Le futur du professionnel de l'information

Annie Le Saux

Un groupe volontairement restreint de Français, Anglais, Allemands, Espagnols, Hollandais et Italiens, invité les 29 et 30 septembre derniers par le Centre de recherches en sciences infométriques 1, s’est penché sur le futur du professionnel de l’information, leurs réflexions devant aboutir à l’élaboration d’un ouvrage.

La capacité d’anticipation dont devaient faire preuve ces participants avait pour objet les transformations économiques, technologiques, sociales, culturelles et institutionnelles et les évolutions professionnelles procédant de ces transformations.

Les infrastructures

Au prime abord, il a pu paraître plus simple – à des participants non-techniciens – de prévoir les facteurs technologiques que les facteurs sociaux, légaux et culturels.

Que seront donc les médias et les différents outils que nous aurons à utiliser dans dix ans ? On peut, sans grand risque de se tromper, émettre les hypothèses suivantes sur leurs caractéristiques : une plus grande rapidité, une plus grande quantité, une intégration de tous les médias, une simplification des outils et – ce qui serait souhaitable quoique peu probable – un coût moindre.

Mais la technologie des systèmes d’information ne doit pas être confondue avec le contenu des services d’information. Si le transport de quantités volumineuses d’informations ne pose plus de problèmes, il n’en va pas de même pour la qualité de ce qui circule dans ces canaux. Obtenir la bonne information à la bonne place passe nécessairement par un contrôle de la qualité de l’information et par une gestion de ces masses d’information. Faites pour démultiplier, et créées plus dans un esprit d’offre que de demande, ces techniques procurent, dans l’idéal, à tous, dans tous les coins du globe et en temps raccourci des moyens d’accéder à l’information. Mais accumulation et mise à la disposition de tous ne règlent pas les problèmes de la validité, de la sécurité et de l’intégrité de l’information, points sur lesquels les professionnels doivent rester vigilants.

Les acteurs

Une nouvelle conception du travail – le télétravail, travail flexible, pour lequel il n’y a plus de lieu fixe – est en train de voir le jour, qui isolera encore plus l’individu, et risque de faire chanceler la cohésion sociale, même si, pour l’instant, sont présentés comme anecdotiques les exemples de personnes travaillant dans des bureaux voisins et ne communiquant plus que par écrans interposés, sans jamais se rencontrer.

Ces changements technologiques vont transformer aussi les pratiques des usagers et des professionnels de l’information. Chaque utilisateur ne va-t-il pas devenir lui-même un professionnel de l’information ? Plus indépendant, il pourra satisfaire sans intermédiaire ses propres besoins en information. A condition d’être formé aux modes et moyens de communication.

N’est-ce pas là une des portes ouvertes au nouveau spécialiste de l’information ? Car chacun s’accorde à reconnaître que les compétences, les connaissances et les aptitudes requises pour ce professionnel seront différentes de son profil actuel. Seront-elles technologiques, organisationnelles ? Le futur spécialiste sera-t-il un expert de haute compétence dans différents domaines, consultant, médiateur capable d’identifier l’information utile et les réels besoins en information ? Devra-t-il avoir – comme certains le souhaiteraient mais comme d’autres le jugent irréaliste – un double cursus, formé à l’information scientifique et technique et formé dans une discipline donnée, l’intégrant à part entière dans l’équipe, partenaire des chercheurs ? Sera-t-il encore un médiateur, apportant une valeur ajoutée à l’information ?

Les savoir et savoir-faire exigés dans ce nouvel environnement seront étroitement liés à la formation. Qui va s’occuper des différents types de formation ? Beaucoup d’options et d’alternatives sont proposées. Il devient urgent d’y réfléchir pour pouvoir intégrer rapidement de nouvelles orientations dans les écoles de formation des professionnels de l’information.

À l’issue de ces deux fructueuses journées, il fut convenu que l’impact des nouvelles technologies de l’information et de la communication sur les pratiques professionnelles, la définition des structures sociales et des enjeux de société découlant de ces technologies et aboutissant à la définition du rôle et des compétences du futur professionnel de l’information devraient principalement servir de fil conducteur aux groupes de travail collaborant à l’ouvrage en préparation.

  1. (retour)↑  Centre de recherches en sciences infométriques, Centre national de la recherche scientifique, 3-5 rue Michel-Ange, 75016 Paris.