Le livre et la lecture dans les régions de France

La politique du ministère de la culture en région

Raymond Delambre

Cet article dresse un état des lieux des différentes voies de la mise en oeuvre spécifique de la politique culturelle en région, dans un contexte de poursuite du processus de déconcentration. S'appuyant sur de nombreuses données chiffrées, l'auteur met particulièrement l'accent sur la contractualisation et sur le rôle des centres régionaux des lettres et agences de coopération entre bibliothèques qui contribuent au développement du livre et de la lecture en région.

This article draws up an inventory of fixtures for different ways for putting specific cultural policies to work in a region, within a context of a process of decentralization. Relying on numerous given figures, the author puts particular emphasis on the contractualization and on the role of regional centres of letters and offices for co-operation between libraries, which contribute to the development of the book and reading in the region.

Dieser Beitrag gibt eine Zustandsbestimmung der verschiedenen Wege der Umsetzung der Kulturpolitik in der Provinz im Rahmen des Prozesses der Dezentralisation. Indem sich der Autor auf zahlreiche Zahlenangaben bezieht, legt er den Schwerpunkt besonders auf die Vertragsbedingungen zwischen dem Staat und den Gebietskörperschaften und auf die Rolle der regionalen Literaturzentren und Verbindungsstellen zwischen den Bibliotheken, die zur Buch- und Leseförderung in der Region beitragen.

En cette année 1998 de poursuite de la déconcentration, processus dont se fait l’écho la grande presse elle-même, il nous semble opportun de présenter un aperçu de l’action régionale menée dans le secteur livre et lecture 1. Il importe néanmoins de souligner au préalable que 1998 n’est que la continuation sinon l’aboutissement d’un processus lancé depuis déjà plusieurs années : le texte à la fois emblématique et juridique est la loi d’orientation n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République, sachant que la réflexion relative à la rénovation du service public avait été lancée par Michel Rocard dans les années 1988 et 1989.

Qui plus est, le secteur livre et lecture était déjà, pour sa plus grande part, déconcentré avant 1998, à la différence d’autres secteurs culturels comme ceux du théâtre et de la musique. A ce titre, les chiffres extraits des bilans d’activité 1995 des DRAC (Directions régionales des affaires culturelles), que nous exploitons notamment ici, demeurent des indicateurs utiles des tendances actuelles. Pour emprunter une image, 1998 et l’approfondissement de la déconcentration représentent pour le secteur livre et lecture quelque chose de comparable à la rétrocession de Hong-Kong, sachant que l’action menée par les acteurs en région représentait déjà la Chine continentale.

Dans cet article, nous avons en particulier pris le parti d’éclairer ce qui apparaît trop souvent comme des « boîtes noires » du point de vue de celui qui s’intéresse au secteur culturel spécifique constitué par le livre et la lecture : il sera donc rendu compte de ce qu’il est convenu d’appeler les « structures régionales » (agences de coopération entre bibliothèques et centres régionaux des lettres), ainsi que des démarches contractuelles de droit commun (des conventions de développement culturel aux contrats de plan État-région en passant par les contrats de ville). De même, on se préoccupera de ce qui pourrait passer inaperçu parce que débordant les limites régionales : la mise en œuvre interrégionale des activités livre et lecture ; dans le même ordre d’idées, on évoquera des tropismes régionaux. Il s’agira encore de souligner l’importance, pour le livre et la lecture en région, de crédits, certes non inscrits au budget du ministère de la Culture, mais décisifs le cas échéant : les crédits communautaires.

Au total, nous nous efforcerons de bémoliser le campanilisme administratif 2, qui aboutit trop souvent à une vision éclatée de l’action de l’État.

Données générales

De manière globale, si l’on raisonne en termes de taux de subventions par habitant (sur la base des crédits de titre IV 3 du ministère de la Culture consommés en 1995), la tendance générale est celle d’un volume de subventions inversement proportionnel au peuplement des régions considérées, ce qui constitue un indicateur d’une politique de redistribution en faveur des régions les plus pauvres. Bénéficient d’un taux nettement supérieur à la moyenne, outre les régions d’outre-mer (Guyane, Guadeloupe, Martinique, La Réunion) et la Corse, les régions Limousin et Champagne-Ardenne. A noter que les régions Basse-Normandie, Franche-Comté et Bretagne bénéficient aussi d’un taux « bonifié ».

Conjointement aux moyens déconcentrés par la Direction du livre et de la lecture (DLL), il convient de souligner la fongibilité croissante des crédits en région. Pour prendre quelques exemples, on notera que l’association socio-éducative de la région de Cognac a bénéficié de crédits non déconcentrés par la DLL pour l’action de formation de « RMIstes » dans le cadre de la Ruée vers le livre ; de manière plus générale, les DRAC parviennent, le cas échéant, à faire bénéficier les projets d’investissement de libraires de crédits du titre VI globalisé en DRAC, non déconcentrés par la DLL.

De même, on ne peut désormais faire l’impasse sur les crédits communautaires : en Poitou-Charentes, le FEDER (Fonds européen de développement régional) a contribué à hauteur de 7 MF à la construction de la bibliothèque centrale de La Rochelle. En Aquitaine, la DRAC a une politique « territoriale » qui permet à ses partenaires de bénéficier fortement des crédits communautaires : sur les crédits du FEDER, sont alloués 243 KF pour le relais-livres en campagne d’Arzacq, 275 KF pour le site relais-livres en campagne de Mazerolles, 10,2 MF pour la BM (bibliothèque municipale) de Mérignac, 190 KF pour l’annexe de la BM de Pau au quartier Ousse-des-Bois, 41 KF pour l’achèvement d’une BM à Mézin. Il convient encore de relever le cas de la Lorraine, dont un bon nombre de projets de bibliothèques bénéficient de crédits communautaires : quelque 8,3 MF ont été recueillis pour les bibliothèques de Bar-le-Duc, Bitche, Mont-Saint-Martin, l’enveloppe communautaire affectée aux bibliothèques pesant ainsi d’un poids équivalent à la deuxième part du concours particulier de la dotation générale de décentralisation.

L’aide à la librairie

Pour la librairie, devenue la priorité absolue du ministère de la Culture en 1995, l’effort national en 1993 représentait 9,37 % des crédits du titre IV affectés au secteur livre et lecture, 13 DRAC dépassant la moyenne ; en 1994, la hausse était de plus de deux points : 10,58 %, 7 DRAC dépassant la moyenne. Pour 1995, l’effort s’accroît encore en passant à 11,03 %, 9 DRAC dépassant cette moyenne.

Pour 1995, on doit ajouter aux 4 568 320 F de titre IV consacrés à la librairie, 675 KF de titre VI dans le cadre du programme spécifique des équipements de proximité, ainsi que 816 630 F de titre VI de droit commun (globalisé en DRAC).

De 1992 à 1995, ce sont un peu plus de 19 MF qui ont été consacrés à la librairie, l’effort des DRAC s’étant nettement accru depuis 1994. Par rapport à 1992 ou 1993, le volume annuel de crédits affectés à la librairie a augmenté de plus de 60 %, passant de 3 744 800 F en 1992 à 6 059 950 F en 1995.

Agences de coopération entre bibliothèques et centres régionaux des lettres

Les agences de coopération et les centres régionaux des lettres (CRL) constituent des acteurs importants du livre et de la lecture en région – de par leur nombre (27), et de par les masses budgétaires concernées (de l’ordre de 40 MF en prenant en compte toutes les entités, la contribution globale des DRAC s’élevant à une dizaine de MF) –, susceptibles de contribuer à la structuration de l’intervention culturelle.

C’est dans la perspective de structuration du territoire régional, grâce notamment aux CRL (et afin d’éviter le risque de doublonnage par rapport à l’activité des DRAC), que la déconcentration auprès des DRAC du financement des CRL, auparavant financés, entre autres, par le Centre national du livre, a été décidée, les DRAC étant à même de suivre au plus près la contribution des CRL à l’aménagement culturel du territoire régional.

Les agences et les centres régionaux des lettres sont constitués sous la forme associative (loi 1901), à l’exception du Centre régional du livre de Champagne-Ardenne et de celui de Picardie, qui n’ont pas de personnalité morale et font partie de leurs offices culturels régionaux respectifs. De même, s’agissant de Provence-Alpes-Côte d’Azur, les actions livre et lecture sont menées dans le cadre de l’Office régional de la culture.

Pour 1994, on constate que la part du financement des DRAC dans le budget des 21 agences et CRL, dont le budget est communiqué, est de 24,42 %, celui des conseils régionaux de 52,40 %. Le pourcentage des DRAC dans le budget des 12 agences s’élève à 48,84 %, celui des conseils régionaux n’est que de 12,62 %. La part des DRAC dans le budget des 9 CRL (concernant notamment les structures aux missions à la fois « CRL » et « agence ») est de 17,53 %, la participation des conseils régionaux se montant à 63,51 %.

Pour 1995, la contribution des DRAC au budget des 22 agences et CRL à budget communiqué – Institut culturel de Bretagne (ICB) non compris : part du conseil régional non communiquée – est de 27,82 %, celle des conseils régionaux de 46 %. La participation des DRAC au budget des 14 agences est de 44,07 %, celle des conseils régionaux de 16,11 %. Le soutien des DRAC au budget des 8 CRL (concernant notamment les structures à la fois « CRL » et « agence » ; ICB non compris) représente 17,46 % des budgets, celui des conseils régionaux quelque 65,07 %.

S’agissant de l’action, une typologie thématique peut être établie à l’intérieur du large spectre des interventions des agences de coopération et centres régionaux des lettres : ces structures peuvent s’occuper de communication, d’expositions, d’information bibliographique, de sauvegarde du patrimoine, de librairie, d’édition, de vie littéraire, de création (bourses d’écriture), de développement de la lecture, de formation enfin.

Le CRL d’Aquitaine se caractérise probablement par le rôle qu’il joue en termes d’irrigation culturelle du territoire, tout à fait en phase avec la politique « territoriale » menée par la DRAC : un exemple emblématique de l’aménagement culturel du territoire que pratique le CRL pourrait être le produit Totem, espace mobile de lecture pour la petite enfance destiné à circuler dans toute la région, en particulier dans les petites communes.

Dans le même ordre d’idées, il faut se féliciter que la manifestation phare des Ambassades (rencontres avec des écrivains et éditeurs), dont l’opérateur est l’ex-AGIR, soit décentralisée à travers la région Centre. La vie littéraire en Poitou-Charentes bénéficie également du CRL, dont les Écrivains présents (rencontres avec des écrivains) concernent, au delà des étudiants, un public plus large dans le département de la Vienne, la bibliothèque départementale de prêt sachant relayer et démultiplier l’événement.

En Midi-Pyrénées, il convient de relever la fort intéressante politique partenariale menée par la DRAC et le conseil régional en faveur de la librairie : depuis 1995, un système d’aide conjoint conseil régional-État a été mis en place grâce au CRL, ce qui démontre l’importance qu’occupe la question de la diffusion du livre aux yeux du partenaire régional.

Le fait que certains CRL puissent aider la librairie de manière déterminée et directe étaye la conclusion de l’étude Le Livre dans les Régions d’Europe selon laquelle « Être compétent juridiquement : là n’est pas la question. On trouve (…) une province danoise, une autonomie espagnole, deux régions françaises, deux provinces finlandaises et une suédoise pour affirmer ne pas avoir de compétences en matière culturelle, alors même que les autres régions de leurs ensembles nationaux respectifs en revendiquent. Cela n’empêche d’ailleurs pas les régions concernées d’agir dans le domaine culturel. Mais c’est là plus l’illustration d’une certaine rhétorique, visant à critiquer l’avancée de la décentralisation dans leur propre pays, ou à justifier légalement une non-intervention dont les bases sont avant tout affaire de choix budgétaire » 4.

S’agissant des actions menées, et afin de rendre compte des différences régionales voire des disparités, on pourrait autant que nécessaire utiliser et décliner la conclusion de cette étude, qui souligne l’importance du retentissement du politico-culturel sur l’action régionale, en indiquant que c’est le « facteur culturel qui a le plus d’impact sur l’état des lieux régional. Les divergences nationales quant à la conception “culturelle et politique” du livre ouvrent sur d’intéressantes distinctions macro-régionales. Grosso modo, on peut distinguer deux types de rapport au livre :

– celui qui fait de l’objet livre un produit culturel, non politique, et où l’enjeu politique est concentré dans une problématique de l’accessibilité. On retrouve, dans ce camp, la plupart des pays qui ont été, et sont souvent encore, marqués par le Library Act de 1850. Il rassemble une grande partie des pays du Nord européen. Il pèse sur les choix régionaux dans le sens d’une action structurée et légitime dans le domaine de la lecture publique, des bibliothèques.

celui qui fait de l’objet livre lui-même un enjeu politique, et où la lecture, par contre, est considérée traditionnellement comme une affaire privée. C’est le camp des pays latins, dans lequel se pense plus volontiers le rôle politique des auteurs que celui des lecteurs. Il influe sur les choix régionaux dans le sens de la diversification des domaines d’actions, et d’un rôle corrélativement moindre de l’action sur la lecture publique » 5.

On remarquera, au demeurant, avec l’étude du conseil régional du Languedoc-Roussillon, que la création d’une structure du type CRL est rare au niveau européen : le « modèle français » des CRL n’a guère fait florès.

Sur un plan prospectif, on constate une tendance, sinon à la fusion des structures quand existent dans la même région à la fois une agence de coopération et un CRL, en tout cas à l’adjonction de « missions CRL » – c’est-à-dire, pour faire bref, de missions concernant la vie littéraire – aux agences, quand celles-ci sont seules en région. S’agissant de l’hypothèse de fusion, elle s’est concrétisée en Basse-Normandie en 1994, l’Agence Rhône-Alpes pour le livre et la documentation (ARALD) étant la première structure fusionnée. Quant à la piste de l’adjonction de missions, l’agence AGIR est devenue CRL en région Centre en 1997 (sachant que dès l’origine d’AGIR, l’interprofession était bien présente au sein de cette association de coopération), le processus avance vite en Bourgogne, avec ABIDOC qui étend ses missions et son audience, en particulier auprès du conseil régional. Il conviendrait encore de citer l’Auvergne, la Haute-Normandie, le Limousin. Dans le sens inverse, le CRL de Midi-Pyrénées fait fonction d’agence de coopération.

Naturellement, cette tendance, en se confirmant, rééquilibrerait, sur le plan politique et du partenariat État-conseil régional, les « agences », et permettrait de revenir sur la part minoritaire que prennent les conseils régionaux à leur financement.

Les outils contractuels d’une politique du livre et de la lecture en région

A la fongibilité des crédits en région répond la globalisation des procédures, notamment contractuelles : il s’agit donc de rendre compte de la politique de contractualisation de droit commun menée par les services déconcentrés dans le secteur du livre et de la lecture. Par contractualisation, il faut entendre passation de conventions entre l’État et les collectivités territoriales, puisqu’est révolue l’époque où Gustave Larroumet, directeur des Beaux-Arts au début des années 1880, constatait que « l’incohérence municipale, compromettant l’unité de l’art, est un fléau ».

De la formule spécifiquement culturelle au cadre le plus général, il convient d’évoquer les conventions de développement culturel (CDC) – formule contractuelle propre au ministère de la Culture que celui-ci propose à ses partenaires –, les contrats de ville, et enfin les contrats de plan État-région (CPER). Trop souvent, le risque est avéré que ces démarches contractuelles ne se transforment en « boîtes noires », empêchant une vision « sectorielle » livre et lecture, si bien que l’« exploitation » des informations en ce domaine se réduit le cas échéant à abonder la rubrique de la « transversalité » (les CDC en particulier ont vocation à concerner plusieurs secteurs culturels). De plus, l’heure est à la relance de la politique contractuelle du ministère de la Culture puisque, comme on le verra, une baisse tendancielle de la contractualisation peut être repérée.

Ainsi, la circulaire d’emploi des crédits déconcentrés pour 1998, circulaire qui constitue la « bible » des DRAC, est tout à fait explicite sur la relance dont il convient de faire bénéficier la contractualisation : « L’accent sera mis sur la contractualisation avec les collectivités territoriales. Les conventions de développement culturel [notamment] seront les outils privilégiés de cette démarche ». 6 Ou encore au titre des « consignes de mise en œuvre » : « Vous inscrirez votre action le plus souvent possible dans le cadre d’une contractualisation avec les partenaires du ministère de la Culture et de la Communication. Vous privilégierez la signature de conventions impliquant plusieurs secteurs et s’inscrivant dans la durée ». 7

Conventions de développement culturel

S’agissant des conventions de développement culturel, 166 CDC et avenants ont été identifiés en 1993, engageant l’État à hauteur de 113 MF ; 64 comportent un volet livre et lecture pour un total de près de 8 MF : si 38 % des CDC ont ce volet, l’ensemble des volets représente un peu moins de 7 % de la contribution totale de l’État.

Pour 1994, 143 CDC engagent l’État à hauteur de 51 MF ; 60 ont un volet sectoriel livre et lecture pour un total de près de 7 MF ; la position relative du secteur « s’améliore » : près de 42 % des CDC répertoriées citent le secteur livre et lecture, ce qui représente 13,5 % de la contribution totale de l’État.

Pour 1995, 84 CDC engagent l’État pour près de 26 MF ; 33 comportent un volet sectoriel livre et lecture, pour un total de près de 2,5 MF : plus de 39 % des CDC citent le secteur, représentant près de 9,5 % de la contribution totale État.

On peut encore comparer avec les 169 CDC recensées par le Département des études et de la prospective (DEP) du ministère de la Culture et avec les 7,5 % de crédits dévolus au livre et à la lecture pour 1992 8 le secteur livre et lecture étant cité dans moins d’un tiers des CDC.

Ce secteur épouse ainsi les fortes fluctuations de la politique contractuelle menée en région, en l’espèce à la baisse.

Une tendance semble pérenne : la baisse du volume financier moyen par convention du volet livre et lecture. Après être passé de 123 KF pour 1993 (64 volets sur un total de près de 8 MF en 1993) à 116 KF pour 1994 (60 citations sur un total de près de 7 MF), il passe encore à 75 KF pour 1995 (33 citations sur un total de près de 2,5 MF). Ce peut être considéré comme le signe de vaches maigres budgétaires, mais aussi celui d’un effet multiplicateur accru des subventions de l’État.

Seule la DRAC Martinique est identifiée comme n’ayant réalisé aucune passation de convention de développement culturel à la fois en 1993, 1994 et 1995.

Pour 1994, 8 structures intercommunales (2 districts, 2 syndicats, un établissement public de coopération intercommunale, un pays, un plateau, un « carrefour » 9) bénéficient d’un financement au titre du volet livre et lecture d’une convention de développement culturel ; pour 1995, 6 cas sont repérés (2 districts, 3 syndicats, un établissement public de coopération intercommunale). Le volume financier accordé par l’État dans le secteur livre et lecture à ces structures représentait, en 1993, seulement un peu plus de 3 % de l’ensemble alloué dans ce secteur, pour 1994, 12,59 % : la tendance d’une propension du secteur à s’insérer dans le cadre intercommunal semble se confirmer, puisque pour 1995 la proportion est de 15 %. Celle-ci pourrait au demeurant s’accroître si une connexion s’établit entre la procédure des conventions de développement culturel et le programme des relais-livres en campagne.

Enfin, on peut adopter le crible du partenariat avec les conseils généraux, retenu par Bertrand Calenge, puisque les conseils généraux et leur BDP (bibliothèque départementale de prêt) sont les aménageurs culturels du territoire de droit commun : « La Direction du livre (…) a permis d’inclure le livre et la lecture dans 22 conventions État-départements de 1986 à 1990 (avec des enjeux très inégaux) ». 10

Par la suite, sur les deux seules années 1994 et 1995, on identifie 13 CDC ou avenants comportant notre secteur (conseil général des Landes en 1995, Puy-de-Dôme en 1994, Indre-et-Loire en 1994 et 1995, Haute-Marne en 1994 et 1995, Guyane en 1994, Essonne en 1995, Charente en 1994, Vienne en 1994 et 1995, Savoie en 1994 et 1995). On peut probablement reprendre ici l’analyse qualitative de Bertrand Calenge relative aux « enjeux très inégaux » et expliquer la hausse du nombre des CDC comprenant un volet livre et lecture conclues entre l’État et les conseils généraux par « l’obligation (…) de présenter une stratégie globale aux conseils généraux » relevée par le même auteur.

Contrats de ville et contrats de plan État-région

S’agissant des contrats de ville entre l’État et les villes concernées, 48 contrats État-ville, comportant un volet livre et lecture, ont été identifiés pour 1994, un montant total de près de 12 MF de subventions de l’État étant à ce titre contractualisé. Pour 1995, 50 contrats sont recensés, pour un total de 7 460 374 F. Pour esquisser une problématique relative à la politique contractualisée de la ville, il n’est pas indifférent que la DRAC des Pays de la Loire ait précisé dans son bilan d’activité 1995 que, dans l’agglomération angevine, un journal de quartier a été financé malgré l’« avis défavorable de la DRAC », de même que des ateliers de lutte contre l’illettrisme ; dans l’agglomération nantaise, c’est la formation de bénévoles en bibliothèque qui a été financée malgré l’avis défavorable de la DRAC.

Enfin, des crédits spécifiquement culture financent 10 contrats de plan État-région 1994-1999 pour leur volet livre et lecture : sont concernés les contrats conclus entre l’État et la région Basse-Normandie (création d’un centre régional des lettres, 6 MF constituant la contribution globale sur les six ans 11 du ministère de la Culture), la Bourgogne (création d’un centre régional des lettres, 0,5 MF constituant la part de l’État), la Corse (promotion des volets livre et lecture, 2 MF pour la part de l’État), la Guyane (actions de formation, le volet livre et lecture n’étant pas fixé ex ante), le Languedoc-Roussillon (sur une ligne « musées et ethnopôle » et pour le « CIDO - fonds documentaire occitan », opération abandonnée ; montants non fixés ex ante), la Lorraine (sauvegarde du patrimoine écrit, avec une part de l’État de 450 KF), la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (développement de la lecture, avec une contribution de l’État de 2 MF), la Picardie (création d’un centre régional des lettres, avec une part de l’État de 1 MF), et la région Rhône-Alpes (formations professionnalisantes, à hauteur de 1,5 MF pour l’État). Pour être complet, il faut encore citer Mayotte et les 10 MF (part de l’État) contractualisés pour la construction de la bibliothèque départementale de prêt.

La consolidation des contributions du ministère de la Culture aux différents contrats de plan État-région permet d’appréhender le poids occupé par leur exécution (de l’ordre de 25 MF), même s’il faut tenir compte du fait que certaines opérations contractualisées ne sont pas tout à fait nouvelles et représentent, le cas échéant, un jeu à somme nulle pour les finances de l’État, ainsi que du prolongement de l’actuel train des CPER. Initialement conclus pour l’habituelle durée de 5 ans, les CPER ont été prolongés d’un an, en 1996, par Alain Juppé. Cette opération s’est faite dans le cadre des mêmes enveloppes budgétaires, afin de réduire la tension budgétaire, au regard de l’état des finances tant des collectivités territoriales que de l’État.

Au demeurant, on estime que le volet culturel, tous secteurs confondus, des actuels CPER est deux fois plus important que lors des CPER antérieurs. Afin d’éviter l’un des biais d’interprétation à partir de la seule prise en considération de la forme contractuelle, précisons que le financement de l’État pour une opération peut aller au-delà du montant contractualisé pour cette même opération (citons ici le cas de la bibliothèque de Mayotte).

De manière générale, et pour ouvrir une perspective de science administrative, on peut probablement constater que l’on ne gouverne pas toujours davantage la société par contrat que par décret12 : en tout cas, il ne suffit naturellement pas qu’un contrat soit signé pour que de plano il s’exécute de lui-même (ainsi en est-il des deux contrats de ville de la Martinique, avec Fort-de-France et Le Lamentin). De même, les juristes pourraient s’étonner que certains CPER soient pilotés à vue et que des actions soient « retirées » du contrat, après sa signature.

Mise en œuvre interrégionale des activités livre et lecture

Il peut être intéressant d’avoir un aperçu des actions interrégionales menées dans le secteur livre et lecture : la question des relations non pas seulement intrarégionales mais encore interrégionales se pose sur le « terrain », et participe d’ailleurs d’un débat qui, à l’instar d’une question comme celle de la promotion de l’intercommunalité et des relais-livres en campagne, déborde le secteur du livre et de la lecture et le seul champ de compétence du ministère de la Culture.

Outre les relations interrégionales nouées à l’occasion d’actions de formation 12, c’est la vie littéraire qui déborde volontiers les strictes frontières régionales.

Ainsi, les relations entre l’Alsace et la RFA s’approfondissent dans le secteur livre et lecture. Après un Temps des livres 1997 très présent à Freiburg, se prépare l’implantation sur le Pont de l’Europe, reliant Strasbourg à Kehl, d’une quarantaine de textes d’écrivains et d’intellectuels européens sur des pupitres tout le long du pont. Cette opération, organisée en partenariat avec les villes de Strasbourg et de Kehl, bénéficie du parrainage du Conseil de l’Europe (en mai 1999 sera célébré le 50e anniversaire du Conseil).

En 1995, ont été lancées les Rencontres transfrontalières, animations littéraires réunissant des écrivains belges et français, grâce à un partenariat entre la Champagne-Ardenne, la Picardie, la communauté française de Belgique et l’éditeur de poésie et de littérature Mont-Analogue de Charleville-Mézières.

Le Salon des Régions du Livre, organisé en partenariat avec la Franche-Comté, la Suisse, le Canada et la Belgique, est un salon tournant dans chacun de ces pays.

En Guadeloupe, le Salon du livre de Pointe-à-Pitre connaît deux élargissements, thématique et géographique : à partir d’un tropisme jeunesse, il tend à présent à intéresser le public le plus large, et il renforce son impact sur les Antilles.

Rhône-Alpes a à son actif plusieurs manifestations à la fois interrégionales et internationales : le concours Quelles nouvelles ? Racconti ?, en partenariat avec Turin et son salon du livre (opération partie du Piémont en 1993, élargie en 1994 à Rhône-Alpes), et Lettres frontière, manifestation lancée en 1994 avec la Suisse romande.

Quelques tropismes régionaux

Après avoir examiné de grandes catégories de l’action régionale, on peut évoquer quelques spécificités régionales 13.

En Alsace, une politique de résidences d’écrivain (dans le cadre, le cas échéant, du partenariat avec L’Alsace et l’éditeur Le Verger) est poursuivie et doit encore se renforcer en 1998, avec des moyens accrus déconcentrés par la DLL (ainsi, Jacques Jouet et Paul Fournel en 1993 et 1994 ; Paul Fournel, Alain Bellet, et Pascal Garnier en 1995 ; Jacques Jouet, Claudine Capdeville et Pierre Laurent en 1995 et 1996). Pour 1998, les initiatives régionales de résidences d’écrivain convergeront avec le programme de parrainages de classes par des écrivains, lancé au niveau national en 1998 par le ministère de la Culture.

La création littéraire a su au demeurant déborder le champ des happy few, grâce à l’implantation de textes oulipiens sur le parcours du tramway de Strasbourg : il est pour le moins pertinent de faire en sorte que le temps du transport ne soit pas du temps mort ; l’action Pont de l’Europe s’inscrit aussi dans cette perpective de l’investissement de l’espace public par la littérature.

En Aquitaine, on constate une politique suivie de contribution des manifestations littéraires à l’aménagement du territoire régional ; à côté de l’institution Salon du livre de Bordeaux, il convient de relever de nombreuses opérations irriguant le territoire régional : Lettres de Dordogne (réalisées grâce à la BDP et assurant la promotion des grands noms du patrimoine littéraire de Dordogne par une exposition itinérante en milieu rural), Écrire la terre, Élisée Reclus (qui a constitué une première expérience d’animations en réseau pour une vingtaine de librairies et BM), Le cinéma des écrivains (manifestation s’étendant aux communes moyennes de Gironde), le Salon du livre de Villeneuve-sur-Lot (qui a commencé à nouer des liens avec le monde rural, grâce à la BDP, et le milieu scolaire). Se trouve au demeurant illustré le bénéfice qu’une vie littéraire régionale peut tirer de l’« offre de prestations de services » des BDP 14.

En Bretagne, le soutien financier de la DRAC à la Maison de la presse de Carhaix, qui participe activement au Salon du livre en Bretagne que la ville organise chaque année en novembre, peut illustrer le souci de l’aménagement du territoire, y compris en matière d’économie du livre, le deuxième cercle des librairies ne devant pas être en tant que tel négligé.

En Champagne-Ardenne, on peut en particulier relever la politique incitative menée en faveur des nouvelles techniques de l’information, aussi bien dans les bibliothèques que dans les librairies et les prisons. On citera l’exemple emblématique de cette politique, déclinée en matière patrimoniale et faisant suite à la session du Comité interministériel d’aménagement du territoire du 20 septembre 1994 15 : fin 1997 le disque optique numérique (DON) Trésors des premiers imprimeurs : la naissance de l’imprimerie dans l’Europe du XVe siècle a paru. Le mode de production de ce DON est particulièrement intéressant : il s’agit d’un coproduit Interbibly et Index +, ce dernier partenaire privé étant à même d’assurer la diffusion du produit 16.

En Picardie, les perspectives de valorisation des richesses régionales en matière de maisons d’écrivain sont tout à fait séduisantes.

En Provence-Alpes-Côte d’Azur, il convient de signaler la pérennisation de l’opération des villes-lecture, qui concerne 8 villes et participe de la lutte contre l’illettrisme.

En Rhône-Alpes, pour n’évoquer qu’un dossier, on remarquera la modulation du taux de subventions sur la deuxième part du concours particulier de la dotation générale de décentralisation : la DRAC utilise cet outil de la modulation pour bonifier le taux spécialement en cas d’intercommunalité, ce qui permet de donner toute son efficacité en région au programme des relais-livres en campagne. Cette promotion de l’intercommunalité peut naturellement concerner d’autres régions.

On a pu constater, bien entendu, une diversité entre les régions. Au demeurant, il ne faudrait surtout pas négliger les importantes disparités intrarégionales, que pourraient faire oublier les discours globalisants sur le caractère défavorisé de telle ou telle région : que l’on songe ici à la place du département de la Marne au sein de la région Champagne-Ardenne (et à celle de l’arrondissement de Reims au sein de la Marne), ou encore à la formule « Toulouse et les sept nains », formule pour le moins révélatrice de l’écart de développement existant entre la capitale régionale et les sept départements périphériques.

Faut-il pour autant parler de « délitement » de la politique culturelle, ou de « paradoxes » 17 ? On pourrait d’ailleurs aller plus loin que Marine de Lassalle, puisque, sur le « terrain », la disparité se conjugue avec la reconduction des opérations, au niveau de l’ensemble des secteurs du ministère de la Culture, selon Jean-Michel Lucas, directeur régional des affaires culturelles d’Aquitaine, qui constate dans son bilan d’activité pour 1996 : « On remarquera ainsi que près de 90 % des actions financées sur les crédits du ministère de la Culture sont renouvelés d’une année sur l’autre, avec des montants de subventions évoluant peu. (…) Ainsi, il nous paraît délicat d’évoquer l’idée même de stratégie de la DRAC, tant le poids des collectivités est grand dans les avancées ou la stagnation des actions. On préférera, donc, en harmonie avec le schéma d’action régionale, parler d’orientations stratégiques. Cette nuance permet de rappeler que l’État-DRAC est rarement maître d’ouvrage 18des actions 19 ».

En fait, la question du délitement peut être tranchée (ou contournée) par le principe de réalité : une politique culturelle nationale est classiquement issue de la convergence, plus ou moins facile et « assistée », de priorités nationales et d’opportunités du « terrain », les unes et les autres ne s’excluant pas. On prendra ici l’exemple des relais-livres en campagne, constitutifs d’un programme national (réalisable grâce au partenariat des BDP bien entendu), et des villages du livre, « génération spontanée » : ces deux formules participent, chacune à sa manière, de l’aménagement culturel du territoire, sans qu’il s’agisse d’y voir de paradoxes. Ou encore, dans la même région Bretagne, on peut citer le relais-livres de Caulnes, issu du programme national, et le Conservatoire régional de la carte postale de Baud, émanation du « terrain » que le ministère de la Culture et plus généralement l’État ont accompagnée et qui, dans la zone du Morbihan où il se situe, participe pleinement à l’aménagement culturel.

Mars 1998

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Agences de coopération entre bibliothèques et centres régionaux de lettres (CRL). Bilans 1995

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Liste des sigles utilisés. Agences de coopération entre bibliothèques et centres régionaux des lettres (CRL)

  1. (retour)↑  Il sera peu question ici de l’équipement en bibliothèques, grâce tout particulièrement au concours particulier de la dotation générale de décentralisation, des statistiques étant régulièrement publiées par la DLL ; par ailleurs, le point de vue est ici exposé à partir du ministère de la Culture (et non des « acteurs de terrain » : bibliothécaires, libraires…). Il convient donc d’avoir à l’esprit les Méditations du cartographe vénitien Frà Mauro : « Even shut in my monastery, I have the whole world at my fingertips : it comes to me through the experiences of the other men. Like a king in the throne room, I await a visit from my messengers, their cloaks still dust-covered » (« Même enfermé dans mon monastère, j’ai le monde entier au bout de mes doigts : il m’arrive à travers l’expérience des autres hommes. Comme un roi dans la salle du trône, j’attends une visite de mes messagers, leur manteau encore couvert de poussière »).
  2. (retour)↑  Nous empruntons cette expression séduisante à Sylvie Le Ray : il s’agit d’évoquer des pratiques administratives susceptibles de rappeler les querelles que se plaisaient à nourrir les familles toscanes entre elles.
  3. (retour)↑  Les crédits du titre IV sont destinés aux dépenses de « fonctionnement », ceux du titre VI aux dépenses d’investissement.
  4. (retour)↑  Page 59 de l’étude réalisée par la région Languedoc-Roussillon/Centre régional des Lettres, en partenariat avec Attiki (Grèce), Generalitat de Catalunya (Espagne), Dùn Laoghaire-Rathdown County Council (Irlande), Região do Norte (Portugal), Regione Piemonte (Italie).
  5. (retour)↑  Op. cit., p. 79.
  6. (retour)↑  Page 8 de la circulaire n° 125473 du 21 janvier 1998 ayant pour objet les « crédits déconcentrés 1998 », signée par Marc Sadaoui, directeur du cabinet de Mme Trautmann.
  7. (retour)↑  Op. cit., p. 5.
  8. (retour)↑  Dans l’étude parue en 1994, Les Conventions de développement culturel en 1992, le DEP ne prend en compte que les crédits de la délégation au développement et aux formations ; en revanche, nous avons consolidé les aides de l’État pour 1993, 1994 et 1995.
  9. (retour)↑  Les pays, plateau et « carrefour » sont des noms choisis en région pour désigner diverses coopérations intercommunales.
  10. (retour)↑  Bertrand Calenge, « Les bibliothèques centrales de prêt : dix années de mutations », BBF, 1992, n° 4, p. 30.
  11. (retour)↑  La contribution sur les six ans correspond à la durée des contrats de plan (1994-1999).
  12. (retour)↑  Il faut signaler le Centre régional de formation aux carrières des bibliothèques, du livre et de la documentation, Bibliest, implanté à Dijon, dont 40 % de l’ensemble des stagiaires bourguignons et francs-comtois viennent de Franche-Comté, et le DEUST mention gestion et exploitation de médiathèques de l’université Antilles-Guyane, « tournant » alternativement en Martinique, Guadeloupe et Guyane.
  13. (retour)↑  En ayant certes à l’esprit l’utile mise en garde méthodologique du Schéma triennal d’action régionale de la DRAC de Martinique pour les années 1995 à 1997 : « L’usage du terme “spécificité” est, en Martinique, chargé d’ambiguïtés. La spécificité est ainsi invoquée non seulement pour “expliquer” une identité culturelle originale, mais également pour justifier son irréductibilité à l’analyse, critiquer “l’ingérence” de l’État dans ce domaine, et réclamer des moyens spécifiques pour promouvoir une culture entendue comme un “patrimoine à préserver” et non comme une dynamique de développement et d’ouverture. Ce discours identitaire, diffus ou porté par un mouvement indépendantiste déclaré, fait de la culture un enjeu et un lieu de conflit latent. La logique même d’une politique culturelle de l’État, si elle ne peut ignorer ce contexte, ne doit pas pour autant conduire à transformer sa mission en une simple gestion de transferts de crédits. Chaque région française n’a-t-elle pas en effet sa spécificité, liée à une histoire particulière, un peuplement divers, des paysages, une langue régionale ? ». Enseignée pour la Martinique (et non à propos d’une quelconque région métropolitaine), cette leçon de défiance à l’égard du discours des spécificités régionales constitue probablement une expérience « cruciale » au sens des sociologues.
  14. (retour)↑  Cf. Martine Blanchard, « Quelles missions pour les bibliothèques départementales de prêt ? », BBF, 1997, n° 5, p. 8-15. Martine Blanchard répartit les missions actuelles des BDP entre la « logique de distribution » (dans le droit fil du « ravitaillement » en livres) et les « prestations de services ».
  15. (retour)↑  Ce CIAT était le premier – à ce stade le seul – exclusivement consacré à la culture.
  16. (retour)↑  Il sera permis de faire une postille à propos de ce produit : lorsque l’on clique sur la représentation numérisée d’un livre fermé, celui-ci s’ouvre virtuellement, un bruit de pages qu’on feuillette se faisant alors entendre ; ainsi, mutatis mutandis, les nouvelles techniques, en imitant le codex et le bruit de sa manipulation, font écho au mimétisme du livre imprimé, à ses débuts honteux, à l’égard du manuscrit.
  17. (retour)↑  Marine de Lassalle, « Les paradoxes du succès d’une politique de lecture publique », BBF, 1997, n° 4, p.10-17.
  18. (retour)↑  C’est naturellement tout à fait normal, l’État étant là pour [essayer de] faire faire plutôt que faire.
  19. (retour)↑  Page 4 du bilan 1996 de la DRAC d’Aquitaine ; le DRAC accuse même le trait : « Ainsi, on pourrait se demander si avec les moyens actuellement disponibles en DRAC, en particulier en termes de personnel, il ne serait pas mieux adapté de s’en tenir à un rôle d’administration de guichet ou d’administration régalienne, au lieu de tenter de mettre en œuvre les orientations stratégiques du partenariat qui demandent un temps important d’information, d’explication, de négociation avec les collectivités, pour une décision finale qui en toute hypothèse n’est pas du ressort de l’État ». Certes, le DRAC conclut provisoirement la question par : « Il nous a semblé toutefois que les enjeux des approches territoriales méritaient un effort accru et que le partenariat devait rester au cœur de l’action ». Au total, cet extrait du bilan de la DRAC d’Aquitaine pourrait contribuer à notre hygiène mentale plutôt qu’au vertige : « J’ai parlé franchement au monde. J’ai toujours enseigné dans les synagogues et dans le temple où tous les Juifs s’assemblent et je n’ai rien dit en secret » (Jean, XVIII, 20 ; Jean Grosjean nous précise à ce propos que l’enseignement du Christ n’est qu’approfondissement de la meilleure tradition d’Israël : toute institution est prise de vertige au seul soupçon qu’on l’approfondisse).