Votre bâtiment de A à Z

mémento à l'usage des bibliothécaires

par Philippe Charrier

Anne-Marie Chaintreau

Jacqueline Gascuel

Paris : Éd. du Cercle de la librairie, 2000. – 314 p.; 24 cm. – (Bibliothèques). - ISBN 2-7654-0778-9 : 230 F/35,06 euros.

Voilà un livre auquel j’aurais bien aimé contribuer. Les ouvrages de bibliothécaires sur les bâtiments sont souvent marqués par un manque d’esprit pratique, comme par complexe face à l’architecture, ou par un excès de simplification, avec des recettes rassurantes. Ici, les auteurs, bibliothécaires, ont fait leur travail : un livre simple, bien organisé et complet. Se mettant en situation, les auteurs se sont demandé : « De quoi ai-je besoin, moi, bibliothécaire confronté à un projet de construction, pour comprendre le bâtiment, anticiper sur le déroulement des événements, répondre aux questions de l’architecte et des techniciens, remplir mon rôle? ».

C’est bien connu, quand on aborde quelque chose que l’on ne connaît pas bien, la forme la plus pratique pour trouver ce que l’on cherche comme pour butiner, est encore l’ordre alphabétique. L’esprit du lecteur s’enrichit de manière active, au gré des questions qu’il se pose, des informations, des éléments d’analyse pertinents livrés à sa découverte. Comme dans un dictionnaire, on rebondit de page en page.

L’ouvrage présente cinquante-quatre articles, de « Acteurs d’une opération de construction » à « Zéro » en passant par « Câblage », « Décoration », « Évaluation des surfaces », « Handicapés », « Plan », « Rayonnages », « Sanitaires » ou « Sûreté », pour citer au hasard. À la lecture de la table des articles, on découvre que tout n’est pas traité sur le même plan pour répondre aux besoins pratiques : on trouve des articles un peu généraux, la « Réhabilitation », un encart sur le vocabulaire de l’urbanisme. Voilà pour une initiation. Les rayonnages, quant à eux, font l’objet de quatre articles détaillés. C’est là que l’on nous attend en tant que véritables spécialistes. « Zéro », c’est une blague des auteurs, sans doute pour couvrir le « Z ».

Les articles se présentent de manière homogène. Une citation les accompagne tous. Par exemple, à l’article « Issues de secours », on trouve cette phrase de Georges Duhamel : « Ils ne dédaignent pas les livres qui donnent des chances d’évasion… » ; un encart en grisé expose brièvement : objectifs-mesures-réglementation-attention (points particuliers à prendre en compte). Pour les « Rayonnages de libre accès », l’objectif est de « stocker, dans les meilleures conditions de conservation et de présentation ». C’est clair et ça va mieux en le disant. Pour le mobilier, le point « attention » nous rappelle qu’il faut « concevoir l’implantation des places de consultation informatique et des rayonnages en même temps que l’installation électrique ». Les points « mesures » fournissent les ratios de base.

Le corps de la fiche, de longueur variable de une à cinq pages, peut être organisé en chapitres. Ici encore, la clarté prime. « Circulations » présente les chapitres suivants : « Liaisons » (définition des circulations), « Parcours du public », « Parcours du document », « Parcours du personnel » et « Sécurité et maîtrise des flux ». C’est-à-dire ce qui structure l’espace, surfaces et volumes, de votre futur bâtiment. Il convient peut-être d’insister sur ce point, tant il peut parfois surprendre et embarrasser le bibliothécaire qui aborde l’analyse d’un plan : « Les lignes de cheminement [structurent la bibliothèque] à partir de ses activités. Le système des relations et des liaisons […] crée l’unité du lieu ». Peut-être faudrait-il ajouter la circulation de l’information entre les divers acteurs comme élément structurant. En effet, des informations qui circulent par un réseau, même par le courrier interne traditionnel, ce sont des déplacements d’agents en moins. En pensant circulations, on pensera également « Signalétique » où l’on trouvera les principes à observer pour une bonne signalisation. Il est important que la signalétique soit en accord avec l’organisation même des éléments qu’elle sert : bâtiment ou collections.

À l’article « Rayonnages, vocabulaire », le corps de fiche est une série de définitions. Petit rappel contre un usage ambigu : une travée n’est pas une allée, mais « l’ensemble composé des tablettes superposées, des montants porteurs et des traverses d’assemblage ». Sous la rubrique « Pour en savoir plus », on trouve quelques références bibliographiques. On apprend donc qu’il existe un Lexique illustré des sièges de bureau ou un article complet de 1997, « Les pare-soleil », dans Techniques et architecture. Enfin, quelques renvois faciliteront votre navigation et closent la fiche.

L’ouvrage s’achève sur la recommandation de visiter des bibliothèques avant de construire pour se faire une culture. Suivez la méthode indiquée, la visite prendra alors tout son sens et son utilité. Les listes de bibliothèques récentes, universitaires ou municipales, sont fournies, juste avant la bibliographie générale. Un index de termes renvoie aux articles. Pratique jusqu’au bout.

Peut-être cette orientation a-t-elle écarté une partie sur ce qui fonde le projet architectural, ce qu’on appelle parfois le « projet d’établissement », je préfère le terme de « projet culturel ». C’est souvent ce qui manque et qui entraîne bien des hésitations de notre part en cours de construction. Tout comme l’architecte adopte un « parti architectural » dès l’esquisse, peut-être les bibliothécaires devraient-ils adopter un « parti bibliothéconomique » pour se sentir maîtres de leur projet, aussi bien vis-à-vis de leurs employeurs que des architectes, qui leur en sauront gré. Il y a là matière à développer. Mais c’est peut-être l’objet d’un autre ouvrage.