Les ressources électroniques
Annie Le Saux
Le 19 juin 1998, la Sous-Direction des bibliothèques et de la documentation a réuni les directeurs des établissements dépendant de l’enseignement supérieur pour faire le point sur sa politique de développement des ressources électroniques. Car, bien que les fonctions documentaires soient restées les mêmes, l’émergence des réseaux a apporté des modifications dans de nombreux domaines, depuis les pratiques documentaires et les pratiques professionnelles jusqu’aux usages.
Des responsabilités plus lourdes ont été conférées à ceux qui ont en charge les ressources documentaires, concernant :
– l’évaluation de l’offre, qui doit s’appuyer sur une veille technologique collective ;
– la sélection et l’acquisition (données hébergées ou accès à distance à ces données). On est face à une offre multiforme, avec des acteurs nombreux, où s’imbriquent les aspects scientifique, juridique et commercial ;
– le traitement de l’information, grâce à des possibilités nouvelles offertes par les métadonnées, dtd…
– la mise à disposition, qui implique d’avoir des outils capables de gérer les accès ;
– la formation des usagers, qui renforce la fonction de médiateur des services documentaires.
Pour faire face à ce contexte mouvant, Claude Jolly pense qu’il est nécessaire de mutualiser les expériences en cours et de les faire connaître. C’est dans cet objectif, que furent abordés, tout au long de cette journée, différents programmes et certaines expérimentations pouvant, à plus ou moins long terme, s’appliquer à la communauté des bibliothèques, et que la Sous-Direction des bibliothèques et de la documentation soutient d’ores et déjà ou se dit prête à soutenir.
La numérisation des collections est une des réalisations qui impliquent une politique globale et partagée, sur la définition de laquelle se penche la Sous-Direction. La numérisation des thèses fait partie de ces réflexions. Alain Diez, de la Sous-Direction des bibliothèques et de la documentation, a évoqué plusieurs approches de diffusion générale des thèses par voie électronique, allant de la numérisation par scanner à sa saisie, dès le départ, directement sous forme électronique.
Expériences en cours
Parmi les démarches nouvelles engagées par certaines universités, citons celle de l’université de technologie de Troyes, dont le système d’information fut présenté par Sabine Barral, directrice du service commun de la documentation de cette université. Les ressources électroniques offertes aux lecteurs englobent les documents produits par l’université – notices du catalogue de la bibliothèque, documents numérisés, dont les thèses, polycopiés, documentation administrative… – et les ressources externes à l’université, comme les cédéroms bibliographiques, les bases de données sur Internet… Pour l’instant, aucune décision n’a été prise concernant les revues totalement électroniques, qui posent le problème du coût de l’abonnement et de celui de l’archivage.
Le cas décrit par Annie Motais de Narbonne, directrice de la Bibliothèque de l’Université de Paris xi, peut être considéré comme l’exemple de la première démarche de consortium française. Il s’agit en l’occurrence de l’organisation par auroc d’achats groupés de services documentaires oclc. Faire partie d’un consortium permet de négocier les offres ainsi que les prix, mais il faut être conscient qu’une participation à plusieurs consortiums est nécessaire pour satisfaire l’ensemble des besoins de chaque établissement.
Dans un marché instable, où l’on assiste à des phénomènes de concentration, où les acteurs sont multiples (éditeurs, producteurs et intermédiaires), les négociations avec les fournisseurs de ressources électroniques sont complexes. C’est avec beaucoup de clarté que Clarisse Marandin, de la Sous-Direction des bibliothèques et de la documentation, nous a fait découvrir les arcanes de ces négociations. Après en avoir exposé les intérêts et les objectifs : acquisition des ressources électroniques à moindre coût, adaptation des conditions de l’offre et amélioration de sa qualité, Clarisse Marandin a souligné à quel point il était important, pour une bibliothèque, de formaliser ses besoins et sa politique documentaire. Les réductions obtenues depuis que les négociations existent encouragent à continuer dans cette voie, malgré la complexité des démarches à entreprendre.
Webdoc, Picarta et Delta
Le concept de Webdoc, présenté par Francien Van Bohemen, de pica, a consisté à se servir de la technologie du réseau pour donner accès aux documents électroniques, qu’il s’agisse de documents gratuits, sous licence ou payants. Une étude de faisabilité a eu lieu afin d’étendre à la France l’expérience de ce service d’accès aux documents électroniques, déjà réalisé auprès de neuf bibliothèques universitaires aux Pays-Bas et de six en Allemagne. L’Agence bibliographique de l’Enseignement supérieur (abes) est impliquée dans ce projet, pour lequel, de juillet à octobre 1998, les universités participantes seront sélectionnées. La mise en œuvre se fera d’octobre à décembre 1998, le lancement du service de janvier à juillet 1999 et l’évaluation en juin-juillet.
Des perspectives de développement sont envisagées, à travers plusieurs projets, dépeints par Look Costers, de pica :
– Picarta, qui vise à créer une sorte de guichet unique pour l’accès à des sources hétérogènes, est en phase d’évaluation dans quatre bibliothèques ;
– Colibri a pour but d’améliorer les possibilités de recherche thématique dans un contexte de multilinguisme et de pluridisciplinarité ;
– Delta sera un système de gestion et de contrôle transparent pour créer une bibliothèque électronique virtuelle.
L’abes, de par sa structure d’établissement public à caractère administratif et des moyens techniques et en personnel importants, est directement impliquée dans les différents projets abordés lors de cette journée (numérisation des thèses, Webdoc…). Suzanne Santiago, directrice de cet établissement, le verrait bien jouer un rôle d’opérateur national, plaque tournante d’une réflexion globale issue d’expériences et de réalisations en cours.Au cours de cette journée d’étude, la parole fut ainsi donnée aux trois acteurs principaux amenés à travailler ensemble dans le développement des ressources électroniques que sont les établissements, l’abes, et bien sûr l’État, dont le rôle à jouer dans le pilotage des projets et leur financement n’est pas à négliger.