Recherche et indexation
résultats et limites
Sylvie Chevillotte
« Recherche et indexation : résultats et limites » était le titre ambitieux de la journée d’étude proposée conjointement par Médiat et l’Association des bibliothécaires français (abf), le 9 octobre dernier, à la Maison Rhône-Alpes des sciences de l’homme de Grenoble. En introduction, Frédéric Saby, de Médiat, insista sur la nécessité de faire évoluer la réflexion sur la formation professionnelle, non pas de façon théorique, mais en partant des besoins réels. Anne-Françoise Bonnardel, de l’abf, souligna quant à elle l’importance de cette seconde journée d’étude en région, après celle de Montpellier en 1996.
La liste autorité rameau
La grande vedette de cette journée fut la liste d’autorité rameau (Répertoire d’autorité matière encyclopédique et alphabétique unifié), ce qui fut diversement apprécié par les participants. Mais au-delà, de nombreux aspects de l’indexation matière furent abordés au cours des exposés, démonstrations et débats : les liens entre l’indexation matière et l’informatique, l’indexation matière et Internet, la formation des « indexeurs », rameau dans l’univers documentaire actuel…
Roland Dachelet, de l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (inria), avait choisi pour titre de sa communication : « Indexation : précision/rappel, le couple infernal ». Précision et rappel sont deux mesures reconnues d’évaluation de la pertinence d’une recherche documentaire : le rappel est le nombre de documents pertinents retrouvés par rapport au nombre de documents pertinents présents dans la base ; la précision indique le nombre de documents pertinents présents par rapport au nombre de documents retrouvés. Ces deux mesures, étroitement liées, forment un compromis. On peut noter l’absence des utilisateurs dans ces notions, ainsi que le fait que cette mesure ne concerne que le contexte de la requête et non celui de la navigation.
Fut ensuite présenté le langage rameau, langage documentaire pré-coordonné qui définit en une fois les documents qui seront pertinents. Roland Dachelet signala la nécessaire distinction entre un langage de représentation – type rameau, donc non accessible à l’utilisateur ordinaire – et un langage d’accès – qui permet d’accéder au document –, langages qu’il faut considérer séparément. Cette différenciation essentielle a sous-tendu le reste des interventions et des débats de la journée. En conclusion, il se demanda – sans répondre réellement – si un schéma de type rameau était compatible avec le Web.
Olivier Rousseaux, de l’Agence bibliographique de l’enseignement supérieur (abes) et Cécile Maury, de la Bibliothèque nationale de France (BnF), détaillèrent le développement de rameau et le rôle de la BnF dans sa gestion actuelle. Cécile Maury commença son exposé par « la préhistoire de rameau, de 1980 à 1985 », qui est une adaptation libre du Répertoire des vedettes matières de l’Université de Laval (Québec), lui-même traduction des Library of Congress Subject Headings. Cette double filiation pèse sur le passé et le futur de la liste d’autorité. Jusqu’en 1994, il existait une différence entre le fichier autorité matière de la Bibliothèque nationale et celui des propositions des utilisateurs. La situation a été régularisée depuis à l’aide d’une validation centralisée. Aujourd’hui, les projets du système d’information de la BnF et du système universitaire de l’abes d’une part, l’absence de développement des logiciels d’autre part, placent la liste d’autorité dans une phase intermédiaire.
Cécile Maury commenta ensuite le rôle du Bureau des autorités-matière du Service de la coordination bibliographique de la BnF dans la normalisation, présentant son action dans la formation et l’information des utilisateurs – c’est-à-dire les bibliothèques – à travers des stages et la parution du journal rameau. Elle conclut par la description du suivi de la cohérence du fichier autorité et du travail de fonds sur la liste de ce même bureau. Olivier Rousseaux souligna à plusieurs reprises l’intérêt de créer des groupes d’utilisateurs au niveau régional.
Le ton de Jeanne-Marie Burlat, de Doc’insa, fut ensuite volontairement provocateur. Elle considéra que, dans un centre de documentation, les utilisateurs étant les lecteurs et non les bibliothécaires, rameau – qui est un langage de représentation – ne peut convenir. Après avoir décrit le langage d’indexation idéal, elle étaya ses propos d’une démonstration du lexique Pascal, ce qui pouvait être discuté et qui le fut.
Récits d’expériences
L’après-midi se structura autour d’un point de vue international, puis de récits d’expériences d’indexation matière. Après un rappel de la composition de l’ifla, de ses différents programmes et de son rôle dans la normalisation, Marie-Martine Tomitch, de la bibliothèque universitaire de Paris v, présenta les travaux de la section Classification et indexation. Créée en 1981, elle a pour objectifs d’encourager la normalisation et l’utilisation généralisée d’outils normalisés de classification et d’indexation matière, ainsi que de promouvoir et de contrôler les recherches sur l’accès à l’information par sujets. Son action concerne tous les types de documents (y compris les documents électroniques) 1.
Enfin, Cécile Maury présenta les projets et les réalisations de coopération internationale de rameau : coopération avec la Bibliothèque du Congrès (États-Unis), le Canada, la Belgique, la Pologne ; participation au projet cobra depuis 1993, puis à metadata depuis 1997. Cet ambitieux projet – qui reste à mettre en place – consiste en une interconnexion informatique de différents thésaurus – dont rameau – qui permettrait à l’utilisateur d’interroger dans sa langue maternelle. Il implique une méthodologie et des moyens informatiques.
C’est à François d’Arcy, directeur honoraire de l’Institut d’études politiques de Grenoble, que revint la charge de conclure cette journée. Soulignant les problèmes pédagogiques considérables causés par l’évolution du monde documentaire, il mit en garde contre la sophistication des systèmes de recherche documentaire qui diffèrent trop de la recherche sur Internet. En effet, des comportements nouveaux apparaissent, et il convient que le personnel de bibliothèques comme les enseignants-chercheurs en tiennent compte ensemble.