Les pôles associés
Annie Le Saux
Une journée sur les pôles associés, réunissant entre autres les responsables de ce réseau partagé, a été organisée par la Bibliothèque nationale de France, dans ses nouveaux locaux de Tolbiac, le 9 mars. Cette seconde journée a confirmé l’intérêt de la profession – près de 300 personnes présentes – envers ce réseau de coopération, que la première rencontre, qui avait eu lieu en mars 1997, avait amorcé 1.
Les différents types de pôles associés
« Le réseau des pôles associés est quelque chose de vivant », a déclaré Marcelle Beaudiquez, directeur du développement scientifique et des réseaux à la BnF, avant d’entamer le bilan des années écoulées. Pour preuve de cette vitalité, l’évolution du réseau depuis la première génération de pôles associés, à dominante thématique – les pôles associés de partage documentaire –, chargés des acquisitions dans leur domaine spécifique, complémentaire des fonds de la BnF, dont font partie par exemple la Bibliothèque interuniversitaire des Langues orientales pour les langues rares d’Extrême-Orient et la Bibliothèque interuniversitaire de médecine pour le domaine médical. Ces pôles associés documentaires sont les plus nombreux.
Des contrats ont ensuite été signés avec des pôles associés « label », c’est-à-dire avec des bibliothèques ou centres de documentation d’établissements scientifiques : le Commissariat à l’énergie atomique pour les sciences et les techniques nucléaires, l’Institut Pasteur pour la biologie et la microbiologie…
Sont venus s’y adjoindre de nouveaux domaines de coopération : le développement de bases bibliographiques régionales (Bibliothèques municipales de Châlons-en- Champagne, Dijon et Rennes) et le Dépôt légal imprimeur dans les régions (Bibliothèques municipales de Besançon pour la Franche-Comté, de Caen pour la Basse-Normandie…).
Cette diversification des pôles associés se poursuit dans des perspectives allant d’une combinaison à la fois géographique et documentaire en vue d’aboutir à un meilleur maillage du territoire, à des pôles associés audiovisuels ou encore vers une coopération dans le domaine de la numérisation, celle des publications des société savantes, par exemple, mine de renseignements pour la connaissance du XIXe au milieu du XXe siècle, et dont la BnF ne possède que 60 à 70 % des documents.
La numérisation
La numérisation fut d’ailleurs le thème central des ateliers de réflexion de l’après-midi, faisant suite à la problématique ouverte par Véronique Chatenay-Dolto, adjoint au Directeur du livre et de la lecture. Les avancées technologiques offertes par la numérisation sont incontestables. Même si l’on ne peut pas la considérer comme un procédé de conservation, elle réduit la consultation des documents fragiles, qui sont ainsi épargnés. La numérisation offre, de plus, une grande capacité de stockage, et elle permet la recherche et l’intervention sur les documents. Enfin, et ce n’est pas le moindre de ses avantages, elle démultiplie l’accès aux documents, en particulier l’accès à distance.
Cela ne va pas sans poser des difficultés. La numérisation nécessite en effet des langages de description normalisés, dont l’adoption doit s’inscrire dans un cadre européen et mondial. Les documents numérisés ne devraient pas s’adresser à la seule recherche mais atteindre aussi le grand public.
Le dernier point abordé par Véronique Chatenay-Dolto concerna les solutions juridiques à prévoir. Celles-ci devront tenir compte du légitime souci de rendre ces documents accessibles au plus grand nombre tout en respectant les ayants droit. Ce qui fait préférer, dans un premier temps, la numérisation des œuvres libres de droit.
Intérêt et contraintes
Dans l’atelier intitulé « La numérisation : intérêt et contraintes », il fut vite évident que la numérisation de documents n’était pas une chose que l’on entreprenait à la légère. Les choix techniques sont importants. Il faut, en effet : choisir entre une numérisation en mode texte ou en mode image, entre une sous-traitance ou un travail en interne ; veiller à la qualité du document de départ, car elle influe sur la qualité de lecture ; prévoir des chemins d’accès rapides et clairs ; savoir que les images prennent énormément de place, même si on a recours à la compression ; utiliser des formats normalisés pour les rendre utilisables, sinon à quoi bon les avantages de la numérisation qui sont d’être accessibles au plus grand nombre ; identifier et décrire les documents numérisés, car ce sont les seuls moyens de les retrouver ; surveiller en permanence la conservation des données, car la pérennité des supports n’est pas établie… Tous ces choix et traitements pèsent lourd sur le plan financier.
Les autres ateliers se sont penchés sur les projets en cours de numérisation de documents spécialisés, sur l’harmonisation nationale des collections virtuelles et sur l’audiovisuel et la numérisation. Les principaux points évoqués portaient sur les critères de choix des documents à numériser, les questions juridiques soulevées par la numérisation, la nécessité de cadrer les initiatives et la place à occuper au niveau européen et international.
Une volonté politique forte en ce domaine, espérée par certains, fut assurée par Catherine Trautmann, ministre de la Culture et de la Communication, qui redit la volonté de l’État de soutenir financièrement les programmes de numérisation des communes. Le ministre conclut sur le rôle des bibliothèques dans l’aide à la familiarisation du plus grand nombre aux nouvelles formes d’accès au savoir.
Cette journée d’étude a été la preuve, si besoin était, que les idées ne manquent pas pour structurer le paysage documentaire français et une nouvelle rencontre, l’an prochain, s’est déjà profilée 2.