L'illettrisme
une question d'actualité
Catherine Bouvet
Benoît Falaize
Fabienne Federini
Pierre Freynet
Ce petit ouvrage tente de faire le point sur la question de l'illettrisme, ici présentée par le Groupe permanent de lutte contre l'illettrisme. Après la description des conditions dans lesquelles il a été« découvert »en France qu'une partie importante de la population maîtrisait mal l'écrit, les auteurs exposent les diverses tendances qui ont cherché à comprendre les causes d'un illettrisme qui persiste malgré une scolarité plus longue, et ses conséquences, aussi bien économiques que sociales et culturelles.
Ils montrent comment les démarches mises en oeuvre pour « lutter contre l'illettrisme » et les fractures sociales qu'il entretient, se sont orientées vers la solution de problèmes économiques visant à donner à l'individu les moyens de s'adapter aux besoins de l'entreprise. Sont ensuite énumérés les dispositifs de formation des formateurs, les outils utilisés, leur intérêt et leurs limites.
DOM-TOM et pays francophones
La situation est différente dans les DOM-TOM, mais de lourdes difficultés demeurent, inhérentes à la nécessité du choix de la langue dans laquelle sera faite l'alphabétisation, choix qui entraîne forcément des ruptures culturelles. Partout apparaît l'inadéquation du système scolaire face aux demandes des populations concernées.
Un tableau montre différentes réalisations dans ces domaines à travers le monde, dans les pays francophones d'Afrique, et en Europe. Le concept de l'illettrisme a évolué sur le plan international - comme en témoignent les résolutions de conférences mondiales -, de nouvelles questions ont été posées sur le rôle de l'alphabétisation, ses objectifs et ses stratégies, l'enseignement des enfants et celui des adultes.
Les grandes campagnes d'alphabétisation de l'Unesco ont été critiquées. Il est apparu nécessaire de préparer de telles campagnes et de les faire suivre d'une « postalphabétisation », afin d'éviter d'importants et coûteux échecs.
Un problème complexe
La conclusion insiste sur le fait que « savoir lire ou savoir que l'on sait lire ne renseigne pas pour autant sur les procédures à l'oeuvre dans l'acte de lecture. Cet acte, qui semble aller de soi, relève pourtant de processus sociaux, cognitifs et pédagogiques souvent très complexes ». Citant Pierre Bourdieu, les auteurs rappellent que, derrière les échanges linguistiques, se jouent toujours des rapports de force symboliques, actualisant des rapports de force entre celui qui s'exprime et son destinataire. Une meilleure connaissance du problème et de sa complexité devrait aider à agir plus efficacement pour le dominer.
L'intérêt de cet ouvrage réside justement dans la reconnaissance de la complexité de ce qu'on appelle l'« illettrisme » - et qui manque à tant d'autres discours sur ce sujet. Les auteurs remarquent que la logique de l'écrit implique un rapport au monde et un rapport aux autres qui soient différents. Car il semble bien que c'est sur ce point que nous butons pour trouver de réelles solutions à l'appropriation de l'écrit par tous.