Rapport annuel 1999

par Laurence Tarin

Inspection générale des bibliothèques

Rapport annuel 1999. - Paris : IGB, 2000. – 103 p. ; 30 cm.

Le rapport annuel de l’Inspection générale des bibliothèques (IGB), dont la forme évolue peu par rapport aux années précédentes, est un bilan de son fonctionnement et de ses activités en 1999. Y sont exposés les thèmes abordés lors des contrôles et visites et y est proposée une synthèse des évolutions observées par les inspecteurs généraux au sein des différentes bibliothèques.

Les résultats de deux missions importantes réalisées en 1999 sont également publiés. Il s’agit d’une part de la mission d’expertise relative à la Bibliothèque nationale de France (BnF), confiée à Albert Poirot à la suite du conflit social qui a marqué cet établissement et, d’autre part, de la mission d’étude sur le métier de bibliothécaire prise en charge par deux inspecteurs généraux dans le cadre de la réflexion que mène sur ce sujet le Conseil supérieur des bibliothèques (CSB).

Parmi les annexes, on remarque la synthèse des réflexions du groupe de travail « Offre documentaire » qui participe au projet du futur musée de l’Homme, des Arts et de la Civilisation et un texte sur les bibliothèques des villes anciennes de Mauritanie.

Avant d’aborder le bilan des activités de l’IGB, le rapport de 1999 rappelle comme de coutume les missions générales de l’Inspection – on trouvera d’ailleurs en annexe l’ensemble des textes concernant l’Inspection générale. On note qu’il a été décidé en 1999 d’ajouter à l’arrêté d’organisation du ministère de l’Éducation nationale qu’il existe trois inspections générales dont l’IGB. Le décret régissant les conservateurs et les conservateurs généraux a également été modifié afin que le ministère de la Culture et de la Communication puisse être consulté sur la nomination de conservateurs généraux chargés de missions d’inspection et sur celle du doyen de l’Inspection. À ce propos, rappelons que fin 1999, c’est à Jean-Luc Gautier-Gentès que la responsabilité de l’IGB a été confiée.

Les contrôles et visites

En ce qui concerne les contrôles et les visites, le rapport fait état de 73 déplacements des différents inspecteurs. Pour les bibliothèques de lecture publique, ces déplacements sont programmés par la Direction du livre et de la lecture (DLL) suivant les propositions des Directions régionales des affaires culturelles (DRAC). Fait nouveau, ces propositions ont parfois pour origine la demande d’une collectivité territoriale en particulier dans le cas de problèmes de direction et de conflits de personnel.

Par ailleurs, plusieurs inspections de bibliothèques municipales étaient liées à l’élaboration d’un programme de bibliothèques municipales à vocation régionale (BMVR). Parmi les thèmes récemment abordés lors des inspections, l’IGB a remarqué l’intérêt porté aux politiques documentaires et au pluralisme des collections aussi bien par les bibliothèques municipales (BM) que par les bibliothèques départementales de prêt (BDP).

Un débat semble également s’ouvrir sur le contenu des médiathèques (les nouvelles technologies se substituant parfois aux secteurs audio et vidéo). À propos des BDP, l’IGB note que le sujet dominant concernait la restructuration des dessertes grâce à l’élaboration de plans de développement de la lecture, notamment dans le contexte de l’intercommunalité.

Pour les établissements de l’enseignement supérieur, le programme suivait essentiellement le rythme des contrats quadriennaux passés entre les universités et le ministère de l’Éducation nationale. Là aussi, les inspecteurs se sont intéressés à la politique documentaire et ont noté que les universités sont de plus en plus exigeantes en ce qui concerne la visibilité des politiques d’acquisition. L’IGB incite d’ailleurs les services communs de la documentation (SCD) à formaliser leurs partenariats documentaires. L’IGB remarque d’autre part que les charges financières des SCD (prises en charge des infrastructures, prélèvements des universités) sont inégales. Elle met également en lumière une lacune du décret de 1985 qui ne prévoit pas d’autres responsabilités que celles de directeur ou de chef de section, alors que de nouveaux modes d’organisation (développement de services centraux, partage entre services publics et services internes) apparaissent et qu’émergent donc de nouveaux postes à responsabilité.

Enfin, il est rappelé que, comme les autres années, plusieurs missions concernant la conservation ont eu lieu, que les inspecteurs participent toujours activement aux travaux des divers organismes internationaux (Unesco, Ifla, etc.) et qu’ils président les jurys de concours et d’examen (une des annexes fait d’ailleurs le bilan de cette dernière activité).

La Bibliothèque nationale de France

Par ailleurs, le rapport annuel de l’IGB s’attarde plus particulièrement sur la mission confiée à Albert Poirot au sujet de la BnF. En 1999, M. Poirot a en effet remis à la ministre de la Culture et de la Communication un rapport faisant la synthèse des propositions des groupes de travail mis en place par la direction de la BnF et l’intersyndicale à la suite du conflit de 1998.

L’IGB revient sur les réactions médiatiques qui ont fait suite à la diffusion de ce rapport, les articles publiés mettaient l’accent sur la sévérité des constats concernant l’architecture et sur la nécessité d’introduire d’autres modes de gestion des personnels. L’Inspection profite également de ce rapport annuel pour expliquer que ce qui lui importait était de « participer à l’élaboration de solutions propres à renouer le dialogue social » et qu’il ne s’agissait pas pour elle de réaliser une opération « d’inspection, d’audit ou de médiation ». À propos de l’organisation de la BnF, l’IGB a souhaité attirer l’attention sur quelques points importants concernant les personnels : les modes de recrutement et de formation, de dialogue social…, les bâtiments : adaptation aux besoins, entretien…, les fonds documentaires : la départementalisation, la documentation électronique, le dépôt légal…, les publics : la relation avec les chercheurs, les heures d’ouverture, les relations avec le site Richelieu, l’Institut national d’histoire de l’art, la bibliothèque de l’Arsenal…

L’IGB conclut en citant quelques phrases du rapport de M. Poirot qui attirent l’attention sur les dangers « qu’il y aurait à minimiser les raisons profondes du mécontentement » et sur les contradictions que devra surmonter l’établissement.

Le métier de bibliothécaire

Hormis ces remarques portant sur le processus de réflexion visant à améliorer le fonctionnement de la BnF, l’IGB fait une part importante dans son rapport annuel aux études sur le métier de bibliothécaire entreprises en collaboration avec le Conseil supérieur des bibliothèques. Deux enquêtes ont été réalisées auprès des conservateurs d’État, l’une portant sur leur parcours professionnel et leur mobilité et l’autre sur leur activité de publication.

La première étude a été réalisée à partir des données des dix dernières commissions administratives paritaires (CAP). Il en ressort que la mobilité (interministérielle et interétablissements) est forte en début de carrière, cependant elle est moindre au niveau des postes de responsabilité et de direction. L’étude détaille les différents types d’établissements relevant du ministère de la Culture et de la Communication 1 et du ministère de l’Éducation nationale 2 et indique en pourcentage le nombre de conservateurs issus d’un type d’établissement à être nommés dans un autre type d’établissement. Cette enquête fait apparaître également la mobilité interrégionale et le mouvement interne aux régions, ce qui permet de déduire un certain nombre de remarques sur l’attractivité des emplois. On s’aperçoit, par exemple, qu’en Ile-de-France, les emplois de direction et d’adjoints attirent des candidatures nombreuses, alors que même les postes de direction attirent peu de candidats dans certaines zones de province comme le centre de la France, mais aussi Bordeaux et Strasbourg. De même, l’IGB note que les candidatures uniques, exceptionnelles dans les bibliothèques universitaires, ne sont pas rares dans les bibliothèques municipales classées. Les chiffres fournis par l’étude sont intéressants, mais malheureusement, les données (relativement réduites) issues des CAP n’ont pas permis, semble-t-il, de réaliser une analyse qualitative et de déterminer les critères de choix des nominations à des postes de direction.

En ce qui concerne la seconde étude sur les publications scientifiques des conservateurs d’État, on soulignera au préalable qu’elle a été réalisée à partir d’un corpus de publications relevant uniquement du champ professionnel concernant le livre et la lecture. Le CSB et l’IGB ont en effet travaillé à partir de l’histoire des bibliothèques françaises, de l’histoire de l’édition française, de la collection « Bibliothèques » des Éditions du Cercle de la librairie et de deux revues professionnelles : le Bulletin des bibliothèques de France (sur dix ans) et le Bulletin d’informations de l’Association des bibliothécaires français (sur six ans). Les rédacteurs de l’étude se sont attachés à identifier l’origine des conservateurs auteurs. Ils montrent que, si l’on rapporte le nombre des auteurs à l’effectif de chaque groupe de conservateurs identifié, on s’aperçoit que le contexte universitaire (BU), curieusement, ne joue pas un rôle d’incitation à l’écriture, mais qu’en revanche, l’activité de formation (CRFCB, Enssib) et les nominations en administration centrale ou dans des établissements d’envergure nationale (en particulier la BnF) semblent la favoriser. Ils notent également qu’un quart des conservateurs des BMC font part de leur réflexion. Les auteurs sont très souvent des directeurs d’établissements, ce qui semble logique lorsqu’il s’agit d’articles rédigés pour rendre compte d’une action de la bibliothèque où ils sont affectés.

L’étude s’intéresse aussi aux sujets abordés par les conservateurs auteurs. Les conservateurs des SCD semblent être particulièrement préoccupés par les nouvelles technologies ; ceux des BMC portent une attention particulière au patrimoine. L’IGB évoque également l’origine géographique des auteurs et les liens existant entre écriture et statut, l’Inspection conclut en affirmant qu’il conviendrait de favoriser davantage l’activité d’écriture des conservateurs.

Annexes

Des annexes, on retiendra un compte rendu partiel des travaux de la mission de préfiguration du musée de l’Homme, des Arts et de la Civilisation. Jean-Luc Gautier-Gentès a en effet réalisé une synthèse des réflexions du groupe de travail sur l’offre documentaire.

Le groupe de travail en question, après avoir réaffirmé la mission d’étude et de recherche de la bibliothèque, souhaiterait qu’une politique d’achat soit formalisée avec le concours des conservateurs et des chercheurs attachés au musée et espère que cette politique parviendra à éviter l’écueil de l’hyperspécialisation comme la tentation de l’encyclopédisme. Le groupe de travail précise que deux espaces distincts, l’un voué à la recherche, l’autre à une salle d’actualité et d’information, devront être aménagés et indique le nombre d’ouvrages qui devront être disposés dans chaque espace. Il est également question du système informatique à mettre en place et des moyens nécessaires.

L’annexe 3, où Jean-Marie Arnoult expose le projet de sauvegarde des bibliothèques anciennes de Mauritanie, est également digne d’intérêt. On y apprend que la réhabilitation des bâtiments abritant des bibliothèques est prévue, ainsi que l’inventaire et le catalogage des documents et qu’un plan de formation des personnels locaux au traitement des documents (nettoyage et conditionnement) est à l’étude.

Grâce à ce rapport, l’IGB rend compte la grande diversité de son activité et nous permet, ce qui n’est pas si courant, de porter un regard transversal sur l’ensemble des bibliothèques.

  1. (retour)↑  Bibliothèque publique d’information, BnF, bibliothèques municipales classées-BMC.
  2. (retour)↑  Bibliothèques universitaires, École nationale supérieure des sciences de l’information et des bibliothèques-Enssib, centres régionaux de formation aux carrières des bibliothèques-CRFCB, instituts universitaires de formation des maîtres-IUFM, grands établissements.