Voyages en botanique
Voyages en botanique a été élaboré par l’Accolad 1 à l’initiative de la région Franche-Comté, pour mettre en valeur les nombreux documents précieux conservés dans la région 2.
Soulignons d’emblée l’excellente présentation de ce DVD, évoquant elle-même l’édition botanique. Trilingue (français, anglais et allemand), il témoigne aussi d’un souci de large diffusion, que justifie l’environnement géographique régional. Le menu permettant la navigation adopte le ton ludique annoncé par les auteurs. Une branche dont chaque rameau peut s’épanouir en fleurs figure les diverses options. L’ensemble, clair, permet à tout moment de passer d’un chapitre à l’autre. Les petites flèches permettant la navigation sur plusieurs pages pour un sujet donné seront peut-être jugées trop discrètes : c’est la rançon d’un choix esthétique mené avec constance. L’on peut aussi regretter l’absence d’une aide contextuelle, et le maniement de la barre d’outils n’est pas tout à fait intuitif. Il serait toutefois dommage que les petites imperfections de la forme occultent le fond.
Une courte introduction présente les fonds numérisés, herbiers, manuscrits, dessins et livres imprimés conservés par plus de quarante bibliothèques, municipales ou universitaires, musées ou muséums, archives ou sociétés savantes, sur une période s’étendant de la Renaissance à nos jours.
Les diverses séquences offrent ensuite diverses approches des fonds. « Admirer » permet de vagabonder de document en document, dans le département de son choix. Une légende permet à tout moment de préciser succinctement la source. Il n’est cependant pas possible d’en maintenir l’affichage durant le défilement des images.
Le chapitre « Imaginer » se décline en plusieurs séquences – « utopie sociale et florale », « fleurs ornementales », « herborisations d’artistes », « jardins » – qui proposent des rapprochements intéressants avec d’autres arts ou techniques, par exemple avec des œuvres de l’École régionale de Besançon, et font place à des réalisations contemporaines. De même, les « impressions tissées » mettent en regard des gravures ou autres illustrations et leur déclinaison par quelques grandes manufactures d’étoffes 3, comme les planches de Besler (1561-1619), reprises par Scheurer-Rott et fils (Thann) en 1894, les étoffes d’Oberkampf (Jouy-en-Josas) inspirées de Lamarck, ou, beaucoup plus près de nous, ces étoffes d’ameublement de Gaston y Daniela (1992) d’après Linné.
« Identifier » donne un aperçu de l’histoire de la botanique et des classifications. « Transmettre » envisage l’avenir de la flore sauvage du XXIe siècle, notamment à travers l’ethnopharmacologie, et rassemble divers conseils donnés aux débutants.
Le chapitre « Botanistes » propose une liste classée par siècle des grands noms de l’édition botanique. Y figurent même des botanistes dont aucun ouvrage n’a été recensé en Franche-Comté, ainsi que des illustrateurs ayant travaillé pour des botanistes, tel ce Pierre Peña, narbonnais collaborateur de Matthias de L’Obel. Cette liste confirme le souci d’élaborer un outil de référence. Un regret toutefois : l’absence d’index, que ne pallie que partiellement la base de données.
Celle-ci permet une approche plus théorique et documentaire et propose de « Rechercher » par auteur, titre, année, lieu de conservation… dans les 2 365 notices détaillées. L’on peut visualiser des illustrations, accéder à la notice biographique d’un auteur, puis revenir à la recherche.
« Voyager » aborde le second volet de ce DVD qui, après une incursion dans le temps et l’œuvre des botanistes, fait une large place aux expéditions scientifiques dont le rôle fut essentiel pour l’émergence de cette science nouvelle : voyages en France-Comté, d’abord, puis évocation des grandes expéditions des XVIIIe et XIXe siècles.
Une bibliographie générale et les coordonnées des établissements complètent ce document, et la liste des crédits témoigne de l’ampleur des collaborations mises en œuvre pour le publier.
Largement diffusé dans les bibliothèques 4, Voyages en botanique, destiné d’abord au grand public, apporte une utile contribution à l’histoire de la botanique et affiche son ambition de susciter de nouveaux travaux.
Dans les illustrations d’une grande qualité, l’on trouvera matière à comparaison entre les fonds présentés ici et d’autres fonds. Chaque confrontation entre ce type de fonds, au sein d’une même région, voire au-delà, est en effet fructueuse et met en lumière les réseaux qui ont favorisé le développement de cette science, permettant de rassembler des œuvres parfois éclatées ou contribuant à la géographie d’une espèce. La matière ici réunie aurait pu permettre d’évoquer plus largement l’illustration botanique et son évolution, aspect qui a fortement influé sur l’histoire du livre scientifique illustré. Mais gageons que l’outil proposé aujourd’hui aux chercheurs leur permettra de poursuivre leurs travaux dans ce domaine également.
L’Accolad, dont la réputation dans le domaine de l’histoire du livre n’est plus à établir, nous offre ici un bel exemple de coopération, dont la réussite devrait susciter des émules.