Éditorial

Le coup de l'information

L'information n'a pas de prix, elle a un coût : mais de quelle information parle-t-on ? De l'information en ligne des serveurs télématiques, de l'information spécialisée, de l'information grand public, de l'information disponible dans les bibliothèques et centres documentaires, de l'information professionnelle, du Minitel ? L'information tous azimuts, qui sera un des fondements de la société de demain, s'avère, en attendant cette échéance, aussi insaisissable que nécessaire, aussi immatérielle qu'onéreuse. D'où des discours multiples, flous et ambigus, sur le coût - les coûts - de confection, de commercialisation, de diffusion, d'utilisation.

A décortiquer, le concept de coût de l'information est déconcertant, pour ne pas dire dérangeant : approché en termes financiers (le producteur, le serveur...), il recouvre un non-dit significatif. Les prix affichés sont ceux qui intéressent l'utilisateur et le discours évacue aisément toute référence au coût social, au coût politique de l'information. Comme le livre auquel, pourtant, on se plait à l'opposer, l'information nouvelle manière donne souvent lieu à une analyse en termes culturels et non économiques ; marchandise pas comme les autres, consommable sans être appropriable, l'information échappe à l'approche économique classique et au marketing. Mais où se situe véritablement le marché de l'information ? Pour l'information bibliographique spécialisée, la situation est en voie de stabilisation ; la balle paraît désormais dans le camp de l'information factuelle, destinée aux spécialistes, aux professionnels, au grand public. Par ailleurs, l'ampleur des investissements consentis dans le projet « information » fait souvent contraste avec la répugnance des décideurs à penser globalement un système local d'information en termes financiers...

Situation contradictoire pour les intermédiaires, l'information nouvelle suscite des coûts nouveaux - et élevés - alors que les utilisateurs ne semblent guère prêts, financièrement et psychologiquement, à admettre cette évolution du service. Les bailleurs de fonds détiennent la réponse mais celle-ci implique des clarifications préalables : les bibliothèques dissèquent leurs propres coûts, par fonctions et par produits, tant au niveau local qu'au niveau national ; abandonnant la situation autarcique qui était la leur il y a quelques décennies, elles vendent leurs prestations et se font clients des services nationaux dont la commercialisation démarre. Une donne complètement nouvelle qui, tôt ou tard, remettra en cause le contenu et la vocation même de la bibliothèque. Là aussi la réponse sera d'ordre politique.