Le conseil supérieur des bibliothèques

Michel Melot

La France s'est dotée en 1989 d'un Conseil supérieur des bibliothèques, que les professionnels demandaient depuis plusieurs années et que les politiques de décentralisation ont rendu indispensable. Des Conseils supérieurs existent dans d'autres pays d'Europe, selon des formules voisines. S'il n'a pas de pouvoir sur les institutions, le Conseil a un rôle de propositions et d'expertise et agit par des « recommandations ». Huit commissions de réflexion ont été mises sur pied lors de cette première année de fonctionnement ; elles couvrent des thèmes divers, de la formation au projet de catalogue collectif national, de la politique européenne à la question du dépôt légal ou du droit de copie. Le Conseil remettra son premier rapport annuel au début de 1991.

In 1989, is created in France a Library advisory council. It was asked for many years by professional librarians and recent movements in decentralization made it needful. Several other European countries already have library councils, on a rather similar way. The French council has no direct power on libraries authorities but is acting in proposing and expertising and gives « recommandations ». Eight commissions have begun to work on different themes such as training, national catalogue, European community projects, legal deposit, copyright. The Library council's first report will issue at the beginning of 1991.

C'est délibérément que les fondateurs du Conseil supérieur des bibliothèques ont annoncé au Journal officiel sa création le même jour, 24 octobre 1989, que celle de l'Etablissement public constructeur de la Bibliothèque de France. Par coïncidence, ce même 24 octobre, l'Association des bibliothécaires français publiait une nouvelle demande de création d'une telle institution, dont elle dressait, une fois encore, le profil. On trouve en effet plusieurs origines à ce Conseil, les unes lointaines, les autres immédiates.

Les origines

Sans remonter aux assises de 1968 où tout avait été déjà demandé, il faut au moins se souvenir du mois d'août 1975, où les ministères de l'Education nationale et de la Culture se partagèrent les bibliothèques, au grand dam des bibliothécaires, de leurs syndicats et associations professionnelles qui avaient dès lors demandé qu'on créât un organisme commun pour assurer une cohésion entre les politiques des deux tutelles. Cette situation semble aujourd'hui s'être institutionnalisée. Non seulement elle est irréversible, mais il faut souhaiter que beaucoup d'autres ministères développent leurs propres réseaux de bibliothèques. Celles-ci ne sont le privilège ni de l'Education, ni de la Culture et l'avenir est bien plutôt à la fragmentation, à la diversification, à la spécialisation des bibliothèques qu'à leur réunification. Malgré cela, aucun Conseil ne fut alors créé.

La seconde origine tient à la politique de décentralisation menée dès 1981 et consacrée en 1986, par la Direction du livre et de la lecture. Dès lors, une nouvelle raison de créer un tel Conseil venait s'ajouter à la précédente car, les collectivités territoriales, désormais responsables de la lecture publique, n'étant pas hiérarchisées, des questions de compétence pouvaient se poser, tant entre elles qu'avec les administrations centrales. Par ailleurs des problèmes déontologiques pouvaient naître de cette liberté totale, dont on craignait les effets négatifs dans les collectivités peu intéressées à la lecture. En 1989, l'Education nationale, lançant une large politique de contractualisation se trouvait dans une situation un peu comparable, en laissant chaque Université choisir ses priorités et ses programmes de développement. Un Conseil limité à un seul ministère n'aurait pas eu grande valeur, mais la conjonction des deux demandes était propice à sa naissance.

La troisième raison, immédiate, fut la décision présidentielle de reconstruire une nouvelle bibliothèque nationale. Chacun, en s'en réjouissant, pouvait alors craindre que ce grand projet n'éclipsât les autres, et qu'on ne reproduisît à une échelle plus grande, les défauts qui avaient étouffé la Bibliothèque nationale, ce manque de relations avec les autres bibliothèques françaises, ce déséquilibre des droits et des devoirs, qui avaient provoqué son asphyxie.

Le 24 octobre 1989 donc, les trois ministères de l'Education nationale, de la Culture et de la Recherche s'associèrent pour fonder le Conseil supérieur des bibliothèques dont la création avait été demandée presque simultanément par le rapport Miquel sur les bibliothèques universitaires et par le rapport Cahart-Melot sur la « très grande bibliothèque ».

Les missions

Les Conseils supérieurs sont à la mode. On en voit bien la raison : dans une période de déréglementation, de décentralisation et de contractualisation, ils constituent une autorité non contraignante qui respecte la liberté de chaque partenaire. Ils ne peuvent donc être que consultatifs et l'on peut regretter leur faible pouvoir, fondés qu'ils sont sur la seule autorité morale et l'accord des parties prenantes, mais comment vouloir à la fois l'indépendance et le lien hiérarchique ? Ils sont un outil sophistiqué - et par là, fragile - de la démocratie.

Un vaste champ de compétence

Leur « irresponsabilité » juridique n'est que la contrepartie de leur indépendance et de leur liberté. Un Conseil supérieur ne peut être saisi, ni contraint. Le texte fondateur ne prévoit en effet aucune procédure de saisine, mais dispose que le président de ce Conseil arrête son ordre du jour, c'est-à-dire décide librement des questions qui méritent d'y être évoquées. Loin de le mettre à distance des professions concernées, cette responsabilité du choix des questions l'oblige à demeurer en perpétuelle veille et à l'écoute des usagers et des professionnels. Quant à son champ de compétence, il peut être vaste. Les ministres qui l'ont fondé n'y ont pas vu un simple comité technique ni même scientifique, mais, selon Jack Lang, un « organe qui conçoit la coopération intelligente entre nos institutions » et selon Lionel Jospin, « une structure capable d'évaluer les enjeux de l'avenir de ce secteur et d'élaborer des stratégies nouvelles ».

Pour mieux préciser ses missions, le Conseil supérieur s'est lui-même donné une charte, dès sa deuxième réunion, et l'a fait connaître. Nul n'ignorera ainsi ses ambitions et ses limites.

Parmi ses limites, celle de la frontière à respecter avec les missions de l'inspection générale des bibliothèques. Il est bien clair que le Conseil supérieur n'examinera aucun problème particulier à un établissement, encore moins à une personne, sauf par accord avec l'inspection générale qui considérerait que le cas est d'importance nationale. Cette nuance est très importante car il faudra décider à partir de quel point la politique d'un grand établissement - la Bibliothèque de France entre autres - est une affaire purement interne ou, au contraire, concerne l'intérêt national de l'ensemble des usagers et des bibliothécaires français.

D'autre part, le Conseil n'a compétence qu'auprès des trois ministères qui le reconnaissent. Les membres du Conseil, unanimes, sont convenus qu'ils accepteraient volontiers d'être placés auprès du Premier ministre. Ce n'est ni par vanité ni par caprice, mais pour toute une série de raisons solides: s'il veut véritablement être un organisme d'arbitrage, le Conseil doit non seulement être en dehors des arbitrés, mais aussi avoir compétence sur tous et en particulier sur le ministère des Finances ou sur celui de l'Intérieur, dont les positions sont généralement déterminantes dans toutes les décisions importantes. Ensuite, s'il doit coordonner le monde des bibliothèques, autant les coordonner toutes, y compris les très nombreuses bibliothèques qui dépendent des ministères des Affaires étrangères, de la Santé, de la Justice, de la Défense, de l'Industrie, etc.

Les bibliothèques des grands établissements d'enseignement de chacun de ces ministères, par exemple, ou encore les bibliothèques souvent remarquables de leurs administrations centrales posent les mêmes problèmes de formation et de statut du personnel, les mêmes problèmes de patrimoine, les mêmes problèmes de mise en réseau que les autres. Enfin, auprès du Premier ministre, le Conseil supérieur se trouverait dans un environnement cohérent, avec des organismes tels que la Documentation française - et sa base Oriadoc -, l'Observatoire juridique des techniques de l'information, ou le Comité de coordination de la documentation administrative avec qui le Conseil supérieur a déjà établi des rapports suivis.

Le Premier ministre a clairement montré l'attachement qu'il porte aux travaux du Conseil supérieur des bibliothèques, en encourageant sa fondation d'abord, et en venant lui rendre personnellement une longue visite lors de sa seconde séance plénière qui s'est tenue à l'hôtel Matignon le 14 juin dernier. Il s'y est principalement inquiété de l'avancement du catalogue collectif national, de l'état des bases de données bibliographiques françaises vis-à-vis du marché étranger des notices et de l'équilibre à respecter entre le projet de la Bibliothèque de France et le reste des bibliothèques françaises. Mais en matière de rattachement de ce nouveau « Conseil supérieur » à ses services, la prudence s'impose. Il est bon d'apprécier auparavant son fonctionnement et son utilité. Il devra faire ses preuves.

L'inconvénient de ne pas dépendre directement du Premier Ministre apparaît clairement aujourd'hui que se traitent les arbitrages sur le statut des personnels de la fonction publique territoriale. Certes, le Conseil a déjà fait savoir qu'il souhaitait, comme chacun, l'alignement de ces statuts sur ceux de la fonction publique d'Etat, et qu'il considérait que les responsabilités et les tâches nouvelles des professionnels des bibliothèques, à tous les niveaux, devaient trouver leur reconnaissance statutaire; certes, son président a été consulté, à plusieurs reprises, par Matignon, sur ces points et sur d'autres. Il n'en a pas eu pour autant accès au dossier et les projets de texte élaborés par le ministère de l'Intérieur, maître de ces statuts, ne lui ont pas été communiqués. Il en va de même vis-à-vis du ministère des Finances. Cette position extérieure au débat statutaire et budgétaire lui laisse finalement une marge de manoeuvre assez faible dans les problèmes de ce type.

La formation professionnelle

En revanche, il devrait jouer un rôle plus direct dans les problèmes de formation professionnelle dont la réforme et le développement sont à l'ordre du jour. Il est en effet le lieu de contact privilégié des différents interlocuteurs : administrations, écoles, associations professionnelles, syndicats, etc. Il a l'avantage d'être un lieu neutre et d'englober les problèmes de formation à tous les niveaux. Il peut ainsi jouer un rôle déterminant dans le rapprochement ou la coordination entre les filières universitaires (maîtrises en documentation, instituts universitaires de formation des maîtres, IUT, CAPES), les Centres régionaux de formation aux professions du livre, l'ENSB, l'Ecole des Chartes, l'INTD 1 et l'Ecole du Patrimoine, les enseignements dispensés par les associations professionnelles et la formation permanente, puisqu'il est, actuellement, le seul organisme qui soit commun à l'ensemble des ces dispositifs.

De même il est bien placé pour accompagner la décentralisation, faisant le lien entre les administrations centrales, les collectivités territoriales, les personnels des bibliothèques et leurs usagers. Selon l'heureuse expression d'un inspecteur général, il pourra, de la décentralisation, « révéler les zones d'ombre et dénoncer les effets pervers ». Il l'a déjà fait. On peut en effet considérer comme un effet pervers le développement sauvage d'antennes universitaires délocalisées lorsque celles-ci sont créées sans bibliothèques. Le Conseil supérieur se penche sur ce point et, en rapport avec l'inspection générale et la DPDU 2, mais aussi avec les enseignants et les élus locaux, doit veiller au bon développement des délocalisations en matière de bibliothèques.

On peut par ailleurs considérer comme une « zone d'ombre » les rapports encore peu structurés entre le développement des bibliothèques scolaires, BCD et CDI 3, et les bibliothèques de lecture publique, malgré les efforts de la Direction du livre et de la lecture en ce sens. Une commission spécialisée du Conseil supérieur a travaillé sur ce problème et vient de rendre ses premières conclusions qui ont été présentées à la séance plénière du 14 novembre.

D'autres Conseils en Europe

On aurait pu imaginer un Conseil supérieur d'une autre nature. Le portrait qu'en donnait le rapport Cahart-Melot était assez différent, inspiré davantage du British library research departement et du Deutsche Bibliothek Institut, organismes plus étoffés, pourvus de services et de moyens financiers. Le Conseil supérieur aurait pu alors orienter des recherches et passer commande d'études communes aux bibliothèques, en matière de normalisation notamment. Il aurait pu être le lieu d'une évaluation commune des bibliothèques françaises en réunissant par exemple l'ensemble de leurs statistiques et tableaux de bord. C'est un organisme simplement consultatif et « politique » au sens large du terme qui a été mis en place, ce qui était sans doute moins lourd et tout aussi nécessaire.

Une telle instance semble aujourd'hui si utile que les pays les plus avancés en matière de lecture, les pays scandinaves, la Grande-Bretagne, les Pays-Bas par exemple, s'en sont également dotés. La Grande-Bretagne, malgré une British library très à même de fournir à l'ensemble des bibliothèques des services communs étendus, malgré une association professionnelle puissante, possède deux conseils nationaux des bibliothèques : l'un, plus politique, formé de membres désignés pour trois ans par le ministre des Arts, le LISC (Library and information services council) existe depuis 1981 : son rôle est de conseiller le gouvernement en matière de coopération entre les bibliothèques. L'autre, plus technique, le LINC (Library and information cooperation council), créé le 23 mai 1989, composé de professionnels émanant des établissements les plus importants s'est donné un plan d'action assez semblable à celui de notre Conseil supérieur.

Les Pays-Bas ont, depuis 1987, le Raad van Advies voor Bibliotheekwesen en Informatieverzorging - Conseil des bibliothèques et des services d'information - composé de neuf membres « politiques », assistés de douze fonctionnaires permanents. Le ministère de la Communauté française de Belgique enfin vient de se doter d'un Conseil supérieur des bibliothèques publiques. Ces organismes s'inspirent de ceux qui ont déjà fait leurs preuves aux Etats-Unis (National commission for libraries and information services) ou dans les pays scandinaves qui se sont regroupés dans un conseil de coopération commun, NORDINFO. Le ministère de la Culture du Portugal vient de décider de créer un Conseil supérieur des bibliothèques portugaises. Il n'est pas impossible que d'autres pays suivent cette voie lorsqu'on y constate les difficultés que font naître, dans un domaine entièrement appuyé sur la notion de réseau et de communication, l'éclatement et parfois, la rivalité, des collectivités responsables. Ceci est particulièrement vrai des pays fortement fédéralisés : l'Allemagne, la Suisse, l'Espagne, où la situation des bibliothèques est plus éclatée encore qu'elle ne l'est en France, interdisant parfois, freinant presque toujours, les progrès qui sont liés à la fluidité des relations, à la facilité des ententes. Voilà pourquoi il n'y a pas qu'en France que les Conseils consultatifs sont à la mode.

Les grands débats

La composition d'une double instance, comme en Grande-Bretagne, est tout à fait ingénieuse et efficace. On conçoit en effet qu'il doive exister un comité plus technique, formé des meilleurs professionnels, pour instruire les dossiers, préalablement aux débats et aux recommandations d'un conseil « supérieur », plus largement constitué de représentants de la communauté intellectuelle et politique. Un tel dispositif est de fait en usage en France dans deux grands débats dans lesquels est impliqué le Conseil supérieur : le catalogue collectif national et la politique européenne.

En ce qui concerne le catalogue collectif national, son élaboration technique appartient bien à un groupe de travail, dirigé par la Bibliothèque de France, dont le Conseil supérieur a suivi, en observateur, tous les travaux. C'est à partir de ses observations et de ses consultations qu'il a remis, dès le mois de mai, ses conclusions aux trois ministres. Ces avis, qui rejoignaient les conclusions du groupe de travail, ont d'ailleurs été entérinés lors d'une réunion interministérielle en juin dernier. Une telle élaboration a donc fonctionné en trois niveaux: le comité technique (le groupe de travail), le comité politique décisionnel (la réunion interministérielle) et, entre les deux, le Conseil supérieur, observateur objectif et conseiller indépendant. Ce dispositif a semblé assez satisfaisant pour devoir être reconduit pour mener à bien la deuxième phase du projet.

De même, pour la coordination des actions des bibliothèques françaises vis-à-vis des instances européennes, les trois mêmes ministères avaient, dès avant la création du Conseil supérieur des bibliothèques, éprouvé le besoin de créer un comité de pilotage commun, chargé de servir de lien entre les bureaux des organismes communautaires, - en particulier la DG XIII et son Plan d'action pour les bibliothèques européennes -, d'examiner les programmes proposés et, si nécessaire, de les classer par ordre de priorité au plan national. A ce comité technique, - le CFPPA, Comité français de pilotage du plan d'action des bibliothèques européennes -, le Conseil supérieur ajoute une dimension plus largement politique : assurer la cohésion entre ces programmes et la politique communautaire française, élargir ses visées au-delà du simple plan d'action de la DG XIII, faire le lien avec les parlementaires européens spécialisés dans ces questions et les organes gouvernementaux. Pour éviter les pertes d'énergie, il a été convenu que le Conseil supérieur des bilbiothèques assurerait le secrétariat du CFPPA. Il s'avère que cette symbiose fonctionne avec simplicité et efficacité.

On pourrait donc imaginer, comme les Britanniques, un double conseil, mais le traitement des opérations au coup par coup, en trouvant pour chaque type de problème, le dispositif le plus approprié, n'est pas sans mérite et semble mieux adapté à une situation toujours en mouvement. Par ailleurs la bonne représentation des professionnels des bibliothèques au sein du Conseil supérieur, le fait aussi que l'un des deux vice-présidents soit permanent et assure une liaison continue avec les instances professionnelles rendent, pour l'instant, prématurée une structure plus complexe et plus rigide.

La composition

Composé de vingt et un membres nommés intuitu personae : quinze nommés respectivement par chacun des trois ministres et six (les trois élus représentant les trois types de collectivités locales, le président et les deux vice-présidents) d'un commun accord entre eux trois, le Conseil supérieur est bien équilibré. Les professions des bibliothèques y sont en effet représentées par un des deux vice-présidents, un inspecteur général, un conservateur en chef de grande bibliothèque universitaire, un directeur de grande bibliothèque municipale, la présidente de l'Association des bibliothécaires français, la directrice de l'Institut national de l'information scientifique et technique. Les grandes institutions le sont aussi, par le président, André Miquel, ancien administrateur de la Bibliothèque nationale et responsable du rapport qui porte son nom sur les bibliothèques universitaires, l'actuel administrateur général de la Bibliothèque nationale, le délégué scientifique de la Bibliothèque de France, ancien directeur du livre et de la lecture, le délégué à l'Information scientifique et technique du ministère de la Recherche.

Un grand éditeur, deux universitaires liés au monde de l'édition et de la presse, d'autres chercheurs de différentes disciplines, le secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences, un grand médecin et universitaire, grand défenseur des bibliothèques universitaires comme autre vice-président, et enfin trois élus, un maire de grande ville, un président de conseil général, ancien ministre, et un représentant de conseil régional, ancien ministre des finances, complètent cet ensemble. L'équipe, on le voit, est consistante, difficilement récusable en cas d'unanimité, suffisamment variée aussi pour voir les problèmes sous différentes facettes. Aujourd'hui, après neuf mois de fonctionnement, ces qualités ont eu déjà l'occasion de se manifester.

Le fonctionnement

Une telle assemblée n'est pas légère. Aussi, dès ses débuts, se sont formées des commissions restreintes, selon les grandes questions à traiter. Les assemblées plénières ne peuvent en effet se multiplier. Le Conseil en aura tenu quatre pour sa première année. L'abondance des ordres du jour en fait souhaiter autant en 1991, mais il sera difficile d'en faire plus. Les commissions en revanche, composées de quatre à huit membres environ, se réunissent autant que de besoin : les membres ont aussi l'avantage de s'y faire accompagner, voire représenter par des experts de leur choix; des personnalités extérieures peuvent y être entendues. Les représentants des trois ministères, selon leurs attributions, y participent, de même que les directeurs des administrations centrales concernées assistent aux réunions plénières.

Huit commissions ont fonctionné depuis le 28 février 1990, date de la première séance plénière où les trois ministres ont eux-même installé le Conseil. Ces commissions ont donc examiné les questions :
- du catalogue collectif national
- des statuts et des formations des personnels
- de la politique européenne des bibliothèques françaises
- des bibliothèques des antennes délocalisées d'universités
- de la relation entre les bibliothèques scolaires et la lecture publique
- du droit de copie appliqué aux bibliothèques
- des bibliothèques des grands établissements scientifiques
- du dépôt légal

Ces commissions vivront à des rythmes différents. Certaines seront lentes, d'autres limitées, certaines disparaîtront, d'autres seront créées selon les questions d'actualité, telle celle qui s'annonce sur l'opportunité d'une loi sur les bibliothèques. Outre ces grands thèmes, dont certains prêteront à des réflexions nécessairement prolongées - la formation des personnels, le droit de copie - et dont d'autres - la politique européenne, le catalogue collectif - ont d'ores et déjà donné lieu à des recommandations précises, le Conseil peut intervenir d'une façon plus ponctuelle, bien que ni sa vocation ni son fonctionnement ne se prêtent à des actions rapides. Il a pu déjà conseiller utilement les services du Premier Ministre, susciter des réunions dans les ministères, faire émerger des questions latentes, jouer les intermédiaires entre des partenaires dont les intérêts différaient, établir des synthèses sur des questions complexes.

Les trois membres de la présidence du Conseil supérieur se sont efforcés d'être à l'écoute du milieu professionnel et des usagers, d'être présents dans les réunions ouvertes, les séminaires et les congrès professionnels, d'organiser des auditions restreintes et des réunions de travail sur les points délicats. Le Conseil doit être le lieu où chaque partie peut se sentir représentée et où certaines questions peuvent apparaître sous un jour nouveau et impartial. Ainsi le rôle qu'il joue ne se limite-t-il pas à des recommandations, encore moins à des actions publiques.

Ne peut-on souhaiter que son rôle soit discret, plus préventif que curatif ? Il pourrait atteindre son but sans jamais se manifester ouvertement auprès des ministres eux-mêmes ou auprès du public; cela serait le signe que la coopération aurait été assurée a priori, intégrée comme un préalable par les partenaires et rien ne saurait mieux le satisfaire.

Novembre 1990

Illustration
Charte du Conseil supérieur des bibliothèques

  1. (retour)↑  IUT : Institut universitaire de technologie; CAPES : Certificat d'aptitude aux professions de l'enseignement secondaire; ENSB : Ecole nationale supérieure de bibliothécaires; INTD : Institut national des techniques documentaires.
  2. (retour)↑  DPDU : Direction de la programmation et du développement universitaire, ministère de l'Education Nationale, dont dépend la sous-direction chargée des bibliothèques universitaires.
  3. (retour)↑  BCD : Bibliothèque centre documentaire, présente dans certaines écoles primaires; CDI : Centre de documentation et d'information, implanté dans les collèges et lycées.