L'informatisation des bibliothèques
vers un réseau départemental
Jean Graftieaux
Marie-Christine Pascal
Bernard Voltzenlogel
L’informatisation des bibliothèques donne lieu en général à deux types d’ouvrages, compte non tenu des ouvrages techniques destinés aux informaticiens : les synthèses compréhensives (l’ouvrage d’Alain Jacquesson 1 est un modèle de clarté), et les analyses comparatives de systèmes dans la perspective de la rédaction d’un cahier des charges (tel le livre d’Annie Gourdier 2, ou celui de Jean-Paul Roux-Fouillet et Anne Tesson 3). Le groupe informatique de l’Association des directeurs de bibliothèques départementales de prêt (ADBDP) a tenté une synthèse de ces deux produits sur un créneau qui, il faut l’avouer, restait assez lacunaire : celui des bibliothèques publiques des communes de moins de 10 000 habitants.
Prospective et conseils techniques
Les auteurs affirment que « le groupe informatique a privilégié dans le présent guide la prospective, mais aussi le conseil technique aux bibliothèques et à leurs autorités de tutelle ». Organisé en trois grandes parties (« pourquoi et comment informatiser », « les fonctions à informatiser », « les systèmes sur le marché »), ce manuel donne une large part à des annexes pratiques dont on soulignera l’intérêt.
Pédagogie et pragmatisme sont les principes que semblent s’être donnés les auteurs, tous trois directeurs de BDP. Pédagogie, avec un important lexique, avec l’explication de la démarche non seulement bibliographique, mais aussi bibliothéconomique, administrative, budgétaire, avec des échéanciers. Pragmatisme – coûts, adresses, références –, par la prise en considération de la réalité actuelle des petites bibliothèques, sans misérabilisme mais également sans rêveries hypertechnicisées, et aussi en restant prudent quant au développement très inégal des services informatiques des différentes BDP.
Sur le plan technique, le manuel présente clairement les différents matériels, modules logiciels, normes, sources bibliographiques nécessaires pour une informatisation. On appréciera la clarté des études comparatives des systèmes informatisés, intégrant adresses de sites équipés, coûts de configurations-types, estimation « habitants-livres » des bibliothèques auxquels ils sont le mieux adaptés. Toutefois, il est regrettable que l’ensemble des sources bibliographiques (Electre, Bibliographie nationale française, sous leurs différents formes... y compris le Serveur bibliographique national qui a disparu un mois après la parution du livre) soit décrit sous la rubrique « acquisitions » et non « catalogage ». De même, on aurait souhaité davantage d’explications sur les procédures de récupération de notices et sur les conversions rétrospectives, hélas nécessaires aussi pour de petites bibliothèques. Et si parfois on peut douter de la compréhension de certains paragraphes techniques peu clairs, par des responsables de petites bibliothèques, il est certain que, d’une part l’informatisation intégrée d’une bibliothèque est chose trop complexe pour être totalement explicitée en 150 pages, et que d’autre part ce guide pourra être surtout utile si une BDP est là pour épauler le responsable de bibliothèque.
L’intégration dans un réseau
En effet, l’ambition de ce guide est d’intégrer l’informatisation d’une petite bibliothèque dans un réseau départemental. Si, dans une première partie, les enjeux d’un tel réseau sont très bien exposés, on est déçu au stade de la mise en œuvre : l’attention du lecteur n’est pas suffisamment attirée par le rôle essentiel de la notice d’exemplaire dans un tel réseau de circulation documentaire, qu’il s’agisse pour la petite bibliothèque de récupérer temporairement des notices bibliographiques des documents en dépôts, d’annuler ces notices par simple mention du rendu des documents à la BDP, ou d’effectuer des tris statistiques distincts. Il serait intéressant qu’une prochaine édition aborde cette question de façon plus claire. Mais cette réticence est peut-être due à la quasi-absence d’une analyse fonctionnelle des BDP dans un tel réseau ; les circulations bibliographiques et documentaires exigent des spécificités informatiques de la part de ces « têtes de réseau » : extractions de notices, réseaux vidéotex ou par lignes spécialisées, traitements en ligne ou sur disquettes, etc. Sans doute l’hétérogénéité des choix « bédépistes » a-t-elle poussé les auteurs à se montrer prudents quant aux suggestions qu’ils pouvaient faire à leurs collègues.
Il n’en reste pas moins certain que ce guide maniable, clair, découpé en chapitres courts, rendra de précieux services aux responsables de petites bibliothèques des réseaux des BDP, qui découvriront ainsi qu’une informatisation intégrée efficace est réellement à leur portée.