Reorganization in the public library.

par Hélène Estivalet

T.D. Webb

Phoenix : Oryx Press, 1985. - 120 p.; 23 cm.
Index, Bibliogr. - ISBN 0-89774-074-2.

Aucun aspect du fonctionnement d'une bibliothèque publique ne peut échapper à l'évolution du monde moderne : améliorations techniques. formation professionnelle, incertitudes économiques, nouveaux besoins du public. Destiné aux conservateurs, bibliothécaires, enseignants, pouvoirs publics, cet ouvrage expose les 5 soucis majeurs de ceux qui veulent réorganiser leur établissement en fonction des besoins de la communauté desservie.

Principe primordial : bien définir les buts qu'on se fixe et les moyens qu'on se donne... Dans ces choix, les bibliothèques peuvent être tiraillées entre 2 attitudes : soit elles s'appuient sur leur expérience dans leurs domaines traditionnels d'activité (éducation, distraction) et conçoivent alors les innovations comme des extensions, soit elles évaluent les futurs besoins du public pour diversifier les services, puis rechercher clientèles et appuis nouveaux. Généralement d'ailleurs, le projet définitif est un compromis entre ces 2 tendances.

Le 2e point peut se résumer par la formule « à buts nouveaux, organisation nouvelle ». A Baltimore, par exemple, on a tenté l'expérience du « généralisme » : ayant pris la décision de répondre au besoin de lecture populaire, on a ignoré une demande plus érudite ou plus irrégulière ; la restructuration a donc tenu compte des modifications des collections et de la « dé-spécialisation » du travail des bibliothécaires. Ce genre d'expérience risque d'ébranler la structure pyramidale traditionnelle de la bibliothèque publique, structure dont les inconvénients (lourdeur, stérilisation de l'initiative individuelle) peuvent inciter à la recherche de nouvelles organisations plus performantes calquées sur la haute technologie industrielle, en particulier pour des actions ponctuelles ou des essais.

Le 3e souci est la place de la bibliothèque dans son environnement social et politique. Une coopération avec d'autres administrations locales est souhaitable : mettre son expérience à leur service pour s'attacher leur clientèle et leur soutien politique lui permet de devenir partenaire à part entière du pouvoir local et non plus une institution un peu en marge de l'administration. Joindre ses forces à celles d'autres organismes aux buts voisins peut favoriser un accroissement du service public et des économies substantielles; loin de perdre son identité, la bibliothèque prend une part majeure dans une société aux besoins croissants d'information.

La participation du personnel est une condition de succès : sans elle, le meilleur des projets peut tourner court. Et plus celle-ci est importante, plus le personnel s'impliquera dans la réorganisation, devenant ainsi source d'idées, d'analyses, de conseils. En corollaire, le directeur doit posséder des qualités non seulement d'administrateur, mais encore de meneur d'hommes !

Enfin, la restructuration étant un problème assez inhabituel, le bibliothécaire ne devra pas hésiter à recourir à des consultations extérieures. A la fois technicien et homme de dialogue, l'expert peut suggérer des solutions économiques, sociales, techniques, qu'aucune coopération ne peut offrir. La consultation peut porter sur des questions très variées : buts à long terme, coopération avec des établissements publics, informatisation... Elle sera d'autant plus fructueuse qu'elle aura été pensée à l'avance et que l'expert tiendra régulièrement le bibliothécaire au courant de ses projets.

L'auteur, T.D. Webb, avec d'autres professionnels habitués à pratiquer des réorganisations, confronte les principes ainsi énoncés à 5 expériences vécues - à Philadelphie, Baltimore, Phoenix, Montgomery, et Tucson - mettant bien en évidence les difficultés rencontrées, les succès et les échecs. Trois leçons se dégagent :
- chaque bibliothèque a son évolution propre et naturelle; un bon bibliothécaire en prend conscience et la maîtrise, au lieu de se laisser guider par elle;
- la nouvelle organisation ne résout pas tous les problèmes de l'ancienne:
- toute réorganisation engendre de nouveaux problèmes : leur trouver une solution devrait être prévu dans le nouvel organigramme, car aucune structure désireuse de bien répondre à son environnement n'est jamais complète ni parfaite.

Trois préoccupations sont en filigrane :
- réalisme : un chapitre de théorie alterne avec un chapitre d'application, faisant bien apparaître les modifications que les conditions locales imposent aux idées;
- honnêteté : les auteurs reconnaissent que parfois leurs théories n'ont pas pu être appliquées (3e point): - précision : de nombreux tableaux et schémas, une bibliographie d'articles et d'ouvrages américains et un index. On regrette cependant l'absence de chiffres concernant les coûts.

Conçu pour des bibliothèques très importantes, couvrant des populations de 6 à 70 personnes, et situées dans un contexte social, économique, culturel, politique, très différent du nôtre, l'ouvrage intéresse cependant les bibliothèques de ce côté-ci de l'Atlantique par le coup de projecteur qu'il donne sur un sujet assez peu abordé.