Editorial
Martine Poulain
Depuis le début des années 80 - parfois plus tôt pour quelques pionniers - fleurissent salons, fêtes et foires du livre. Souvent généralistes, ils ont tendance à se spécialiser, chacun mettant alors son imagination en éveil pour déterminer le thème susceptible d'innover ou de représenter au mieux l'image de la ville qui l'accueille. Salons, fêtes et foires rivalisent, se donnant comme mission commune de promouvoir le monde du livre. Ils multiplient pour ce faire animations et débats en tout genre. Des bébés-lecteurs aux marins voyageurs, tout le monde est invité à se laisser séduire par une offre qui se veut tentatrice, notamment auprès des publics peu familiers des autres lieux de lecture. Ponctuant l'ensemble, le désormais Temps des Livres veut rayonner dans la France entière, susciter les initiatives et les partenariats les plus divers, encourager les manifestations les plus originales et les plus inhabituelles
Ces initiatives connaissent pour la plupart un grand succès, résultat du travail souterrain et acharné de quelques passionnés, préparant tout au long de l'année leur feu d'artifice final
Cette livraison du BBF a invité quelques-uns de ces organisateurs à proposer une forme de bilan de ce type de manifestations. Celles-ci sont parfois critiquées pour leur aspect éphémère, pour leur volonté médiatique, pour un certain goût de l'apparence. Vitrines pour les auteurs et les éditeurs, elles ne seraient que peu formatrices de lecteurs. On leur oppose alors l'institution et la pérennité, l'école ou la bibliothèque, seules capables de forger des pratiques durables. Les salons et fêtes du livre seraient-ils les marchands du temple, l'école et la bibliothèque en étant les seuls véritables gardiens ?
Il n'en est rien, estiment ici les responsables de ces manifestations. Fêtes et foires du livre sont elles aussi des espaces publics d'initiation au livre et à la lecture. S'ils promeuvent le commerce du livre, c'est bien dans l'ambiguïté parfaite de cette expression, qui en signale la composante marchande, mais met plus encore l'accent sur l'exercice d'intimité que requiert et favorise tout contact entre un texte et son lecteur.