Bibliothèques municipales
données 1990
Paris : ministère de l'Education nationale et de la Culture : Direction du livre et de la lecture, 1993. - 63 p. ; 24 cm.
On l'attendait ! Il est arrivé ! Qui ? : le livret statistique « Bibliothèques municipales » de la Direction du livre. Nouveau cru, nouvelle formule. Il est tombé dans les bibliothèques au début de l'été.
Un nouvel outil
Laissons-nous aller à une première réaction : plus petit, beaucoup moins imposant que son prédécesseur de 1987, il est pratique, maniable, et lisible. Tant de louanges sont inhabituelles, mais il faut le dire, il s'agit là d'une petite prouesse de synthèse statistique.
Vous y découvrirez d'abord l'introduction d'Evelyne Pisier - en tête de la plaquette -, testament bibliothéconomique ou billet de départ de l'actrice numéro 1 de la politique culturelle de l'Etat à la Direction du livre et de la lecture ? Après les premiers (et longs) balbutiements de la décentralisation, il y est en effet affirmé (enfin et presque pour la première fois !) le rôle évaluateur de la Direction : on en attendait depuis longtemps des preuves tangibles !
Toutefois cette plaquette vient en prolongement des deux brochures éditées lors de la Fureur de lire 92 (Livres en cartes), qui avaient eu l'avantage d'indiquer de façon claire la géographie des bibliothèques et de la lecture en France.
On nous annonce également un futur document, avec des données plus complètes, qui devrait prendre en compte les bibliothèques départementales et les services audiovisuels des bibliothèques publiques. Il s'agit donc d'un document intermédiaire. On ne saura pas encore tout cette année !
L'avertissement des différents collaborateurs de cette brochure invite à la prudence tant que les nouveaux formulaires statistiques n'auront pas subi l'épreuve du feu ; on remarquera néanmoins que la méthode de travail est bien indiquée, ce qui permet entre autres de cerner correctement le cadre de référence dans lequel se situe ce document.
La présentation générale et les multiples tableaux graphiques sont, dans l'ensemble, d'une grande lisibilité : nous sommes loin des pages de colonnes du document précédent. Les grands manipulateurs de tableaux statistiques seront frustrés.
Mais qu'à cela ne tienne, seules les données statistiques d'importance sont traitées dans le petit opuscule 1990 : les collections, les acquisitions, les transactions, mais aussi, de manière beaucoup plus lisible, les locaux et véhicules, les horaires et une présentation générale des établissements. Un chapitre particulier permet de connaître l'état du développement informatique municipal.
Quelques petits problèmes de lecture néanmoins : les couleurs utilisées dans certains graphiques ne correspondent pas aux tableaux ou « fromages » correspondants (voir p. 18 et p. 19 : emplois spécifiques des bibliothèques), ce qui handicape légèrement la lecture. Par ailleurs, les données fournies dans la brochure sont dissociées de celles du mémo, bien qu'elles se complètent, en particulier pour les informations comparatives.
Quelques données détaillées
Revenons en détail sur quelques données statistiques : l'évolution de 1987 à 1990 nous mettra du baume au cœur ou, au contraire, risque de nous attrister.
Avec 52 % de la population desservie et 16 % d'inscrits dans les bibliothèques municipales, il n'y a pas de quoi pavoiser ! Néanmoins, l'absence de données provenant des BDP devrait corriger cette vision négative. En ce qui concerne les emprunteurs, l'augmentation n'est que de 0,6 %, mais n'est-ce pas là l'effet négatif de la faible augmentation des crédits, notamment d'acquisitions (qui passent de 11,03 F à 11,30 F par habitant). Si 40 % des communes de 5 à 10 000 habitants sont dotées d'une bibliothèque, il existe toujours 20 % des 776 communes de 10 à 50 000 habitants sans bibliothèque. Ce qui tendrait à prouver que l'évolution est plutôt lente dans les secteurs fortement urbanisés, les statistiques ne permettant pas d'ailleurs de connaître plus finement l'état du réseau dans les communes de plus de 50 000 habitants.
L'observation des chiffres des personnels nous apportera peut-être les informations recherchées : avec 40 % de personnel spécifique - contre 36 % en 1987 -, les effectifs professionnels décollent à peine, même s'il y a un léger mieux. Cela signifie donc que 60 % des effectifs sont des personnels administratifs, techniques mais aussi des CES (contrat emploi solidarité) et vacataires. La tendance se confirmera-t-elle à la lecture des statistiques des emplois en regard de la nouvelle filière culturelle ? C'est à craindre.
Un bon point toutefois pour les communes de 10 à 20 000 habitants qui ont le plus fort taux d'encadrement (A et B), à égalité avec les villes de plus de 100 000 habitants qui, pourtant, ont un taux de cadres A inférieur aux précédentes.
L'état des collections nous plonge dans le pessimisme. Malgré un taux d'acquisitions des livres maintenu à 13 %, cela ne représente que 228 livres pour 100 habitants contre 225 en 1987. La tendance à l'augmentation avait été plus forte entre 1983 et 1987 (191 en 1983).
A noter que la formulation des dépenses par poste, 53 F par habitant pour les dépenses de personnel, 11,30 F pour les acquisitions, ne nous permet plus une comparaison globale, même si ce mode de présentation est plus logique et plus intéressant que la formulation globale.
Plusieurs nouveautés
La communication sur place des documents, qui représente une forte activité des bibliothèques, ne faisait pas en 1987 l'objet d'un tableau statistique général. Elle est ici présente.
En 1987, les heures d'ouverture n'étaient pas exploitées de manière globale. Les 3 tableaux et le commentaire de la livraison 1990 sont en revanche particulièrement explicites et nous permettront de relire avec des réels repères certains articles de presse professionnelle de ces dernières années. Les écarts sont effectivement considérables d'une commune à l'autre, et si les plus grosses villes maintiennent un niveau d'heures d'ouverture supérieur à la moyenne nationale, près de le moitié (47 %) sont ouvertes moins de 20 h. Où situer le seuil d'existence réel d'une bibliothèque ?
Enfin le chapitre consacré à l'informatique nous appelle à la prudence : nous ne sommes pas entrés encore de plain-pied dans l'ère informatique. Il faudra corriger nos rêves ! Près des deux tiers des bibliothèques municipales ne sont pas encore informatisées et seules 60 % sont concernées par l'informatique. Le catalogage manuel a encore de belles heures devant lui.
En bref, un document riche d'enseignement, même si le prochain devrait nous faire découvrir une réalité plus complexe et plus riche. A souhaiter seulement qu'il paraisse dès juin 1994, ce qui permettra de suivre l'évolution encore au plus près de la réalité.