Patrimoine des bibliothèques de France
un guide des régions. 8. Bretagne, Pays-de-Loire, Poitou-Charentes
Ici encore, les villes sont dans l'ordre alphabétique, et les trois provinces prospectées ainsi parfaitement mélangées. Il n'est pas certain que ce soit bien pratique. Cette remarque touche l'intégralité de la publication. Mais il y a le plaisir de flâner, comme entre les rayons d'une bibliothèque. Le préfacier, Michel Simonin, l'a fait avec délectation.
Regardons simplement quelques illustrations. Il y en a près de trois cents, d'une excellente qualité de reproduction avec une mise en page donnant à l'ensemble de l'oeuvre une belle cohérence esthétique.
Reliures
Vingt-deux reliures sont représentées. Les décors sont de deux types : ceux qui ont un rapport direct avec le texte, usage assez courant au XVIe siècle - reliure pour Jean Grolier avec médaillon peint ; estampage sur peau de truie blanche par Thomas Krüger, représentant un portrait de Melanchton pour une édition de l'oeuvre du Réformateur.
Exceptionnelle, au XVIIIe siècle, cette reliure anglaise, mosaïquée, porte une décoration équestre sur un ouvrage d'hippologie. Les reliures « parlantes », sorte de « calligramme du livre », ne réapparaissent qu'au XIXe siècle sur des cartonnages d'éditeurs illustrés pour des livres édifiants ou sur une grande plaque de A. Souze sur lesquelles la bibliothèque Mazarine a attiré il y a quelques années le regard des amateurs.
Mais c'est surtout à la fin du XIXe siècle que les maîtres relieurs réalisent pour les livres des couvrures qui disent leur contenu : une branche de laurier en peau verte, mosaïquant un veau rouge, décor réalisé par André Bruel, vers 1925, pour Les Poilus de Marc Leclerc qui ont bien mérité cette gloire ; les grandes peintures à plein plat de l'artiste breton Auguste Lepère ; les incrustations de nacre polychrome dans un box bleu marine ; une reliure de 1994 de Guillemette Goar, pour La Côte de Max Jacob.
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, les reliures ne sont pas « parlantes », mais les livres reçoivent de somptueux habits de fête, couverts de festons et de dentelles, et portant souvent la marque de leurs propriétaires : une reliure de Padeloup aux armes du comte d'Hoym sur un maroquin rouge, une fanfare sur vélin d'ivoire aux armes de Catherine de Médicis, ou le célèbre double « phi » enlacés, avec son écureuil, qui marque les dons de Nicolas Fouquet au collège des Jésuites de Paris, etc.
Un musée naval
Les trois provinces qui figurent dans ce guide ont des rives marines. Ce livre est aussi une sorte de musée naval. Étienne Cleirac, en 1661, décrit les Us et coutumes de la mer, rassemblant autour de lui une impressionnante documentation.
Une carte portugaise peinte sur un grand parchemin en 1632 présentant l'océan Atlantique sillonné de bateaux, illustre en même temps que la découverte du Nouveau Monde, l'expansion du christianisme, une illustration foisonnante, un arbre de Jessé en bas à droite, quelques figures de saints - Dominique, Antoine de Padoue -, les blasons et les étendards des nations conquérantes, la croix du Christ plantée partout, des roses soufflant des vents sur toutes les diagonales.
Poissons, algues, animaux marins, tels ces « lion et lionne de mer », dodus et chanoinesques, illustrent le Voyage autour du monde, de Juan Fernandez. L'« homme-tortue » de Pierre Belon en 1555, est appelé le « moine des mers » dans son armure d'écailles bleues, et on pourrait prendre ce grand homard pour un bouquet... de fleurs séchées.
Et puis les bateaux de toutes sortes sont si nombreux qu'on ne sait où donner de la voile : la majestueuse nef de Lutèce, qui orne la marque de l'imprimeur du roi, les rameurs d'une miniature dans le recueil des romans de la Table ronde, manuscrit de 1220 de la BM de Rennes, ou la corvette de Dumont d'Urville qui essuie un sacré grain dans les mers du pôle Sud.
Enfin, la dernière illustration est stupéfiante : une gigantesque voile dressée sur un mât central au milieu d'un amphithéâtre, de Juste Lipse, et imprimée par le tourangeau-anversois, Christophe Plantin, en 1584.
J'ai dit du mal des index des volumes 4 et 7, je père-sévère (comme écrit Lacan) et signe.