La presse d'éducation populaire de 1830 à 1960 : répertoire des publications en série de mouvements et associations
T.1: Mouvement et association de jeunesse et d'éducation populaire laïques et catholiques : 1830-1939
Marly-le-Roi : Institut national d'éducation populaire, 1982. -XXVI-193 p.; 30 cm. - (Document de l'INEP; XL).
Le titre et l'introduction définissent la matière, le champ et la méthode de ce répertoire. Il s'agit, nous disent les auteurs, d'un recensement des périodiques publiés entre 1830 et 1939 par les mouvements nationaux d'éducation populaire qui s'inscrivent dans l'idéologie laïque et dans l'idéologie catholique. Le recensement ne prend en compte ni les associations régionales, ni celles qui s'inscrivent dans la mouvance des mouvements prolétariens et qui constituent un courant spécifique d'éducation ouvrière.
L'ouvrage apporte, en réalité, beaucoup plus qu'il n'annonce. Les auteurs eux-mêmes, tout au long de leur préface, parlent d'un « Guide ». C'est bien de cela en effet qu'il s'agit, et c'est ce qui fait toute la valeur d'un répertoire qui, s'il s'en était tenu au projet annoncé, serait singulièrement aride et ne pourrait intéresser qu'une poignée de spécialistes. Les auteurs ont essayé de débrouiller l'écheveau de la vie associative. Ils y distinguent quatre ensembles qui forment les quatre chapitres de l'ouvrage : les courants positivistes et laïques (52 p.), les œuvres catholiques pour la jeunesse (10 p.), les mouvements catholiques sociaux et apostoliques (99 p.), les mouvements catholiques d'éducation et d'action civique et sociale (16 p.). La dispersion des titres des périodiques entre les chapitres et sous-chapitres est compensée par un index alphabétique général.
Chacun des chapitres est précédé d'un tableau synoptique où apparaissent les filiations, les apparentements ou les convergences entre les différentes associations. Celles-ci font l'objet d'une notice historique succincte, à la suite de laquelle sont indiqués, selon les cas, leur adresse, la localisation, l'état et les conditions de consultation de leurs archives, lorsque celles-ci sont accessibles. La notice est complétée par une sélection des articles et des travaux universitaires consacrés à l'association. Ces bibliographies partielles complètent la bibliographie générale (26 titres) donnée à la fin de la préface et forment avec elle un second répertoire qui sera aussi utile aux chercheurs que celui qui fait l'objet propre de la publication. Elles sont d'autant plus précieuses qu'on y relève un bon nombre de références qu'il serait impossible de découvrir ailleurs parce qu'elles concernent des ouvrages inédits : mémoires universitaires (maîtrise, DEA, écoles) et thèses (3e cycle et Etat).
Le corps de l'ouvrage est un répertoire des bulletins, revues et actes des congrès des associations. La plupart des notices sont rédigées de première main sur les exemplaires conservés à la Bibliothèque nationale et dans trois bibliothèques parisiennes spécialisées (Action populaire, Institut national de la recherche pédagogique, Musée social). Les notices sont rédigées selon les règles du catalogage des publications en série et indiquent la localisation du périodique. Le répertoire est donc aussi un embryon de catalogue collectif parisien. Certains titres n'ont été découverts dans aucune bibliothèque ; ils sont cependant cités avec la source d'information qui a permis de les repérer.
Tous ceux qui font des recherches dans le domaine foisonnant de l'éducation permanente, savent combien il est difficile d'identifier les groupements, les personnes et les publications, et de les situer dans leur contexte idéologique et social. Ils ne parviennent pas toujours à surmonter cette difficulté, et l'on bute souvent, en lisant leurs travaux, sur l'imprécision des propos, les confusions, et parfois même sur des erreurs. Le répertoire d'Arlette Boulogne et de Sylvie Fayet-Scribe les aidera à les éviter. Il faut souhaiter, pour cette raison, que ce répertoire, encore inachevé et présenté sous une forme multigraphiée, soit continué et proposé à un éditeur qui lui assurera une large diffusion dans les milieux universitaires et dans les services de documentation et d'étude des mouvements et des institutions d'éducation populaire.
Ce sera l'occasion de réviser et de parfaire l'ouvrage, qui n'est pas exempt des défauts indiqués plus haut. Le premier chapitre, par exemple, ne respecte pas l'ordre chronologique, et il paraît ignorer que l'Association polytechnique n'a été qu'une parmi d'autres des associations d'instruction populaire issues de la Révolution de 1830. Ce chapitre pèche aussi par une incohérence fondamentale. Il introduit les bibliothèques populaires dans le courant positiviste et laïque, sur le même plan que les associations. Or les bibliothèques, comme les cours du soir, n'ont été qu'un moyen utilisé par les associations appartenant à tous les courants d'opinion. Cette incohérence conduit les rédacteurs à introduire une oeuvre diocésaine dans le courant laïque. En revanche, le répertoire ignore deux associations nationales catholiques de propagande pour la lecture : la Société pour l'amélioration et l'encouragement des publications populaires (1862) qui a fusionné avec la Société bibliographique en 1879. On relèvera aussi d'autres inexactitudes plus ponctuelles. Charles Péguy s'est intéressé aux universités populaires, et leur a consacré non pas deux, mais trois, Cahiers de la Quinzaine (3e série, n° 2, 10, 20-oct. 1901, février et juillet 1902). Il est cependant tout à fait abusif - et les péguystes en seront outrés - de faire des Cahiers de la Quinzaine le successeur du Bulletin des universités populaires (notice 125). Les trois fascicules doivent être replacés dans la bibliograhie qui suit la notice sur les universités populaires. Le chiffre de 3000 bibliothèques populaires donné à la p. 46 est inexact : il y a eu des dizaines ou des centaines de milliers de bibliothèques populaires. Le chiffre indiqué est celui des bibliothèques reconnues par le ministère de l'Instruction publique.
Enfin, la notice de la Société Franklin (p. 49) a confondu son origine avec celle de la Société des amis de l'instruction. Aucun ouvrier n'a participé à la création de la Société Franklin qui a été un parfait exemple de société paternaliste animée par de grands bourgeois philanthropes. Les bibliographies devront être soigneusement revues et complétées. Il y manque quelques titres comme, par exemple, la thèse de Raymond Tronchot sur l'enseignement mutuel, qui est la seule étude fondamentale sur la Société pour l'instruction élémentaire (p. 43-44). Tout cela est aisé à corriger, et on ne verra là que des remarques de détail qui ne diminuent en rien la valeur d'une synthèse documentaire exemplaire, qui facilitera l'accès à la connaissance d'un domaine d'activité sociale difficile à explorer.