Modèle pour la fourniture de services bibliographiques en Europe

par Jérôme Kalfon

Michèle Lénart

Luxembourg : Office des publications officielles des communautés européennes, 1996. - ix-154 p. ; 30 cm. - (Bibliothèques dans la société de l'information). isbn 92-827-7888-6

Qui n'a jamais rêvé de la meilleure des bibliothèques électroniques pourrait rêver d'un modèle idéal de fourniture de services bibliographiques, tant pour les professionnels que pour l'utilisateur final.

Il s'agirait d'un service rapide, où l'information bibliographique serait disponible avant la publication, et ce pour l'ensemble des intervenants (bibliothécaires, libraires, etc.). Elle pourrait être intégrée dès la phase de la commande, et former une bonne articulation avec systèmes internes de gestion de bibliothèque ou de librairie. Cette information serait ensuite enrichie et contrôlée.

La recherche pourrait être effectuée dans toutes les langues de la Communauté européenne (grâce, par exemple, à un langage pivot, fondé sur une classification). Les notices disposeraient d'une information bibliographique plus riche qu'actuellement, intégrant, à l'instar des périodiques, résumé et sommaire, voire davantage. De plus, tout ou partie de cette information bibliographique pourrait être généré automatiquement, à partir du document primaire ou d'informations fournies par l'éditeur sous une forme électronique standardisée.

Anticiper les évolutions

Techniquement, une situation de ce type est réalisable, c'est en tout cas ce que tend à montrer l'étude confiée à Michèle Lénart (Tosca Consultants) par la Commission des Communautés européennes.

La demande consistait à proposer de nouveaux modèles pour la fourniture efficace de services bibliographiques, harmoniser des prestations, mettre en commun des données, développer la diffusion de l'information bibliographique dans les pays de l'Union européenne (UE) où elle est encore faible, donner aux bibliothèques nationales les moyens de suivre, ou même anticiper les évolutions technologiques actuelles.

L'étude s'articule autour de trois axes : la présentation et l'analyse des paramètres, leur modélisation, la proposition d'un plan d'action. Elle est précédée d'un bilan de l'existant décrivant les situations des services bibliographiques dans l'ensemble des pays de l'UE (document très volumineux disponible sur demande sous forme de disquette 1).

La présentation des paramètres prend la forme d'une approche quantitative et qualitative du marché des points de vue des fournisseurs et des utilisateurs des services bibliographiques, mettant en évidence les facteurs déterminants : délais, qualité, taux de couverture, possibilités de récupération, coûts de production et de déchargement, modes de diffusion, par exemple.

Les facteurs de frein

Les facteurs de frein au développement sont également présentés de façon détaillée : nous retiendrons les problèmes juridiques, l'hétérogénéité des situations nationales, la fragmentation de la demande, les lenteurs structurelles ainsi que les formats.

En effet, l'étude met en cause les formats en vigueur, qui reproduisent la structure des formats papier issus de technologies aujourd'hui largement dépassées et limitatives dans la description bibliographique.

De plus, ce format réduit l'utilisation aux seules bibliothèques. Il est proposé d'approfondir l'étude des potentialités du langage standard de balisage sgml (Standard Generalized Markup Language) produit par l'iso, en tant que format de gestion de l'information bibliographique.

Curieusement, les réseaux de catalogage partagé sont également présentés à plusieurs reprises comme facteur de frein, alors que l'on peut les considérer, dans un schéma de coopération, comme le troisième partenaire important, en particulier pour les références extra-européennes. Cette analyse s'explique peut-être par le fait qu'il s'agit d'une commande à l'usage notamment des bibliothèques nationales.

Message d'alerte

Les bibliothèques et autres agences bibliographiques nationales (ABN), loin d'être les seuls intervenants, vont se trouver concurrencées par d'autres acteurs, provenant en particulier du secteur livre (éditeurs, syndicats professionnels), au point de se voir court-circuitées sur leurs propres domaines de compétence.

Rien ne s'oppose en effet, si l'on dispose des listes de contrôle d'autorités, à ce que d'autres acteurs proposent un niveau de qualité conforme aux besoins des utilisateurs. Le risque étant de laisser aux ABN les produits présentant un intérêt économique limité, listes d'autorité, marché de la rétroconversion, littérature grise, publications officielles.

Outre des propositions concernant la résolution des problèmes de frein, les plans d'action mettent en lumière les besoins de concertation entre partenaires. Un schéma plaçant les bibliothèques nationales au centre du dispositif est désormais révolu. L'étude ne fait pas mystère des difficultés de la modélisation dans un environnement technologique en forte évolution ; réalisée en 1995, elle est déjà en partie datée, en particulier en ce qui concerne les aspects liés aux réseaux.

La lecture de cette étude permet de mesurer l'ampleur du défi auquel se trouvent confrontées les bibliothèques nationales. Dans cette perspective, il s'agit d'une base de travail pour l'avenir d'un grand intérêt méthodologique. D'un point de vue formel, on regrettera simplement l'absence d'une relecture plus attentive du texte ainsi que d'une table des sigles et acronymes.

  1. (retour)↑  Annexe sur disquette disponible auprès de A. Mijon, DG XIII-E-4.