faut maintenir le livre fermement ouvert pour pouvoir lire ! Certes, une remarque qui n’a l’air de rien, mais que pourra comprendre l’auteur de Livre,

Brève, l’histoire de l’image l’est à la fois par le nombre de pages et par le nombre de chapitres : 9 chapitres pour 130 pages environ, et une typographie qui oblige à la synthèse. De « Du rêve à l’écran » à « Bienvenue dans la vidéosphère », c’est plus une flânerie, une réflexion, qui nous sont proposées, qu’une véritable histoire, et surtout pas le récit chronologique de l’envahissement progressif de l’image au fil des siècles et des techniques.

Puisant dans son abondante et érudite culture en la matière, l’auteur navigue avec aisance de la Renaissance italienne à Émile Raynaud, des premières retransmissions télévisées (dans les années 1930) à l’utilisation de la reconnaissance de caractères dans le tri postal (1985). Avec une aisance et un plaisir d’écriture évidents, il balaie notions plastiques et philosophiques complexes, exhume quelques « petits maîtres » de la peinture qui lui paraissent remarquables, confronte l’Histoire et sa représentation, et nous perd parfois dans les méandres de sa pensée, avec un art de la digression brillant, mais peut-être peu adapté au format et aux objectifs de la collection.

Les limites clairement définies d’une collection

C’est sans doute là que le bât blesse : le lecteur, même s’il le regrette vivement, ne saurait avoir lu et vu, assimilé et apprécié, autant de textes, autant d’images, autant de notions, que Michel Melot. Et, dans les limites clairement définies d’une collection qui « dessine en neuf chapitres l’histoire et le portrait de son sujet », on pouvait s’attendre, disons, à autre chose. Il y a, à la fois, trop d’informations et pas assez d’explications, trop d’évocations et pas assez de preuves.

On reste, cependant, toujours séduit par cette tension exigeante qui fait, par exemple, interroger l’écriture au regard de son image, et qui nous mène de la grotte Chauvet aux plus récentes innovations de l’« infosphère » avec le même regard critique, c’est-à-dire le souci de ramener l’événementiel contemporain à la mesure du temps – pour mieux stigmatiser, souvent, la futilité ou l’inanité de telle mode forcément passagère.

En ramenant souvent l’image, l’iconographie, à leurs origines largement religieuses, Michel Melot appelle l’image à la dimension du sacré, cette notion, dans un monde post-nietzschéen, ayant désormais une acception étendue à toutes les notions d’autorité. L’exercice est habile, parfois superficiel (la collection, sans doute, l’impose) mais, avec un tel auteur, toujours stimulant, voire provocant.