Marketing de produits documentaires

Compiègne-Télédoc : diversification des services et promotion en direction des entreprises

La BUTC a mis sur pied un système de gestion analytique qui permet de fixer des objectifs, principalement financiers, à ses différentes activités et de contrôler leur réalisation. Son service de recherche documentaire, Compiègne-Télédoc, fonctionne avec du personnel spécialisé, recruté à cet effet. Ouvert aux entreprises, qui représentent 40 % de sa clientèle, ce service offre toute une gamme de produits allant de la fourniture de références bibliographiques ou de documents à des études d'organisation de systèmes documentaires en entreprise.

The technology university library in Compiègne has created an analytic management system in order to settle the goals (mainly financial) of its activities. The information retrieval service, Compiègne-Télédoc, is under the responsibility of specialized staff. The service, which is open to the firms, provides references, documents as well as studies about the management of information systems in the firms.

La bibliothèque de l'Université de technologie de Compiègne est née il y a une quinzaine d'années. Elle a mis sur pied un système de gestion tout à fait novateur, tant par son évaluation des activités documentaires de la bibliothèque que par son analyse du budget par fonctions et ses mécanismes de contrôle financier. Elle a également développé un service de recherche documentaire, Compiègne-Télédoc, qu'elle a eu l'originalité de situer d'emblée dans une perspective commerciale et d'ouvrir aux professionnels extérieurs à l'université, au monde de l'entreprise. Autant de raisons de nous entretenir avec ses responsables : Liliane Vézier, directrice, Christine Pierrey, division de la Communication de l'information, Sylviane Héau, division des Affaires générales, Annie Bertrand, division des Acquisitions et du traitement des collections et Philippe Charrier, division de l'Edition et de la culture technologique et industrielle.

BBF. La bibliothèque a particulièrement réussi son intégration à l'université. Quelle a été votre démarche ?

Liliane Vézier. Toute notre action s'est fondée sur une démarche « marketing ». Nous avons bâti la bibliothèque à partir des besoins de nos différents publics. Chaque fois que nous nous sommes trouvés face à un problème, nous nous sommes demandé quelle était la solution la plus intéressante pour nos utilisateurs. C'est la nécessité de les satisfaire qui nous a amenés à concevoir des produits et à les commercialiser.

A partir de cette démarche, on peut construire des bibliothèques de toutes sortes, depuis la Bibliothèque nationale jusqu'à la nôtre, parce que les besoins auxquels elles ont à répondre ne sont pas les mêmes. Notre vocation a abouti à un type de services et de produits qui peuvent être tout à fait différents ailleurs et peuvent ne pas être rémunérés dans certains cas, parce qu'ils ne sont pas rémunérables ou bien parce que la clientèle n'est pas solvable - les contribuables s'y substituant alors. Notre volonté n'est pas de faire du commercial à tout prix. Il se trouve que pour nous, c'est le moyen le plus efficace de remplir notre mission. Ce n'est pas forcément vrai partout. En revanche, ce qui est vrai partout, c'est qu'il faut bâtir sa bibliothèque sur les besoins de ses utilisateurs.

Nous avons un potentiel qui peut être utilisé par les entreprises. Et le rôle fondamental de l'université n'est-il pas de participer au développement du pays, notamment à son développement technique, scientifique et industriel ? La nécessité de se mettre à la disposition des entreprises fait partie d'un impératif bien compris de service public. La rémunération de ce service par les entreprises est à la fois une nécessité économique et ce qui permet de le rendre crédible. Elle se justifie donc pour des raisons économiques et psychologiques.

Une gestion analytique

BBF. La BUTC a adopté un système de gestion qui se rapproche de la comptabilité analytique pratiquée en entreprise. Dans quel but ?

Sylviane Héau. Nous fonctionnons par « projets », c'est-à-dire par unités qui correspondent à une activité ou à un type d'acquisitions. Ces petits budgets nous permettent d'individualiser tous les flux financiers. Nous y ouvrons toutes les lignes budgétaires nécessaires à l'imputation des dépenses relatives au projet. Par exemple, pour le projet 204 C, qui concerne la recherche documentaire, nous avons ouvert les lignes suivantes : frais de réparation de terminaux et maintenance, frais de serveurs, de publicité, de stages, ainsi que salaires et charges concernant les personnels recrutés sur les ressources propres de la bibliothèque. Pour les acquisitions de périodiques, trois lignes sont ouvertes, la première pour les périodiques français, la seconde pour les périodiques étrangers payés en dollars, la troisième pour les périodiques étrangers non payés en dollars. Cette individualisation des dépenses est très précieuse lors des périodes de fluctuations monétaires importantes, pour les prévisions budgétaires qu'elle permet de faire.

LV. Nous utilisons le plan comptable classique, mais nous en croisons les données autrement pour travailler par unité fonctionnelle. Ainsi les responsabilités sont-elles réparties entre les différents membres de l'équipe qui ont à gérer, dans le cadre de chaque projet et avec un objectif précis, un financement particulier.

Toute activité de la bibliothèque a un responsable, un objectif et un budget. Un projet comprend plusieurs « utilisateurs de crédit » qui correspondent aux différents types de recettes et permettent de les identifier : soit des recettes affectées au sens comptable (contrats, CNL, crédits d'équipement), soit des ressources propres. De cette façon, on peut observer l'évolution des dépenses par origine de financement pour chaque activité.

SH. Par exemple, les acquisitions de livres d'enseignement, qui sont codées par le nombre 207 (tous les projets ont un code à trois chiffres), sont alimentées par des ressources affectées qui se répartissent ainsi :
207 D : acquisition de livres d'enseignement sur crédits d'université ;
207 E : sur crédits d'équipement du ministère ;
207 F : sur crédits CNL ;
207 H : sur crédits région ;

LV. Nous pouvons faire des tris pour connaître la part de budget par type d'acquisition, celle des ouvrages d'enseignement et celle des ouvrages de recherche, et, dans le cadre de la recherche, par secteur, dans la mesure où nous avons des accords avec certains organismes pour développer tel ou tel secteur.

Des objectifs de recettes

En matière de ressources, nous fixons un objectif pour chacune d'entre elles lorsque nous préparons le budget prévisionnel. Par exemple, dans le cas de la subvention DBMIST, nous ne nous en tenons pas à la somme perçue l'année précédente, car nous estimons que nous allons pouvoir négocier un peu plus. Nous disposons de 20 à 30 sortes de ressources propres, depuis la photocopie jusqu'aux contrats. Le chiffre d'affaires de chaque produit est contrôlé au cours de l'année pour vérifier que les objectifs financiers sont bien tenus.

Actuellement une trentaine de projets sont en cours. Notre but n'est pas de gagner de l'argent mais de pouvoir faire plus. L'existence même de certaines opérations dépend du financement qu'elles vont trouver, d'où l'importance de suivre leur réalisation, mais aussi leurs recettes.

BBF. Comment sont définis les projets ?

LV. C'est le travail de l'équipe de faire des propositions. Elles sont ensuite soumises au conseil de la bibliothèque, puis de l'université. Le dialogue est très ouvert entre la bibliothèque et l'université. Nous sommes en contact permanent, tantôt structuré dans le cadre de commissions, de groupes de travail sur le fonds documentaire, tantôt informel.

SH. Le conseil de l'université détermine le pourcentage du budget pour la recherche et celui pour l'enseignement. La responsable des acquisitions achète les ouvrages d'enseignement en concertation avec le directeur de la pédagogie, à partir des demandes des responsables d'unités de valeur et des enseignants. Pour la recherche, la répartition entre les différents départements de l'université est décidée en commission scientifique à partir de critères que nous avons établis : un département égale une part, un service une demi-part, les enseignants et les lecteurs de 3e cycle tant de parts, etc.

LV. Dans le cadre de leurs enveloppes budgétaires, nous laissons une liberté totale aux enseignants-chercheurs. Ce sont eux qui choisissent les livres à commander et nous recueillons quotidiennement leurs demandes qui sont traitées chaque jour.

Centralisation des acquisitions documentaires

Lorsque les crédits d'acquisitions de la bibliothèque sont épuisés, les enseignants peuvent utiliser leurs propres crédits d'enseignement et de recherche, car nous avons instauré une passerelle financière : nous passons les commandes sur des ressources non affectées, que nous finançons en refacturant les ouvrages à l'université. Les entrées égalent les sorties. L'intérêt du procédé est qu'il permet de dépasser nos propres limites budgétaires et de centraliser tous les achats de documentation de l'université.

BBF. Quelles sont les prestations qui vous fournissent des recettes ?

Christine Pierrey. On peut distinguer les prestations que l'on trouve en général dans les bibliothèques (photocopies, fourniture de documents par prêt interbibliothèques, recherches documentaires automatisées, etc.) et celles que nous avons développées pour répondre aux besoins spécifiques de nos usagers, enseignants-chercheurs ou industriels : revues de presse, revues de sommaires, analyses, résumés, traductions, synthèses, actions de formation, études de système d'organisation documentaire dans l'entreprise, audit. Nous avons créé un service qui regroupe toutes ces prestations, Compiègne-Télédoc, dont la marque est déposée. Dans ce cadre, nous avons mis au point, par exemple, le « Carnet d'adresses de l'entreprise », guide des sources d'information utiles aux entreprises, destiné à être prochainement publié.

BBF. Quelle est la part de chacun des modes de financement ?

LV. Le chiffre d'affaires global de toutes les prestations est de 1,5 million de francs. Les contrats représentent à peu près la même somme et les subventions aussi. La proportion est donc d' 1/3 pour les prestations, 1/3 pour les contrats, 1/3 pour les subventions. Elle est à peu près stable depuis plusieurs années, l'augmentation la plus sensible ayant été celle des prestations.

Les contrats, qui sont d'environ 1,5 million de francs, portent sur notre banque de données BATECH, sur la recherche télématique, sur un certain nombre d'expositions. Nos partenaires privilégiés sont le ministère de la Recherche et de la Technologie, la région, les Télécommunications. Nous avons également un contrat avec l'UNESCO pour former des étudiants étrangers à la documentation.

La subvention de la DBMIST ne représente que 9 % de notre budget. Il est vrai que dans un budget consolidé, il faudrait inclure les salaires des fonctionnaires, soit environ 1,7 million de francs, charges comprises. Nous sommes en train de mettre au point une consolidation de budget, procédure assez délicate à réaliser en établissement public, où ce n'est pas l'habitude. Nous réfléchissons en commun avec l'université qui a la même démarche. Nous allons essayer de prendre en compte l'amortissement de nos collections et de nos équipements. Un budget consolidé est très utile pour apprécier la valeur d'une entreprise et calculer un certain nombre de ratios qui sont autant de critères d'analyse de la gestion.

Prévision et contrôle de gestion

BBF. Quel contrôle financier avez-vous mis en place ?

LV. Le point est fait régulièrement tout au long de l'année en réunion de coordination. Un gros travail est réalisé pour établir le budget prévisionnel. La méthode de prévision est très importante : nous analysons comment les recettes ont été effectuées l'année précédente et quelle stratégie nous adoptons pour l'année à venir. Pour la plupart des activités, nous misons généralement sur une légère augmentation. Mais, si nous décidons de faire un effort dans tel ou tel domaine, nous faisons une hypothèse de progression que nous tentons d'évaluer précisément.

Développer un service qui va amener des recettes supplémentaires entraîne aussi du travail en plus. Soit nous réussissons à ne pas accroître les effectifs par une nouvelle analyse des tâches et une réorganisation du travail, soit nous prenons une décision de recrutement sur nos ressources propres. Par exemple, pour Compiègne-Télédoc, nous avons décidé d'engager à plein temps la documentaliste qui jusque-là travaillait à mi-temps sur le « Carnet d'adresses de l'entreprise ». Elle va assurer le suivi des contacts avec la clientèle, ce qui permettra à la personne qui en était chargée auparavant de se consacrer plus pleinement aux actions de promotion de l'information scientifique et technique. Nous engageons alors notre responsabilité. Il nous faut donc bien peser la somme dont nous avons besoin et fixer un objectif de recettes qui y corresponde. Si c'est totalement irréaliste, il ne faut pas faire l'opération.

SH. Les projets qui doivent s'auto-financer sont suivis de très près pour contrôler la progression régulière des rentrées. Par une série d'histogrammes et de courbes, nous pouvons voir si les dépenses restent bien dans le cadre des recettes réalisées.

BBF. En recrutant du personnel sur vos ressources propres, vous prenez quand même un risque.

LV. Il y a du risque, comme dans toute entreprise... Le risque est stimulant. Mais nous ne prenons pas de risque inconsidéré. Il y a des cas où nous embauchons une personne sur un objectif et avec une date limite pour évaluer ses résultats, une période d'essai en quelque sorte.

Il nous est arrivé d'avoir à faire un choix stratégique qui engage très largement la bibliothèque. Nous avons alors pris la décision de redistribuer les moyens pendant une période pour nous investir dans ce choix et y concentrer nos efforts. Il faut, dans ces occasions, que nous soyons tous d'accord pour supprimer tout risque ailleurs et ne prendre de risques importants que dans un seul secteur. Il y a toute une stratégie du risque.

SH. Nous disposons de verrous sur le plan comptable, car nous sommes très aidés par l'automatisation de la gestion. Nous n'ouvrons pas, par exemple, tout le budget en début d'année. Mais le système est souple. Si nous avons besoin d'un micro-ordinateur, nous n'allons pas attendre six mois sous prétexte que nous n'avons que 30 % des crédits ouverts. Les décisions sont prises en commun et nous savons toujours où nous en sommes.

BBF. Avez-vous fait des analyses de coûts par fonction, par exemple, celui du traitement d'un ouvrage ou bien celui d'une notice versée au catalogue ?

Annie Bertrand. Nous n'avons pas réalisé d'analyse financière assez précise pour en parler ici. Toutefois nous avons réduit les coûts en simplifiant au maximum le circuit du livre. Le gain de temps a été d'environ 50 %. C'est également pour améliorer la qualité du service rendu que nous avons analysé le processus de traitement d'un document, de la réception de la demande formulée par le lecteur jusqu'à la mise en rayon du document et la mise à jour des fichiers. Ceci nous a conduits tout aussi bien à changer de fournisseurs qu'à optimiser les différentes étapes du traitement bibliothéconomique des collections (suppression de l'indexation CDU et de l'inscription au registre-magasin, rédaction de notices simplifiées... ).

SH. Nous allons faire ce type de calcul dans l'année qui vient avec le nouveau « tableau de bord » de la DBMIST.

Les coûts informatiques

BBF. Mais savez-vous par exemple à combien vous est revenue l'automatisation de votre catalogue ?

AB. Au bout de quelques années, nous pourrions peut-être le calculer puisque nous savons précisément maintenant combien de temps prend l'entrée d'une notice.

Au départ, nous avons eu un contrat avec la DBMIST pour développer un logiciel. Nous avons passé des années difficiles. Nous avions des problèmes liés à l'ordinateur sur lequel notre produit était implanté. Il était souvent en panne parce que la version du système d'exploitation changeait. Nous n'avons pas travaillé dans des conditions normales. Les coûts d'utilisation de l'ordinateur central ont été très lourds. Il fallait recruter du personnel pour saisir les données le soir ou le week-end. Le coût informatique était moindre, mais les salaires étaient doubles.

A l'heure actuelle, avec trois consoles en salle connectées du matin au soir et une console pour la saisie pendant un petit mi-temps, nos factures d'utilisation de l'ordinateur sont de 10 000 F par mois environ. Mais comme l'informaticien travaille encore un peu à développer le produit, il y a du temps de CPU, d'unité centrale de traitement, important.

BBF. Avez-vous des projets pour l'automatisation du prêt ?

AB. L'automatisation du prêt est dans la continuité de celle du catalogue. Le logiciel VORACE permet d'ajouter très facilement des modules pour d'autres fonctions de la bibliothèque.

A l'époque où nous avons réfléchi à l'informatisation, nous avons bénéficié de la présence à Compiègne d'une équipe en intelligence artificielle relativement développée, qui avait un peu étudié les systèmes de gestion de bases de données. C'est la politique de la bibliothèque de participer autant que faire se peut à des actions de recherche. La DBMIST était également intéressée au développement d'un tel produit.

SH. En matière de gestion financière et comptable, nous avions aussi un logiciel « maison » qui répondait à tous nos besoins d'analyse et nous permettait cette comptabilité par fonction. Mais depuis cette année, le ministère nous a imposé un logiciel de gestion qui nous cause beaucoup de difficultés car il n'est pas du tout adapté. Il a dû être conçu par des comptables et non par des gestionnaires. Pour les universités qui n'étaient pas informatisées, il représente un progrès, mais pour nous il constitue vraiment une régression.

Nous avons pour objectif de retravailler le logiciel du ministère pour retrouver la même finesse d'analyse. Depuis un an, un informaticien s'y emploie à temps plein. Il essaie d'en faire quelque chose d'aussi proche que possible de l'ancien système en matière de service rendu. Car, grâce à lui, nous avons pu déconcentrer la gestion au maximum. Par exemple, Annie Bertrand interrogeait directement, à partir du terminal de son bureau, le projet « Acquisitions » pour savoir si elle pouvait engager telle ou telle dépense sans avoir besoin d'en référer à ma division. Les enseignants-chercheurs, à qui des crédits avaient été alloués, recevaient à la fin de chaque mois l'état de leur compte. Pour la gestion de nos abonnements, le système nous permettait de sortir le catalogue des périodiques et les bons de commande automatiquement. Nous tenons beaucoup à la souplesse et à l'autonomie qu'il autorisait et espérons revenir bientôt au même niveau.

Le prix de la qualité

BBF. Venons-en à votre service de recherche documentaire, Compiègne-Télédoc. Sur quelle base l'avez-vous conçu ?

CP. Ce service a été créé en 1976 à la demande des enseignants-chercheurs. Nous avons eu dès l'origine une politique de qualité. Pour fournir la meilleure prestation possible, nous avions besoin d'un personnel qualifié, formé aux disciplines scientifiques.

Le coût de l'information a toujours été lié, pour nous, à cette question de qualité. Nous faisons rémunérer les recherches documentaires, mais nous y mettons nous-mêmes le prix et investissons ce qu'il faut pour rendre le meilleur service. Des ingénieurs spécialisés ont été recrutés : pour s'occuper des brevets, par exemple, un ingénieur qui avait travaillé à l'INPI. Il n'était pas question de se débrouiller avec les moyens du bord.

BBF. Quels sont vos domaines de recherche ?

CP. Ce sont ceux de la technologie. Nous sommes spécialisés dans les domaines scientifiques et techniques : biologie, chimie, agro-alimentaire, mécanique, informatique, etc. Mais cela n'exclut pas des recherches en droit et en économie. Nous nous sommes abonnés également à des serveurs d'informations économiques et financières lorsque nous nous sommes aperçus qu'il existait une demande à ce sujet.

BBF. Quelle est la proportion des types de recherche, bibliographiques, factuelles ?

CP. Au départ, il s'agissait surtout de recherches bibliographiques. Les recherches factuelles se sont développées pour atteindre aujourd'hui environ 30 % du total des recherches : normes, listes d'adresses, fichiers d'entreprises, statistiques, car nous sommes un relais INSEE. Il y a encore une majorité de recherches bibliographiques, surtout à l'université, mais il est vrai que l'on commence à s'apercevoir que l'on trouve autre chose dans les banques de données. Cette évolution est liée à l'information que nous faisons sur les banques de données.

Un système de traitement de l'information

BBF. Quels sont les produits documentaires fournis par Compiègne-Télédoc ?

CP. Nous avons toujours eu le souci de ne pas nous borner à l'interrogation des bases, mais de créer un circuit de produits. Nous avons mis en place un système de traitement de l'information, par des spécialistes de l'université qui peuvent, à la demande, produire des résumés, des analyses ou des synthèses. Au sein de l'université, les enseignants et les étudiants ressentent peu le besoin de ce type de produit qu'ils ont l'habitude de faire eux-mêmes.

La demande vient plutôt des entreprises. Mais au départ, elles connaissaient très mal les banques de données. Il y a eu tout un travail d'information à faire. A plus forte raison, acheter une analyse ou un résumé de document était une pratique qui n'était pas entrée dans les moeurs. Maintenant elle est devenue plus familière, mais alors se pose la question du conseil. La clientèle industrielle attend de nous que nous prenions globalement en charge tous ses problèmes. La recherche de documentation en entreprise est toujours liée à une action à entreprendre : revoir un circuit de fabrication, développer un produit. Il faut donc faire un diagnostic dans l'entreprise pour orienter la recherche documentaire, ce qui relève plutôt d'une activité de conseil. Très peu de prestataires d'information en ont les moyens.

La bibliothèque n'est pas équipée pour ce genre de tâche, mais nous avons dans l'idée d'arriver à fournir un produit qui débouche sur ce genre de service, en nous appuyant sur un réseau de spécialistes, notamment au sein de l'UTC.

BBF. Comment se répartissent vos différents utilisateurs ?

CP. Les enseignants, chercheurs et étudiants, à 60-65 %, les clients extérieurs, en majorité des entreprises, à 35-40 %.

BBF. Quels sont les coûts liés à ce travail de traitement de l'information ?

CP. Ce sont d'abord les coûts de personnel. Le service comprend six personnes, sans compter le secrétariat, la facturation et la comptabilité qui sont pris en charge par la division des Affaires générales. Il faut prendre en compte, bien entendu, les coûts de la documentation : les abonnements aux serveurs, les annuaires, les thésaurus, etc.

Dès le début, nous avons placé le service dans une perspective commerciale. Une personne a été engagée pour faire de la promotion et nous avons un budget pour réaliser le matériel nécessaire : plaquettes, mailings, bientôt phonings.

BBF. Quel est votre chiffre d'affaires ?

LV. Il est d'environ 400 000 F.

BBF. Le service s'auto-finance-t-il ?

LV. Ses recettes couvrent les frais du personnel spécifiquement recruté pour la recherche documentaire et tous les coûts directs, y compris la formation de ces personnels. Nous dépensons beaucoup d'argent en formation, une formation très finalisée, par exemple les stages des différents serveurs et nous sommes abonnés à 14 serveurs.

Coûts réels et prix de vente

BBF. Quelle est votre politique de tarification ?

CP. Nous avons le souci de faire payer nos produits à leur juste valeur. Mais il n'est pas possible de faire prendre en charge tous les coûts réels, car le public n'est pas habitué à payer l'information. Nous ne voulons pas nous priver d'utilisateurs comme les petites et moyennes entreprises, qui ne disposent parfois que d'un faible budget pour leur documentation. Certaines n'y consacrent pas plus de 1000 F par an.

LV. Le vrai prix de revient de nos produits documentaires devrait comprendre les salaires de la totalité du personnel du service, y compris le personnel fonctionnaire. On devrait y inclure aussi l'amortissement des installations, bâtiments et collections, et une part des frais généraux.

Mais c'est un prix de revient qui n'est pas réaliste. Personne n'est prêt à payer ce prix actuellement. Par ailleurs, on peut considérer que l'amortissement des bâtiments et des collections fait partie de notre mission de service public. Notre conception du service public, c'est que nous mettons en place des structures qui peuvent servir à tous, et, à partir du moment où nous les exploitons de façon spécifique pour quelqu'un, nous répercutons sur lui le coût de cette exploitation, mais ce coût-là uniquement.

BBF. Quel est le prix d'une recherche pour vos différents utilisateurs ?

CP. Le coût standard d'une recherche pour une entreprise est entre 1 000 et 1 500 F. C'est un service personnalisé qui comporte un entretien avec le client, pour bien cerner la question et la stratégie de recherche à mettre en oeuvre, l'interrogation de plusieurs fichiers et tout le travail complémentaire nécessaire. Il ne s'agit pas de lui fournir une série de listings en vrac.

Pour les enseignants et les chercheurs de l'université, les prix varient entre 700 et 1 000 F. Nous avons des tarifs plus incitatifs pour les étudiants. Il est vrai que les recherches pour eux sont souvent plus courtes.

BBF. Quelle est la part de vos différentes prestations ?

CP. La fourniture de documents, brevets et normes, représente 40 % de notre travail, la recherche documentaire à peu près le même pourcentage, et les autres services les 20 % restants.

BBF. Vos clients industriels sont-ils implantés dans la région ?

CP. La majorité d'entre eux viennent de Picardie et d'Ile-de-France. Mais il nous arrive de travailler pour des industriels du sud de la France, de Toulon, par exemple récemment.

LV. Notre prospection est orientée vers la région et les départements limitrophes, mais nous avons des étudiants en stage dans toute la France et même à l'étranger. Nos clients sont parfois très éloignés.

La bibliothèque et la production d'information

BBF. La BUTC est également productrice d'informations, puisque vous avez constitué une banque de données sur les catalogues industriels, BATECH ?

CP. BATECH est un projet en redéfinition. Les banques de données, dans le domaine des produits, ne sont pas rentables, KOMPASS par exemple. Il nous faut nous rapprocher le plus possible des besoins des industriels.

SH. La collecte des données a été faite, il faut les actualiser. Le problème a été celui du financement car il n'a pas été continu. Nous avons recruté des ingénieurs et des techniciens sur des contrats pour BATECH, mais la bibliothèque a dû prendre le relais à plusieurs reprises. Il nous a fallu trouver de nouvelles sources de financement pour faire repartir le projet.

CP. Nous nous sommes trouvés confrontés à des problèmes de niveau d'indexation. Plus on indexe finement, plus le traitement est long et cher. Il faut être assez précis, sans aller trop loin dans la description, surtout pour des catalogues. Mais nous avons pu constater qu'il y avait une réelle demande de la part des syndicats professionnels et des entreprises dans ce secteur de la machine-outil et nous sommes en train de relancer BATECH.

Philippe Charrier. La production d'information ne se limite pas à BATECH. L'édition et la réalisation d'expositions sont aussi des productions. Une division de la bibliothèque est consacrée à ces deux activités. Dans le domaine de l'édition, elle assure les tâches de recherche d'auteurs, de sélection et de préparation des manuscrits, et partiellement de diffusion, pour le compte de la collection Université de Compiègne, chez Maloine.

Quant aux expositions, nous en accueillons régulièrement, et en produisons, soit à l'échelle locale, lorsqu'il s'agit de réalisations d'étudiants, soit à l'échelle régionale ou nationale, lorsqu'il s'agit de projets plus vastes, regroupant de nombreux partenaires. Une telle réalisation, « Mille ans de technologie en Picardie », est actuellement en cours, mettant en jeu l'UTC, le Conseil régional, et divers organismes. La BUTC est à l'initiative et au centre de ce dispositif.

Analyse de système documentaire en entreprise

BBF. Quels sont vos autres projets de développement ?

CP. Nous essayons de mettre au point d'autres types de services : des études sur le système documentaire des entreprises. Je restreins volontairement à « système documentaire », car, lorsque l'on parle d'information dans les entreprises, on rejoint automatiquement les problèmes de communication et de gestion de personnel. Or ce sont des domaines difficiles qui demandent d'autres compétences. Nous, nous sommes spécialistes de la circulation de l'information et des documents. C'est pourquoi, lorsque nous parlons d'étude des systèmes d'information, nous définissons bien nos limites car, sinon, nous risquons de nous trouver en face de problèmes que nous ne maîtrisons pas. Ce travail d'audit, d'analyse et de réorganisation de systèmes documentaires dans les entreprises, est un de nos axes de développement à l'heure actuelle.

De façon plus générale, nous menons une politique de sensibilisation à l'information. Nous travaillons par exemple avec le groupe « S'informer pour entreprendre en Picardie », qui a une action de valorisation de l'information auprès des entreprises et des professionnels de la région. A l'université, nous participons à la formation des étudiants à l'information dans le cadre de plusieurs unités de valeur. Notre optique est de répondre, de façon à la fois dynamique et ouverte, aux besoins de nos différents partenaires.