Journées Abes
Yves Desrichard
AACRAnglo-American Cataloguing Rules
Abes Agence bibliographique de l’enseignement supérieur
ANRT Atelier national de reproduction des thèses
Cadist Centre d’acquisition et de diffusion de l’information scientifique et technique
CCSD Centre pour la communication scientifique directe
Cines Centre informatique national de l’enseignement supérieur
Couperin Consortium universitaire pour les périodiques numériques
Hal Hyper article en ligne
Inist Institut national de l’information scientifique et technique
ISBD International Standard Bibliographic Description
ISSN International Standard Serial Number
OCLC Online Computer Library Center
RDA Resource Description and Access
RLG Research Libraries Group
SIGB Système intégré de gestion de bibliothèque
Star Signalement des thèses, archivage et recherche
Sudoc Système universitaire de documentation
Tel Thèses électroniques en ligne
L’Abes, Agence bibliographique de l’enseignement supérieur, avait cette année décidé de donner une nouvelle impulsion aux « Journées Abes » qu’elle organise chaque année pour rendre compte aux utilisateurs de ses services – au premier rang desquels le Sudoc –, de l’avancée de ses travaux et de ses projets.
C’est peu de dire que cette nouvelle formule a été une réussite totale, enthousiasmante – et épuisante ! – pour les congressistes. Saluons tout d’abord la qualité de l’organisation assurée, sous la houlette de Raymond Bérard, directeur de l’Abes, par son équipe. Une gestion « à l’américaine » (la sincérité en plus) a permis un parfait déroulement de cette journée et demie qui réunissait, les 30 et 31 mai 2007, plus de 200 participants et 25 intervenants 1, et il convient de le saluer. Saluons aussi les participants qui, assidus, attentifs, intéressés, ont survécu au rythme soutenu (plus de 9 heures d’exposés pratiquement non-stop la première journée !) de la manifestation.
Il serait impossible et fastidieux de résumer l’ensemble des présentations, dont on trouvera qui plus est l’essentiel sur le site de l’Abes 2. On se contentera d’esquisser certains axes forts, nourris des réflexions des différents intervenants, sans que ceux ou celles qui seront omis doivent s’en offusquer, chaque contribution ayant mérité intérêt et prêté à la réflexion.
« L’Abes, ce n’est plus seulement le catalogue »
Comme Raymond Bérard l’indiqua d’emblée, « l’Abes, ce n’est plus seulement le catalogue ». Et pourtant : avec ses 8 millions de notices bibliographiques, ses 23 millions de localisations, son 1,6 million de notices d’autorités, ses 3 000 bibliothèques participantes 3, le Sudoc est une réussite incontestée (+ 25 % de consultations l’an dernier), saluée comme telle par le rapport de la Cour des comptes – plus rugueux sur d’autres points – récemment consacré aux bibliothèques universitaires 4. Il était donc courageux, tout en prenant acte (quand même !) de ce succès, de rebondir rapidement, d’explorer de nouvelles pistes, d’être à l’écoute des utilisateurs comme des concurrents, pour développer nouveaux produits et nouveaux services.
Pour autant, le Sudoc n’était pas (tout à fait) oublié, dont Raymond Bérard rappela qu’il était désormais 5 indexé par Google Scholar, lui assurant désormais une visibilité mondiale dont les effets ne pourront être que bénéfiques à court et à moyen termes pour les bibliothèques membres.
Car les maîtres mots de ces journées ont été collaboration, mutualisation, voire concentration, dans tous les secteurs de développement des bibliothèques. On n’en attendait pas moins de journées Abes, mais ce parti pris a été illustré de nombreux exemples, ainsi de la présentation du réseau Réro des bibliothèques de Suisse occidentale (francophones) faite par Marylène Micheloud, exemplaire à plus d’un titre – et où le partage par l’ensemble des bibliothèques membres du même SIGB fit plus que des envieux dans la salle. Ainsi aussi du rapprochement/absorption partielle entre l’Abes et les services complémentaires du Cines. Ou de celui, encore en devenir mais fortement recommandé, des mêmes avec l’Inist, les Cadist, le CCSD, voire Couperin. Raymond Bérard ayant même évoqué l’hypothèse du chargement du Sudoc dans WorldCat, le gigantesque catalogue d’OCLC, on pouvait bizarrement en conclure à la prochaine absorption de l’ensemble par OCLC, déjà propriétaire de Pica, prestataire de services pour l’Abes, et du RLG, fournisseur de notices pour le Sudoc 6…
Boutade certes, mais qui traduit la forte influence américaine sur le monde des réseaux bibliographiques, qu’illustrèrent chacune à sa manière Janifer Gatenby, d’OCLC Pica et Françoise Leresche, de la Bibliothèque nationale de France. La première présenta notamment les évolutions en cours de la consultation de WorldCat, et posa comme évidence les liens avec Google Print (pour la consultation en ligne des documents) ou Amazon.com (pour la commande des documents), qui font tellement débat en France… La seconde rappela que, engagée en parallèle, la refonte des ISBD en un seul ISBD « consolidé » d’une part, et des AACR en RDA de l’autre, pourrait se solder, vu l’avance prise par ce second, par une mise en œuvre des RDA au niveau international – c’est-à-dire par l’uniformisation à l’américaine des pratiques de catalogage.
« La bibliothèque est un guide »
De consultation en ligne de documents en texte intégral, il fut aussi beaucoup question, entre la mise en œuvre du projet Star de diffusion des thèses par voie électronique et la présentation du projet « archives-ouvertes.fr » de coordination au niveau national de l’ensemble des projets en matière d’archive ouverte. Entre les offres de diffusion en ligne du CCSD, de Tel, de Hal, et même de l’ANRT de Lille, et les 80 projets recensés en bibliothèque universitaire, on avait un peu le tournis, et pas seulement à cause des sigles… Le foisonnement n’est jamais mauvais, mais la régulation a du bon, et les différentes présentations en la matière laissaient sur le sentiment qu’une voie médiane, ni trop centralisatrice ni trop individualisée, serait à privilégier.
C’est une solution que met en œuvre depuis plus de trente années, d’une manière exemplaire mais parfois trop discrète, le Centre international de l’ISSN, dont Alain Roucolle nous présenta l’activité, avec l’innovation fondamentale (pour les spécialistes !) que constitue la mise en œuvre d’un ISSN-L, dit « de liaison », qui permettra de lier les différentes manifestations d’une même revue soit sur différents supports (papier, en ligne…) soit dans différentes éditions (régionales, linguistiques…) disposant chacune de leur propre ISSN. Exemplaire aussi, sur ce projet, la collaboration du Centre avec les bibliothèques et les grands catalogues collectifs certes, mais aussi et surtout les éditeurs de revues, et notamment de revues électroniques, dont on sait les problèmes que posent leur identification et leur localisation.
En préambule de ces journées, Elmar Mittler, entre autres ancien directeur de la Niedersächsische Staats– und UniversitätsBibliothek de Göttingen, réalisation excellente au niveau européen, avait conforté les participants dans leurs missions et leurs services. « La bibliothèque est un guide », les bibliothèques sont des « institutions de service pour leurs clients ». Il faut aller vers les étudiants, vers les professeurs, connaître leurs besoins et y répondre, connaître leurs pratiques et les accompagner. Brocardant (de façon sans doute un peu rapide) la numérisation « façon Google », il énonça le maître précepte en la matière : « Faire une fois – mais bien. » Autrement dit, les bibliothèques peuvent désormais avoir une approche globale en matière de documents numérisés : création, mise en forme, identification, diffusion.
Enfin, en un parfait équilibre avec les contributions de haute volée qui l’avaient précédée, une synthèse des ateliers qui se déroulaient en parallèle 7 des sessions proprement dites permit de se rentre compte au final que ces journées avaient parfaitement rempli leur double office : d’une part, offrir aux participants un regard plus large sur l’actualité des réseaux, tant au niveau politique, technique, que bibliothéconomique ; d’autre part et pour l’Abes, « rendre compte », avec une honnêteté sans langue de bois, de ce qui pourrait être et ne pas être fait, dans les prochains mois, dans les prochaines années, parmi tous les projets en cours.
Une suggestion (une seule) pour l’année prochaine : étaler la densité des interventions sur deux jours, ce qui laisserait au débat, aux questions, une place plus large que ce qui a été permis, non par les organisateurs qu’on devinait tout acquis à cette cause, mais par l’emploi du temps.