À l'approche du musée, la médiation culturelle
Elisabeth Caillet
Depuis la crise des intermédiaires, corps intermédiaires de notre système démocratique ou intermédiaires de notre distribution marchande, nous vivons le printemps des médiateurs. Dans la foulée du médiateur de la République, toute la sphère publique revendique sa part de médiation, de l'élu au juge, en passant par le policier.
Le domaine culturel n'est pas en reste, où l'on y est médiateur, forcément médiateur... Comme tous ces mots qui se répandent de plus en plus vite d'une science à l'autre, d'un métier à l'autre, nous ne sommes pas très sûrs du sens qu'ils véhiculent, mais ils circulent.
La notion de médiateur culturel
Rendons au secteur des musées ce qui lui appartient, à savoir l'antériorité de la notion de médiateur culturel, forgée pour accompagner les évolutions de l'institution muséale dans des missions dont le terme de conservateur ne suffisait plus à rendre compte.
Il s'agissait d'affirmer « la préoccupation des publics au coeur du projet de musée ». Cette affirmation a été suffisamment forte pour que se créent des formations universitaires de médiateurs culturels, à propos desquels une étude récente en Rhône-Alpes laisse cependant apparaître que l'insertion professionnelle ne se fait pas aussi bien qu'il était escompté 1
Dans ce contexte, un ouvrage sur la médiation culturelle dans les musées ne peut que retenir l'attention et l'intérêt. Malheureusement, le présent ouvrage n'y parvient qu'au tiers, c'est-à-dire dans le premier chapitre consacré aux théories du musée et à l'émergence de la médiation. C'est une réflexion sur les paradoxes fondateurs du musée, sur la figure du musée dans notre société, sur la question de la valeur, avec des détours par Marx, Foucault et Lyotard, cités et commentés.
Publics et musées
Le chapitre suivant porte sur « l'invention du public par la médiation », c'est-à-dire les différentes relations que les publics peuvent entretenir avec les musées, ce que l'on peut savoir de ce qu'ils viennent y chercher, les limites de la démarche pédagogique. Le troisième chapitre détaille les différents outils de connaissance des publics, puis d'accompagnement de ces publics (promotion, accueil, participation, programmation...) et se conclut sur la question de la formation des médiateurs.
Mais ce qui fonctionnait dans le premier chapitre n'a plus la même efficacité ensuite. On ne perçoit la construction de l'argumentaire qu'avec difficulté, la lecture est surprise par de longs détours théoriques qui ont un intérêt propre, mais qui risquent d'égarer le lecteur. Celui-ci est dérouté par la présence de philosophes dans le voisinage de la carte de fidélisation et par trop sollicité par d'abondantes notes de fin d'ouvrage.
Du même coup, l'objectif de celui-ci ne s'impose pas toujours avec évidence. S'agit-il d'un projet pédagogique visant à définir le contenu des formations de « médiateurs des musées » ? S'agit-il d'un projet politique visant à légitimer une fonction, puis à montrer que cette fonction est un métier ? Ce sont deux objectifs qui exigent un effort de lisibilité au-delà du cercle des spécialistes.