Bibliothèques et services documentaires des grandes écoles
Madeleine Heid
Les professionnels de la documentation dans les grandes écoles en France se retrouvent depuis 15 ans dans un groupe spécifique de la Conférence des grandes écoles (CGE). Leur nouvelle enquête sur la situation des services documentaires montre une évolution contrastée, où de grands centres pilotent aisément le développement des services aux utilisateurs avec des équipements modernes, tandis qu'une majorité de petites équipes assurent, tant bien que mal, le rôle pédagogique particulier de la documentation dans l'enseignement supérieur des ingénieurs et cadres de gestion... Qui pourra aider à la prise de conscience des moyens indispensables, pour apprendre aux élèves de ce niveau à utiliser efficacement les informations techniques et professionnelles d'aujourd'hui ?
Librarians and information specialists of French « grandes écoles » have used to meet for 15 years in a specific group of the « Conférence des grandes écoles ». Their new survey about the state of the art in library services shows a contrasted situation. Some big services, with modern facilities, easily give good services to users. Many of the smaller ones try to do their job as weil as they can, in providing documentation services to these specific users, who are future engineers and managers. Who will be able to help people to be aware of the indispensable facilities, necessary to teach these students to use efficiently the professionnal and technical informations today ?
In einem Sonderausschuß der Hochschulenconferenz (CGE = Conférence des grandes écoles) besprechen sich miteinander seit 15 Jahre die in den französischen Hochschulen tätigen Dokumentationsfachleute. Dank ihrer neuen Untersuchung, die die Lage der Dokumentationsabteilungen betrifft, wird eine verschiedene Entwicklung festgestellt : große Zentren haben es leicht, ihren Benutzem immer bessere Dienste mit modernen Ausstattungen zu leisten - die meisten aber verfügen nur über kleine Belegschaften, die so gut wie möglich die pädagogische eigene Rolle der Dokumentation zur Ausbildung der Ingenieure und Betriebsvorgesetze spielen. Kônnte doch nur einer die nötigen Mittel erkennen lassen, um diese erhabenen Studenten die Ausnutzung der heutigen technischen und beruflichen Information zu lehren !
La conférence des grandes écoles 1 (CGE) est une association loi 1901, qui regroupe, en France, 140 écoles d'ingénieurs, 28 écoles de gestion, 10 écoles de spécialités diverses, 7 universités étrangères et les associations de professeurs de classes préparatoires. Le rôle de la Conférence, outre la représentation de ses membres auprès des pouvoirs publics et du monde professionnel, la promotion du système des grandes écoles tant en France qu'à l'étranger, la coordination d'actions communes et la diffusion de l'information sur les activités des écoles - au travers de la Lettre de la Conférence des grandes écoles et d'un colloque annuel -, est de favoriser la réflexion au sein de commissions permanentes comme : Amont, Recherche, Relations internationales, Communication, Mastères spécialisés. Des groupes de travail 2 sont créés pour traiter de problèmes spécifiques. Le groupe Documentation-Information existe depuis 15 ans.
Dix ans après une première enquête 3, lancée par ce groupe de la CGE, intitulé alors Information, documentation et pédagogie, les professionnels de la documentation ont voulu faire à nouveau le point sur la situation et l'évolution des services documentaires des grandes écoles.
Entre-temps, des actions importantes ont été suivies par le groupe Documentation : par exemple, la formation, par les documentalistes, des utilisateurs (élèves et enseignants) à l'interrogation des banques de données, avec insertion dans le cursus, dans le meilleur des cas, de cours de méthodologie et de recherche de l'information scientifique et technique. Cette expérience 4 a été de nouveau soutenue en 1992 et 1993 par le ministère de la Recherche et de l'Enseignement supérieur. Autre réalisation : la création et l'alimentation de THESA 5, par Marie-Claude Font, de l'Ecole des mines de Paris : « La seule banque de données signalant les sujets de thèses en cours dès la première année d'inscription en thèse », gérée par l'Institut national de l'information scientifique et technique (Inist). Cette banque de données intéresse particulièrement les dirigeants d'entreprises.
La nouvelle photographie générale des services documentaires aujourd'hui permet de situer leur rôle dans les 178 établissements d'enseignement supérieur membres et associés de la CGE, et leur présence ou absence dans la formation des ingénieurs et des cadres supérieurs, en même temps qu'elle donne la mesure des efforts à faire pour assurer la place de la documentation dans la compétitivité des grandes écoles.
L'enquête
La conception du questionnaire a été réalisée à partir de questionnaires récents, diffusés par les associations de documentalistes ou de bibliothécaires, en 1991 notamment. Cette nouvelle trame se voulait générale et simplifiée, de façon à dégager des indicateurs régulièrement observés par la suite. Néanmoins, huit chapitres distincts furent jugés essentiels, et le questionnaire occupait treize pages !
Les chapitres sont analysés dans l'ordre : l'identité professionnelle de l'établissement ; l'organisation de la structure documentaire (simple ou en réseau) ; la composition des fonds documentaires (dont une enquête plus analytique a été reprise dans le répertoire de 1993 6) ; la composition du budget du service ; l'état de l'informatisation de gestion et de recherche ; les types de services rendus aux utilisateurs et leur tarification éventuelle ; les produits d'information documentaire ; les actions de promotion du service.
L'enquête a été envoyée le 18 octobre 1991 aux écoles et organismes membres et associés de la CGE. Cela a représenté 178 envois aux directeurs généraux et responsables de services documentaires.
Une relance téléphonique soutenue a permis de réunir 120 questionnaires, représentant autant d'unités documentaires. Sachant que certaines écoles disposent de plusieurs services, tandis que d'autres peuvent avoir au contraire une documentation commune, il est difficile d'établir un taux fiable de réponses. Mathématiquement, celui-ci serait de 67 %, mais ce chiffre pourrait être réévalué, d'autant plus que les rappels téléphoniques ont mis à jour le fait que certains établissements n'ont toujours pas de documentation gérée par un professionnel, ou ont une documentation carrément inexistante : cette situation a été confirmée lors de la réalisation du répertoire 1993. A titre de comparaison, en 1980, le taux de réponses était de 53 %, 159 questionnaires furent retournés sur 300 envois, plus largement échantillonnés semble-t-il qu'aujourd'hui, encore qu'il y ait aussi, dans la liste CGE de 1991, des établissements universitaires.
L'exploitation statistique de l'enquête a été assurée par l'Ecole supérieure des sciences commerciales d'Angers (ESSCA), sur le logiciel Chadoc, de février à juin 1992.
Lors de la saisie des questionnaires, l'intégration de réponses variées, notamment aux questions ouvertes, ainsi que la prise en compte de certains commentaires, ont conduit à ajouter des variables, ce qui a porté leur nombre à 346. Mais, par ailleurs, le taux de non-réponses à certaines questions a rendu l'analyse des données correspondantes très aléatoire, si bien qu'il est apparu raisonnable de n'étudier réellement que 255 variables. Ce compte rendu présente les plus significatives d'entre elles.
D'emblée, il ressort que les services documentaires des grandes écoles françaises sont loin de constituer un groupe homogène. Les chiffres ci-contre suffisent pour montrer cette diversité.
L'enquête a été traitée anonymement. Les catégories d'écoles (scientifiques, de gestion, d'agriculture) n'ont été retenues que pour les résultats généraux du taux de réponses.
En 1992-1993, un répertoire des services documentaires des grandes écoles a été réalisé par le groupe Documentation de la CGE sous la direction de Jacqueline Leroy (Ecole des mines, Paris), avec le soutien du Conseil supérieur des bibliothèques ; il sera réactualisé en 1994. On y trouve, entre autres, pour les 127 établissements signalés, le détail des domaines et des fonds documentaires, données volontairement non traitées de l'enquête. Un index des principaux domaines et une liste des mots-clés le complètent utilement.
Identité professionnelle
Les établissements qui ont répondu à notre enquête se répartissent comme suit : 58 % d'écoles d'ingénieurs ; 20 % d'écoles de gestion ; 18 % d'écoles des sciences de la nature et 2,5 % d'autres.
Pour le nombre total d'étudiants en formation, moins de 2 % des établissements ont moins de 99 étudiants, 30 % en ont entre 100 et 499, 35 % entre 500 et 999, et presque 11 % plus de 1 000 (il y a eu 22 % de réponses non valides).
Pour le nombre d'étudiants en troisième cycle, 37,5 % des établissements en ont déclarés de 10 à 99, 20 % de 100 à 499, 2,5 % plus de 500, et moins de 1 % de 0 à 99. Là aussi, on a noté une proportion forte de réponses non valides (39 %) qui se retrouvera régulièrement dans des questions apparemment sans difficultés de réponses.
A la question sur le nombre d'étudiants étrangers, 49 % des établissements ont répondu entre 0 et 99, 12,5 % de 50 à 199, 7,5 % 200 et plus et 30,8 % de réponses non valides.
Quant au nombre total d'enseignants, chercheurs et thésards, les réponses se répartissent ainsi : moins de 2 % entre 0 et 9, 19 % de 10 à 49, 12,5 % de 50 à 99, presque 32 % en ont plus de 100, et... 35 % des réponses sont non valides.
Structure documentaire
Dans ce chapitre, l'analyse des résultats de l'enquête fait apparaître des problèmes de définition (réseau, statut, définition de poste, informatisation...) qui rendent parfois difficile l'interprétation des chiffres obtenus.
Il n'en reste pas moins que le besoin et l'utilité d'appartenir à un réseau apparaît important, puisque 33 % des services documentaires participent déjà de près ou de loin à des réseaux et 19 % ont des projets de coopération.
Ces résultats sont intéressants même s'il semble y avoir eu confusion entre participation à une banque de données commune et à un réseau de recherche ou professionnel.
On aurait pu donner, au préalable, la définition suivante des réseaux : « Des systèmes permettant le transfert, la circulation de l'information entre disciplines et entre pays, systèmes qui entraînent la mise en commun de l'information que détient chaque centre affilié et dont la structure suppose un échange, c'est-à-dire la fourniture d'information contre la réception d'informations » 7
En ce qui concerne les catalogues collectifs, 54 % des services participent au Catalogue collectif national des périodiques (CCN), 4,17 % au Catalogue collectif des ouvrages étrangers reçus en France (CCOE ), et seulement 2,5 % au Pancatalogue.
L'intérêt pour THESA s'avère assez limité : 25 % des services documentaires y participent et 17 % souhaitent y collaborer. La moitié des nouvelles adhésions à THESA a eu lieu en 1988 pour stagner par la suite. Aujourd'hui, la gestion de cette banque de données par l'Inist, une fois passés les ajustements des procédures et des techniques, devrait lui donner une dimension plus conforme à son originalité et à sa qualité.
Coopération avec les pays étrangers
Seulement 18 % des établissements font état d'une coopération avec l'étranger.
Les projets de réseaux sont très dispersés, aussi est-il difficile d'en établir une typologie. Ils concernent pour 60 % l'Europe ou des pays européens.
On peut noter que chaque projet cité ne l'est que par un seul établissement, ce qui signifie qu'il n'y a pas de coopération entre établissements.
Le rattachement hiérarchique des services documentaires est caractéristique des contrastes révélés par l'enquête : 60 % des services documentaires sont rattachés à la direction générale, ce qui semblerait indiquer une place reconnue à la documentation ; 17 % le sont à la direction des études, 13 % à la direction administrative.
Surface et nombre de places
Parmi les services documentaires qui ont répondu à l'enquête, la surface totale est : pour 2 % de moins de 49 m2, pour 33 % entre 50 et 249 m2, pour 36 % entre 250 et 599 m2, pour 7 % de 600 à 999 m2 et pour 13 % de plus 1 000 m2. La moyenne des surfaces est de 544 m2, avec les disparités mentionnées dans l'introduction (tableau des extrêmes). Par étudiant, la surface moyenne de l'ensemble documentaire (magasins, bureaux, salles de lecture) est donc de 0,97 m2 (la moyenne recommandée est de 1,50 m2). La moyenne des places assises est d'une pour 7,69 étudiants (ou 13 places pour 100 étudiants).
La Direction de la programmation et du développement universitaire préconise en moyenne une place pour sept étudiants afin de parvenir, à long terme, à une place pour cinq étudiants8-9. A titre de référence, les recommandations britanniques prévoient en moyenne une place pour trois étudiants en lettres, une pour quatre en sciences et une pour cinq en technologie. Ces ratios étaient, en 1991, en bibliothèque universitaire, de 0,54 m2 par étudiant inscrit et d'une place pour 18 étudiants inscrits à l'université. Le nombre de places assises pour les lecteurs vient préciser les chiffres ci-dessus, car il n'a pas été possible d'exploiter les résultats des surfaces pour les salles de lecture seulement. L'on constate en effet que 4 % des centres ont de 0 à 9 places assises seulement, plus de 42 % entre 10 et 49, 30 % entre 50 et 99, 7 % entre 100 et 149, 8 % entre 150 et plus ! (5 % de réponses non valides). En moyenne donc, les élèves des grandes écoles ont deux fois plus de chance, en 1991, d'avoir une place assise en bibliothèque que ceux des universités...
Composition des équipes
Les résultats révèlent une majorité de petites équipes, puisque plus de 62 % des services annoncent, en nombre total d'emplois équivalents plein temps, de 1 à 3 personnes ! 29 % des services ont entre 4 et 9 personnes, équivalents plein temps. L'on retrouve ensuite le profil des grandes bibliothèques ayant de 10 à 14 personnes (3 %), de 15 à 19 (2 %), 20 et plus (1 %).
Qualification du personnel
Les résultats sont à aborder avec une grande prudence. En effet, les taux de non-réponses sont ici très élevés : 41 % et 52 % (pour les responsables et les assistants).
La notion de « cadre », « employé », « assistant » ne répond pas, semble-t-il, aux mêmes définitions suivant les services, ce qui rend les réponses difficilement exploitables.
Pour les services qui ont répondu, la moitié des responsables a une formation en documentation (de niveau Bac + 2 à Bac + 5 : 22 % seulement des responsables ont une formation supérieure en documentation). En comparaison, en 1988, 41,7 % des effectifs des BU étaient des professionnels.
Par contre, en valeur absolue, 22 % des responsables ont une formation Bac + 5 ou doctorale dans une discipline autre que la documentation.
Ceci semblerait indiquer que, dans ce cas, la connaissance d'une discipline a pu paraître plus utile que la connaissance professionnelle en documentation.
Globalement, on peut aussi remarquer la place importante de la formation professionnelle à Bac + 2 (24 %).
Taux d'encadrement des lecteurs
L'encadrement est en moyenne d'une personne pour 106 usagers (élèves enseignants-chercheurs). Ce chiffre est faible si on le rapporte au pourcentage de personnel ayant une formation professionnelle supérieure (25 %). A titre comparatif, en 1991, en BU, une personne est disponible pour 355 lecteurs inscrits.
Le fonds documentaire
Les périodiques
Les services documentaires reçoivent régulièrement en moyenne 261 titres de périodiques. Le coût moyen de l'abonnement est de 626 F par an, toutes disciplines confondues.
Si l'on rapproche ce nombre d'abonnements du nombre des inscrits, on obtient une moyenne de 6 abonnements par inscrit. La moyenne est d'un titre pour 14,76 étudiants dans les BU en 1991. Si l'on considère les réponses à l'évolution des collections, la moyenne du nombre de nouveaux abonnements, qui est de 11, est presque le double de celle du nombre d'abonnements supprimés, qui est de 6. Peut-on en conclure que les collections s'enrichissent ?
Le taux moyen de croissance des collections de périodiques est de 4,4 % (4 % dans les BU en 1991).
Les ouvrages
Les écarts sont très importants dans les collections d'ouvrages puisque le minimum est de 45 et le maximum de 300 000. La moyenne est aux alentours de 19 578 ouvrages.
En moyenne, un étudiant dispose de 43 livres (24 livres par étudiant inscrit dans les BU en 1991).
Rappelons que le Répertoire des services documentaires (cf. note 6) précise la composition des fonds.
L'accès aux documents
La moyenne des heures d'ouverture des salles de lecture est de 43 heures par semaine, ce qui est important par rapport au sous-encadrement des lecteurs évoqué plus haut.
- 72 % des services ouvrent moins de 50 heures par semaine ;
- 28 % ouvrent plus de 50 heures.
Les BU ouvraient entre 45 et 50 heures en moyenne par semaine en 1991.
Environ 80 % des services documentaires sont en accès direct et 50 % sont ouverts à tout public. Ce résultat serait à compléter par la nature des services offerts, et par la situation géographique de l'établissement. L'on note que 31 % des services sont équipés d'un système antivol, alors que 80 % sont en accès direct.
Les prêts
Les réponses non valides sont importantes : 27,5 %. Est-ce par manque de statistiques fiables ou par absence de ce service de base ? On remarque que 30 % des réponses se situent entre 1 000 et 5 000 prêts par an, 17 % de 5 000 à 10 000. La moyenne des prêts entre bibliothèques (PEB) est faible : 643 prêts par an, soit 0,7 prêt par an par lecteur inscrit (environ 8 400 prêts par an dans les BU en 1991).
Les usagers
En ce qui concerne le nombre d'inscrits, nous enregistrons 24,17 % de réponses non valides... Ce qui renvoie aux mêmes interrogations que pour les statistiques de prêts ! 2 % des réponses donnent moins de 99 lecteurs inscrits, 30 % des réponses situent de 100 à 499 lecteurs inscrits, 28 % de 500 à 999, 13 % de 1 000 à 1 999 et 3 % 2 000 et plus. La moyenne des usagers effectifs par rapport au nombre total d'usagers potentiels (étudiants, enseignants et chercheurs) donne un taux d'inscription de 65,5 % et de 76 %, si l'on rapporte le nombre des inscrits au nombre d'étudiants seulement. La moyenne du nombre de prêts par lecteur inscrit est de 10 par an (13 prêts par an dans les BU en 1991). A titre de comparaison, dans les BU de l'ancienne République fédérale d'Allemagne, la moyenne était, en 1977, de 28 prêts par lecteur et par an. On peut conclure à l'importance de la consultation sur place, liée à l'accès direct et à la composition des fonds documentaires, riches en périodiques.
Les budgets de fonctionnement
87 % des services documentaires ont un budget qui leur est propre, signe d'une certaine autonomie de la documentation, mais seulement 77,5 % ont la responsabilité des dépenses. Il aurait été intéressant de pouvoir indiquer la part du budget documentaire dans le budget général de l'établissement.
Une grande disparité caractérise les budgets d'acquisitions : de 19 000 à 3 000 000 F, la moyenne se situant autour de 391 089 F (à remarquer seulement 5 % de réponses non valides).
Les abonnements de périodiques
On est frappé par le taux de non-réponses (15 %) : peut-on relier ce taux à une absence de statistiques détaillées identifiant les dépenses par type de documents dans le budget global ? Les dépenses en abonnement s'échelonnent entre 3 953 et 1 600 000 F.
58 % des services dépensent moins de 200 KF. 2,5 % dépensent plus de 1 000 KF. Les dépenses d'abonnement absorbent en moyenne 58 % des budgets d'acquisitions, tous documents confondus.
Généralement une amélioration de la couverture documentaire devrait se faire sentir dans les années qui viennent, puisque 52 % des services documentaires ont eu un budget en augmentation les 3 années précédentes et 51 % attendent une augmentation de leur budget pour l'année à venir. La dépense moyenne par étudiant est de 714 F par an. Elle est de 232 F par lecteur inscrit dans les BU en 1991.
En conclusion de ce chapitre, au-delà des problèmes de définitions, ces différents chiffres et ratios révèlent :
- un équipement médiocre des services documentaires des écoles : moins d'un m2 par étudiant : 1 place pour 8 étudiants ;
- un sous-encadrement professionnel : un quart du personnel a acquis une formation supérieure en documentation, et l'encadrement documentaire est d'une personne pour 100 utilisateurs ;
- mais une couverture documentaire correcte : dépense de 714 francs par an par étudiant, et en développement : 50 % des budgets sont en augmentation.
L'informatisation
L'informatique documentaire équipe en force 86 centres sur 120 (71,67 %). 13 centres (10 %) sont sur le point de le faire... et 65 % de ceux qui sont informatisés ont des projets particuliers de développement. On note des grandes dates dans ce mouvement. C'est le grand « boom » depuis 1986 : 50 % des réponses positives donnent cette date initiale, et 13 % donnent celle de 1990. Il faut peut-être considérer aussi le renouvellement d'anciens systèmes, mais cet historique très récent est une réalité, au vu des logiciels cités. Lors de la précédente enquête, en 1980, on évoquait l'« automatisation » comme technique à développer pour les 5 années suivantes. Cela n'aurait en fait concerné que 13 % des effectifs (11 % pour les 2 années suivantes)...
La diversité des situations documentaires est là encore illustrée par les 30 logiciels différents évoqués, dont 19 ne sont cités qu'une seule fois ! Texto, de ce fait, bat tous les records en apparaissant 32 fois !
Peu de logiciels « maison » sont encore utilisés aujourd'hui. Nous en dénombrons neuf.
39 % des systèmes fonctionnent en réseau, dont 21 % en interne, mais la question a-t-elle été bien comprise par tous dans le même sens ? En tout cas, seuls 9 sont des réseaux informatiques nationaux et 3 internationaux.
En moyenne, le nombre de terminaux est de 8 (le minimum est de 1, le maximum de 70 et 50 % ont moins de 12 terminaux) et la question d'un accès vidéotex extérieur n'a pas eu de réponses significatives (5 % seulement).
Manifestement, l'interrogation des fichiers internes des bibliothèques est réservée à l'établissement lui-même et ne passe pas par le vidéotex, à moins qu'il n'y ait là aussi, des réponses ne distinguant pas les postes de travail et d'interrogation propres aux systèmes et ceux dédiés exclusivement aux interrogations de banques de données et de CD-Rom, par exemple.
La gestion des systèmes est effectuée plus par les documentalistes eux-mêmes (31 %) que par les informaticiens (21 %) et, pour 18 %, par les deux.
50 % des centres informatisés déclarent une maintenance des logiciels et des nouvelles versions (11 % n'en n'ont pas) et 28 % font partie d'un club d'utilisateurs. Ceci s'accorde avec la typologie des logiciels énoncés, dont peu sont des logiciels multipostes pour bibliothèques importantes. Les systèmes utilisés par les services documentaires semblent plus appréciés pour la recherche documentaire (60 %), le catalogage (57 %) et les éditions (46 %), que pour la gestion des acquisitions, du budget, les statistiques (29 % !) ou les transferts de fichiers (25 %). L'on peut considérer que les réponses à l'informatisation des modules cités révèlent plus l'usage qu'en font les professionnels que les réelles possibilités des logiciels utilisés. Il est de ce fait notable que 25 % utilisent les modules de transfert de fichiers, car cela prouve l'intérêt d'un travail en réseau.
Seuls 10 % récupèrent des notices de diverses sources : seules BN-Opale et Delphes sont citées deux fois.
Bref, en taux d'équipement informatique, tout a changé depuis 10 ans ! Et les projets restent nombreux. Il serait intéressant de rapprocher l'informatisation des services rendus, du personnel, de la participation aux réseaux... Les modules statistiques restent manifestement à développer, soit dans leur utilisation, soit dans leur création par les concepteurs ! Néanmoins on est surpris par la diversité des systèmes et des logiciels tendant à refléter, sans doute, à la fois la variété de l'offre et la jeunesse du marché.
Les services rendus
Langages documentaires et thesauri
47,5 % des langages de recherche sont propres aux services documentaires, 18 % utilisent la CDU, 8 % la classification Dewey, 6 % le DES 10, 12 % le Thésaurus du management, 2,5 % Rameau et Pascal. La forte proportion de langage propre à chaque service peut, là aussi, gêner les participations ultérieures à des réseaux internationaux, comme par exemple l'OCLC qui alimente le Pancatalogue.
Interrogation des banques de données
Seuls 18 % d'utilisateurs « sélectionnés » interrogent directement. 13 % des recherches sont effectuées par les responsables des services, 48 % par les documentalistes, seulement 2 % par des spécialistes. Les résultats fournis restent, pour 67 %, des listes de références et pour les 14 % de documents primaires fournis en réponses, 82 % le sont par prêt entre bibliothèques (PEB), 48 % par télécopie, 79 % par copie et courrier, 2,5 % par Numéris.
Les produits d'information documentaire
Public servi et tarifications
Le tableau à plusieurs entrées du questionnaire a été transposé en une série de diagrammes (cf. page suivante), à comparer « d'un coup d'oeil ». Là aussi, le taux de non-réponses est important, même pour des produits très fortement cités, comme le catalogue de périodiques. Il est tout à fait clair aussi que les produits sont davantage réalisés pour les enseignants et les chercheurs et qu'ils sont payants pour les personnes extérieures à l'école. Le tableau peut être lu comme retraçant l'importance de la diffusion des produits accordée aux utilisateurs des services documentaires (ciblage des produits).
32 % des services garderont la gratuité de leurs produits, tandis que 26 % songent à les rendre payants. On peut en déduire que 58 % des services sont actuellement gratuits, 30 % demandent un droit d'entrée, 23 % facturent les prestations elles-mêmes.
Promotion du service
47 % des services documentaires réalisent un guide du lecteur et 22 % en ont le projet. Dans 78 % des cas, il y a une présentation orale. 10 % éditent une publication. Ce pourcentage n'a pas évolué depuis 1980. La collaboration aux publications externes des écoles a également stagné (32 %). II s'agit surtout de bibliographies et d'articles (12 %). 7 % seulement analysent des ouvrages. 10 % assurent une formation à l'information sous forme de cours ou de travaux dirigés. Ce chiffre était de 45 % en 1980 pour des formations d'environ 4 heures. 11 % des unités documentaires mentionnent, alors que la question n'était pas posée, l'organisation de journées portes ouvertes. 37 % participent d'une façon globale aux manifestations de l'Ecole. Enfin, 36 % organisent des animations, dont 18 % dans le cadre de réseaux. 12 % en ont le projet. L'ouverture vers l'extérieur, la diversification et la tarification des services restent limités.
En conclusion, il reste difficile de dessiner une image moyenne des services documentaires des grandes écoles françaises tant ils sont disparates. Certaines unités bénéficient de moyens (budget, effectifs, qualification du personnel, etc.) très importants tandis que d'autres vivotent péniblement. Certaines écoles n'ont tout simplement pas de documentation. Une comparaison est cependant possible par rapport à l'enquête de 1980. Il ressort que, si la couverture documentaire est correcte, si l'informatisation est massive, bien que récente, en revanche, certaines faiblesses perdurent : équipes réduites, peu de personnel qualifié, encadrement insuffisant des utilisateurs, produits documentaires issus des activités de gestion plutôt destinés aux chercheurs... La situation s'est même détériorée pour la formation des usagers. Alors que « trouver la bonne information » est un facteur de réussite dans l'entreprise, que, dans l'enseignement supérieur, de plus en plus de recherches personnelles sont demandées aux étudiants, les services documentaires n'ont pas encore acquis la place qui leur revient au sein des grandes écoles. Qui prendra conscience de ce paradoxe ?
Novembre 1993