La petite enfance et les livres
Association haute-normande pour la coopération régionale des bibliothèques et des centres de documentation
Tout le monde, désormais, éducateurs, psychologues et sociologues s'accordent à penser que les « manières d'être lecteur » s'enracinent dans des expériences anciennes liées au livre ou à la lecture. Dans les nombreux stages qu'il animait sur l'acte de lire, Georges Jean 1 rappelait toujours que toute lecture est le souvenir d'une première lecture.
Sensibilisation précoce aux livres
On ne peut que rendre hommage à l'AHNCORD d'avoir publié les actes de journées d'information qui ont eu lieu les 18, 19, 20 et 21 septembre 1989, consacrées à « la petite enfance et aux livres ». Bien que destinées, prioritairement, aux professionnels de la petite enfance et aux bibliothécaires, ces journées s'adressaient à toute personne intéressée par le sujet.
De l'avis même des organisateurs, elles « avaient pour but de :
- donner des bases théoriques sur l'acquisition du langage écrit chez l'enfant,
- informer sur des collaborations menées au sein d'une même ville, de différentes institutions (bibliothèques, crèches, services sociaux, écoles matemelles),
- faire connaître le rôle primordial du contact précoce avec les livres dans la lutte contre l'illettrisme,
- insister sur l'importance de l'imaginaire dans la structuration de la personnalité ».
Le document de travail qui en a résulté, rend compte de ce double projet : projet de connaissance et projet d'action commune entre différents partenaires. Les diverses communications sont condensées de manière à restituer les échanges auxquels elles ont donné lieu.
L'intervention de Jean-Pierre Cassany, pédopsychiatre, médecin-directeur du CMPP-Sévigné de Rouen 2, vise à développer la sensibilisation précoce aux livres (et non l'apprentissage précoce de la lecture). Il s'appuie pour cela sur les travaux concernant les mécanismes de l'apprentissage de la lecture : ceux de Colette Chiland et de Diatkine, en psychologie, ceux d'Emilia Ferreiro, de Foucambert et de Jean Hébrard, en pédagogie. A partir de la description de cas d'enfants éprouvant des troubles de lecture, l'auteur resitue la dyslexie comme symptôme dans l'économie familiale plutôt que comme handicap.
Un document de travail
Marie Bonnafé, psychanalyste et secrétaire de l'Association ACCES (Actions culturelles contre les exclusions et les ségrégations) présente ses objectifs et ses modes d'intervention. Prenant acte des résultats de recherche d'Emilia Ferreiro et de Diatkine selon lesquels l'enfant a besoin de stimulations culturelles pour entretenir sa curiosité pour le livre, ACCES s'efforce de développer auprès des bébés et de leurs parents, dans les salles d'attente des PMI 3, les pratiques de récits de comptines ou d'histoires pour faciliter l'accès à l'imaginaire. Des expériences diverses illustrent l'importance de ce langage du récit : une expérience de lecture de contes traditionnels avec des enfants en échec de lecture, un recueil de jeux et de chansons (Enfantines). D'autres réalisations éditoriales sont présentées : Popi, mensuel pour les tout-petits (Bayard-Presse) et l'illustration dans le livre pour enfants.
Ce dossier très fourni s'achève avec une intervention de Jean Perrot qui tire les conséquences de ce qu'apporte Winnicot sur l'idée du livre comme objet transitionnel et de l'importance du jeu. Il cite des exemples de livres-surprises, de livres-jeux et de livres-catastrophes qui, tous, ont une chance de créer un choc affectif au plus profond de la personnalité de l'enfant et, à ce titre, instaurent un mode de communication entre l'enfant et le monde.
Au total, cette brochure atteint bien l'objectif que s'étaient fixé les organisateurs des journées d'information : fournir un document de travail aux bibliothécaires et aux spécialistes de la petite enfance et y puiser l'envie de raconter des livres aux tout-petits.