L'usager cet inconnu ?

Jean-Michel Salaün

Le 25 octobre dernier, une journée de travail s'est tenue à l'ENSB 1, sur le thème L'usager cet inconnu...Peut-on satisfaire la demande d'information ?, organisée conjointement par l'Ecole et l'ADBS 2 dans le cadre de leur collaboration.

L'usager sera-t-il l'éternel méconnu ? Nombre d'études sur les publics des bibliothèques - quand elles existent - présentent souvent, estimaient les intervenants, un caractère peu opératoire. Bien souvent, leur résultat est discutable du fait de leur condition de recueil, ou inexpliquable du fait des catégories proposées, ou encore d'un intérêt limité par leur caractère trop platement descriptif. Un travail sur les méthodologies d'enquête est nécessaire afin de permettre de dégager une typologie des comportements et de déboucher sur une étude des motivations, notamment par des techniques d'observation.

Deux enquêtes, sur les pratiques de recherche d'information des chercheurs dans le biomédical d'une part, et des ingénieurs techniques de l'autre, viennent d'être effectuées. Elles mettent en évidence notamment l'importance de la proximité matérielle de la documentation pour les premiers types de chercheurs et l'ignorance des techniques, des outils et des services de recueil d'information pour les seconds. D'où une multiplicité de positionnements possibles pour un centre de documentation en entreprise, depuis le rôle de fournisseur privilégié en passant par celui d'appoint, d'assistant, de conseil jusqu'au plus intéressant: le rôle de stratège.

Certains plaident pour l'information utile, pour une approche consumériste du marché de l'information documentaire. Il est alors indispensable de segmenter la demande d'information. Diverses tentatives montrent la difficulté, mais aussi l'impérieuse nécessité, de quantifier les usages. Le poids croissant, par exemple, de l'autoproduction, favorisée par la démocratisation de la micro-informatique, fausse les études de marché et statistiques actuelles.

Comment mieux connaître cette catégorie floue qu'est le non-usager ? Certains ont proposé une typologie qui distingue le non-usager absolu, qui préfère une démarche informative autonome (ou pas de démarche du tout), le non-usager contraint, qui ne vient pas parce que les services ne lui sont pas ou peu accessibles, et le non-usager provisoire qui, selon son désir, l'état de ses travaux et de sa demande ou encore de ses capacités informatives, va s'éloigner du service d'information, sans que cette attitude soit nécessairement définitive.

Faut-il alors mettre en oeuvre un véritable marketing de l'information ? Certains, proposant même l'abandon du terme d'usager pour celui (moins usagé ?) de client en sont de farouches partisans. Un tel marketing bien conçu doit s'appuyer sur des produits documentaires qui reflètent l'identité de la profession, sur la connaissance du marché, sur la prise en compte des prix et des coûts et sur une nécessaire promotion.